L’analyse d’un corpus de propagande djihadiste : présentation et méthode
Après presque une année et demie passée à redéfinir notre sujet, celui-ci devait porter préalablement sur la radicalisation des mineurs et avait dû être abandonné en raison de l’impossibilité d’ouvrir un terrain intéressant, la recherche sur la propagande a commencé courant 2018. C’est à ce moment-là qu’a démarré la constitution, fastidieuse et relativement longue, du corpus de propagande, puis du corpus juridique.
A cette époque déjà, la plupart des sites et comptes djihadistes avaient été fermés, et la propagande s’étaient enterrée en grande partie sur des réseaux clandestins et des chaines cryptées. C’est sur le darknet, comme Al-Qaïda au milieu des années 2000209, et la messagerie sociale russe Télégram que circulaient, et que circulent toujours, les échanges, messages, et fichiers de propagande. N’accède pas vraiment qui veut à ces plateformes de communication, qui exigent d’être un minimum initié.
Il était cependant encore possible en 2018 de trouver quelques fichiers épars sur le navigateur Tor, essentiellement des vidéos d’exécutions en arabe, et de temps en temps quelques vidéos médiatisées, particulièrement violentes, ce qui nous a permis de compléter le corpus. Certains sites alimentés en contenus violents en tous genres, non spécifiquement djihadistes, semblent, encore aujourd’hui, passer en partie entre les mailles du filet, et publient toujours quelques vidéos djihadistes, rarement traduites210.
Néanmoins, il est globalement compliqué de visionner la propagande du groupe, surtout en quantité, variée et traduite, en passant par une simple recherche sur un navigateur classique, même sur Tor. C’est surtout grâce au site tenu par le chercheur Aaron Zelin, qui recense l’activité médiatique des groupes djihadistes partout dans le monde, et permet l’accès à un grand nombre de supports aux chercheurs et professionnels, que nous avons pu collecter une majeure partie des données exploitées211.
C’est d’abord par le biais de ce site riche et complet, puis de différents médias sur Internet et des sites clandestins, que nous avons pu visionner, écouter et lire l’intégralité du corpus présenté dans la thèse. Tor et les autres médias, dehors du site d’Aaron Zélin, sont en réalité venus compléter les quelques lacunes de celui-ci.
En effet, certaines vidéos ne sont pas visionnables sur le site pour des raisons éthiques, notamment lorsqu’elles touchent aux attentats, or, les sites clandestins violents ne sont pas embarrassés de la même morale. C’est sur un de ces sites, que nous avons pu visionner la vidéo « « Kill them whenever you find them », diffusée par Al Hayat Media en janvier 2016, et mettant en scène les terroristes du Bataclan.