Pour la plupart de nos tests orthopédiques, à l’ exception de ROOS, nous avons deux variables à évaluer pour affirmer que le test est positif chez un individu suspecté d’ avoir un SDT. Il y a la reproduction des signes et symptômes ainsi que la diminution ou l’ absence du pouls radial. Puisque la majorité de ces tests prennent en considération la diminution ou l’ absence du pouls radial, nous étions à la recherche d’ un outil diagnostic peu couteux et non invasif nous permettant d’ évaluer le débit sanguin. Il était pertinent d’ étudier le changement hémodynamique pendant l’ exécution d’ un test orthopédique afin de déterminer à quel moment durant le test, il y a une possible compression artérielle. Notre choix s’ est donc arrêté sur l’échographie-doppler.
La machine à échographie doppler
L’échographie-doppler ou écho-doppler est une technique d’imagerie médicale en deux ou trois dimensions qui permet une étude morphologique et hémodynamique de façon noninvasive. L’appareil est constitué d’ un échographe classique couplé à une sonde Doppler. L’échographie permet la visualisation des tissus mous, des organes et des structures vasculaires grâce à des ondes acoustiques. La sonde est habituellement formée de cristaux piézoélectriques qui, lorsque soumis à des impulsions électriques, vibrent et génèrent des ultrasons. Jumelé à l’effet doppler, il est également possible de quantifier les vitesses circulatoires des vaisseaux . Les globules rouges du sang deviennent donc la cible des ultrasons. Comme ils sont en mouvement, la vitesse des globules rouges est calculée par la variation entre la fréquence de l’onde émise et la fréquence de l’ onde reçue (Dauzat et al.; Schaberle & Herwig, 2005). En règle générale, le signal doppler est optimal à un angle de 30° à 60° pour les vaisseaux superficiels (Bhargava, 2010). Il existe différent mode de représentation des signaux recueillis afin d’optimiser l’image , nous en verrons quatre . Pour commencer, il yale mode doppler qui se divise en deux: le doppler continu qui traduit le flux sanguin par un bruit et contient deux cristaux piézoélectriques et le doppler pulsé PW « power wave » qui traduit la vitesse et permet la discrimination en profondeur grâce à un seul cristal. Le mode B est une image bidimensionnelle des structures et représente une coupe de l’ organe étudié selon la position de la sonde . Le mode M « mouvement » ou duplex utilise une haute fréquence afin d’avoir une image en mouvement, qui résulte d’une combinaison du doppler pulsé et du mode B. Finalement, le mode CF « color f10w » ou triplex ajoute au mode M de la couleur au flux sanguin des vaisseaux; la couleur rouge pour les flux qui s’approchent de la sonde et la couleur bleue pour les flux qui s’ en éloignent (Deklunder, Dauzat, Boivin , & Sédiri, 2004; Mehra, 2010).
L’une des manières de calculer la vitesse du flux sanguin est le pIC de vélocité systolique (PYS), dont la normale pour le membre supérieur distal varie entre 40-60 cmls (Dargon & Moneta, 2012). On se rappelle que le cycle cardiaque se divise en trois étapes majeures: la systole auriculaire (compression des oreillettes et remplissage actif des ventricules), la systole ventriculaire (contraction des ventricules et expulsion du sang vers le système circulatoire) et la diastole (relaxation et remplissage passif des ventricules – la diastole auriculaire est plus courte et simultanée à la systole ventriculaire). En utilisant le doppler à émission pulsée, le flux sanguin artériel distal se traduit par une modulation triphasique à haute vélocité pulsatile (Deklunder et al., 2004; Mehra , 2010) . Elle est composée d’ une onde systolique étroite avec un pic systolique maximal, suivie d’une petite onde de « rebond » inversée pour la phase pré-diastolique et finalement une petite onde pour la phase diastolique . Cette modulation triphasique avec un léger reflux sanguin (l ‘onde inversée pré-diastolique) est due à la résistance périphérique élevée des artères distales mais elle n’est pas toujours présente (Deklunder et al., 2004).
Cette technique d’imagerie nous permet également de déceler certaines pathologies vasculaires telles les sténoses, les thromboses, l’artériopathie, les anévrismes, etc . Chez le jeune adulte atteint d’ un SDT, une diminution du débit sanguin dans le membre supérieur peut être causée par une compression des vaisseaux subclaviers ou axillaires (KlingelhOfer, 2014; Landwehr, Schulte , & Voshage , 2001). Nous l’avons vu dans l’Introduction générale, les causes de compression vasculaires dans la région du défilé thoracique sont nombreuses. L’échographie-doppler nous permet d’évaluer le flux sanguin d’ un vaisseau au repos mais également lors d’une position anatomique spécifique (à l’image d’ un test orthopédique) ce qui nous aide à identifier le site potentiel de compression (Kotval , 1989). L’ enregistrement spectral anormal du débit d’une artère distale en aval d’une occlusion résulterait en deux signes: une vitesse systolique abaissée et une augmentation du temps d’ascension systolique (Deklunder et al. , 2004; KlingelhOfer, 2014; Mehra, 2010). Dans des cas plus importants de sténose nous constatons une augmentation de la composante diastolique et finalement un arrêt complet du signal.
Dans la littérature, il est rapporté que les tests orthopédiques utilisés pour diagnostiquer une SDT présentent un taux important de faux positifs (Rayan & Jensen, 1995; Wright, 1945). Si un test orthopédique a un pourcentage trop important de faux positifs, il ne peut pas être valide. Cela va à l’encontre de la définition même d’un test diagnostique. Voici deux hypothèses qui pourraient expliquer la présence de faux positifs : 1) le test lui-même crée une compression des structures vasculaires et/ou nerveuses auprès des sujets sains et ne peut donc pas être considéré comme un test valide; 2) le test n’ est pas effectué correctement et cette déviation vient créer une compression des structures en faussant le résultat du test. Durant cette étude, nous allons vérifier ces deux hypothèses.
Dans un premier temps, vérifier les faux positifs dans une population saine durant l’exécution de six tests orthopédiques et noter la présence ou l’ absence de symptômes. Les six tests orthopédiques évalués sont : Adson, Halstead, Wright, Allen, costoclaviculaire et ROOS. Dans un deuxième temps, vérifier le pourcentage de faux négatifs auprès d’une petite cohorte de sujets atteints pour les mêmes six tests. L’ écho-doppler est l’outil que nous utilisons pour mesurer le PVS de l’artère radiale au repos et lors des différents tests orthopédiques auprès de tous les sujets. De plus, nous avons ajouté des variations aux tests afin de vérifier si un changement dans l’exécution de ces derniers pourrait avoir une influence sur la valeur du PVS. Dans un dernier temps, vérifier dans quelles conditions nous pourrions obtenir une meilleure validité.
Un questionnaire d’incapacité DASH (disability arm , shoulder and hand version française), est complété par les sujets. Les résultats de la présence ou l’ absence de signe(s) et symptôme(s) lors des six tests orthopédiques sont répertoriés. De plus, les flux artériels sont observés à l’aide de l’ échographie-doppler au repos et pour chaque position. Toutes les mesures de PSV sont prises distalement au niveau de l’artère radiale étant donné l’ anatomie particulière de la région du défilé thoracique (mouvement de la clavicule lors des tests et l’ orientation de l’artère subclavière par rapport à la sonde) où le risque de créer de faux positifs augmente.
Le formulaire DASH est un outil qui permet d’évaluer l’incapacité d’ un patient à effectuer certaines tâches en lien avec une atteinte aux membres supérieurs. Il y a 30 questions générales évaluées de 0 à 5. Certaines questions sont en lien avec la capacité de faire une tâche, l’intensité de douleur d’ une tâche ou être en accord ou pas avec la phrase proposée . Le sujet doit répondre à un minimum de 27 questions sur 30. Il Y a également deux sections optionnelles de 4 questions chacune : module travail et module sport/musique. Ces deux sections sont calculées à part. On calcule le pourcentage d’incapacité par rapport aux symptômes selon une formule mathématique fournie avec le questionnaire. Par la suite , on interprète le pourcentage de la façon suivante: 0-20% aucune incapacité , 21 -40% incapacité légère , 41-60% incapacité modérée , 61 -80% incapacité sévère et 81-100% incapacité extrême (Hudak et al. , 1996).
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