LA REINSERTION SOCIALE DES MALADES
MENTAUX
Revue critique de la littérature
Pour notre travail, nous avons eu à consulter un certain nombre d’ouvrages concernant la situation des malades mentaux en général. Premièrement, nous avons eu recours à la documentation électronique sur Internet pour avoir des informations sur les sociologues qui se sont intéressés à la maladie mentale. Parmi les principaux ouvrages que nous avons sélectionnés en guise de bibliographie, ceux qui traitent spécialement de notre sujet sont : l’ouvrage de . Celui-ci comporte onze études qui traitent de la folie selon différentes approches : historique, sociologique, anthropologique, philosophique, psychopathologique et psychiatrique. Avec cet ouvrage, nous remontons l’histoire de la « folie », depuis sa première apparition dans la colonie sénégalaise jusqu’à maintenant. Ce livre reconsidère les connaissances sur la folie, qu’elles soient traditionnelles ou modernes. Il fait aussi une analyse du contexte sociohistorique et des conduites collectives et individuelles, ainsi que les différents traitements des troubles mentaux. L’ouvrage ne s’intéresse pas seulement à la folie, mais est, tout de même, indispensable pour une étude en santé mentale au Sénégal. En effet, à la lecture de cet ouvrage, nous nous rendons compte que la connaissance des troubles affectifs n’est pas exclusivement du domaine psychiatrique. Cette dernière doit aussi se référer à des données sociologiques. La folie n’est pas le domaine réservé des psychologues et des psychiatres. Cet ouvrage s’intéresse aussi à la pratique psychiatrique, aux réactions, aux attitudes, mais aussi, aux causes sociales et culturelles autant qu’individuelles et collectives de la folie. Nous avons aussi consulté deux ouvrages d’Erving Goffman (1922-1982) intitulés ASILES10 et STIGMATE .Dans le premier ouvrage, l’auteur réalise une étude célèbre au sein d’un hôpital psychiatrique, afin de saisir la manière dont l’identité sociale des malades se transforme au sein d’une « institution totale », qui vise à remodeler entièrement la personnalité. Du point de vue sociologique, nous étudions le rapport entre patient et psychiatre. Voir comment ces rapports aident le malade à se rétablir ou l’enfoncent dans son mal. Dans les hôpitaux psychiatriques, la maladie est institutionnalisée dans un espace qui aliène de plus en plus les malades. Souvent, l’enfermement et les conditions de vie au sein de ces hôpitaux ne favorisent guère la guérison des malades. L’enfermement et la séparation totale des hôpitaux de l’extérieur, marginalisent les patients. Tel est aussi le cas des détenus dans le milieu carcéral. Cet ouvrage nous renseigne sur les réalités des conditions de vie sociale des malades et autres reclus. Il nous renseigne aussi sur les rapports entre internés mais aussi entre internés et soignants. Nous avons aussi, un aperçu sur l’organisation de la vie quotidienne des internés, aussi bien dans les hôpitaux psychiatriques, que dans le milieu carcéral. Dans son ouvrage STIGMATE, l’auteur ne parle pas uniquement des personnes atteintes de troubles psychiques mais de toutes les personnes qui souffrent d’un stigmate physique ou mental. D’ailleurs, c’est dans cet ouvrage que nous arrivons à voir les interactions sociales entre les personnes stigmatisées et celles qui ne le sont pas. Dans cet ouvrage, Goffman analyse les stigmates, c’est-à-dire les attributs discriminants qui jettent le discrédit sur quelques catégories de personnes, dans la dynamique de la relation à autrui. Des lignes de démarcation sont utilisées par la société pour séparer les discriminés ou les discriminables (selon que le stigmate est visible ou non) des « normaux ». Goffman en souligne les conséquences sociales tant pour les uns que pour les autres. En effet, par nos comportements, souvent discriminatoires, nous réduisons efficacement, même si c’est souvent inconscient, les chances de réinsertion des stigmatisés. A la bibliothèque de la Clinique Moussa Diop de l’Hôpital Fann, nous avons consulté de nombreux ouvrages aussi intéressants les uns que les autres, parmi lesquels une revue intitulée : , présentée en volumes, sous la direction de René Collignon qui a publié de nombreux travaux sur les troubles psychiques. La Psychopathologie Africaine est fondée par la société de Psychopathologie et d’Hygiène de Dakar, en 1965. Cette revue est largement ouverte aux autres disciplines des sciences humaines : Psychologie, Sociologie, Ethnologie, Anthropologie afin de mieux appréhender et de mieux comprendre les comportements pathologiques (ou normaux) de l’homme africain. Les vol XIII, n°3 (1977) et XIV, n°2,3 (1978) nous ont été d’une grande utilité. A la lecture du premier volume, nous nous sommes renseignée sur les phénomènes surnaturels, souvent cités à l’origine des troubles mentaux. Nous comprenons mieux, les relations qui existent entre esprits invisibles (djinns, rabs, sorciers anthropophages etc.) et troubles mentaux. Le deuxième volume, nous a surtout renseigné, sur l’évolution de la Psychiatrie au Sénégal, en Afrique noire en général. Nous avons aussi beaucoup appris sur les conditions de prise en charge des malades mentaux à l’Hôpital Fann. Nous avons consulté divers ouvrages, revues, interviews, etc. sur la maladie mentale afin de mieux aborder notre sujet. Le quatrième ouvrage que nous avons sélectionné est intitulé : de François Laplantine. Le contenu de cet ouvrage est basé, en particulier, sur une étude faite au sein d’une communauté ethnique d’Afrique de l’Ouest. Il parle, en particulier, de la maladie mentale au sein de la communauté Baoulé en Côted’Ivoire. Cependant, il étudie, parallèlement, des connaissances originales africaines qui ne doivent rien au « savoir » médical de l’Occident. Il existe en Afrique, des psychiatries culturelles, c’est-à-dire des psychiatries qui mettent en relief les cultures dans le traitement des troubles mentaux. Ceci revient à dire qu’il existe des troubles qui sont particuliers à certaines ethnies, mais aussi selon les sous cultures. A la lecture de ce livre, nous nous rendons compte qu’en Afrique et partout ailleurs, l’on tombe malade selon des modèles culturels et que les traitements requièrent souvent de ces modèles. Ceci pour dire que toute psychiatrie est ethno-psychiatrique. Ce livre nous a permis de mieux saisir la conception de la maladie mentale en Afrique traditionnelle, mais aussi le traitement traditionnel des troubles mentaux en Afrique face au traitement moderne.
Définitions de certains termes utilisés
Comme le dit Emile Durkheim : avant de chercher quelle est la méthode qui convient à l’étude des faits sociaux, il importe de savoir quels sont les faits que l’on appelle ainsi14. Afin de respecter cette règle, nous commencerons par définire les termes clés que nous allons utiliser. Ces définitions sont tirées du Dictionnaire de Sociologie de Gilles Ferréol, du Dictionnaire de l’Ethnologie et de l’Anthropologie de Pierre Bonte et de Michel Izard, du Dictionnaire de Sociologie du Robert, Seuil, mais aussi du Dictionnaire de la Psychologie de Norbert Sillamy. Certaines définitions sont tirées de certains de nos ouvrages sélectionnés comme La Folie Au Sénégal, La Folie de la collection Que Saisje ? Dans la mesure où notre sujet s’intéresse à la santé mentale en général, nous commencerons par définir la santé. Pour les sociétés comme pour les individus, la santé est bonne et désirable. La maladie, au contraire, est la chose mauvaise qui doit être évitée. L’organisation mondiale de la santé définit la santé comme suit : « Etat de parfait bien-être physique, mental et social ». Dans le dictionnaire de Sociologie du Robert, Parson y définit la santé de la manière suivante : la santé apparaît de la manière la plus immédiate, comme une des conditions requises du fonctionnement de tout système social […]. Un trop haut niveau de maladie, un trop bas niveau de santé apparaissent comme dysfonctionnel par rapport au fonctionnement du système considéré15. Pendant des millénaires, la maladie représenta une punition divine infligée pour faute morale ou religieuse. Hippocrate fut le premier à considérer la maladie comme étant un phénomène naturel. Si la santé est un état de parfait bien-être psysiologique et biologique, la maladie est la rupture de cet équilibre provoquée soit par une lésion soit par un trouble fonctionnel, selon les cas, les maladies sont dites « organiques » ou « fonctionnelles » 16. Dans un premier temps, la maladie nous empêche de mener à bien nos rôles sociaux. Un sujet accède au rôle social de malade par la reconnaissance de son incapacité involontaire à remplir ses fonctions sociales habituelles. Dans le Dictionnaire de la Psychologie de Norbert Sillamy, la maladie est définie comme étant, l’ altération de la santé par suite de l’incapacité du corps à utiliser ses défenses organiques contre une agression extérieure ( traumatisme, toxi- infection, etc.) ou pour résoudre ses conflits psychologiques. La maladie peut satisfaire certaines personnes qui y trouvent des avantages appréciables (dégagement de responsabilité). Dans le cas des névroses, il n’est pas rare de voir des sujets interrompre leur traitement quand ils prennent conscience qu’en guérissant, ils perdront les avantages qu’ils avaient lorsqu’ils étaient malades. Concernant le terme de la Folie, nous n’avons pu trouvé de définition sociologique, ni anthropologique. Les définitions que nous avons, sont tirées du Dictionnaire de la Psychologie et de certains de nos ouvrages que nous avons consultés. Dans les disciplines sociologique et anthropologique, les termes « maladie mentale » ou « aliénation mentale » sont les plus utilisés. Jaccard Rolland définit la folie dans son livre intitulé : la folie, (collection Que sais je ?) comme, celle qui saisit l’être et le rend à lui même étranger. Celle qui est angoisse, douleur, sentiment de déréliction. La folie a été longtemps et continue d’être vue uniquement sur le registre du négatif. Elle a toujours été associée à la sorcellerie, à la possession et au péché. Les progrès des sciences et des techniques restent sans effet sur les liens étroits unissant folie et sorcellerie. Les discours savants sur la folie décrivent le plus souvent le « fou », non seulement comme un raté de la forme personnelle, c’est-à-dire une personne anormale, mais aussi, comme un raté du groupe (tant du groupe familial que de la collectivité tout entière) dont il constitue le « bouc émissaire ». Dans le Dictionnaire de la Psychologie, la folie est définie comme étant : un trouble de l’esprit, la déraison. La déraison a été convertie par la Psychiatrie moderne en « maladie mentale ». Dans le Dictionnaire de la Sociologie, l’aliénation est définie comme le destin de « conscience malheureuse ». C’est le « négatif à l’état brut », l’oublie de soi dans l’autre, le devenir étranger. Chez Hegel, le concept d’aliénation est polysémique. Toujours chez Hegel19, l’aliénation a d’abord le sens de l’« extranéation ». L’expression évoque la négation, moment premier de la conscience, mais aussi la réconciliation de l’être avec lui même. Le concept d’Aliénation mentale s’est imposée, avec Pinel, philosophe et docteur, aux dépends de l’ancienne notion de folie, vaste et imprécise. En affirmant que l’aliénation mentale était une maladie, il a permis son entrée dans le champ de la pathologie. Le trouble mental passe ainsi du registre de la folie à celui de l’aliénation. Dans le Dictionnaire de la Psychologie, l’aliénation mentale est définie comme un trouble de l’esprit qui rend la vie sociale impossible. La réinsertion sociale est une composante du processus de réadaptation qui suppose luimême le traitement et le retour réussi au milieu régulier, l’adaptation nouvelle à des conditions disparues qui redeviennent actuelles, à de nouvelles conditions20. Il s’agit, en fait, de rétablir un équilibre rompu par l’incapacité d’un être à vivre dans la société. Dans le Dictionnaire de la Psychologie, la réinsertion est définie comme étant, le retour progressif à un mode de vie normale. En ce qui concerne les malades mentaux, on favorise leur réinsertion sociale en les plaçant dans des foyers et des ateliers protégés. La réinsertion correspond à la prévention qui vise à rétablir un malade, après sa guérison, dans des conditions de vie aussi normale que possible. Ces conditions sont à la fois physiques, sociales et mentales. Le terme famille, dans sa définition classique, désigne un couple, un homme et une femme, et leurs enfants résidant ensemble. Nous avons la définition d’Andrée Tahon pour qui la famille représente une unité de personnes en interaction, chacune occupant une position à l’intérieur de la famille, définie par un certain nombre de rôles. Dans le Dictionnaire de la Sociologie de Gilles Ferréol, la définition de la famille n’y apparaît pas clairement, ce qui est plutôt défini, c’est la Sociologie de la famille. Cependant, dans celui de la Psychologie, la famille est définie comme : un ensemble d’individus unis par les liens du mariage, du sang ou de l’adoption, qui vivent ensemble sous un même toit ou, s’ils sont séparés, qui se reconnaissent un foyer commun24. Dans La Famille Wolof, A. – B. Diop en donne une définition qui intègre tous les membres d’une famille élargie vivant dans une même concession, dont le mâle le plus âgé est le chef de famille. D’après l’auteur, la famille rurale wolof, est, non seulement un cadre de vie, mais une organisation socio-économique. Une cellule de production et de consommation dans l’économie agricole de subsistance, d’où son importance en milieu traditionnel. C’est en son sein, que s’établissent les relations sociales les plus permanentes et les plus étroites entre parents et alliés. La cohérence de la famille est un facteur important dans l’évolution ultérieure de ses membres. On a montré, en effet, la relation positive qui existe entre l’alcoolisme, la maladie mentale, la délinquance et la dislocation familiale. Nous ne pourrons clore cette partie, sans définir le terme de maladie mentale. La maladie mentale est définie, dans la partie introductive de l’ouvrage des chercheurs du Sénégal, comme étant un trouble de la relation (conflit avec soi-même, conflit avec les instances éducatives, conflit avec les référents socioculturels) qui influence la souffrance (et ses différentes formes d’expression) individuelle ou qui fait souffrir les autres.
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