LE CHOIX DE LA FRONTIERE FRANCO-ALLEMANDE
Motivés notamment par des intérêts économiques et l’éclosion de nationalismes forts en Europe, les deux conflits mondiaux ont laissé derrière eux une Europe morcelée et dévastée. Le sort des pays européens était alors incertain et faisait déjà débat avant la fin de la Seconde Guerre Mondiale. De nombreuses conférences interalliées se sont tenues afin de préparer l’après guerre, dont les notables conférences de Yalta en février 1945 et Potsdam en août 1945. Emergeait alors l’idée de la création « en coopération avec les autres nations pacifiques, d’un ordre mondial régi par le droit et consacré aux intérêts de la paix, de la sécurité, de la liberté et de la prospérité commune»1. L’idée d’une construction commune et d’un rapprochement interétatique s’est ainsi peu à peu dessinée grâce à des précurseurs et militants aux positions affirmées : « Les Etats Unis d’Europe, un pas vers l’unité mondiale, seront bientôt une réalité pour laquelle nous combattons »2. La multiplication des désaccords entre les membres de la Grande Alliance à la fin des années 40, a entraîné la naissance de tensions et marqué dès 1947, l’entrée du Monde dans la Guerre Froide3. Un clivage Est-Ouest s’est alors instauré sur le continent européen, divisant la partie occidentale et la partie soviétique de l’Europe. Ces tensions, parfois même accompagnées de frictions au sein d’un même bloc4 ont modifié et ralenti le projet d’une Europe unifiée. Cependant, supportées notamment par le plan Marshal, des unions occidentales se sont mises en place telles que la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier en 1951 et la Communauté Economique Européenne en 1957. La chute du bloc soviétique marqué symboliquement par la chute du mur de Berlin en 1989, a stimulé la naissance de nouvelles dynamiques dans le processus de construction européenne. Le 7 février 1992, les 12 membres de la Communauté Européenne ont signé le traité de Maastricht et fondé l’Union Européenne. La chute progressive des régimes communistes a permis l’élargissement de l’Union aux pays d’Europe centrale et orientale pour créer l’Union Européenne à vingt-sept membres que l’on connait aujourd’hui5.
par la multiplication des relations entre les pays
« L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes, créant d’abord une solidarité de fait. »1. Comme l’annonçait Robert Schuman dès 1950, la construction européenne s’est faite progressivement, par la mise en place d’organisations communes touchant des domaines de plus en plus vastes (domaines économiques et techniques) mais aussi par des initiatives fortes. La première grande étape de coopération entre les pays européens est sans doute le traité sur le charbon et l’acier qui, par sa réussite a entraîné l’élargissement de la coopération économique à d’autres secteurs dans le but d’atteindre une libre circulation des personnes, des marchandises et des services entre les Etats2. La coopération entre les Etats membres s’est peu à peu institutionnalisée avec le renforcement des aspects intergouvernementaux (les députés européens sont dès 1979 regroupés par couleurs politiques et non par nationalités3) et le développement de politiques communes. L’élargissement de l’Union commencé en 1973 avec l’entrée du Royaume-Uni, du Danemark et de l’Irlande, a contribué au renforcement de la visibilité de l’Union Européenne à l’international. Cependant, la construction de l’Union ne s’est pas faite de manière continue et a connu des périodes d’arrêt, comme peut l’illustrer l’échec de la mise en place d’une constitution européenne en 2005. Ainsi, l’Union européenne est le résultat d’une construction progressive4 par le bas mais également de leaders politiques symboliques qui ont motivé la mise en place de politiques communes5.
Les tensions historiques entre les pays européens ainsi que les guerres ayant ravagées le continent ont motivé la construction des communautés européennes (CECA et CEE). La volonté d’assurer la paix entre les Etats en unissant les hommes6, s’est initialement traduite par la mise en place de liens économiques de plus en plus forts dans l’objectif de multiplier les intérêts communs, rendant ainsi les affrontements armés moins envisageables. En effet, par la mise en place successive de la CECA et de la CEE, les fondateurs de l’Union s’efforçaient de réduire « les ruptures administratives nationales […] barrières gênantes qui vont à l’encontre de la dynamique de rapprochement des pays»7. Objectif de l’après guerre, la pacification des relations entre les peuples reste aujourd’hui encore au cœur du projet européen qui vise notamment à « […] surmonter les antagonismes dus au morcellement territorial, religieux, idéologique de l’Europe, pour développer des solidarités, les pérenniser dans des institutions permettant aux nations de coopérer pacifiquement, de s’intégrer progressivement dans un vaste ensemble capable d’assurer la paix et la prospérité, et de concrétiser l’identité de l’Europe par rapport au reste du monde»1. Les démarches mises en œuvre dans le but de stabiliser les relations ont évolué et le maintien de la paix en Europe prend dorénavant de nouvelles formes. Bien qu’aujourd’hui l’existence d’une identité européenne est discutable, le partage de valeurs, de politiques et de normes semble pouvoir contribuer à la stabilisation des relations. La politique européenne vise à développer la coopération transeuropéenne dans l’objectif notamment de multiplier les interdépendances entre les nations : « La notion cadre de coopération transeuropéenne sert à regrouper toutes les activités de coopération internationale qui impliquent des collectivités locales et régionales en Europe. C’est en référence aux relations pacifiées entre territoires voisins mais indépendants que l’idée de coopération est mise en avant »2. La coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale semble ainsi s’inscrire « dans la philosophie même de la construction européenne »3.