Le banc de mesure de lentilles thermiques

Le banc de mesure de lentilles thermiques

Dans la partie qui précède, nous avons décrit les principales techniques existantes pour caractéri- ser les effets thermiques dans les lasers solides ; nous avons terminé en exposant les raisons qui nous ont amené à choisir un analyseur de surface d’onde de Shack-Hartmann. Un banc de mesure a été développé dans le but de répondre à un « cahier des charges » qui tient en deux exigences : 1) la mesure des lentilles thermiques (aberrations incluses) doit être possible sur une surface cor- respondant aux conditions habituelles du pompage longitudinal (dans notre cas, sur une zone de 200 µm de diamètre) ; 2) la mesure doit pouvoir se faire avec et sans effet laser. En particulier, on souhaite mesurer les lentilles thermiques dans des conditions aussi proches que possibles des conditions « réelles » de fonctionnement décrites dans la première partie sur les tests laser. Nous allons donc dans ce chapitre décrire le dispositif expérimental développé, depuis la source jusqu’à la détection : nous verrons d’abord quelles propriétés spatiales et spectrales doit avoir la sonde, avant de nous pencher sur le problème du positionnement du capteur par rapport au cris- tal ; enfin nous examinerons les performances et les limitations du banc. L’analyseur de surface d’onde utilisé est un HASO32 commercialisé par la société française Ima- gine Optic™. La matrice de microlentilles est un réseau de 32×32 microlentilles carrées, de 160 microns de côté chacune. Pour alléger l’écriture, nous dirons dans toute la suite « le Shack-Hartmann» pour signifier « l’analyseur de surface d’onde de type Shack-Hartmann ».

Nécessité d’une sonde externe spatialement cohérente

Il est clair qu’on ne peut pas utiliser directement le faisceau de cavité, car il s’adapte à la lentille thermique : son front d’onde est toujours plan sur les miroirs plans de la cavité. Nous sommes donc ramenés au cas des méthodes indirectes exploitant les propriétés des cavités, dont nous avons longuement vanté les inconvénients au §II.2. Reste la pompe : ne peut-on pas exploiter l’autofocalisation du faisceau de pompe dans le cristal ? Pour répondre à cette question, il faut définir quelle est la cohérence spatiale minimale du fais- ceau de pompe permettant une mesure correcte. Le Shack-Hartmann estime la pente moyenne du front de phase sur la surface d’une microlentille : il faut donc que sur cette surface, les rayons incidents aient tous la même direction, avec une tolérance correspondant au diamètre angulaire de la tache de diffraction, soit λ/d (d = dimension d’une microlentille). Si D est le diamètre du faisceau de pompe au niveau de la matrice de microlentilles, on doit donc vérifier la relation :  Non seulement la cohérence temporelle du faisceau de sonde n’est pas utile (puisque la méthode n’est pas interférométrique), mais elle est même plutôt indésirable. En effet, les capteurs de Shack-Hartmann sont sensibles aux possibles interférences entre deux taches focales venant de deux microlentilles adjacentes (coherent cross talk) [Mansell 99]. Puisque les microlentilles sont peti- tes (160 microns de côté), la tache focale s’étend sur plusieurs pixels et il n’est donc pas rare, même pour des pentes locales faibles, que deux taches se superposent et interfèrent. Pour éviter ce phénomène, des sources au spectre large sont préférables.

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Quant au choix de la longueur d’onde, il est guidé par l’argument suivant : si l’on souhaite effec- tuer des mesures avec effet laser, il est essentiel que tous les traitements optiques (hautement réfléchissants, dichroïques, ou anti-reflet) soient transparents à la longueur d’onde de sonde. Si l’on choisit une longueur d’onde proche de la longueur d’onde laser, il faut des traitements di- chroïques compliqués à réaliser et onéreux. Il faut ajouter qu’il est très difficile de trouver une source laser émettant autour de 1 micron et qui ne soit ni absorbée ni amplifiée par un cristal dopé à l’ytterbium1. De plus, la sensibilité des capteurs CCD étant maximale dans le rouge, il se- rait préférable de travailler à une longueur d’onde située dans le domaine où le capteur est le plus sensible. Il est donc important de savoir si l’on peut mesurer la lentille thermique « vue » à 1 micron avec une sonde complètement décalée vers les longueurs d’onde visibles, sans faire une erreur trop grande. Il y a deux effets à prendre en compte : 1) la dispersion chromatique, liée aux bandes d’absorption dans l’ultraviolet.

 

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