La transformée de Radon sur lignes brisées en forme de lettre V
En 1997, Basko [6] est le premier à introduire l’idée d’une transformée de Radon sur une paire de demi droites formant le motif d’une lettre V en essayant de modéliser la formation d’image tomographique utilisant une caméra Compton unidirectionnelle [74]. Dans ce cas précis l’axe de symétrie de la ligne brisée était non fixe et pouvait tourner autour d’un point du plan représentant la couche de détecteur (où se produit la diffusion dans une caméra Compton), mais l’inversion de cette transformée n’a pas été trouvée analytiquement. Il faudra ensuite attendre les travaux de Nguyen [51] et de Florescu [26] sur des géométries à axe fixe pour voir l’apparition des premières transformées de Radon sur des lignes brisées inversibles analytiquement. Dans ce chapitre nous allons dans un premier temps mettre en œuvre le calcul analytique des problèmes direct et inverse d’une classe de transformée de Radon sur des lignes brisées avec une direction des axes de symétrie fixée (TRV). Nous allons donc étudier la TRV dans plusieurs procédés d’imagerie : le premier où nous incorporerons un miroir pour aboutir à une tomographie par transmission et réflexion de rayons X, le second est l’imagerie d’émission à partir du rayonnement gamma diffusé et le troisième est la toute première bimodalité en tomographie utilisant le rayonnement diffusé. Dans ces nouvelles imageries le mouvement du détecteur est réduit au minimum alors que dans la tomographie conventionnelle la rotation relative entre le détecteur et l’objet sous étude est obligatoire (ce qui peut devenir un problème rédhibitoire dans certaines applications). De plus, nous avons développé un algorithme de correction de l’atténuation innovant pour ces nouvelles imageries. II.1 Application de la TRV en tomographie par transmissionréflexion En tomographie conventionnelle, une source ponctuelle de rayons X calibrée émet à travers une coupe en deux dimensions d’un objet le long d’une ligne droite avant que La transformée de Radon sur lignes brisées en forme de lettre V 36 II. La transformée de Radon sur lignes brisées en forme de lettre V chaque photon atteint un détecteur. Dans ce cas précis, l’atténuation subit par le rayonnement est exprimée par la transformée de Radon classique. Au lieu d’utiliser simplement une représentation sur des lignes droites, nous allons généraliser la transformée de Radon sur des lignes brisées ce qui permet de représenter la mesure de l’atténuation du rayonnement X le long d’une trajectoire en forme de V. L’idée physique pour réaliser ceci sera de briser la trajectoire rectiligne en utilisant un miroir adapté et cette cassure serait localisé en un point R comme le montre la figure II.1(b). Les miroirs qui réfléchissent les rayonnements X ont de nombreuses applications en optique et astrophysique fondamental (NASA …), nous pourrons citer notamment les miroirs Gobel [36]. Les données requièrent un nombre important d’angle d’incidence θ sur le miroir (qui seront obtenu par une variation de la distance SD comme sur la figure II.1(a). L’autre paramètre à faire varier sera le point de réflexion xR qu’on pourra faire varier par translation de l’objet par exemple. source X Miroir Détecteur Objet (a) Miroir Objet x y xS L xR xD θ Rθ r 0 S R D (b) Figure II.1 – Principes de fonctionnement de l’imagerie transmission-réflexion Ce type de système est un nouveau type de scanner couplant les phénomènes de transmission et de réflexion et qui pourrait être utilisé là où le mouvement de rotation est problématique car ici ce dernier est remplacé par un mouvement de translation, ce qui est très appréciable par exemple pour le contrôle de bagages dans les aéroports ou le contrôle de convoyeurs. II.1.1 Modélisation de l’imagerie de transmission-réflexion Les figures II.1(a) et II.1(b) montrent schématiquement le fonctionnement principal de cette nouvelle modalité d’imagerie. Une série de points sources à intensité calibrée est alignée et une autre série de points détecteurs est placée sur cette même ligne. A l’opposé, nous placerons le miroir qui réfléchira le rayonnement émis vers les points détecteurs. Donc l’ensemble de la trajectoire de la radiation s’effectue sur une ligne brisée en forme de V, dont le sommet est à la surface du miroir et dont l’angle d’ouverture varie pour chaque paire source-détecteur. En translatant parallèlement à l’axe source-détecteur et en considérant tous les angles de réflexion sur le miroir nous pouvons compléter notre jeu de donnée et ainsi remplacer la rotation habituelle des scanners. Pour exprimer l’évolution du flux de photons, nous nous plaçons pour l’instant dans un cas optimal (sans diffusion). L’idée basique est de considérer un point source ponctuel S émettant un flux de radiation primaire à travers l’objet. En sortie d’objet, les photons sont réfléchis en un point R du miroir puis après un passage à nouveau à travers le milieu sont collectés en un point détecteur D. La physique du modèle requiert que toute la densité du flux de radiation gb(D) enregistrée en un point D est due à tous les sites potentiels R reliant un point source S quelconque à ce même point D (chaque couple de point source-détecteur étant symbolisé par une variation d’angle θ avec 0y). Dans ce cadre, nous pouvons distinguer deux étapes : 1. De S à R : le flux de photon est incident, possédant une énergie initiale E0, est soumis à un facteur d’atténuation dû à l’objet. 2. De R à D : L’intensité des rayonnements réfléchies est diminuée par un coefficient du miroir c(θ) (nous utiliserons par la suite régulièrement la notation p(θ) = ln(c(θ)) représentant la réflexion partielle sur de tel miroir. Ce coefficient est malheureusement aussi dépendant de l’angle d’incidence. Puis le flux de photon sera à nouveau soumis à un coefficient d’atténuation en retraversant l’objet. Force est de constater qu’on aura une perte sèche au niveau du flux importante car il sera soumis à un passage plus long dans un milieu diffusant, aux imperfections du miroir et à un effet de durcissement du flux plus important. Posons la fonction positive à support compact f(x, y) représentant la carte d’atténuation inconnue de l’objet. Par analogie avec la transformée de Radon classique (voir le premier chapitre), nous allons maintenant écrire la transformée directe dans notre cas. Nous utiliserons la paramétrisation (xR, θ) pour notre transformée. Les données projetées gb(xR, θ) mesurées au point xD (xD = xR + L × tan(θ)) après avoir été émis à un site xS (xS = xR − L × tan(θ)) et subi un angle de réflexion θ (voir Fig. II.1(b)) peut être écrit comme la transformée de Radon suivant : gb(xR, θ) = V bf(xR, θ) = 1 cos(θ) Z R2 f(x, y)δ(x − xR − y tan(θ))dx dy + p(θ) + 1 cos(θ) Z R2 f(x, y)δ(x − xR + y tan(θ))dx dy = Z ∞ 0 f(xR + r sin(θ), r cos(θ))dr + p(θ) + Z ∞ 0 f(xR − r sin(θ),r cos(θ))dr (II.1) Cette équation définit la transformée de Radon sur des lignes brisées (T RV 1) et décrit l’acquisition des données sur les récepteurs et ainsi l’équation de la formation d’images de notre nouvelle modalité d’imagerie par transmission-réflexion. Maintenant nous allons continuer notre analyse avec pour l’instant un coefficient p(θ) nul (miroir parfait sans perte). Ce coefficient additif que l’on peut calibrer pouvant être compensé en post traite- 38 II. La transformée de Radon sur lignes brisées en forme de lettre V ment . On constate donc que l’écriture de l’équation (II.1) peut aussi s’écrire si nous négligeons p(θ) sous la forme d’une transformée intégrale dans R 2 avec un noyau de Dirac concentré sur la ligne V : g(xR, t) = Z R2 f(x, y)κ(xR, θ|x, y)dxdy, (II.2) avec t = tan θ et κ(xR, θ|x, y) = δ((x − xR) cos(θ) − y sin(θ)) + δ((x − xR) cos(θ) + y sin(θ)) (II.3) Donc l’image d’un point source donné à (x, y) ∈ R 2 est la somme de deux distributions de Dirac, qui a un support sur le plan (t, xR), constituant deux demi-droites, avec t > 0, croisant l’axe des xR à x = xR et ayant une pente de ±y −1 i.e. θ = arctan x − xR y (II.4) Dans la représentation (θ, xR), le support d’un point source est juste une courbe d’arctangente, ce qui implique que le support de cette transformée est non compact dans cette représentation. L’opérateur adjoint de cette transformée peut s’écrire : V † bf(xR, θ) = Z 0 − π 2 1 cos(θ) g(x + y tan(θ), θ)dθ + Z π 2 0 1 cos(θ) g(x − y tan(θ), θ)dθ. (II.5) Cet opérateur revient à un opérateur classique de rétroprojection mais ici pour la transformée de Radon sur lignes brisées.