LA REPONSE IMMEDIATE AUX PLEURS
Sources d’informations ayant amené les mères à la réponse immédiate aux pleurs (annexe 11) 1. La lecture Les sources matérielles extérieures comme les livres (pour cinq participantes) et internet (pour une participante) ont été mentionnées dans les témoignages.
Une acquisition par expérience
Les résultats montrent, là aussi, que c’est surtout par expérience que la moitié des mères interrogées en sont venues à répondre sans délai aux pleurs de leur enfant. La réponse aux pleurs ne semble ainsi pas venir d’une transmission familiale, ni de recommandations entendues par les professionnels de santé comme les sagesX femmes, mais surtout une habitude prise « par la force des choses » : Laure LW52W54 « tout s’est fait naturellement (…) je n’avais pas du tout envie de la laisser pleurer », Capu LW333W334 « je me suis souvent mise à sa place, il ne faut pas la laisser pleurer parce que moi je n’aimerais pas que l’on me laisse pleurer, que l’on ne vienne pas me voir ».
L’instinct
Cependant, le résultat le plus significatif concernant ce thème était le côté instinctif mentionné par huit participantes qui révèlent ne pas concevoir de laisser pleurer leur bébé : Capu LW42W43 « instinctivement je n’avais pas du tout envie de le faire », Pat LW377W379 « quand il pleure je ne peux pas m’empêcher de le récupérer, je ne supporte pas d’entendre qu’il pleure, qu’il va mal ou qu’il a besoin de quelque chose. C’est quelque chose d’insurmontable pour moi ». Paula LW265W268 soulignait aussi « c’est surtout important d’écouter son cœur, d’écouter son bébé, et si on sent qu’il faut faire commeRci ou comme ça, je pense que c’est la meilleure solution. C’est instinctif en fait, un feeling qu’on ne peut pas expliquer », MC LW439W440 « c’était plutôt instinctif, je ne pouvais tout simplement pas la laisser pleurer, cela me prenait aux tripes ». LA REPONSE IMMEDIATE AUX PLEURS 22 II. Facteurs contextuels : interventions et remarques de l’entourage sur la réponse immédiate aux pleurs (annexe 12) Les interventions et remarques de l’entourage étaient moins diversifiées que pour le portage ou le coWdodo mais beaucoup plus représentatives, à travers les idées suivantes : 1. Un caprice Neuf participantes ont entendu de leur entourage que répondre aux pleurs du bébé favorisait les caprices de ce dernier, comme en témoignent Capu LW57 « j’allais la rendre capricieuse », Céleste LW245 « des crises ou des caprices pour rien (…), demander les bras inutilement », Laure LW154 « une fille capricieuse », Lisa LW38W39 « tu vas te faire manger, il faut les laisser pleurer un peu », LW79W81 « cela les rendait capricieux d’avoir tout tout de suite (…) ce n’était pas leur rendre service que d’accourir au moindre pleur », MC LW 442 « trop de caprices », LW481 « tu vois elle a encore gagné », Mu LW111W112 « si tu réponds tout de suite aux pleurs, elle va être capricieuse », Paula LW288W289 « il ne fallait pas que je m’étonne si Maxence devenait capricieux et impatient ». Cette notion de caprice a été très représentée et demeure une idée dominante pour cette pratique.
Les stéréotypes et préjugés
Ils ont été fortement représentés dans le thème des pleurs puisqu’évoqués par l’entourage de neuf participantes, avec l’idée qu’ « il faut qu’ils apprennent à se consoler tout seuls » (Paula LW251W252). Ainsi, certaines phrases récurrentes en témoignent : « elle pleure, elle se fera les poumons, il faut qu’ils apprennent à attendre ces bébés » (So LW295), « mais laisseRle se faire ses poumons » (Pat LW408), « laisseRla pleurer, c’est comme ça qu’ils apprennent à trouver leur sommeil » (Mu LW117), « il faut les laisser pleurer un peu (…) pour qu’ils apprennent à se calmer tout seuls » (Lisa LW39W40), « cela n’a jamais tué un enfant de le laisser attendre » (Laure LW 142), « laisseRle pleurer, il comprendra » (Flo LW222), « après c’est trop tard tu vas te faire avoir » (Céleste LW258).
Autres remarques de l’environnement
Huit participantes ont reçu des conseils pour arrêter de répondre tout de suite aux pleurs de leur enfant, ou encore des éléments de comparaison avec leur propre expérience, comme Capu qui a entendu (LW41W42) « tu devrais essayer… moi regarde je le pose, il s’endort et j’ai juste eu à le laisser pleurer un peu », LW92W93 « moi maintenant, pour le faire dormir (…) je le laisse selon la méthode du cinq/dix/quinze » ou encore Flo LW226 « ne t’inquiète pas, il va comprendre qu’il doit s’endormir ». 23 De même, MC LW476 s’est entendue dire « il faut que tu arrêtes d’être une maman trop sur ton enfant », Pat LW390W391 « moi j’ai toujours attendu un peu avant d’y aller et franchement deux fois sur trois ils se calment tout seuls », ou encore Paula LW259W260 « attend au moins deux minutes avant d’aller le chercher, il ne risque rien tu sais ». Le côté positif et bénéfique de répondre immédiatement aux pleurs du bébé pour le rassurer n’a été entendu que par deux participantes. En effet, les remarques allaient plus dans un sens opposé, avec encore une fois l’idée de dépendance de l’enfant et de son manque d’autonomie : Céleste LW255 « il sera toujours dépendant de toi », LW257 « il faut leur apprendre le plus tôt possible à être un minimum indépendant », Mu LW110W111 « elle va pleurer tout le temps pour t’appeler si tu y vas au moindre pleur ». Trois mères se sont vues posé des questions ouvrant la discussion autour de la réponse immédiate aux pleurs. Quant aux préoccupations pour le bienWêtre de la mère, notamment en terme de fatigue, elles n’avaient pas leur place dans le thème des pleurs puisqu’une seule participante l’avait évoqué. Comme précédemment, les pleurs ont suscité des remarques qualifiées par les mères de « question de culture » (trois participantes) mais surtout de « question de génération » (six participantes) : Capu a ainsi pu entendre « nous à l’époque on laissait pleurer les bébés et cela ne les a jamais tués » (LW39W40), Mu rapportait aussi « quand ce sont des personnes âgées, on se dit que c’est un peu obsolète, que c’était une autre époque » (LW145W146), et Pat LW409W 410 « c’était peutRêtre comme cela dans le temps ». De même, Paula remarquait que « la génération d’avant, on dirait qu’ils veulent que tout soit normé, cadré, avec des règles » (LW268W269). III. Ressentis de la mère : conséquences émotionnelles et affectives (annexe 13) 1.L’énervement, l’agacement et la colère : pour six participantes 2. Des mères choquées d’entendre de telles remarques de la part de leur entourage (six participantes), ainsi qu’une impression de stupidité et d’absurdité des propos: Capu LW65 « je trouvais les remarques des gens stupides », LW116 « c’est absurde et affreux de les laisser pleurer », Flo LW229 « je trouve cela tellement archaïque », Paula LW279 « complètement absurdes et bêtes », So LW309 « c’était ridicule et absurde ». 24 3. Un sentiment de jugement qui concernait six mères comme: Lisa LW89 « cela m’énervait de me sentir jugée comme une mère qui cède tout à son enfant », Laure LW153 « je me sentais vraiment jugée làRdessus. Comme si j’étais une mère trop louve », ou encore Mu LW113 « ce sentiment de « ma pauvre tu ne comprends rien ». 4. Un devoir de justification, devoir de preuves : pour six participantes 5. Autres émotions ressenties par la mère Deux participantes ont évoqué d’ellesWmêmes le sentiment d’avoir été respectée dans leur choix, dans un contexte de bienveillance, et deux ont décrit avoir ressenti avoir confiance en elles. Les autres ne se sont spontanément pas exprimées sur ce point. A l’inverse, deux participantes ont évoqué un sentiment de scission avec les autres et ont ressenti de l’incompréhension par rapport aux remarques qu’elles avaient reçues. Les sentiments de tristesse et de déception ont été ressentis par trois mères. Quatre participantes ont évoqué du découragement, de la lassitude, de la déprime, de l’épuisement et de l’impuissance en entendant les remarques de leur entourage, comme par exemple Flo qui confiait LW247 « j’étais épuisée (…) et découragée ». Dans le même sens, quatre des participantes ont connu, à la suite de ces remarques, un sentiment d’infériorité, ou bien se sont senties dévalorisées, comme Lisa LW59W61 « je me suis dit que c’est ma belleRmère qui réussissait mieux que moi et qu’il fallait peutRêtre que je change quelque chose », ou Mu LW112W113 « je trouvais cela tellement dégradant et humiliant pour moi. Comme si les gens savaient mieux que moi ». De plus, la moitié des mères interrogées parlent de solitude.