L’ABSTRACTION DE LA SUBJECTIVITE DANS LA PROCEDURE DE DIVORCE EN FRANCE
La procédure civile se définit comme la « forme suivant laquelle on doit intenter les demandes en justice civile, y défendre, instruire, juger, se pourvoir contre les jugements et les faire exécuter. Le droit du procès n’est autre que le droit de la procédure, et étudier le procès revient à étudier les modalités de son déroulement, « autrement dit les techniques procédurales »185. Le premier chapitre du titre premier du code de procédure civile est consacré aux principes directeurs du procès. Ces différents principes sont communs aux différentes procédures civiles et sont les garants d’une d’une justice équilibrée. Certains de ces principes se recoupent avec le droit commun des procédures (civile, pénale, administrative) dessiné sous l’amplitude de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des différentes sources internationales. Ce droit commun du procès est appelé « droit processuel », il constitue un véritable bloc de droits fondamentaux procéduraux.
Pour autant, la procédure de divorce apparaît comme une procédure singulière, avec ses propres règles. En effet, pour concrétiser l’impératif de pacification, la procédure de divorce a dû opérer certains aménagements des règles procédurales traditionnelles de la procédure civile ou encore du droit processuel. La procédure de divorce n’est pas uniquement destinée à la fonction originelle de la procédure, c’est-à- dire trancher un litige. La procédure de divorce doit également limiter le conflit. Pour réaliser l’objectif de pacification, les règles procédurales s’appliquent à extirper pendant le déroulement du divorce tout ce qui relève du domaine du subjectif (facteur de contentieux). Cette extraction est garantie par l’exclusivité de l’office du juge aux affaires familiales (§1) et grâce à des mesures procédurales propres au divorce limitatives de dissension .
L’objectivité assurée par l’exclusivité de l’office du juge aux affaires familiales
L’unicité du juge aux affaires familiales est indispensable pour tempérée la procédure (A.). Mais le cumul des fonctions défie le principe d’impartialité (B.), d’autant que son office est réalisé à huis clos (C.).procédure civile est « comme une procédure d’apaisement entre gens civils ».187 Cette affirmation prend tout son sens dans le procès du divorce. La procédure de divorce est régie de manière à évincer tout ce qui relève du domaine du personnel, pour laisser place au consensus, à l’intérêt collectif entendu des deux époux. ne pouvait être combattu que par l’œuvre de plusieurs juges, permettant de garantir une bonne justice. La collégialité suscite des débats entre les membres de la juridiction, un échange de points de vue et d’opinions, évitant une décision prise par un juge isolé soumis uniquement à ses certitudes et son jugement. La collégialité est une garantie des droits de la défense, elle diminue le risque de partialité du juge, corrige les préjugés et permet une décision plus réfléchie et plus aboutie. Le principe de collégialité est un principe inhérent à la procédure civile. Cependant, la collégialité n’est garantie par aucun texte, ni par le Conseil constitutionnel, ni par le Conseil d’Etat. En effet, le 23 position dans une décision du 2 février 1995189 dès lors que l’institution du juge unique dépend du législateur et non des juges eux-mêmes afin de respecter le principe d’égalité entre les citoyens.
La matière du divorce apparaît donc comme un terrain propice au juge unique. Le domaine du divorce appartient à l’intime, au vécu. La collégialité peut être facteur d’intimidation, d’absence de confiance. En effet, le procès du divorce n’est pas un procès traditionnel. Il ne s’agit pas de déterminer le coupable, mais au contraire d’amener les parties à s’entendre. En effet, le cheminement procédural du divorce est bâti selon une volonté qui est d’éliminer le conflit pour laisser toute la place au consensus. La procédure de divorce ne rend plus justice, elle favorise une justice négociée. n’intervient plus pour trancher un conflit mais comme le guide virtuel des époux dans le traitement du divorce. C’est le maître du jeu, selon la célèbre formule l’homme orchestre. Certes, le divorce est construit davantage par les époux mais sous la houlette du juge.
L’article L.213-3 du COJ prévoit que « dans chaque tribunal de grande instance, un ou plusieurs magistrats sont délégués dans les fonctions du juge aux affaires familiales. Le juge aux affaires familiales connaît : 1° Du divorce, de la séparation de corps et de leurs conséquences, sous réserve des compétences attribuées au tribunal de grande instance ; 2° Des actions liées à la fixation de l’obligation alimentaire, de la contribution aux charges du mariage et de l’obligation d’entretien, à l’exercice de l’autorité parentale (…) »