Vous devez bien comprendre avant d’apprendre
Avant de vouloir retenir un texte, un sujet quelconque de français, d’histoire, de géographie ou de sciences, vous devez d’abord en faire l’analyse et en comprendre la signification exacte dans ses moindres détails.
Quand vous vous trouvez en face d’un morceau que vous devez mémoriser, votre premier travail doit être de vous rendre compte de l’architecture du morceau, de retrouver le plan de son exécution, de chercher le chemin qu’a suivi l’auteur, de voir par où il a passé, où il a tendu; de se dessiner, pour ainsi dire à soi-même, l’ordre des idées, car cet ordre est une sorte de cadre où viennent naturellement se ranger à leur place toutes les images, tous les mots, de façon qu’ils restent nettement fixés dans le souvenir.
Les formules scientifiques délicates, les passages difficiles, les mots obscurs seront éclairés et précisés par le recours à des ouvrages adéquats suffisamment explicites, par l’interrogation de moteurs de recherche sur le web et par l’usage du dictionnaire qui doit être toujours à la portée de la main. Avec Chapelain vous pouvons le considérer à juste titre « comme le trésor et le magasin des termes simples et des phrases reçues ». II enseigne avec précision, stimule votre curiosité, éclaire votre jugement, enrichit et fortifie votre pensée tout en vous faisant souvent mesurer l’étendue de votre ignorance.
Les lieux géographiques de tout genre, les montagnes, les rivières, les villes, etc., seront repérés sur un atlas comme par exemple www.3datlas.com.
Pour retenir facilement une suite de faits historiques, vous chercherez à déterminer les rapports naturels qui ont existé entre eux. N’apparaissant plus isolés et s’enchaînant en une série de causes à effets, leur mémorisation sera d’autant plus sûre et solide que vous aurez eu recours au jugement et à la raison.
Nous précisons plus loin ces différents points.
Utilisez les lois psychologiques de la mémoire
La plus importante des lois mnémoniques, parce qu’elle conditionne la conservation des images, a trait à la vivacité de l’impression et de la sensation premières. Vous retenez facilement un spectacle, un fait, une lecture, une notion qui ont suscité une sensation forte. Son acuité peut provenir de l’émotion qui l’accom-pagne ou de l’attention qu’elle nécessite.
Si vous n’êtes pas toujours maîtres de la première condition, vous l’êtes de la seconde. Autrement dit vous pouvez accorder la plus grande attention au texte ou au sujet que vous désirez fixer dans votre mémoire.
Cette démarche de l’esprit peut se faire en deux temps:
« Quand je lis un livre dont j’ignore la valeur écrit Jules Payot, il se passe en mon attention l’analogue de ce qui se passe dans mes muscles lorsque je franchis un pont de neige douteux sur la crevasse d’un glacier: je n’appuie pas. Je ne marche pas franchement, délibérément. De même, je lis « du doigt ». De la sorte, la marque laissée dans la mémoire est si faible que quelques heures suffisent à l’effacer. Parfois même, comme dans la lecture du journal, je ne puis rien retrouver quelques moments après. La plupart des conversations banales, des observations et des lectures sans valeur se dissipent comme du brouillard au soleil.
«J’ai acquis de la sorte une précieuse faculté d’oubli volontaire dont je conseille aux jeunes gens de faire les frais. Il n’y faut que de la volonté et de l’habitude. Cette faculté donne le privilège de ne rien retenir du premier coup, et, par conséquent, de ne pas être encombré de souvenirs du hasard. Ce que j’entends, ce que je vois, ce que je lis glisse à l’oubli si je ne retiens pas par un acte d’attention redoublé, donc voulu. Je puis lire sans rien retenir quand je n’ai pas accordé ce redoublement.
« Pour que je retienne une chose, il faut, maintenant que l’habitude est prise, que je veuille la retenir et que je lui accorde un retour d’attention. Tout ce que je ne fixe pas par ce retour volontaire d’attention disparaissant, je fais une immense économie de force nerveuse, car je ne retiens que ce qui m’intéresse, que les observations et les expériences de valeur. »
L’attention sera facilitée, et, du même coup, l’impression renforcée, par l’établissement de plans, de résumés simples et précis, par l’exécution de schémas, l’examen d’illustrations et de photographies, notamment sur le web, se rapportant au sujet étudié.
Savoir lire pour retenir, c’est tout un art
Aux judicieux conseils donnés par Jules Payot, vous en ajouterez quelques-uns car la lecture joue un rôle de premier plan. Elle vous permet, en particulier, de combler le fossé qui existe entre la connaissance et l’action et d’améliorer de ce fait votre comportement individuel. D’autre part, elle vous donne le moyen, tout spécialement en ce qui concerne les disciplines scientifiques, d’entrer en contact avec des réalités qui s’installent chaque jour davantage aux carrefours de la pensée.
Sans doute, à notre époque, la radio et la télévision ont retiré au livre l’un de ses rôles essentiels qui est d’apporter la connaissance.
Mais l’écrit présente un avantage considérable sur l’audiovisuel car il est le véhicule indispensable à la réflexion. A l’encontre des informations audio-visuelles, qui sont plus ou moins passivement « reçues », la lecture représente un moyen « actif » de connaissance. Elle provoque généralement la mise en oeuvre des meilleures facultés intellectuelles: la concentration, l’attention active, la compréhension, la confrontation de la pensée de l’auteur avec votre propre pensée de sorte qu’elle peut être l’occasion privilégiée d’une rencontre entre deux solitudes. Nourriture cérébrale, elle participe aussi au développement de la personnalité.
La confrontation régulière avec l’expression d’intelligences indiscutées, avec des connaissances nouvelles engendre la culture; la mémoire s’enrichit et groupe ses acquisitions, le caractère se précise par le choix constant que propose l’esprit critique, l’imagination s’abreuve aux sources littéraires. Pour bien comprendre la pensée politique, économique, sociale, littéraire, scientifique, philosophique et morale, il faut la lire, et, en l’occurrence, le livre, notamment sous la forme d’eBook, a un avenir plus glorieux encore que son passé puisqu’il peut maintenant se limiter à ce qu’il a de plus noble.
A ce point de vue, et sans prôner pour autant une littérature édifiante ou béatement optimiste, évitez de lire les oeuvres médiocres, les ouvrages d’aigris et de mécontents, qui développent l’anxiété, et qui, de ce fait, sont dangereux pour votre équilibre mental et votre paix intérieure, alors qu’il y a tant d’œuvres splendides et réconfortantes.
Devant les titres prometteurs, devant les alléchantes « bandes de lancement », ayez le courage de vous demander: «Ces livres valent-ils la peine d’être lus ? » Soit par vanité, soit par folle ambition de se tenir au courant et d’« être à la page », soit plus souvent encore par curiosité passionnée et dévorante, ne vous jetez pas comme un affamé sur n’importe quel livre qui « vient de paraître ». Laissez-le vieillir et faire ses preuves. Dans quelques mois peut-être vous n’entendrez plus parler de ces ouvrages qui, à un moment donné, « ont fait fureur »; alors vous pourrez lire en toute sécurité les 2 ou 3 qui surnageront.
D’un point de vue un peu différent, et sans vouloir affirmer dogmatiquement que « tout est dans tout », il est néanmoins permis de dire que dans les oeuvres éminentes et accomplies, dans ces livres qui ont subi l’épreuve du temps et que l’on peut qualifier de « royaux », les grands écrivains, les philosophes et les moralistes de génie ont tout vu, tout senti et tout dit, de sorte que les auteurs de second plan ne font que les imiter ou les démarquer. Dès lors, ne vaut-il pas mieux préférer les originaux aux copies, puiser à la source pure plutôt que de s’abreuver aux maigres et parfois troubles ruisseaux qui en découlent ?
Abandonnez aussi ces auteurs obscurs et quelquefois incompréhensibles parce que vagues et confus, ceux qui déforment le réel pour paraître subtils, profonds ou raffinés, ou encore ceux qui, par snobisme, sont des abstracteurs de quintessence. Autrement dit, délaissez ces fabricants de nuages de fumée, ces précieux, ces Trissotin pour qui nulle oeuvre ne mérite crédit si elle n’est hermétique.
Ne vous laissez pas non plus piper par ces « prix littéraires », de notoriété et de qualités douteuses, qui distinguent un livre parmi des dizaines d’autres qui le valent et qui le propulsent ainsi vers de hauts tirages alors que les ouvrages délaissés restent dans l’obscurité. Ni par certains « Mémoires » plus ou moins suspects que l’on fait « mousser » comme s’il s’agissait d’une lessive ou d’un savon de qualité et qui mettent en vedette une « personnalité » en vue, qu’elle soit militaire, diplomate, acteur, sportif, politicien, truand « repenti et embourgeoisé », participant à un « scandale », etc.
En tout cas, quelle que soit la nature de l’ouvrage que vous désirez examiner, jetez d’abord un coup d’œil sur la préface, parcourez la table des matières puis lisez attentivement la conclusion qui, généralement, résume les théories ou les faits exposés.
Si vous estimez que le livre mérite d’être lu, n’oubliez pas que l’art de lire se confond avec l’art de penser: il exige patience et recherche.
Ce qui signifie qu’il faut lire lentement, quitter le livre de temps en temps et méditer sur le passage que vous venez de lire.
Il faut aussi relire parce que vous n’êtes pas sûr d’avoir du premier coup compris exactement un auteur et parce qu’en relisant un texte vous y découvrez toujours de nouvelles beautés ou des idées qui vous avaient tout d’abord échappé.
Au cours de la lecture, vous soulignerez les passages clés et vous les numéroterez dans la marge puis vous les classerez par sujets sur la page de gauche. Vous les recopierez ensuite dans un fichier informatique ou à la main sur une fiche bristol. Vous reprendrez la fiche chaque fois que vous aurez besoin d’une citation ou d’une idée sur ce qu’a dit l’auteur. Cet index vous donnera le numéro de la page et avec cette annotation vous pourrez reprendre un livre que vous n’avez pas lu depuis des années.
Commencez donc cette bonne habitude tout de suite avec le présent texte.
Sélectionnez les phrases-clés et rangez-les dans un fichier d’un coup de copier-coller.
Enfin, s’il vous arrive de lire un ouvrage de médiocre qualité, ce n’est pas grave, car «il n y a pas de mauvais ouvrage où il n’y ait quelque chose de bon » (Goethe). Au surplus, vous pouvez tirer du profit à lire un livre mal écrit, mal pensé ou insignifiant si vous savez en relever les imperfections.
Recherchez la netteté, la précision et l’ordre
Le grand ennemi de la mémoire est la confusion. Les auxiliaires les plus puissants sont la netteté, la précision et l’ordre.
Ne cherchez donc pas à appréhender un grand nombre de notions à la fois et celles que vous maintiendrez à la lumière de l’attention seront bien précises et réduites à l’essentiel. Vous en éliminerez les menus détails de façon à les présenter à l’esprit sous la forme d’idées générales. Celles-ci soulagent la mémoire parce que, sous une représentation unique, un seul mot, une seule formule, une seule phrase, elles embrassent une multitude de faits particuliers. Notez au passage que toute la publicité est basée sur ce principe: pour être retenus, les slogans et les noms de marque doivent être présentés sous des formes simples et précises.
En outre, l’ordre est le besoin le plus impérieux de l’esprit; la mémoire, en particulier, ne peut s’en passer. Grâce à l’ordre, elle retient sans peine, porte légèrement et retrouve à volonté une quantité incroyable d’idées et de faits; sans ordre, elle succomberait sous un fardeau mille fois moindre. Cela est si vrai qu’à défaut d’ordre rationnel les procédés mnémotechniques, dont vous parlons dans la dernière partie, offrent un ordre conventionnel plus ou moins artificiel. Mais il n’y a d’ordre véritable que l’ordre logique. Vous ordonnerez donc les idées générales et les idées secondaires rationnellement, c’est-à-dire hiérarchisées et reliées entre elles par des liens logiques. Tel est le moyen de faire que votre esprit soit bien plein sans cesser d’être bien fait, d’être rempli sans être encombré, et contienne beaucoup sans porter en lui aucun poids mort.
Ce qui n’empêche que chacun a sa mnémotechnie personnelle et ses petits procédés plus ou moins ingénieux pour grouper ses souvenirs et les faire revenir fidèlement à la conscience. Ainsi, il est utile, dans l’exercice de la mémoire courante, d’établir des «jalons », des « points de repère » bien choisis et de grouper autour d’eux tous les souvenirs connexes ou subordonnés.
Pour situer par exemple dans le temps un souvenir indécis un peu vague, vous pouvez le faire osciller, sur la ligne du passé, entre deux points de repère; vous le rapprocherez de l’un, vous l’éloignerez de l’autre et vous le daterez par comparaison avec l’un d’eux. Vous pourrez dire : « Le fait s’est passé une semaine après les vacances, 15 jours avant la maladie de mon frère, la veille de tel événement important, etc. » Vacances, maladie, événement marquant sont des points de repère datés avec précision et exactitude; ils peuvent servir à localiser et à dater d’autres souvenirs.
Une démarche analogue de l’esprit peut être employée en histoire pour dater un événement déterminé.