LA QUESTION DE L’ÉDUCATION DANS LE TRAITÉ DE PÉDAGOGIE DE KANT
LES DIFFERENTES ETAPES DE L’EDUCATION
Chez Kant l’éducation ne se fait pas du jour au lendemain. En effet, le philosophe de Königsberg identifie deux grands moments dans le processus éducatif : l’éducation physique et l’éducation morale. Il est important de souligner d’emblée que chez l’homme de Königsberg la notion d’éducation physique englobe à la fois l’éducation du corps et celle de l’esprit. Ainsi par éducation physique Kant entend aussi bien l’éducation du corps que celle de l’âme ou de l’esprit. C’est ainsi qu’il affirme lui-même que : « on peut d’une certaine manière nommer physique la culture de l’âme aussi bien que celle du corps 32 ». Dans cette phrase Kant utilise le terme « âme » pour parler de l’esprit. Et cela nous conduit à déduire que le philosophe considère que le terme « âme » et le mot « esprit » comme des synonymes. Par conséquent lorsqu’il parle de la culture de l’âme il pense à la culture de l’esprit. Kant fait remarquer que la culture du corps et la culture de l’esprit ont pour point commun de s’occuper de la nature de l’homme alors que le deuxième grand moment de l’éducation c’est-à-dire l’éducation morale s’évertue à fournir à la liberté des lois. Par conséquent si l’éducation physique cherche à ajouter quelque chose à la nature de l’homme, l’éducation morale elle cherche à rendre l’enfant sensible non pas à la voix du maitre comme cela se fait avec la discipline dans l’éducation physique, mais à la voix de la raison pratique. Ainsi on remarque une différence sensible entre ces deux grands moments de l’éducation. Car si dans le premier grand moment l’enfant est sous le joug de la discipline, dans le deuxième grand moment c’est-à-dire dans l’éducation morale l’enfant est affranchi de cette domination absolue du maitre pour enfin exercer une liberté qui est sienne suivant les recommandations de la raison. L’hétéronomie dans laquelle se trouve l’enfant au départ doit progressivement céder la place à une autonomie à la fois morale et intellectuelle. En effet, pour Kant la véritable éducation est celle qui réussit à faire en sorte que l’enfant puisse penser par lui-même et se guider lui-même sans un directeur de conscience. Ce qui fait que lorsque le philosophe affirme que l’enfant doit se soumettre à une discipline, il ne le dit pas par simple désir de domination mais plutôt parce qu’il veut que l’enfant se départisse de sa sauvagerie qui renvoie, selon lui, à une certaine indépendance vis-vis de la loi. On peut donc dire que dans l’éducation physique, le maitre confisque la liberté de l’enfant et prend la direction de la volonté pour lui désigner quoi dire et quoi faire. Mais qu’est-ce que la volonté ? Selon Kant la volonté est « une faculté de se déterminer soi-même à agir conformément à la représentation de certaines lois. Et une telle faculté ne peut se rencontrer 32 Kant, Réflexions sur l’éducation, traduit, introduit et annoté par A. Philonenko, Paris, Vrin, 2018, p.146. 15 que dans les êtres raisonnables 33». Par conséquent suivant Kant les animaux n’ont pas de volonté dans la mesure où ils ne sont des êtres dotés de raison. Alors qu’est-ce qui guide l’animal ? En effet, Kant considère que c’est l’instinct qui dicte à l’animal son plan de conduite alors que l’homme est dépourvu d’instinct il n’a que sa raison pour se guider34 . Pour en revenir à la discipline il est important de souligner que chez Kant l’enfant dans le premier grand moment de l’éducation, n’est pas tout à fait libre dans la mesure il ne se détermine pas à agir suivant la loi pratique puisqu’il est sous l’autorité du maitre qui lui dicte la conduite à tenir. Il semble donc que Kant considère que la liberté est un bien si précieux que le maitre ne doit point s’aventurer à la laisser entre les mains d’un être dont la raison n’est pas encore assez développée et dont le cœur aussi n’a pas été purifié par la discipline. Ainsi la discipline en arrachant la sauvagerie naturelle de l’enfant joue le rôle de purification telle sorte que l’on peut dire avec Kant que l’enfant qui n’a pas été soumis à la discipline ne sera jamais libre à l’âge adulte. Car ses dispositions sauvages vont régner en maitre dans l’univers de sa volonté. Comme l’affirme Kant en ces termes : « Cependant l’homme, par nature, a un si grand penchant pour la liberté, que, s’il commence par s’habituer à elle quelque temps, il lui sacrifie tout. C’est pourquoi, comme on l’a dit, il faut avoir très tôt recours à la discipline, car s’il n’en est pas ainsi, il est par suite très difficile de transformer l’homme : il suivra alors tous ses caprices35 ». Ainsi il est nécessaire de soumettre l’enfant à une discipline sinon il risque d’être sous la domination de ses désirs aveugles auxquels justement la discipline est censée le purifier. Mais dans l’éducation physique le maitre, dit Kant, doit tout faire pour ne pas troubler la nature. C’est ainsi que le philosophe considère que dans l’éducation intellectuelle le maitre doit toujours tenir compte de la capacité mentale de l’enfant. Sinon il risque de prêcher dans le désert. C’est au nom de la règle qui veut que le maitre ne bouscule point la nature de l’enfant que Kant recommande au maitre l’usage de la méthode intuitive dans l’éducation de l’esprit. En effet, la méthode intuitive est celle qui fait appel à l’observation sensible. Car partant du principe selon lequel l’enfant jusqu’à un certain âge n’est pas une certaine capacité d’abstraction. Donc pour que le maitre puisse être compris il faut que l’objet de son enseignement porte sur des choses qui sont à la portée du jeune homme c’est-à-dire sur des connaissances empiriques que l’élève peut saisir par intuition sensible.
La conception Kantienne de l’éducation
Définir l’éducation n’est pas une tâche facile dans la mesure à la question « qu’est-ce que l’éducation ? » on trouve une multitude de réponses qui sont très souvent en contradiction les unes des autres. En effet, chaque auteur définit l’éducation selon celle qu’il a reçue ou en opposition avec celle qu’il a reçue s’il trouve qu’elle est lacunaire. Cependant Kant ne fait pas partie de cette dernière catégorie car le témoignage qu’il donne sur la façon dont ses parents l’ont éduqué nous laisse croire qu’il approuve l’éducation qu’il a reçue de ses parents. Ainsi qu’est-ce que l’éducation chez Kant ? Qu’est-ce qui différencie la conception Kantienne de l’éducation d’avec celles des auteurs comme Rousseau et Durkheim ? Quelle est la spécificité de la conception Kantienne de l’éducation ? Peut-on parler d’éducation chez l’animal ? Est-il possible d’éduquer les animaux ? En effet, Kant considère que l’éducation est le propre de l’homme dans la mesure où de toutes les créatures qui existent il n’y’a que l’homme qui a besoin de recevoir une éducation pour atteindre sa destination. Pour le philosophe de Königsberg dès la naissance les animaux atteignent leur destination. Car ils sont dotés d’un instinct alors que l’homme en est dépourvu. Il est courant d’entendre dire que l’éducation vient du latin educere qui signifie faire sortir. Néanmoins Olivier Reboul considère que cette étymologie est fausse. Car selon lui le mot éducation vient certes du latin, mais d’un autre verbe, educare « qui signifie élever des animaux ou des plantes et, par extension, avoir soin des enfants37 ». Cependant le mot n’a pas conservé ce sens dans la mesure où l’action que l’on exerce sur les animaux ou les plantes n’est plus considérée comme une éducation. Ainsi on ne parle d’éducation que lorsqu’il s’agit de l’homme. Car selon Kant « l’homme est la seule créature qui doive être éduquée. 38» Donc ce concept d’éducation ne doit être appliqué qu’à l’homme qui serait selon le philosophe de Königsberg la seule créature qui a besoin d’une éducation. Cependant l’histoire du mot peut-elle nous donner une idée de ce qu’est l’éducation ? En effet, selon René Hubert avant 1527 le mot éducation n’existait pas dans la langue française et c’est en 1549 que le mot apparait dans tous les lexiques. Et à l’origine le mot désignait, comme le dit Olivier Reboul, les soins qu’on prend dans l’élevage des animaux, des plantes ou des enfants. Toutefois en 1649 on constate une restriction du terme éducation dans la mesure où l’académie française va réduire l’éducation à l’instruction des hommes. C’est dans ce sens d’ailleurs qu’elle définissait l’éducation comme étant « le soin qu’on prend de l’instruction des enfants, soit en ce qui concerne les exercices de l’esprit, soit en ce qui regarde les exercices du corps. 39» Suivant cette définition l’instruction ne renvoie pas seulement à la culture de l’esprit, mais fait aussi référence aux exercices physiques que l’on fait effectuer à l’enfant afin de donner à son corps une certaine vigueur. Cependant Olivier Reboul signale qu’au XIXe siècle l’éducation était synonyme de savoirvivre c’est-à-dire « l’adaptation aux normes de la classe « supérieure », à ses symboles, ses valeurs, ses mots de passe, mais aussi une réelle maitrise de soi ; l’homme éduqué est celui qui sait se tenir, au double sens de garder son rang et garder son sang-froid 40». De ce fait au XIXe siècle on considérait que l’éducation consistait à socialiser une jeune génération destinée à prendre la relève de celle qui l’a précédé. D’ailleurs cette idée de l’éducation comme socialisation va se retrouver un siècle plus tard dans la pensée d’un auteur comme Durkheim. Toutefois le philosophe Königsberg se démarque d’une telle conception de l’éducation. En effet, Kant considère que la mission principale de l’éducation c’est d’amener les dispositions naturelles enfouis dans l’enfant à un développement complet. Chez Kant l’éducation n’est pas synonyme d’instruction ainsi il s’oppose à l’académie française de 1649. Selon lui l’instruction fait partie de l’éducation, mais n’est pas toute l’éducation. Pour Kant « par éducation on entend, en effet, les soins (l’alimentation, l’entretien), la discipline, et l’instruction avec la formation. 41 . » Ainsi Kant identifie deux grands moments dans l’éducation de l’enfant : le moment de l’éducation physique et celui de l’éducation morale. Cependant Kant accorde à la discipline une place importante dans sa théorie de l’éducation. En effet, pour lui le maitre doit soumettre l’enfant à une discipline dont le but est d’arracher ses dispositions sauvages. Kant considère que l’enfant en naissant vient avec à une certaine sauvagerie que l’éducateur doit nécessairement dépouiller afin de faciliter l’élévation du jeune homme à l’humanité. Ainsi la discipline est nécessaire car sans elle l’homme risque de tomber dans l’animalité. Cependant Kant, Réflexions sur l’éducation, traduit, introduit et annoté par A. Philonenko, Paris, Vrin, 2018, p.93. il ne faudrait pas penser que la discipline prive l’enfant de sa liberté. Car pour Kant la contrainte que l’on exerce sur le jeune homme doit le conduire à l’usage convenable de sa liberté c’est-à-dire à l’autonomie morale. Si la discipline transforme l’animalité de l’enfant, la culture elle doit développer les facultés intellectuelles de l’enfant. Ainsi il s’agit avec la culture ou l’instruction de développer l’esprit de l’enfant. On est dans l’éducation intellectuelle ou éducation de l’esprit qui est aussi un élément de l’éducation physique. Avec la formation du caractère on est au deuxième grand moment de l’éducation. En effet, Kant considère la formation du caractère comme le moment le plus décisif dans l’éducation de l’enfant car c’est elle qui doit permettre à l’enfant d’être un homme autonome c’est-à-dire un homme qui est entièrement sensible à la voix de la raison. On est avec ce moment dans l’éducation morale qui se trouve être le dernier moment de l’éducation, mais aussi la plus importante selon Kant.
L’éducation physique
De nos jours parler d’éducation physique c’est penser plutôt aux différentes activités que l’on fait faire au corps afin de le fortifier davantage. Cependant chez Kant l’éducation physique englobe à la fois celle du corps et celle de l’esprit. Ainsi lorsque le philosophe de Königsberg parle d’éducation physique il pense à la fois à la culture du corps et à celle de l’esprit. Comme en témoignent ces propos suivants : « on peut nommer d’une certaine manière physique la culture de l’âme aussi bien celle du corps. » Chez Kant l’éducation du corps est la première étape du processus éducatif. Elle tient une place importante dans son projet éducatif. Car c’est elle qui est liée aux soins destinés à l’enfant et à la culture du corps c’est-à-dire aux différents mouvements que l’enfant effectue de façon spontanée. Cependant cet intérêt de Kant pour l’éducation du corps n’est pas nouveau puisque depuis l’antiquité on a toujours accordé de l’importance à l’éducation corporelle. En effet, dans les sociétés antiques la guerre tenait une place de choix et pour gagner une guerre il fallait nécessairement avoir des soldats vigoureux. C’est ainsi que dans des cités comme celle de Sparte « tous les exercices sont des préparations ou des entrainements à l’activité du soldat. De 12 à 30 ans la vie se passe entièrement à la caserne 54». Par conséquent la préoccupation suprême de ces sociétés c’était d’assurer leur défense. Comme en témoigne René Hubert en ces termes : « L’éducation corporelle est la base sur laquelle tout repose. Rousseau qui lui accorde beaucoup, note sur ce point l’accord de tous les éducateurs qui l’ont précédée. Ni l’antiquité ni davantage le Moyen Age ne l’ont méprisée. La place que tenait dans ces sociétés la guerre et, dans la guerre, la vigueur personnelle, aurait suffi à la justifier 55». Ainsi Kant n’a pas tort d’accorder une grande importance à l’éducation corporelle car comme nous venons de le voir avec René Hubert elle constitue le fondement sur lequel tout doit reposer. Cependant l’éducation corporelle doit être naturelle dans la mesure où elle doit se conformer à la nature c’est-à-dire elle ne doit point troubler la nature. Ainsi c’est à la nature que revient la fonction d’indiquer le chemin que doit prendre cette première éducation. Mais avant Kant, Rousseau avait parlé d’éducation naturelle et on peut dire même que c’est un concept que Kant emprunte à l’auteur de l’Emile ou de l’éducation. C’est pour cette raison que nous croyons nécessaire le fait de chercher la définition que Rousseau donne à ce concept. En effet, chez Rousseau l’éducation naturelle négative cherche plutôt à cultiver d’abord les sens qui sont, selon lui, les instruments de nos connaissances. Ainsi avant de bourrer l’esprit de l’enfant de connaissances, le mieux serait d’exercer ses organes de sens. Car dans les premiers moments de la vie la raison n’est pas encore développé c’est pour cette raison que c’est renverser l’ordre des choses que de vouloir commencer par raisonner avec les enfants comme le voulait Locke56 . De ce fait ce serait troubler l’ordre que la nature a établi que de vouloir commencer par développer d’abord l’esprit de l’enfant. C’est d’ailleurs dans cet esprit que Rousseau affirme que : « La première éducation doit donc être purement négative. Elle consiste, non point à enseigner la vertu ni la vérité, mais à garantir le cœur du vice et l’esprit de l’erreur. Si vous pouviez ne rien faire et ne rien laisser faire ; si vous pouviez amener votre élève sain et robuste à l’âge de douze ans, sans qu’il sût distinguer sa main droite de sa main gauche, dès vos premières leçons les yeux de son entendement s’ouvriraient à la raison ; sans préjugés, sans habitudes, il n’aurait rien en lui qui pût contrarier l’effet de vos soins 57». Ainsi dans l’éducation naturelle négative la tâche du maitre consiste à « ne rien faire et ne rien laisser faire » c’est-à-dire que le maitre doit s’effacer pour accorder la vedette à la nature qui est, de l’avis de Rousseau, la seule apte à pouvoir effectuer une telle tâche. On peut donc dire que Rousseau accorde à la nature une confiance absolue. C’est cette même attitude que l’on remarque chez Kant qui veut aussi que la nature ne soit point troublée dans cette première éducation. Cependant chez Rousseau cette première éducation qu’il qualifie de négative s’étend jusqu’à l’âge de douze ans. Mais contrairement à Rousseau, Kant n’apporte aucune précision sur la durée de la première éducation. La seule chose que nous savons c’est qu’elle commence à la naissance, mais nous n’avons aucune idée sur l’âge durant lequel la première éducation doit prendre fin chez Kant puisque lui-même ne dit rien à ce sujet. Se conformer à la nature c’est refuser d’ajouter quelque chose aux précautions prises par la nature. C’est pour cette raison que Kant considère que la nourriture que l’on doit donner à l’enfant est le lait maternel. Et cela se justifie par le fait que c’est celle que la nature a choisi pour l’enfant. Cependant Kant commence dès le début à écarter un préjugé qui consiste à dire que la maman transmet à son enfant des sentiments rien qu’en l’allaitant. Pour Kant ce préjugé est sans fondement58 . S’appuyant sur Rousseau, le philosophe de Königsberg rejette la thèse qui consiste à dire que le premier lait que la mère donne à l’enfant juste après sa naissance, est nuisible à la santé de ce dernier. En effet, pour Kant cette idée est fausse dans la mesure où Rousseau a attiré l’attention des médecins sur les vertus de ce premier lait qui a, de l’avis de Rousseau, la faculté de chasser les impuretés qui se sont accumulées dans les intestins de l’enfant au moment de la gestation. On sait depuis Rousseau qu’il existe un lien étroit entre la qualité de la nourriture de la nourrice et celle du lait destiné à l’enfant. Ce lien n’a pas échappé à Kant. Cependant en ce qui concerne l’alimentation de la nourrice Rousseau est favorable à un régime végétarien. Car pour lui « le goût de la viande n’est pas naturel à l’homme59 ». En effet, Rousseau considère que la consommation de la viande à des effets moraux et selon lui la plupart des gens qui se nourrissent de viande sont cruels. Et la raison qui justifie le fait que le goût de la viande n’est pas naturel à l’homme est selon lui l’indifférence dont les enfants font montre à l’égard de la viande et leur goût manifeste pour les végétaux. Ainsi la nourrice ou la mère ne doit pas se nourrir de viande durant le temps que dure l’allaitement, mais son alimentation doit être végétarienne. Une alimentation plus propre à assurer la qualité du lait. D’ailleurs Rousseau considère que la consommation de la viande est à l’origine de certaines maladies chez les enfants. Comme il le souligne lui-même en ces termes : « Les paysannes mangent moins de viande et plus de légumes que les femmes de la ville ; et ce régime végétal parait plus favorable que contraire à elles et à leurs enfants. Quand elles ont des nourrissons bourgeois, on leur donne des pot-au-feu, persuadé que le potage et le bouillon de viande leur font un meilleur chyle et fournissent plus de lait. Je ne suis point du tout de ce sentiment ; et j’ai pour moi l’expérience qui nous apprend que les enfants ainsi nourris sont plus sujets à la colique et aux vers que les autres. 60» Cependant à la différence de Rousseau, Kant n’est pour aucun régime en particulier. En effet, le philosophe de Königsberg remarque qu’il y’a des peuples qui ne mangent que de la viande et qui se portent bien et d’autres dont la nourriture est végétarienne et qui sont aussi bien portants. De ce fait « il semble donc que tout dépend de la santé de la nourrice et que la meilleure nourriture soit celle qui lui permet de se porter le mieux61 . » Ainsi Kant n’impose pas à la nourrice un régime particulier. Il laisse à la nourrice la possibilité de choisir son régime alimentaire. Si c’est la viande qui est plus favorable à sa santé alors elle peut consommer la viande de même si ce sont les végétaux qui conviennent le mieux à son état de santé alors son alimentation sera végétarienne. Cependant à un certain moment donné le lait maternel qui servait jusqu’ici de nourriture à l’enfant, disparait. Ainsi on entre dans la période de sevrage. Cette période est indiquée selon Rousseau par l’éruption des dents. Mais puisqu’on ne peut plus nourrir l’enfant avec le lait maternel alors avec quoi doit-il être nourri ? En effet, pour Kant la bouillie et les aliments qui donnent une sensation de piqûre ne sont pas des aliments sains. Kant cite même l’exemple des Russes qui donnent à leurs enfants du vin. Cependant cette pratique est, selon lui, dangereuse dans la mesure elle provoque la mort de bon nombre d’enfants. De ce fait après le sevrage la nourrice doit éviter de donner à l’enfant tout ce qui est piquant ainsi que « les nourritures ou les boissons trop chaudes, qui sont causes de faiblesse. »
INTRODUCTION |