La prévention posturale des troubles de la déglutition chez l’adulte atteint de paralysie cérébrale

La prévention posturale des troubles de la déglutition chez l’adulte atteint de paralysie cérébrale

Utilité sociale et intérêt et enjeux pour la pratique professionnelle En France, à l’heure actuelle, “la paralysie cérébrale touche environ 2 enfants pour 1 000 naissances, soit chaque année 1 500 enfants atteints en plus” [7]. Cela en fait la plus fréquente des déficiences motrices chez l’enfant. Bien que l’atteinte ne soit pas évolutive, la croissance puis le vieillissement de la personne font évoluer les symptômes, avec une augmentation progressive des troubles posturaux et une diminution des capacités. Au cours du temps, la qualité du positionnement au fauteuil roulant a tendance à diminuer, tandis que les troubles de la déglutition de l’adulte paralysé cérébral augmentent en fréquence et en gravité. Face à ce problème de santé publique, nous pensons qu’une vigilance et des actions de prévention doivent être mises en place, en particulier par l’entourage professionnel des usagers sur leur lieu de vie. Ce point de vue est soutenu par les recommandations de bonnes pratiques professionnelles de l’ANESM , qui invitent à “former et sensibiliser les professionnels, afin qu’ils mettent en œuvre 11 les techniques permettant de prévenir et éviter les douleurs dans les gestes de la vie quotidienne et apportent une attention aux soins préventifs quotidiens” [8]. L’objectif est d’optimiser la qualité de vie des résidents, définie en 1993 par l’OMS comme étant 12 “la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeur dans lesquels il vit. Ceci en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. C’est un concept très large, influencé de manière complexe par la santé physique du sujet, son état psychologique, son niveau d’indépendance, ses relations sociales ainsi que sa relation aux éléments essentiels de son environnement”. 10 Locution latine qui signifie : “d’abord, ne pas faire de mal”. 11 Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des établissements et Services sociaux et Médico-sociaux. 12 Organisation Mondiale de la Santé. 7 Au regard des éléments de pratique probante, l’ergothérapeute favorise une meilleure installation et un positionnement adapté de la personne à mobilité réduite [9]. Son action dans ce domaine est importante pour prévenir les dysphagies, comme le soulignent le Dr Pierre Rumeau et le Pr Bruno Vellas (2003) [10]. Conformément aux recommandations du kinésithérapeute et posturologue Bengt Engström (1993), l’ergothérapeute prend en compte, dans ses objectifs de positionnement, les répercussions des déficits posturaux aux niveaux fonctionnel (déglutition ), physique (difficultés respiratoires), social (isolement), et psychologique (souffrance morale) [11]. Cette approche globale de la situation de handicap nous permet de rechercher véritablement, avec et pour la personne, un état de santé tel que défini par l’OMS (1946) : “un état de complet bien-être physique, mental et social, qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité”. Une approche centrée sur la personne nous rend sensible aux relations étroites et aux interactions qui existent entre elle, ses activités et son environnement. Cette dynamique est théorisée par l’anthropologue Patrick Fougeyrollas (2010) dans le modèle du PPH (cf. Annexe 1) [12]. Ainsi, 13 un déficit postural (système organique) entrainera une incapacité à avoir un bon alignement postural (aptitude) à l’origine d’une situation de handicap lors de la prise des repas (activité courante). Les troubles de la déglutition, ainsi induits ou amplifiés, diminuent la participation sociale de la personne, quantitativement et qualitativement. L’état de santé se trouve dégradé (par la dénutrition, l’infection pulmonaire ou l’étouffement) ainsi que les relations à l’environnement (personnel, communautaire et sociétal). Réciproquement, il nous semble pertinent d’envisager qu’une action de l’environnement (aidants professionnels) sur la personne (par le positionnement) permettrait : une compensation du déficit postural, le retour à un alignement postural satisfaisant, l’engagement dans l’activité “repas” et le recouvrement d’un état de santé. Nous considérons que l’ergothérapeute, apte à “élaborer et conduire une démarche d’éducation et de conseil en ergothérapie et en santé publique” (compétence 5 du référentiel) et “former et informer” (compétence 10), est à même de répondre aux questions des aidants professionnels et de les conseiller dans le positionnement des adultes paralysés cérébraux dysphagiques lors des repas [13].

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Questionnement de départ

Nos recherches ont débuté dans le cadre d’un stage en MAS en novembre/décembre 2015. En présence de résidents adultes atteints de paralysie cérébrale, nous souhaitions tout d’abord nous intéresser aux troubles de la déglutition, et au rôle de l’ergothérapeute dans leur prévention. En effet, cette problématique est traitée avec autant d’égard en lieu de vie que la communication, le contrôle d’environnement, la prévention des lésions cutanées ou des déformations ostéo-articulaires (en raison de l’incidence régulière des fausses routes au sein de cette population, et des risques encourus lorsque celles-ci surviennent). Par la suite, il nous a paru pertinent d’établir un lien entre les troubles posturaux et les troubles de la déglutition, puis par extension entre le positionnement et la prévention des dysphagies. Cette hypothèse, confirmée tant par nos lectures dans la littérature scientifique que nos observations sur le terrain, met en exergue le rôle de l’ergothérapeute travaillant avec des adultes paralysés cérébraux dysphagiques comme expert du positionnement au fauteuil roulant. Toutefois, un problème d’ordre pratique nous a alerté lors de nos observations sur le terrain : au cours des temps de repas, les résidents sont rassemblés dans un réfectoire où ils mangent avec l’aide d’aidants professionnels (aides soignants, aides médico-psychologiques, éducateurs spécialisés). Ces professionnels, expérimentés dans leurs domaines de compétences, ne le sont pas nécessairement dans le positionnement au fauteuil roulant des résidents. En effet, leurs programmes de formation respectifs n’incluent pas de module sur le positionnement, et leurs référentiels ne font pas explicitement mention de compétences et d’activités dans ce domaine. Les deux ergothérapeutes de la structure, ainsi qu’une kinésithérapeute formée au positionnement, sont également présents, mais cela ne représente qu’un faible effectif de personnes formées (environ une pour 20 résidents). De plus, nous notons l’absence d’orthophoniste dans la structure. Lors des repas, nous constatons une installation parfois approximative des résidents, et des sollicitations régulières des ergothérapeutes par les aidants professionnels, désarmés face à des troubles de la déglutition dont ils n’identifient pas forcément l’origine

Pré-enquête exploratoire

Dans l’objectif de vérifier la cohérence de notre questionnement, et afin de nous conformer aux recommandations concernant la construction de données probantes, nous adressons un questionnaire aux services d’ergothérapie de cinq lieux de vie de la région marseillaise, accueillant des adultes paralysés cérébraux (cf. Annexe 2). Nous leur demandons de bien vouloir les transmettre aux équipes d’aidants professionnels précédemment cités, afin que ceux-ci témoignent de leur pratique et formulent d’éventuels besoins d’information et de formation. Nous avons défini les critères d’inclusion et d’exclusion suivants : 14 Acquisition de savoir. 15 Acquisition de savoir-faire. 10 Critères d’inclusion Critères d’exclusion – Intervenir dans une MAS ou un FAM. – Être présent lors des temps de repas des adultes cérébrolésés. – Proposer une aide au repas. – Être un aidant naturel. – Être un ergothérapeute. – Être un médecin MPR. Les questions concernent : – La profession des personnes et leur lieu d’exercice. – Leur intervention sur les réglages du fauteuil roulant lors des repas. – Leur intervention sur l’installation des patients lors des repas. – Leur ressenti concernant un besoin de formation/information sur ces sujets. – Leur connaissance des troubles de la déglutition. – Leur façon de les identifier et les prévenir. – Leur ressenti concernant un besoin de formation/information sur ces sujets. – Ce qu’ils attendaient de l’ergothérapeute dans un programme de formation/information. – Leurs remarques éventuelles.

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