L’AVENIR DU MONDE URBAIN EN AFRIQUE
La deuxième tendance
La deuxième tendance, confirmant la première, est d’examiner l’évolution démographique des communes urbaines qui avaient été définies par le Ministère de l’Intérieur lors du dernier recensement de la population en 1993. Ces communes reportent un taux de croissance démographique de 83,8% contre environ 48% pour l’ensemble du pays entre 1993 et 2008. Parmi les communes urbaines de première catégorie, 15 ont vu leur population au moins doublé pendant cette période. En plus, les communes urbaines de seconde catégorie ont grandi, certes à un rythme moindre, mais quand même à un taux supérieur à 50% entre 1993 et 2008.
La troisième tendance
Enfin, la troisième tendance, plus difficile à capter, est la croissance accélérée de la population au sein de plusieurs communes rurales, notamment celles qui se trouvent en périphérique de la capitale. Les statistique montrent que l’explosion démographique a pris surtout place autour de la commune urbaine d’Antananarivo plutôt qu’en son intérieur pour la simple raison que cette dernière est déjà en partie saturée même s’il existe encore des possibilité de densification car les taux restent relativement faibles par rapport aux centres urbains d’autres villes de taille comparable.18 La population au sein de la commune urbaine a augmenté environ de 30 000 habitants par an entre 1993 et 2008, ce qui est non-négligeable mais inférieur à la croissance démographique reportée dans les communes avoisinantes qui a explosé pendant cette période. Par exemple, la commune d’Ambohidratrimo a vu sa population triplé depuis 1993. C. Les causes principales de l’urbanisation A Madagascar l’urbanisation trouve son origine dans l’accélération de la migration rurale-urbaine. En effet, les familles urbaines sont en général plus petites et leurs taux de natalité sont plus bas. Autrement dit, la croissance démographique urbaine ne s’explique pas de manière endogène à la ville. 1. Migration Le nombre de personnes qui migrent en direction des centres urbains à Madagascar n’est pas connu avec précision mais deux catégories majeures de migrants peuvent être mises en exergue20 : – Les paysans qui sont à la recherche de conditions de vie plus favorables, en particulier des opportunités d’emplois et un accès facilité aux écoles (les étudiants) et aux centres de santé puisque les conditions sont effectivement en moyenne meilleures en ville que dans les campagnes. – Les migrants dont le but est de vendre leur surplus de production agricole dans les centres urbains. Ceux-ci, relativement éduqués, deviennent alors des commerçants ou des vendeurs de produits agricoles, et restent fortement attachés au monde rural par des liens le plus souvent familiaux et éthiques. Les migrations existent aussi à l’intérieur de la ville puisqu’environ 1 ménage sur 5 à Antananarivo reporte s’être déplacé d’un district de résidence à l’autre sur une période de 6 mois, notamment en quittant le centre pour des quartiers périphériques où les loyers sont plus modérés.
D’autre facteurs
L’émergence et l’essor des centres urbains sont la combinaison de multiples facteurs, y compris le climat, la connectivité, la disponibilité de services publics et la présence de pouvoirs administratifs et politiques. Pour Madagascar, une analyse économétrique simple suggère que l’attirance pour les villes est associée à la présence d’établissements scolaires ; de réseaux de communications (internet et téléphone) ; l’accès aux services d’électricité et d’eau ; et l’accès au crédit. Par contre, la présence de fonctions administratives et politiques ainsi que de services de santé ne semblent pas jouer un rôle majeur dans les regroupements démographiques. Les agglomérations se forment donc dans des zones qui possède d’écoles et qui proposent de meilleurs services en termes de connectivité ainsi que d’énergie et d’eau. Le poids de l’accès à l’éducation correspond aux attentes exprimées par de nombreux migrants qui placent ce facteur comme essentiel dans leur décision de se déplacer vers les villes22. Mais , le sens de leur causalité n’est pas toujours aisé à discerner car les gens se déplacent vers les villes parce qu’ils ont un accès plus facile aux infrastructures mais celles-ci sont aussi construites pour répondre à la pression démographique. Et ce n’est pas parce qu’il y a plus d’écoles ou d’infrastructures dans les zones à fortes densité de population que la qualité de ces services est uniformément plus élevée
Aspect de l’urbanisation à Madagascar
Condition de vie des citadins
Les villes ont tendance à grandir rapidement, notamment la capitale, car elles constituent un pôle d’attraction pour ceux qui vivent dans les campagnes. Ces derniers y recherchent un accès à l’éducation et des opportunités de travail ; bref, une meilleure condition de vie. L’accès à l’éducation est le motif de migration pour environ 7% des ménages au sein d’Antananarivo (source : Mc Ram III, mai 2010). 45 Tableau 5 : Conditions de vie des ménages selon leur milieu de résidence Urbain Grandes Villes (Plus de 50 000) Villes Moyenne (entre 20 et 50 000) Rural Revenu salarial par ménage et par an (milliers d’Ariary)
Consommation par ménage et par an (milliers d’Ariary)
Source : EPM 2005, calculs de l’équipe de banque mondiale Note : 1/ Le revenu salarial élevé est défini comme celui d’un ménage du décile le plus riche, alors que le bas est celui du plus pauvre. 2/ Le niveau de consommation élevé est celui d’un ménage du décile le plus riche, alors que le bas est celui du décile le plus pauvre. 3/ Le ratio de pauvreté capte la proportion de population vivant au dessus du seuil de pauvreté qui est défini comme 305 300 Ariary par personne et par an. L’intensité de la pauvreté est mesurée comme l’écart moyen entre le revenu des personnes vivant au dessus du seuil de pauvreté, alors que la sévérité représente la somme des carrés des écarts ente le revenu et le seuil de pauvreté. Les indices de Gini et de Theil mesurent les inégalités en termes de revenus, avec 1 comme distribution la plus inégalitaire des revenus. 46 1. Revenu salarial Les donnés de l’enquête 23des ménages enseignent que le revenu salarial moyen d’un chef de ménages est fortement corrélé à son lieu de résidence. Il est environ le double en milieu urbain que celui observé en zone rurale (tableau 5). Les salaires moyens sont également supérieurs dans les grandes villes, variant de 1,2 million d’Ariary par an à Antananarivo à 817 000 Ariary dans les villes entre 20 000 et 50 000 habitants et 728 000 Ariary en zone rurale. Par contre, les disparités salariales sont plus prononcées dans les villes que dans les campagnes puisque le ratio entre les salaires reçus par le décile de ménages les plus riches et les plus pauvres atteint 4 dans les grandes villes contre 3 dans les campagnes. Plus précisément, on s’aperçoit que les riches dans les grandes villes gagnent presque deux fois plus que les riches en zone rurale, alors que les pauvres reportent un revenu qui n’est que de 30% supérieur. Ces disparités salariales sont encore plus élevées lorsque la comparaison se fait par catégorie professionnelle : un cadre supérieur à Antananarivo gagne en moyenne 22 millions d’Ariary par an contre seulement 770 000 Ariary pour un petit exploitant agricole, soit 12 fois plus. 2. Consommation Une approche complémentaire est de s’intéresser à la consommation qui permet de prendre en compte l’autoconsommation et les revenus en nature, qui ne sont pas négligeables pour les plus pauvres à Madagascar. Par contre, elle conduit à sous estimer le bien-être des plus riches qui ne consomment qu’une partie de leur revenus. Les résultats renforcent ceux trouvés pour les revenus salariaux dans la mesure où les ménages urbains consomment en moyenne davantage que ceux dans les zones rurales, et cette propension est corrélée positivement à la taille de la ville. Si les différences entre catégories de population sont moins élevées pour la consommation que pour les revenus salariaux, cela s’explique principalement par la capacité d’épargne supérieure de la part des ménages les plus riches. 23 travaux de Zaza Randriamiarana sur les résultats de l’enquête des ménages (2005) et de l’Unicef avec son enquête auprès d’un échantillon de ménages dans l’agglomération d’Antananarivo et de Toliara (résultats de l’enquête McRam III, juillet 2010). 3. Pauvreté Enfin, les taux de pauvreté apparaissent inversement corrélés à la taille de l’agglomération. Plus la concentration démographique grandit, plus ce taux diminue. Si les ménages urbains gagnent plus, consomment davantage et sont moins pauvres que ceux dans les campagnes, leur fragilité financière demeure puisque 4 ménages sur 10 à Antananarivo et Toliara touchent moins de 100 000 Ariary par mois (soit l’équivalent de 50 US$). Il n’y a qu’un ménage sur 5 qui déclare gagner plus de 300 000 Ariary par mois (150 US$) (graphique2). En outre, le revenu de presque la moitié des ménages dépend de leurs ventes ou prestations, ce qui souligne leur vulnérabilité.
INTRODUCTION |