LA RESISTANCE DU SYSTEME EDUCATIF MALGACHE AUX DIFFERENTES REFORMES PEDAGOGIQUE
LES REPERES THEORIQUES
Dans cette partie de notre travail, nous entrerons dans le cadre théorique de l’objet de recherche. Nous avons jugé nécessaire de parler de la socialisation car l’école en est une instance. Par la suite, nous allons confronter les grandes théories avec notre problématique. Que dit la sociologie des réformes, des organisations et de l’éducation ? Selon Jean-Paul VOYER,16 « l’élaboration d’un cadre théorique se résume pour une bonne part à l’identification des variables principales susceptibles d’exercer une influence sur le phénomène étudié, à l’analyse de leurs interrelations respectives ainsi que des éléments d’explication disponibles pour rendre compte de ces relations… Il ne s’agit pas simplement cependant de localiser et de résumer les conclusions des études antérieures sur la question ; encore faut-il en faire une analyse critique, intégrer ces éléments de façon à former un tout, un véritable ensemble théorique. » Nombreux sont les auteurs qui ont proposés des théories sur les réformes, les organisations et l’école. Dans ce chapitre, nous allons les confronter à la problématique. Nous allons les analyser afin de cerner notre objet de recherche.
SOCIOLOGIE DES REFORMES : LES CAUSES DES INNOVATIONS DU SYSTEME EDUCATIF
Que nous dit la sociologie des réformes ? Que pouvons- nous dire sur les causes des innovations du système éducatif ? Nous nous appuyons ici sur l’ouvrage de Pascal BIANCHINI : Ecole et politique en Afrique noire, Sociologie des crises et des réformes du système d’enseignement au Sénégal et au Burkina Faso (1960-2000)17. Dans cet ouvrage, l’auteur affirme qu’« on ne peut réduire la logique des prises de position des ‘‘évolués’’ puis des intellectuels africains à l’hostilité ou l’acceptation de la dynamique d’acculturation. Car, en ce domaine, la politique a été contradictoire : alors qu’elle prônait l’assimilation au nom de la ‘‘mission civilisatrice’’, elle a aussi veillé à maintenir l’enseignement colonial dans une position subordonnée relativement à l’enseignement métropolitain. Aussi, les élites indigènes ont plutôt revendiqué dans le cadre du système existant, la fin de toute discrimination, plutôt que l’adaptation des contenus et de l’organisation scolaire aux spécificités locales. » En ce qui concerne l’Afrique Noire, quand les enfants de la nation ont été instruits, ils ont pris conscience que le système éducatif semblait encore véhiculer des idées d’acculturation, séquelles de la colonisation. Ils ont commencé à critiquer le contenu des programmes scolaires et à qualifier ces derniers d’être discriminatoires et non adaptés aux besoins d’une nation fraîchement décolonisée. Aussi, des tentatives de revendications ont mobilisées les étudiants de chaque pays. Ce mouvement a par la suite influencé la masse populaire, provoquant ainsi un soulèvement populaire un peu partout en Afrique. A ce titre, BIANCHINI affirme que « juste avant l’indépendance, il semble que ce soit, au sein des militants étudiants et non chez les enseignants restés en Afrique, que l’on puisse repérer la genèse intellectuelle des réformes de l’éducation à venir au cours des années 197019. Cette contribution s’explique sans doute par les trajectoires de l’exil et les perspectives d’évolution des sociétés et des systèmes éducatifs africains qu’ont été à même de percevoir certains intellectuels du mouvement étudiant. 20 » Le mouvement étudiant malgache eut lieu principalement en 1972. On revendiquait alors la malgachisation de l’enseignement qu’on jugeait trop éloigné des valeurs culturelles malgaches. Au fond, le but ultime était de couper totalement le lien qui nous reliait à la France métropole. Mais pourquoi nos réformes sont-elles mort-nées et n’ont pas abouti aux résultats attendus ? Ont-elles été vouées à l’échec à cause de motifs trop flous et de mesures prises qui ne se coïncidaient pas ou ne répondaient pas aux exigences de départ ? Le népotisme, l’incompétence des responsables, l’organisation même de ces innovations sont en cause. Si tel est le fond du problème, il nous faut donc revenir au problème de cette organisation.
SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS : L’ORGANISATION DE L’ADOPTION DE CHANGEMENT D’APPROCHE
La notion de sociologie des organisations est née après la seconde guerre mondiale, c’est-à-dire au moment où la sociologie de l’éducation s’est épanouie. Elle s’intéressait, au départ, aux institutions telles que les usines, les services administratifs ou les hôpitaux. Bref, son terrain d’action était surtout le fonctionnement des organisations et l’influence de la « structure » sur la dynamique d’action de ses « membres ». Les sociologues, surtout américains, pensaient progressivement que les organisations pouvaient servir de laboratoire pour expliquer les interactions entre les contraintes de la société et la liberté individuelle. Cette sociologie s’intéresse à l’orientation d’une institution vers un objectif, le choix de 18 Document en ligne : idem 19 BIANCHINI(2001), Document en ligne, p181 -199 20 Document en ligne : op.Cit. 17 moyens, et la coordination des activités à l’intérieur d’une structure délibérée.21 Dans son livre Participer à l’organisation du changement, Michel DARBORD dit que: « L’organisation est la science de l’action (…) sa mise en œuvre est l’art de l’équilibre, et un art profondément humain. » « Aux blocages suivis d’explosions, aux révolutions brutales qui se réduisent à un transfert du pouvoir à une nouvelle caste dirigeante, seront substituées l’adaptation collective et continue, et la révolution permanente et pacifique, seules susceptibles d’amener les véritables progrès dont nous avions fini par douter. » 22 Aussi, on peut en tirer que pour organiser il faut agir. Il ne s’agit plus d’user de la force pour gagner le respect et la collaboration de tous. Le meilleur moyen d’atteindre ensemble un but collectif c’est de mettre chaque individu ou groupe d’individu à la place qui lui convient. Pourtant, il est difficile de considérer les malgaches comme des hommes d’action. Une mentalité favorisant l’oisiveté : le mipetrapetraka, le mitraitraika prédomine et rend ainsi difficile d’apporter des changements conséquents et rapides sur les indices socio-économiques. Peut-on donc parler à Madagascar d’adaptation collective ? Ne serait-ce pas plutôt de l’inadaptation collective ? Combien de fois l’Etat a-t-il essayé de changer les habitudes de la population, mais en vain ? Prenons l’exemple de la propreté pour essayer de comprendre cette difficulté. Il a fallu un temps assez long aux citadins pour ne jeter les déchets dans les bacs à ordures publiques. Et la pérennisation de cette nouvelle habitude ? Aujourd’hui, c’est autour de l’Etat de rencontrer des difficultés dans collecte des ordures.
PARTIE INTRODUCTIVE |