La sous-représentation des femmes dans la vie politique
On observe d’énormes écarts entre la présence des hommes et celle des femmes dans les différents milieux professionnels et les instances décisionnelles à Madagascar. Les inégalités de genre persistent en matière de droits et d’accès aux ressources, de très faibles niveaux de représentation des femmes aux postes de décision économiques, scientifiques et politiques sont constatés et les violences appliquées aux femmes restent trop fréquentes. Les données sur l’intégration des femmes dans le commandement des affaires publiques à Madagascar démontrent que celles-ci sont encore sous-représentées à tous les niveaux et dans tous les secteurs, plus particulièrement, dans les sphères de décision qu’il s’agisse du pouvoir législatif ou du pouvoir exécutif, du Gouvernement aux instances régionales, communales et locales. Nous pouvons estimer que la sous-représentation des femmes dans la vie politique relève trois faits sociaux : la différence dans la socialisation des femmes et des hommes, le stéréotype de l’identité féminine, le système discriminatoire du partage de pouvoir.
Différence dans la socialisation des femmes et des hommes
Dès l’enfance, les garçons reçoivent un style d’éducation différent à celui des filles. Un grand verre de séparation s’est produit entre le traitement envers les deux sexes. L’éducation familiale est l’un des paramètres majeurs de la construction de la trajectoire des enfants, bien au contraire il existe parfois un traitement inégal de la part des parents pour élever leurs enfants. A titre d’illustration, lorsque les filles sortent de l’école, elles s’occupent tout de suite de la cuisine, du ménage alors que les garçons se livrent 84 immédiatement au divertissement ou ils finissent tout de suite leurs devoirs. Cela a un grand impact au niveau du développement intellectuel et au résultat d’un examen.Effectivement, les parents dressent, orientent fortement leurs filles dès le premier âge vers la filière féminisée, et au contraire leurs fils vers les filières technologiques, professionnelles, économiques et politiques. Alors, il importe de souligner que les filières scolaires restent très sexuées. En conséquence, les choix d’orientation sont encore strictement marqués par l’identité sexuelle. Les filles se trouvent très minoritaires dans les filières d’excellence qui ouvrent sur des positions de pouvoirs. Dans la plupart des cas, ce sont des personnes originaires d’une famille à fort capital qui ont beaucoup plus de chance de s’intégrer à la vie politique que celle de la classe populaire. Cela résulte du fondement éducatif car la famille aisée dispose également des moyens nécessaires pour suivre le parcours concentré sur la vie politique. Généralement, l’école faciliterait l’apprentissagedes relations de pouvoir, des communications horizontales entre élèves, des ententes verticales entre adultes et enfants. Cela dit, il faut replacer l’éducation dans le contexte social et ne pas oublier que le système scolaire reproduit ou renforce les logiques de discrimination de la socialisation, y compris celles qui concernent le champ politique. Or, l’éducation à propos de la politique est très rare à Madagascar, surtout la pédagogie au niveauprimaire, ainsi que le secondaire se fonde sur l’absence de l’apprentissage constructif en faveur de la carrière politique. La transmission de l’éducation politique est en particulier l’affaire de l’enseignement supérieur. En plus, pour ce qui est de famille à faible capital, elle a de la difficulté en matière de moyen financier pour assurer la poursuite de l’étude universitaire.
Le stéréotype de l’identité féminine
Le faible taux de participation des femmes à la vie politique s’explique par des facteurs entravant leur participation à la vie électorale. Il s’agit autant de paramètres socioculturels, en particulier,la conception discriminatoire ou patriarcale du rôle des femmes qui octroie une valeur élevée de leur prise de responsabilité effective dans le foyer. Le mode de construction traditionnelle de l’identité féminine qui ne fournit pas aux femmes des armes nécessaires pour entrer en lice à l’égalité avec les responsabilités familiales quotidiennes relèvent presque exclusivement de la femme, ce qui assure aux hommes la liberté d’action sur la place publique. 85 Malgré l’introduction de la lutte pour l’égalité de sexe, le stéréotype culturel de l’identité de la femme demeure encore très présent. Cette culture constitue véritablement un effet psychologiquequi est déjà enraciné solidement au niveau de la pensée des malgaches. Les femmes sont encore victimes d’inégalité, plus particulièrement, elles ont du mal à poursuivre leurs carrières professionnelles. Plus particulièrement, ce sont les mères qui assument en priorité la garde et l’éducation des enfants. Dans les couples biactifs, les femmes se consacrent au travail domestique en moyenne 75% de temps. Depuis lors, la société malgache est définie historiquement par la société patriarcale, d’où le pouvoir appartient à la puissance paternelle ;l’homme détient beaucoup plus d’autorité que la femme dans le foyer. A cet effet, la femme malgache est naturellement obéissante à la domination masculine. En conséquence, ce mode de construction traditionnelle de l’identité féminine reste ancré dans la culture malgache. En revanche, la représentation des femmes dans le monde du pouvoir demeure faible. Plus précisément, lors d’une élection, le peuple se met dans l’embarras de choix lorsqu’il existe une femme candidate, il préfère mieux de choisir en priorité les hommes. Vu l’écho du stéréotype de la femme malgache, l’électorat a la tendance à ignorer, défier les femmes ;il considère les femmes comme un être non combatif. Il existe une influence négative sur la perception des électeurs à l’égard des candidates féminines.La majorité des citoyens perçoivent que l’affaire publique ou politique est une affaire très précieuse qui exige une puissance, force de dirigeant alors que les femmes sont encore loin d’avoir tous les bagages pour gérer avec assurance le pays et elles ne sont « pas faites » pour la prise de décision. Cette perception négative de l’image des femmes notamment l’absence de confiance envers elles permettent de limiter leur accès dans la vie politique.
Le système discriminatoire du partage de pouvoir
Contexte général
Les femmes représentent plus de la moitié de la population malgache mais peu d’entre elles jouissent pleinement leurs droits. Cette discrimination systémique reflète l’existence de rapports de pouvoir traditionnellement inégaux. Depuis lors, les républiques successives à Madagascar sont définitivement caractérisées par la prédominance des hommes, plus précisément, les représentants des régions.En terme derépartition de pouvoir, les hommes figurent la grande 86 partie des sièges dans la sphère politique. Les hommes sont plus nombreux dans les organes dirigeantdes structures étatiques tels que les ministres, les membres de HCC, lesagents diplomatiques, les sénateurs, les FFM, etc. L’intégration systématique de l’égalité hommes-femmes dans le processus législatif a été pendant longtemps absente de l’ordre du jour des institutions concernées. Au niveau du gouvernement, la présence des femmes en tant que ministre n’excède pas au-delà de 10%. Le système électoral, l’organisation des partis politiques ou des structures législatives renferment des facteurs intrinsèques d’inégalité hommes-femmes. Les femmes ont été longtemps privées de droits politiques, dans les faits, rares sont celles qui bénéficient du statut représentant à une élection. La présence des femmes relève toujours du bon vouloir des partis politiques. Pourtant, les partis politiques n’auraient pas pu favoriser l’accès des femmes à l’élection communale, législative, et présidentielle. Or, les femmes qui voulaient se présenter à titre indépendant, manquent d’appuis matériels et financiers par rapport aux candidates issues du parti politique. L’absence de réglementation sur le financement des campagnes électorales a toujours lésé les femmes, face aux hommes ayant généralement plus de moyens.
Au niveau de l’Assemblée Nationale
Du point de vue juridique, les règles qui déterminent le parlement n’agissent pas non plus en faveur de l’accès des femmes parlementaires aux postes-clés au sein de cette institution. Vu la structure politique qui semble inchangée depuis ces vingt-cinq dernières années, même si les femmes commencent à être plus nombreuses, les Bureaux Permanents ainsi que la présidence des Commissions et des groupes parlementaires sont toujours du ressort des hommes parlementaires. Plus précisément, ils jouent un rôle prépondérante en matière de détermination des priorités budgétaires et des programmes nationaux, les femmes étant quasi absentes des Commissions stratégiques (finances publiques, économie, affaires étrangères, etc.). La constitution de 2010 inscrit explicitement « égal accès et la participation des femmes et des hommes aux emplois publics et aux fonctions dans le domaine politique (…) ».Par contre, aucune des lois organiques successives n’a fait mention de mesures spécifiques d’action affirmative pour faire de l’égalité de droit une égalité de fait, entre autres en matière de gouvernance. La volonté politique pour promouvoir l’égalité de chances entre hommes et femmes demeure toutefois insuffisante. L’organe exécutif ne lance qu’une minorité d’activité à propos de prise en compte de l’égalité hommes-femmes, 87 il se préoccupe davantage de la situation politique, économique à Madagascar. Quand les lois touchent des sphères autres que sociales, elles restent silencieuses par rapport à cette dimension (ex. économie, infrastructures, développement rural, etc.). La nécessité d’intégrer l’égalité hommes-femmes dans toutes les lois reste d’ailleurs méconnue. La production de lois afférentes à ces questions des femmes reste sporadique et présente de grandes difficultés. La législation interne revêt des inactions par rapports aux engagements internationaux, continentaux et régionaux. En se référant aux vingt-cinq dernières années, un petit nombre de législations orientées vers le rééquilibrage de l’égalité hommes-femmes ont été soumises à l’examen du parlement. Les initiatives qui se rapportentà cette parité faisaient de temps en temps suite aux suggestions et soutiens des partenaires au développement du pays.Ce sont les acteurs externes (sociétés civiles, ONG,…) qui prennent beaucoup plus d’engagements de mettre en profit l’équilibre hommes-femmes dans le champ politique. L’Etat malgache reste inactif, surtout en matière de financement, par exemple la dernière conférence de Beijing, faute de moyen financier, aucune représentante malgache n’a pu assister à ce sommet de la femme.
Introduction |