La théorie historico-culturelle et la théorie de l’activité

 La théorie historico-culturelle et la théorie de l’activité

La constitution du cadre théorique de cette recherche comporte un double défi. D’abord, au croisement des approches psychologiques et des approches sociales précédemment développées, l’enjeu est de rendre lisible par les concepts et la démarche transformative de la clinique de l’activité (Clot, 1999 ; 2008c) une notion (celle d’identité) omniprésente, utilisée dans le sens commun donc polysémique. Ensuite, les questions soulevées dans cette recherche et étayées à travers la revue de littérature, se sont inscrites dès le départ dans les préoccupations du DATIEF (Développement de l’Activité, Travail et Identité des Enseignants en Formation, ERTe n° 60), puis celles du LAMHESS (Laboratoire sur la motricité humaine, l’éducation, le sport et la santé). Autrement dit, c’est bien un enjeu transformatif, développemental qui est ici visé (enjeu pratique), qui passe nécessairement par une meilleure connaissance de l’activité des enseignants débutants (enjeu épistémique) (Clot & Leplat, 2005). Précisément, il s’agit d’éclairer le développement de l’activité de travail à des fins de formation, pour revisiter les maquettes de formation, la mise en oeuvre de l’alternance entre les stages et la formation en centre universitaire. Notre projet vise plus particulièrement à comprendre comment se réalise le façonnage de l’IP des enseignants débutants, pour Le postulat de base est que l’on peut comprendre le processus du façonnage identitaire en analysant l’activité des sujets au travers des concepts de l’approche clinique de l’activité. Le façonnage de l’IP est vu à travers l’activité de travail des enseignants dans laquelle le développement du sujet est favorisé ou au contraire empêché. Cette approche trouve ses fondements dans la théorie de l’activité et la psychologie historico-culturelle (Cultural Historical Activity Theory : CHAT), l’ergonomie francophone et la psychodynamique du travail. Les contributions de ces trois sources sont mises en avant (Clot, 2008c). Les pages suivantes visent à préciser ce cadre. Ainsi, sera approfondi le concept d’activité à travers les travaux issus de trois générations de la CHAT (Vygotski, 1960 ; 1934/1985 ; 2003 ; Leontiev, 1975 ; 1976 ; Engeström, 1999a ; 1999b ; 2008). En différenciant l’activité réelle de l’activité réalisée et en définissant les quatre dimensions du métier, tel que le propose Clot (1999), nous interrogerons le concept de développement. Nous nous attacherons particulièrement à montrer le lien entre l’activité et l’IP. Pour ce faire, les concepts de genre et de style devront être définis (Clot, ibid. ; Clot & Faïta, 2000 ; Yvon, 2001). Les apports de l’ergonomique francophone permettront de comprendre l’activité de l’enseignant entre prescriptions et contraintes (Amigues, 2003 ; Daniellou, 1996), et appuieront l’idée de La théorie historico-culturelle et la théorie de l’activité La constitution du cadre théorique de cette recherche comporte un double défi. D’abord, au croisement des approches psychologiques et des approches sociales précédemment développées, l’enjeu est de rendre lisible par les concepts et la démarche transformative de la clinique de l’activité (Clot, 1999 ; 2008c) une notion (celle d’identité) omniprésente, utilisée dans le sens commun donc polysémique. Ensuite, les questions soulevées dans cette recherche et étayées à travers la revue de littérature, se sont inscrites dès le départ dans les préoccupations du DATIEF (Développement de l’Activité, Travail et Identité des Enseignants en Formation, ERTe n° 60), puis celles du LAMHESS (Laboratoire sur la motricité humaine, l’éducation, le sport et la santé). Autrement dit, c’est bien un enjeu transformatif, développemental qui est ici visé (enjeu pratique), qui passe nécessairement par une meilleure connaissance de l’activité des enseignants débutants (enjeu épistémique) (Clot & Leplat, 2005). Précisément, il s’agit d’éclairer le développement de l’activité de travail à des fins de formation, pour revisiter les maquettes de formation, la mise en oeuvre de l’alternance entre les stages et la formation en centre universitaire. Notre projet vise plus particulièrement à comprendre comment se réalise le façonnage de l’IP des enseignants débutants, pour Chapitre 2. Cadre théorique 45 « Toute fonction psychologique, dans le développement culturel de l’enfant, apparaît deux fois ou sur deux plans : elle apparaît d’abord sur le plan social puis sur le plan psychologique ; d’abord entre les individus comme une catégorie interpsychique, et ensuite à l’intérieur de l’enfant comme une catégorie intrapsychique » (Vygotski, 1960, p. 197). Ce modèle prévoit donc un apprentissage puis un développement des fonctions psychologiques supérieures du sujet par l’entremise de signes qui lui sont adressés et qu’il s’approprie en trois temps : d’abord il les connaît sans en comprendre le sens (pas de liaison), puis il en comprend le sens (liaison externe) puis il les intériorise à proprement parler. Vygostki décrit cette dernière étape comme celle de l’autonomie, c’est-à-dire celle au cours de laquelle le signe culturel est « greffé », le sujet pouvant agir sans le soutien d’autrui. En d’autres termes, le principe est posé de la « transition d’une influence sociale externe de l’individu à une influence sociale interne de l’individu » (Vygotski, 1960, p. 116). Rapporté à la formation professionnelle initiale des enseignants, ce modèle permet de considérer que ceux-ci sont aussi destinataires de « signes culturels » au cours d’échanges, de moments de formation et de classe (l’interpsychique) et qu’ils les « greffent » pour en faire des instruments psychologiques permettant d’agir dans un contexte nouveau (l’intrapsychique) (Bertone, Chaliès, Clarke & Méard, 2006 ; Flavier, 2009 ; Méard & Bruno, 2008 ; Moussay, Flavier, Zimmermann & Méard, 2011). Ces signes deviennent des outils de pensée et de jugement au cours de l’expérience professionnelle en classe (Vygotski, 2003). Concevoir l’IP au travers du concept d’activité implique, pour le sujet, l’intériorisation de ces « signes externes » ayant une origine culturelle. renormalisation des prescriptions (Schwartz, 2000 ; Wisner, 1995). Enfin, nous convoquerons la psychodynamique du travail afin de définir le concept de reconnaissance (Dejours, 1993). La reconnaissance apparaît en effet comme étant essentielle dans le processus de façonnage de l’IP de l’enseignant débutant et de l’identité en général.

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L’apport de la théorie historico-culturelle selon Vygotski

L’apport de Vygotski tient à la place de la situation sociale considérée comme source et ressource de l’activité individuelle. Le développement des fonctions psychologiques du sujet est d’emblée compris à travers sa participation à des pratiques socialement organisées. Ses travaux postulent un développement culturel du psychisme :« Toute fonction psychologique, dans le développement culturel de l’enfant, apparaît deux fois ou sur deux plans : elle apparaît d’abord sur le plan social puis sur le plan psychologique ; d’abord entre les individus comme une catégorie interpsychique, et ensuite à l’intérieur de l’enfant comme une catégorie intrapsychique » (Vygotski, 1960, p. 197). Ce modèle prévoit donc un apprentissage puis un développement des fonctions psychologiques supérieures du sujet par l’entremise de signes qui lui sont adressés et qu’il s’approprie en trois temps : d’abord il les connaît sans en comprendre le sens (pas de liaison), puis il en comprend le sens (liaison externe) puis il les intériorise à proprement parler. Vygostki décrit cette dernière étape comme celle de l’autonomie, c’est-à-dire celle au cours de laquelle le signe culturel est « greffé », le sujet pouvant agir sans le soutien d’autrui. En d’autres termes, le principe est posé de la « transition d’une influence sociale externe de l’individu à une influence sociale interne de l’individu » (Vygotski, 1960, p. 116). Rapporté à la formation professionnelle initiale des enseignants, ce modèle permet de considérer que ceux-ci sont aussi destinataires de « signes culturels » au cours d’échanges, de moments de formation et de classe (l’interpsychique) et qu’ils les « greffent » pour en faire des instruments psychologiques permettant d’agir dans un contexte nouveau (l’intrapsychique) (Bertone, Chaliès, Clarke & Méard, 2006 ; Flavier, 2009 ; Méard & Bruno, 2008 ; Moussay, Flavier, Zimmermann & Méard, 2011). Ces signes deviennent des outils de pensée et de jugement au cours de l’expérience professionnelle en classe (Vygotski, 2003). Concevoir l’IP au travers du concept d’activité implique, pour le sujet, l’intériorisation de ces « signes externes » ayant une origine culturelle. 

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