L’articulation du grasset rappels anatomiques

Etude spécifique des ligaments croisés et de leur fonction au sein du grasset

Le ligament croisé antérieur (LCA) s’insère caudalement sur la face médiale du condyle fémoral latéral et crânialement sur l’aire intercondylaire du tibia (Figure n°3).
Figure n° 3 : Insertions osseuses des ligaments croisés du chien (d’après ARNOCZKY et MARSHALL, 1977)
Le LCA est composé d’une bande de fibres crânio-médiales, étirée en extension et en flexion, et d’une bande de fibres caudo-latérales, étirée en extension et relâchée en flexion.
L’ensemble des fibres du LCA est, d’après la description d’ARNOCZKY et MARSHALL en 1977, orienté en une spirale externe proximo-distale d’environ 90°.
La fonction principale du LCA est de limiter le mouvement de glissement du plateau tibial crânialement au fémur (Figure n°4). Il limite également la rotation interne du tibia.
Figure n° 4 : Mouvement de glissement créé par la RLCA (d’après SCHULZ, 2007)
Fe = fémur ; Fi = fibula, T = tibia
Le ligament croisé postérieur (LCP) s’insère proximalement en région crânio-médiale de la fosse intercondylaire fémorale et distalement en partie caudale de l’échancrure poplité du tibia (Figure n°3).
Le LCP est composé d’une partie crâniale, tendue en flexion et lâche en extension, et d’une partie caudale, lâche en flexion et tendue en extension. Sa fonction principale est de limiter le mouvement de glissement du plateau tibial caudalement au fémur.
Les insertions osseuses des ligaments se font par des zones de transition fibrocartilagineuse puis de cartilage minéralisé. Cette transition permet une diminution des contraintes exercées sur l’articulation en assurant un changement de raideur progressif du ligament.
La vascularisation des ligaments croisés est assurée par des vaisseaux du tissu conjonctif adjacent (dont ceux du coussinet graisseux de l’articulation), car ils sont dépourvus de vascularisation propre.
Fonctionnellement le valgus et le varus sont limités respectivement par les ligaments collatéraux médial et latéral. Des lésions de ces ligaments entrainent donc l’application d’une plus forte contrainte sur les ligaments croisés en augmentant l’instabilité du grasset.

Etiologie, physiopathogénie et physiopathologie de la RLCA chez le chien

La RLCA est rarement traumatique chez les chiens (20% d’après MOORE et READ en 1996), à la différence de ce qui semble être le cas le plus fréquemment chez l’Homme. Elle est attribuée chez le chien à un processus chronique et dégénératif, avec des ruptures fréquentes du ligament du membre controlatéral dans les deux ans suivant le premier diagnostic.
L’étiologie exacte reste indéterminée, mais elle est reconnue comme étant multifactorielle. Au vu des modifications de métaplasie et de réorganisation des fibres qui débutent au centre du ligament, une des hypothèses formulées consiste en un défaut de vascularisation intrinsèque.
Plusieurs facteurs (génétique, conformationnels, environnementaux, immunitaires et inflammatoires) ont été identifiés.
• Facteurs génétiques
Les grandes races semblent concernées de façon plus importante que les petites races avec des prédispositions raciales prouvées pour les Labradors Retriever, les Rottweilers et les Terreneuves. En ce qui concerne les Terreneuves, une étude de WILKE et al. datant de 2006 a même permis d’émettre l’hypothèse d’une transmission génétique récessive à pénétrance incomplète.
• Facteurs de conformation anatomique
Une mauvaise conformation anatomique des membres est mise en cause dans le processus dégénératif au travers d’un défaut d’alignement et d’une modification des contraintes auxquelles sont soumis les ligaments croisés. Ces défauts de conformation du grasset sont multiples (synthèse réalisée par GRIFFON en 2010): luxation patellaire médiale, rotation interne du fémur, torsion du tibia, sténose de la fosse intercondylaire, pente du plateau tibial accentuée et défaut d’alignement du ligament patellaire.
• Facteurs environnementaux
Les chiens d’âge avancé (âge supérieur à 5 ou 7 ans selon les auteurs) semblent être les plus touchés (VASSEUR, 1993).
De plus les animaux castrés semblent être atteints en plus grand nombre que les animaux entiers. L’hypothèse avancée pour expliquer ce phénomène est un déficit de synthèse d’élastine, un des composants des fibres ligamentaires (déficit constaté chez le rat, mais non prouvé chez le chien) (WHITEHAIR et al., 1993).
Enfin, les animaux plus lourds sont également plus sujets à présenter des ruptures du LCA (probablement à cause de l’augmentation des contraintes subies par le grasset). Or les animaux castrés ayant une tendance connue à l’embonpoint (du fait de la réduction de leur dépense énergétique), cette constatation peut être reliée à la précédente.
• Facteurs immunologiques
Une infiltration lympho-plasmocytaire du ligament a été identifiée dans 67% des cas de rupture du LCA (GRIFFON, 2010). L’étude de la réaction inflammatoire en jeu a permis de caractériser cette réaction comme étant de type antigénique et dirigée contre les fibres de collagène de type I. Ces antigènes sont libérés dans l’articulation suite à une lésion du ligament. Néanmoins, la réaction inflammatoire serait plutôt une conséquence de la lésion ligamentaire et non sa cause, étant donné que sa présence ne présage pas d’une rupture ultérieure. Une hypothèse de séquestre bactérien au sein du ligament était avancée par MUIR et al. dans leur étude de 2007, dans laquelle de l’ADN bactérien étaient présent dans 37% des biopsies synoviales effectuées sur des animaux présentant une RLCA (ADN absent des biopsies réalisées sur des animaux sains et des animaux ayant subit une résection chirurgicale du LCA).
Chez le chien, la rupture du LCA est associée jusque dans 80% des cas à une lésion du ménisque médial (fortement attaché aux reliefs osseux adjacents et soumis à de fortes contraintes lors des mouvements anormaux du tibia). De plus, cette rupture s’accompagne d’un processus arthrosique du grasset, à un stade plus ou moins avancé lors du diagnostic. Cette arthrose semble être majorée lors de la présence d’une pente tibiale excessive (FUJITA et al., 2006).

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Le traitement chirurgical des RLCA chez le chien

Depuis la première description de rupture du LCA chez le chien en 1926 plusieurs traitements ont été proposés. La prise en charge médicale, consistant à laisser le chien au repos et à lui administrer un traitement anti-inflammatoire, n’est retenue que pour les chiens légers (< 10 ou 15 kg) qui peuvent présenter une amélioration clinique dans les 6 semaines. Néanmoins ce traitement ne corrige en aucun cas l’instabilité créée par la rupture, l’animal reporte son poids sur le membre controlatéral (le soumettant donc à des contraintes accentuées) ce qui accroit fortement le risque, déjà existent, de rupture du ligament controlatéral. De plus, le processus arthrosique continue d’évoluer. Chez les chiens plus lourds, l’amélioration clinique est beaucoup moins nette. Un traitement chirurgical est donc à préconiser dans tous les cas.
De multiples techniques chirurgicales ont été décrites. Dans l’ensemble elle peuvent être scindées en deux groupes : des techniques de stabilisation active, qui visent à rétablir une force s’opposant à l’avancée du tibia lors des mouvements du grasset, et des techniques de stabilisation passive, visant à remplacer la force de retenu normalement exercée par le ligament croisé. Nous décrirons ci-dessous les principales techniques existantes.

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