La spécification des variables inputs, outputs et les corrélats de l’efficience
Détermination des inputs et outputs des institutions financières
Comment définir les variables inputs et outputs est une autre question controversée, provoquant un débat de longue date dans la littérature traitant l’efficience bancaire. Contrairement aux entreprises manufacturières qui produisent des biens physiques, les banques produisent une large gamme de produits qui sont des services d’intermédiation difficilement identifiables. Les premiers travaux relatifs à la performance des banques se sont basés sur les outputs bancaires suivants : l’actif total, tout investissement productif générant des intérêts, les dépôts à vue, le nombre de comptes de dépôts et les comptes de prêts. Cette spécification a permis le développement d’outputs spécifiques aux institutions financières. Certain auteurs ont justifié le choix de leurs outputs en s’appuyant sur les contraintes liées à leurs travaux de recherche ou sur la disponibilité des informations. Or, ce manque de précision a abouti à l’absence de compromis concernant les outputs bancaires, ainsi qu’à l’apparition de confusion entre les inputs et les outputs (Berger & Mester, 1997). Sealey & Lindley (1977) ont contourné ces limites en donnant des définitions précises des inputs et des outputs des institutions financières, et plus particulièrement des banques .Avec les développements récents de la théorie de la firme, basés sur la maximisation de l’utilité des différent intervenants, les conditions suivantes ont été énoncées : La firme doit considérer sa production économique comme étant celle qui permet d’obtenir des outputs dont la valeur dépasse celle des inputs. La valeur des outputs générée par le processus de production doit se mesurer à partir du prix du marché. En d’autres termes, la théorie de la firme exige que le prix des outputs et les décisions concernant leur production et permettant de maximiser les profils soient sur les coûts et les revenus privés, mesurés par les prix du marché. Les outputs techniques d’une institution financière ne sont pas nécessairement les outputs économiques. Seuls les services qui permettent d’obtenir des investissements productifs d’intérêts earning assets sont considérés comme étant des produits ayant plus de valeur sur le marché que les inputs qui sont générés (Sealey & Lindley ,1977). Les services reçus par les déposants des institutions financières sont généralement associés à l’acquisition d’inputs économiques. En effet, ces services engendrent des coûts et ne génèrent pas de revenus directs. Le processus de production de l’institution financière, du point de vue de la firme, est un processus à plusieurs étapes, nécessitant l’utilisation d’outputs intermédiaires. En effet, les fonds prêtés, qui découlent généralement des dépôts des clients, sont transformés en outputs et proposés par l’institution financière à ses clients, ce processus de transformation nécessite l’utilisation du facteur capital, du facteur travail et d’autres inputs matériels. L’objectif est de générer des investissements productifs à intérêts, considérés comme outputs. Le mode de transformation que nous venons de définir se rapproche de celui des entreprises industrielles. En effet, une unité de production fabrique, dans un premier temps, un output qui sera par la suite introduit comme input dans un deuxième processus de production. En conclusion la production d’outputs d’une institution financière nécessite généralement l’utilisation des inputs suivant : Le travail, mesuré par le nombre d’employés de l’institution financière. Son prix représente les dépenses en personnel de l’institution. Le capital physique, composé des immobilisations et autres actifs fixes. Son prix est déterminé à partir des dépenses en équipements. Les dépôts et tous les autre fonds empruntés, sachant que les dépôts représentent un output intermédiaire généré par un processus de production au sein de la même institution et qui a été assimilé à un input. Le prix des dépôts est déterminé à partir des intérêts versés aux détenteurs de ces fonds.
Quelques remarques concernant les outputs
La qualité des outputs
Théoriquement et afin que la comparaison entre les estimations d’efficience d’un échantillon de banques donné soit significative, les banques doivent générer la même qualité d’outputs. Cependant, il existe des différences difficilement mesurables au niveau de la qualité des outputs, qui sont dues en partie au manque de transparence dans les données disponibles. Berger & Mester (1997) considèrent que les données bancaires reflètent mal l’hétérogénéité des outputs produits. Ils précisent que le flux des services associés aux produits financiers est habituellement considéré comme étant proportionnel à la valeur en dollar du stock d’actif ou de passif appartenant au bilan. Or, cette approximation pourrait engendrer des erreurs de mesure des outputs. Par exemple, les crédits commerciaux peuvent varier selon leur taille, leur échelonnement, la transparence de l’information, le risque qu’ils génèrent …etc. Ces différences au niveau de cet output ne sont pas déduites du bilan. Cependant, elles peuvent affecter les frais de constitution du dossier de crédit, les coûts de contrôle et le suivi ainsi que les frais financiers engagés par la banque. Ces coûts liés à la qualité des produits pourraient être assimilées à une inefficience-coût. De cette manière, la mauvaise appréciation de la qualité des outputs aurait engendré une mauvaise interprétation de l’inefficience. Berger & Mester (1997) proposent comme solution le choix d’une méthode alternative de la fonction de profit, afin de mieux contrôler les différences au niveau de la qualité des outputs. D’autres études se sont intéressées à la manière avec laquelle il était possible de contrôler la qualité des outputs. Par exemple, Hughes & Mester (1993) ont introduit le volume des créances douteuses afin de contrôler la qualité des crédits. De même, Berger & Mester (1997) ont introduit les pertes engendrées par les mauvaises créances comme moyen de contrôle de l’efficience. Les auteurs précisent que l’introduction des pertes sur créances et des créances douteuses comme moyen de contrôle de la qualité des outputs au niveau des fonctions de coût et de profit dépend du caractère exogène de ces variables. Les créances douteuses et les pertes sur les créances peuvent être exogènes lorsqu’elles sont causées par des chocs économiques. Elles peuvent cependant être endogènes si elles sont dues à une mauvaise gestion du portefeuille de crédits ou encore lorsque les dirigeants prennent volontairement la décision de réduire les dépenses à court terme, en réduisant le budget alloué à l’étude rigoureuse des dossiers de crédits (Berger & Mester,1997). Berger et Deyoung en 1997 ont tenté de résoudre ce problème en introduisant le ratio crédits non performants / total crédit nonperformingloan/total loan in the bank state comme variable de contrôle afin d’apprécier son impact sur l’efficience .Le résultat obtenu est que la variable est presque totalement exogène et permet de mieux contrôler les chocs négatifs qui pourraient affecter l’efficience des banques (cité par Ohene-Asare,2011).
Le rôle du capital financier
La prise en compte du capital financier a une influence sur la mesure de l’efficience des banques. En effet, la solvabilité d’une banque dépend aussi bien de sa capacité à absorber les pertes que du degré de risque que comporte le portefeuille lui-même. Les risques d’insolvabilité affectent les coûts et les profits des banques via la prime de risque que la banque se doit de payer pour ses crédits non assurés, et à travers l’intensité des activité du risque management que la banque s’engage à gérer (Burger & Humphry,1997). C’est pour cette raison que le capital financier est un élément important dans l’analyse de l’efficience. Dans une certaine mesure, en contrôlant les taux d’intérêt payés sur la dette non garantie, ceci aide dans la diversification des risques, mais ces taux restent imparfaitement mesurés. Le capital financier d’une banque affecte directement ses coûts puisqu’il permet de disposer des fonds nécessaires pour accorder les crédits. Il intervient en tant que variable importante dans les fonctions de coût et de profit. Hughes précise que même si les concepts d’efficiencecoût et d’efficiences-profit prennent comme hypothèse que les banques sont neutres face au risque riskneutral, certaines peuvent être plus averses au risque que d’autres (Burger & Humphry, 1997). Cependant, le capital financier peut également être introduit comme netput ou comme une variable de contrôle. Il peut également être utilisé pour expliquer l’efficience bancaire, il sera alors introduit comme variable explicative de l’efficience (Berger & Humphrey, 1997).