La servuction « on line » : points communs et spécificités face à la  servuction traditionnelle

La servuction « on line » : points communs et spécificités face à la  servuction traditionnelle

Le site Web comme INTERFACE DE LA rencontre de service

Eiglier et Langeard (1987) ont une conception systémique de la production du service : le service constitue l’objectif et le résultat du système de « servuction » d’un prestataire. La servuction est définie comme « l’organisation systématique et cohérente de tous les éléments physiques et humains de l’interface client-entreprise nécessaires à la réalisation d’une prestation de service dont les caractéristiques commerciales et les niveaux de qualité ont été déterminés. » Dans l’offre de service, on distingue souvent les services principaux (« core service ») qui satisfont le besoin principal du client et les services auxiliaires (« peripheral services ») qui facilitent l’accès au service de base ou y ajoute de la valeur (Eiglier et Langeard, 1987 ; Grönroos, 1984, 1993).Le service résulte de l’interaction de trois éléments de base nécessaires à sa production et à sa distribution : le client, le support physique et le personnel en contact qui subissent, en arrière-plan, la coordination du système d’organisation interne à l’entreprise et la présence des autres clients. Le concept de servuction souligne l’importance du processus. Le service, en tant que résultat, ne peut être dissocié de la manière selon laquelle il est fourni (Grönroos, 1984). La rencontre de service (service encounter) est décrite comme le « moment de vérité » au cours duquel les clients et les employés coproduisent le service (Bitner, 1990, 1995 ; Eiglier et Langeard, 1987 ; Zeithaml et al., 1988).Le marketing des services repose sur les spécificités de ce secteur d’activité : l’intangibilité, l’inséparabilité et l’hétérogénéité. Les services sont traditionnellement considérés comme physiquement intangibles, ils sont un acte de la part du prestataire et une expérience pour le bénéficiaire (Bateson, 1977). Le processus de production d’un service est simultané à sa distribution et à sa consommation  (Eiglier et Langeard, 1987 ; Grönroos, 1984). Les services sont hétérogènes dans la mesure où ils reposent sur une relation interpersonnelle et que leur évaluation est à la fois situationnelle et subjective.Chercheurs et managers ont envisagé les conséquences de ces spécificités sur le management de la relation entre les clients et l’entreprise. Or, toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité, créent une relation de service lorsqu’elles décident de mettre en ligne un site Web. Corrélativement, la question qui se pose est de savoir si le concept de rencontre de service est applicable et opportun pour définir la nature de la relation entre un vendeur virtuel et ses clients. Par conséquent, il est intéressant comparer les principes de management de la relation d’un service traditionnel avec ceux d’un service électronique, en partant des trois grandes spécificités reconnues pour le concept d’un service traditionnel.

Intangibilité

Les services sont caractérisés par leur intangibilité. D’emblée, on constate que l’Internet renforce cette caractéristique dans la mesure ou l’expérience d’achat se déroule dans un environnement virtuel. Les produits et les services existent comme des informations numériques (Rayport et Svioka, 1995). Le site Web soutient la rencontre de service en remplaçant l’infrastructure matérielle traditionnelle des prestataires et peut être conçu comme un magasin virtuel (Filser, 2001). Cette accentuation de l’intangibilité des services électroniques a des incidences sur l’ajustement de l’offre à la demande, la protection de l’offre et son évaluation (cf. tableau 1). Certaines facilitent le processus de gestion de la servuction on line, d’autres le compliquent.

Ajustement de l’offre à la demande

Dans environnement de service traditionnel, l’ajustement de l’offre à la demande est un problème crucial. Les activités de services sont souvent soumises aux fluctuations temporelles de la demande. En cas d’affluence, le prestataire est obligé d’adapter son potentiel de production ou de refuser des clients. S’il accepte un nombre de clients supérieur à ses capacités, il court le risque de créer de l’insatisfaction (temps d’attente, délais de livraison, erreurs dans la prise de commande, etc.).La distribution électronique des services n’est que partiellement soumise à ces effets, d’où un avantage potentiel en terme de flexibilité de la servuction. L’Internet permet de proposer réseau de distribution international, 24h/24h, à un grand nombre de clients. Il est toujours possible de surdimensionner le serveur (nombre d’accès simultanés, vitesse de transfert des données) pour faire face à des pointes de trafic limitées dans le temps, par un investissement technologique d’un coût acceptable. En revanche, la maîtrise de l’encombrement du réseau et l’équipement personnel des clients en informatique n’est pas maîtrisable en B to C. On peut cependant noter que cette contrainte est plus facile à gérer dans le cas de services Intranet. Au fond, dans un environnement électronique, l’ajustement des capacités de l’offre à la demande concerne essentiellement le système d’organisation en back-office. En effet, la servuction n’impose pas nécessairement la présence physique du personnel de contact (le traitement des réclamations ou l’aide en ligne peut conduire à prévoir un personnel via une plateforme téléphonique par exemple). La performance du prestataire repose en grande partie sur la flexibilité et la réactivité de la chaîne logistique qui assure notamment la gestion des stocks, la livraison des produits et le service après-vente. Remarquons enfin que, l’existence de produits manquants a souvent posé problème pour l’exécution de la commande du « panier électronique », bien qu’en théorie, la gestion des stocks soit facilitée par l’automatisation des processus de saisie électronique de la commande.

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Protection des services

L’offre de services est facilement imitable dans la mesure où elle ne peut être brevetée. De la même manière, on constate l’absence de protection légale sur le concept de site Web, son ergonomie et même ses éléments graphiques. Malgré tout, la marque et le nom de domaine sont protégeables pour un coût très modique. D’une manière générale, l’utilisation de la technologie et de la distribution électronique ne constituent pas un avantage compétitif à long terme (Volle, 1999 ; Tomiuk, 2000). C’est pourquoi, la qualité des services reste le principal moyen de différenciation des offres électroniques et de fidélisation des clients.

Evaluation des services

L’intangibilité rend difficile l’évaluation d’un service avant, et même parfois après sa consommation (Eiglier et Langeard, 1987). Par comparaison avec l’acquisition de produits tangibles, l’achat de services est perçu comme présentant un degré de risque plus élevé durant les phases préalables à l’achat.Les caractéristiques de la distribution électronique participent à renforcer ce sentiment de risque. L’achat en ligne présente des incertitudes quant aux caractéristiques des produits/services commandés et à la fiabilité des procédures mises en œuvre par le prestataire (délais de livraison, sécurité des paiements, gestion des réclamations, etc.). D’autre part, les problèmes de sécurité et de confidentialité constituent un réel obstacle à son développement. Enfin, dans un environnement de service traditionnel, la confiance repose notamment sur la relation interpersonnelle qui est absente de l’environnement électronique. Ceci constitue un handicap certain pour la servuction électronique face à la servuction tradionnelle.Face à ce constat, les prestataires doivent utiliser des réducteurs de risques. Cases (2002) distingue les réducteurs de risques liés aux conséquences d’un mauvais achat (éléments garantissant l’échange du produit, le remboursement) et ceux liés à l’incertitude de l’achat (la connaissance de l’enseigne et/ou la marque, l’avis des autres clients, la crédibilité et la précision de l’information).Le distributeur peut améliorer la confiance des clients à chaque étape du processus d’achat. L’absence de contact physique avec le prestataire lors de l’achat en ligne renforce le besoin de clarté et de précision des informations sur l’offre. Les possibilités graphiques et interactives d’Internet permettent d’adapter la forme et le contenu des informations délivrées aux internautes selon leurs attentes et leurs motivations (cf. annexe 1). La crédibilité de l’information peut être renforcée par la dimension sociale de l’expérience de service. Par exemple, certains vendeurs proposent à leurs clients de prendre connaissance et même de discuter avec d’autres clients pour connaître leurs avis sur l’offre (« ce sont des gens qui ne travaillent pas pour eux alors je peux croire ce qu’ils disent »). Dussart (1999) parle de transparence qui permet aux clients tout comme aux vendeurs de diminuer le risque perçu de la situation. Les clients peuvent également avoir la possibilité de tester les produits ou services (les shareware par exemple.) et/ou de faire des simulations. Muylle et al. (1999) parlent de virtualité (marketplace anchorage) : les opportunités offertes à l’utilisateur d’expérimenter virtuellement, de simuler la réalité (observer un objet sur tous les angles en cliquant sur les parties qui nous intéressent, faire un devis gratuit d’une assurance auto).

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