La théorie du genre
L’approche théorique du genre
1°) Le concept de genre : Le concept de genre est un concept social qui part du principe que les différences sexuelles propres ne constituent pas et ne justifient pas les inégalités entre les êtres humains sur les plans sociaux. Seule la culture intervient en créant les identités pour 230 Source numérique : http://ac.lille.free.fr/echo.2.html, Bertrand DEKONINCK Le Travail domestique : le privé est politique et économique, Lille Alternative, jeudi 1er juin 2000 231 Op cit. 232 Op cit. La théorie du genre 201 chaque sexe et en élaborant les systèmes de genre. Les différences se transforment alors en inégalités. On peut observer dans toute société que les places occupées par les femmes et par les hommes et les rôles sociaux que les unes et les autres jouent ne sont pas seulement Ŕ et loin de là Ŕ le résultat de la différence physiologique entre les hommes et les femmes. Ils sont le résultat d‟une longue construction collective. Le mot genre est la traduction du mot anglais Gender. Ce terme est apparu pour la première fois en 1972, dans un ouvrage d ‟Ann Oaklay intitulé « Gender and Society », et s‟est progressivement répandu à partir des années 80. Il propose de faire la distinction entre la dimension biologique (sexe) et la dimension culturelle (genre). Le genre permet ainsi de mettre en évidence le fait que : Les rôles « féminins » et « masculins », par exemple les femmes doivent s‟occuper des tâches ménagères et des enfants, la politique ou la direction d‟entreprises sont des domaines réservés aux hommes, etc., ne sont pas déterminés à la naissance – caractères innés déterminés par la biologie – et voués à ne jamais changer mais sont attribués aux hommes et aux femmes par la société comme des rôles acquis / socialement construits : appris à l’école, au sein de la famille, etc. Ces rôles peuvent donc évoluer différemment selon les situations sociales, économiques et culturelles où se trouvent les individus. Le terme anglais « Gender » désigne le sexe, masculin ou féminin, socialement construit. Pour les féministes francophones, ce concept correspond aux « relations sociales de sexe ». Le terme « genre » ne renvoie pas à des catégories biologiques (hommes et femmes) mais à des catégories sociales (féminin et masculin). Le genre implique l’organisation sociale de la relation entre les sexes. Il regroupe donc toutes les différences constatées entre les hommes et les femmes, tant au niveau individuel que social, économique, politique et culturel233 . Le concept « genre » a été approprié et élaboré comme catégorie opératoire d‟analyse par les chercheuses américaines, dans la mesure où il échappe aux connotations biologiques qui s‟attachent au mot « sexe ». Ce sont les données biologiques- elles mêmes construites et interprétées- qui ont permis, de présenter comme « naturels » la bi catégorisation en 233 Source numérique : Gender studies, Un article de Wikipédia, l’encyclopédie libre. 202 sexes et les rapports sociaux entre sexes234 . Le concept « genre » permet de désigner sans ambiguïté, une construction socioculturelle235 . Le concept de « genre » est donc un concept social qui part du principe que les différences sexuelles propres ne constituent pas et ne justifient pas les inégalités entre les êtres sociaux. Seule la culture intervient en créant les identités pour chaque sexe et en élaborant les systèmes de genre. Les différences se transforment alors en inégalités. On peut observer dans toute société que les places occupées par les femmes et par les hommes et les rôles sociaux que les unes et les autres jouent ne sont pas seulement Ŕ et loin de là Ŕ le résultat de la différence physiologique entre les hommes et les femmes. Ils sont le résultat d‟une longue construction collective236 . « L‟utilisation du concept « genre » par les historiennes américaines est du point de vue de l‟analyse historique, une catégorie utile, comme le précise Joane Scott, parce qu‟il est un élément constitutif de rapports sociaux fondés sur les différences perçues entre sexes. Quant à Michèle Riot Sarcey, le genre est une façon première de signifier des rapports de pouvoir et que le genre femme, au sens social, est aussi une construction historique » 237 . Ce que le concept de genre interroge, ce sont les relations de pouvoir entre les hommes et les femmes et l’asymétrie fondamentale dans la hiérarchie des deux groupes. Il doit permettre d’analyser les relations entre les hommes et les femmes dans les espaces/institutions sociales – famille, communautés, marchés, école, rue, stade, etc. – en tant que redistribution inégale des ressources, des responsabilités et du pouvoir entre les hommes et les femmes.
Genèse des « Gender Studies »
« Le concept de «Gender» est né aux Etats-Unis dans les années 70 d’une réflexion autour du sexe et de l’utilisation de cette variable dans les recherches en sciences sociales. Les « Gender studies » ont profondément renouvelé l’étude des rapports homme/femme en posant que la différence de sexe est une construction sociale. « Ce domaine d’étude veut montrer comment les inégalités dont sont victimes les femmes s’appuient d’une part sur une idéologie légitimant, de fait, l’oppression des femmes et d’autre part sur un ensemble de mécanismes sociaux qui tendent à présenter comme naturelle une division inégalitaire des rôles sociaux entre les hommes et les femmes, y compris dans les sociétés qui se prétendent démocratiques et égalitaires » 238 . Si ce courant n’a guère d’équivalent en France, en revanche la notion de genre a fini par s’imposer dans les études féministes et de nombreux enjeux de société. On trouve parfois des traductions comme « études des genres » ou « études sur le genre » mais les personnes qui écrivent dans ce champ de recherche reprennent le terme « Gender Studies ». 238Source numérique : http://fr.wikipedia.org/wiki/Gender_studies 204 Le mouvement féministe qui a pris de l’ampleur après la révolution sexuelle cherche à faire entendre sa voix au sein des institutions de recherche » 239 . Le Mouvement de libération des femmes (MLF), en 1970, s‟est constitué en partie en réaction contre le machisme qui régnait durant le mouvement de Mai 68. Les Féministes et les libertaires ont toujours partagé la revendication d‟autres rapports sociaux entre les sexes et en particulier la revendication d‟une libération sexuelle et des rapports d‟oppression qui ne confondent pas libéralisme et amour libre. Il ne peut donc y avoir de véritable révolution sexuelle sans remise en cause des rapports économiques d‟exploitation. Cette révolution suppose aussi une remise en cause de toutes les formes de hiérarchie afin que soient possibles des relations entre individus libérés des rapports de domination. Il s’agit de faire reconnaître un engagement qui se veut de plus en plus une réflexion renouvelée sur le monde. « C’est un psychologue, Robert Stoller, qui popularise en 1968 une notion déjà utilisée par ses confrères américains depuis le début des années 50 pour comprendre la séparation chez certains patients entre corps et identité. De là l’idée qu’il n’existe pas une réelle correspondance entre le genre (masculin/féminin) et le sexe (homme/femme). Dès 1972, en s’appuyant sur l’articulation entre la nature et la culture développée par l’anthropologue français Claude Lévi-Strauss, la sociologue britannique Anne Oakley renvoie le sexe au biologique et le genre au culturel » 240 . Le « genre » constitue ainsi un nouveau domaine de recherche en histoire, abordé de différentes manières – théorie du patriarcat ; approche féministe et marxiste; approche psychanalytique. Les études cherchent à montrer comment le genre structure concrètement et symboliquement la vie sociale et la distribution du pouvoir. Selon Christine Delphy, le genre « c‟est ce que l‟on pourrait appeler le « sexe social » », c’est-à-dire tout ce qui est social dans les différences constatées entre les femmes et les hommes, dans la division du travail ou dans les caractères qu‟on attribue à l‟un ou à 239 Source numérique : http://www.scienceshumaines.com/0ales-gender-studies-0a_fr_4666.html, rédigé par Sandrine Teixido. 240 Op cit. 205 l‟autre sexe. Sa théorie est que l‟ensemble de ce que sont et de ce que font les femmes et les hommes, et qui paraît spécifique à chaque sexe, est en fait entièrement social241 . 3°) Les Rapports sociaux de genre : Les femmes et les hommes (les filles et les garçons) ont le plus souvent un statut différent au sein de la famille, dans la communauté et dans la société. Pour remplir leur rôle, ils et elles utilisent des ressources différentes (naturelles, économiques, politiques et sociales). Il arrive que l’appartenance à un sexe ou l’autre empêche les individus de jouer le rôle qu’ils ou elles voudraient jouer et d’accéder aux ressources nécessaires à ce rôle. Les femmes en particulier, doivent surmonter des difficultés pour accéder à certaines ressources et/ou les contrôler. De plus, leur contribution sociale et économique est souvent sous-estimée. Il est donc important d‟analyser « les relations de genre » dans le cadre des actions de développement ; cela revient à considérer la répartition et l’organisation des rôles, des responsabilités, des ressources et les valeurs attachées aux hommes ou aux femmes, afin d’identifier les différences et les inégalités qui les séparent et de déterminer leurs intérêts, possibilités, contraintes et besoins respectifs en terme de développement. Contrairement aux différences biologiques entre les sexes, les rapports sociaux de genre dépendent du contexte. Ils varient d’un pays à l’autre, d’une région à l’autre dans un même pays (différences entre la ville et la campagne, par ex.), mais aussi d’une famille à l’autre. Les rapports sociaux de genre ne sont pas figés. Même dans les cultures traditionnelles, ils évoluent avec la situation économique, juridique, politique ou environnementale. Certaines de ces évolutions sont voulues et favorisent l’égalité : nombre de pays ont par exemple entrepris d’éliminer toute discrimination entre les sexes dans leur législation. Il arrive aussi que des mesures soient prises pour perpétuer ou accroître les disparités (en Arabie Saoudite, les femmes n’ont ainsi pas le droit de conduire). Les changements ne sont pas toujours voulus et peuvent aller dans un sens ou dans l’autre : Positifs : comme par exemple dans les zones franches du Bangladesh, où nombre de femmes travaillent (même si leur employeur ne se soucie que de ses intérêts économiques et n’a que faire du pouvoir social des femmes et si les conditions de travail sont souvent douteuses) tirant ainsi de leur activité un revenu 241 Entrevu de CHRISTINE DELPHY, « Le Genre, Sexe Social » juin 2002, réalisé par Pauline TERMINIERE. 206 monétaire non négligeable qui leur permet d’améliorer leur statut au sein de la famille. Négatifs : comme par exemple dans certains pays de l’Est où la libéralisation des marchés a engendré un chômage élevé parmi les hommes qui, privés de leur place et de leur statut traditionnel à la tête de la famille, tendent à exprimer leur malaise et à affirmer leur masculinité en recourant à la violence domestique.