L’accélération par sillage laser
Notions de base sur l’interaction laser-plasma II.1.1 Plasma Souvent présenté comme le quatrième état de la matière, un plasma est un milieu constitué au moins partiellement de particules chargées, telles que des électrons libres ou des ions. Un plasma peut par exemple s’obtenir en chauffant suffisamment un gaz, de manière à arracher certains des électrons des atomes qui constituent le gaz. Pour l’atome le plus simple, l’hydrogène, l’énergie à fournir pour arracher l’électron – appelée énergie d’ionisation – est de 13.6 eV, correspondant à une température d’ionisation de plus de 100000 K. On voit tout de suite que ces valeurs sortent du cadre auquel nous sommes habitués sur notre planète. En effet, si le plasma est l’état de la matière qui constitue très majoritairement notre univers, il se rencontre difficilement à l’état naturel sur Terre (sauf dans les hautes couches de l’atmosphère), et il est nécessaire de recourir à quelques astuces pour le créer. La grande majorité des plasmas est globalement neutre. Ainsi, si dans un plasma constitué de deux espèces de particules, par exemple des ions et des électrons, on écarte un petit volume δV d’électrons de sa position initiale, ceci crée un déséquilibre local de charge dans le plasma ainsi que des champs électriques s’opposant à ce déséquilibre. Le déplacement d’un petit volume de charge sur une distance dx engendre un champ E = enedx/ε0, avec e la charge fondamentale, ε0 la permittivité du vide et ne la densité particulaire des électrons.
Laser
Un laser (de l’acronyme anglais pour ‘Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation’) est un dispositif qui crée un rayonnement directif et cohérent. 15 II.1 Notions de base sur l’interaction laser-plasma Le principe du laser est de jouer sur la désexcitation coordonnée d’atomes excités au préalable par une source d’énergie extérieure (phénomène de pompage) pour produire un rayonnement électromagnétique amplifié.
Interaction laser-plasma
Dans le cas de l’accélération par sillage laser, le plasma est créé en envoyant une impulsion laser gaussienne ultra-courte sur un jet de gaz, qui est souvent constitué de gaz léger tel que l’hélium.Les valeurs d’ionisation pour les deux électrons de l’hélium sont respectivement Ei(He+) = 24.6 eV et Ei(He2+) = 54.4 eV. Ainsi l’intensité demandée pour ioniser totalement l’atome d’hélium est déterminée par l’énergie d’ionisation du deuxième électron, et on obtient une intensité laser nécessaire I0 = 8.78 × 1015 W/cm−2 . En prenant des valeurs typiques de l’accélération par sillage laser, soit une énergie E0 ∼ 1 J, un waist W0 ∼ 10 µm ainsi qu’une durée τ0 ∼ 30 fs, on obtient une intensité de l’ordre de 2 × 1018 W/cm−2 , c’est-à-dire une intensité près de 3 ordres de grandeur supérieure à celle nécessaire pour ioniser totalement le gaz d’hélium. De plus, si on considère que le laser ionise totalement les atomes se trouvant dans un rayon de l’ordre de son waist pendant sa propagation, et en prenant une distance de propagation D ∼ 1 cm – longueur typique d’accélération dans notre cas – dans un gaz de densité 5×1018 cm−3 , l’énergie laser consommée pour l’ionisation des particules est donnée par : Eioni = 2πW2 0 Dne(Ei(He+) + Ei(He2+)) = 400 µJ. La proportion d’énergie laser perdue dans l’ionisation du plasma est ainsi minime. Ces observations ont deux conséquences quant-au traitement de l’interaction du laser avec le gaz. Premièrement, l’intensité présente dans le piédestal de l’impulsion laser est déjà suffisante pour ioniser l’hélium. On peut donc considérer que la quasi-totalité de l’impulsion laser interagit avec un plasma déjà formé. Deuxièmement, on pourra négliger l’énergie laser perdue dans l’ionisation du gaz. Ainsi en pratique, on ne prendra pas en compte l’état gazeux, et on considèrera directement l’interaction d’un laser avec un plasma déjà totalement ionisé. Cette hypothèse permet notamment de réduire les ressources nécessaires pour les simulations numériques, le calcul de l’ionisation étant évité (on ne s’intéressera pas dans cette thèse à l’utilisation d’espèces atomiques de haut Z). On s’intéresse à présent à la propagation du laser au sein du plasma. Le laser y vérifie l’équation de dispersion suivante : ω 2 0 = ω 2 p + c 2 k 2 0 . (16) Deux cas de figures peuvent se présenter : Si ωp > ω0, alors k0 est complexe, et l’onde laser ne pourra pas se propager dans le milieu : elle sera réfléchie et donnera une onde évanescente dans le plasma. Physiquement, cela signifie que le temps caractéristique de mouvement des électrons est plus petit que la période laser : les électrons auront le temps de réagir aux oscillations du champ laser et pourront écranter sa propagation. Un tel plasma est dit sur-dense. Si ωp < ω0, alors à l’inverse, k0 est réel, et l’impulsion laser peut se propager dans le plasma. Physiquement, les électrons n’auront pas le temps de réagir aux oscillations rapides du champ laser, et ne pourront pas s’opposer à la propagation du laser. Un tel plasma est dit sous-dense et c’est ce genre de plasma qui nous intéresse dans l’accélération par sillage laser.
Accélération d’électrons par sillage laser
On considère maintenant que seuls les électrons sont en mouvement, tandis que les ions constituent un fond immobile et neutralisant, cette hypothèse étant justifiée dans la suite. On suppose de plus que le plasma peut être considéré comme un fluide froid, l’énergie thermique des électrons étant faible par rapport à l’énergie gagnée du laser. Cette hypothèse permet de supprimer le terme de pression dans l’équation de conservation de l’impulsion.
Théorie non-linéaire
La théorie linéaire précédente permet de comprendre assez simplement les mécanismes mis en jeu qui conduisent à la formation de l’onde de sillage. Cependant le modèle physique est assez limité, et un modèle non-linéaire et relativiste est utile. Dans le cas unidimensionnel où les quantités ne vont dépendre que de la direction x et du temps t, la relation p⊥ = mecA est vérifiée. De plus on se place dans le cadre de l’hypothèse quasi-statique, et on introduit ξ = x − vgt.