La rationalisation des activités sociales d’après Max Weber (1864-1920)

La rationalisation des activités sociales d’après Max Weber (1864-1920) fiche bac n°1 2005-2006

Introduction: Point commun entre le taylorisme et la musique classique ?
Pour Max Weber, ce sont deux exemples de la rationalisation des activités humaines. Le taylorisme est un moyen efficace (rationnel) de produire tandis que la musique classique est un exemple poussé de formalisation (système de règles explicites encadrant une activité) de la musique (orchestre, instruments, système de notation, types musicaux : opéra, symphonie, musique de chambre).
Max Weber est un sociologue allemand qui analyse les sociétés modernes à partir d’un principe dominant, la rationalité. En cherchant ce qui distingue la société occidentale des autres, et pourquoi le  capitalisme s’y est développé de façon précoce, Weber montre l’importance du mouvement de rationalisation dans la plupart des activités humaines (religion, science, économie, travail etc.)

L’analyse de Max Weber
 
Le processus de rationalisation
 
La méthode de Max Weber
 
-La démarche sociologique de Max Weber est fondée sur une méthode compréhensive et interprétative. En effet si l’on veut comprendre les comportements humains, il faut deux conditions, d’une part essayer de se mettre à la place de l’acteur (phase compréhensive) afin de comprendre son point de vue et d’autre part postuler que les actions réalisées ont un sens ce qui permet de les interpréter (explication).
-Une action sociale (but de la sociologie) est donc une activité orientée significativement vers autrui (Ex: tentative d’un automobiliste d’éviter un passant) et peut-être expliquée à travers quatre idéaux types: doc.1p18 (Bordas)
Rationalité en finalité : On choisit les moyens les mieux adaptés pour réaliser un objectif (confrontation des moyens et des fins) Ex: Comparer les différents taux de rémunération que proposent les banques afin de placer de l’argent. On peut assimiler cette rationalité à l’efficacité et au calcul, ce qui la rapproche de la rationalité des néo-classiques qui s’appuie sur un raisonnement coûts-avantages.
Rationalité en valeur : L’action sociale se justifie par une référence à des valeurs ou à des convictions  sans pour autant tenir compte des éventuelles conséquences de l’action. Ex: Risquer sa vie en duel par sauver son honneur
L’activité traditionnelle :  La réaction s’explique par l’habitude ou la coutume Ex: Achat quotidien de pain
L’activité affectuelle  : La réaction est liée à des sentiments ou de l’émotion Ex: geste d’énervement
 

La rationalisation des activités humaines

document 4p504 (Hachette)
La rationalisation est l’application du principe de la rationalité (en finalité) à l’ensemble des activités humaines (le droit, la religion, le travail, la musique, l’organisation du travail, la politique, la science). Plus généralement cela signifie que l’ensemble des activités sociales se détachent de l’influence du sacré et de la tradition pour suivre des règles d’efficacité et de calcul (autonomisation), ce qui entraîne une spécialisation plus poussée des activités sociales (le droit devient une discipline détachée de la religion puis se divise en droit civil et droit pénal ou droit public et privé etc, idem pour la médecine (chirurgie, dermatologie, rhumatologie, radiologie etc;)
-La diffusion de la science donne l’impression à l’individu que toute chose peut être expliquée « rationnellement » (ex : fonctionnement d’un train), ce qui élimine la part de mystère et de magie dans la vie quotidienne. Ceci entraîne le « désenchantement du monde », la science en supprimant les croyances anciennes et en démystifiant le monde laisse l’individu sans réponse sur le sens de la vie. (d2p18, Bordas)
 
L’esprit du capitalisme ou le rôle des valeurs rationnelles
 
-Comment peut-on expliquer que c’est en occident que le capitalisme a connu son développement le plus important ? Le capitalisme est avant tout défini comme une recherche systématique du profit grâce à l’utilisation rationnelle de moyens de production. C’est en cherchant à obtenir plus de gains que le capitaliste va peu à peu rationaliser son activité en choisissant par exemple d’accumuler du capital, de diviser le travail (cf.Taylorisme) ou d’améliorer sa gestion (comptabilité, contrat de travail, statut des sociétés). D3 et 4 p19 (Bordas)
-De plus la mise en œuvre du capitalisme se fait dans un univers juridique de plus en plus formalisé qui contribue à réduire l’incertitude et les aléas des échanges économiques (droit du travail, droit social, droit commercial, statut juridique des sociétés, tribunaux de commerce, prud’hommes, droit de la concurrence etc.)
-Pour Max Weber, l’apparition de cet « esprit capitaliste », méthodique et inspiré par le calcul est à mettre en parallèle avec les valeurs* de la religion protestante de l’époque (renaissance) qui ont favorisé la rationalisation de l’activité économique. D’une certaine manière l’éthique protestante a été une condition favorable (mais non unique) au développement du capitalisme d5p20 (Bordas)

  • *[L’ascétisme, le travail comme vocation, la recherche du salut]

La bureaucratie, une forme de domination rationnelle
 
-La bureaucratie est un autre exemple de l’extension du principe de rationalité. Il s’agit d’une forme d’organisation supérieure aux autres en raison de son efficacité et qui repose sur plusieurs règles : les différentes tâches sont spécialisées et séparées (comme dans la division du travail), le pouvoir est fondé sur la compétence (recrutement par concours), les  règles sont impersonnelles et les fonctions sont hiérarchisées. NB: La bureaucratie concerne aussi bien les administrations publiques que les grandes entreprises. D7p21 Bordas
-Mais ce qui explique la supériorité de la bureaucratie sur les autres organisations, c’est sa justification : elle est basée sur une domination légale-rationnelle. Sa légitimité  (ce qui justifie ses actes) provient non de la coutume (domination traditionnelle) ou de la personnalité d’un dirigeant (domination charismatique) mais de la loi.6/20 bordas à faire maison
-L’existence de règles impersonnelles et prévisibles est censée garantir sa neutralité et son efficacité, c’est pour cette raison que M.Weber était persuadé que la bureaucratie était l’organisation la plus à même de répondre aux besoins croissants du monde moderne (accroissement de la population et des échanges).

LIRE AUSSI :  LA RECHERCHE DE LA PERENNITE CONTRACTUELLE PAR LES PARTIES

Prolongements contemporains

Le cercle vicieux bureaucratique
 
-Dans les années 60, le sociologue français, Michel Crozier, reprend les travaux de Weber et montre que dans les entreprises et administrations françaises de l’époque, le développement de la bureaucratie est une réponse à certaines caractéristiques de la culture française (la peur du face à face, le désir de tout contrôler). La notion de « cercle vicieux » signifie que face à un dysfonctionnement, l’organisation a tendance à multiplier le nombre de règles, ce qui aboutit à rigidifier le système et l’empêche encore plus de s’adapter.
-De plus, l’existence de règles impersonnelles aboutit paradoxalement à des marges d’incertitude qui sont utilisées par les acteurs pour accroître leur pouvoir (en retenant l’information par exemple) au détriment des autres. Ces luttes internes pour le pouvoir allongent alors les processus de décisions et nuisent à l’intérêt général (Ex: attente plus longue des décisions de justice). La bureaucratie n’est donc pas un modèle d’organisation efficace comme le supposait Max Weber. D13p25 bordas
-On peut aussi reprendre les critiques contre le taylorisme (absentéisme, turn-over, coulage) qui montrent là encore qu’une organisation ne peut fonctionner comme une machine, les règles finissant par être inadaptées.

La mobilisation collective D10 p25 (Bordas)
 
-Le principe de rationalité en finalité a été utilisé par M.Olson dans son analyse des fondements de l’action collective. Il montre que contrairement à ce que disait Marx, l’existence d’intérêts communs ne débouche pas toujours sur une mobilisation. En effet les individus peuvent faire un calcul coûts / avantages (rationalité en finalité) et décider, puisque les avantages obtenus (hausse des salaires par exemple) ne peuvent être individualisés, de ne pas participer (phénomène de passager clandestin).
-Un autre auteur, C.Tilly montre que contrairement à ce modèle il peut exister d’autres motivations à l’action et notamment une forme de rationalité en valeur, les individus qui sont fortement intégrés dans un groupe avec une forte identité collective, sont plus enclins à l’action collective en raison de leur attachement au groupe (action d’après les valeurs du groupe). Mais ce n’est pas le seul déterminant, le contexte politique (rôle du pouvoir, nombre de partis) peut influencer l’action..

Les critiques de la rationalité D8p22 Bordas
 
-Pour H.Simon, l’analyse de la prise de décision dans les grandes organisations montre que la plupart de décisions ne sont pas prises selon le principe de rationalité en finalité (ou selon un raisonnement coût avantages).
-En effet, la plupart des individus ne disposent pas de l’ensemble des informations leur permettant de choisir la solution (ou méthode) la mieux adaptée à l’objectif. De plus l’individu n’a pas la capacité de traiter toute l’information dont il dispose, la maximisation n’est pas possible. C’est donc plutôt par tâtonnement que les individus vont agir en prenant la solution la plus satisfaisante (et non la plus optimale). Il s’agit donc d’une rationalité limitée ou procédurale qui se différencie de la rationalité en finalité de Max Weber.

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