La presse d’un point de vue sociolinguistique

La presse d’un point de vue sociolinguistique

Construire un cadre théorique permet et équivaut à poser les questions, définir les phénomènes, les objets, les notions envisagés. En somme, se créer et se doter d’une sorte de boîtes à outils d’analyse et de compréhension (des notions, des concepts et de leurs définitions) (Chardenet, Blanchet, 2011, p. 17) afin de mieux appréhender un contexte, une réalité et plus tard une méthodologie.

Compte tenu du fait que nous nous intéressons principalement au langage humain, à des phénomènes langagiers prenant ancrage/prenant sens dans le culturel et le social, le choix de la thématique a été dicté et justifié par le contexte sociolinguistique et socioculturel d’abord, les motivations personnelles et sociales ensuite (dans la première partie). Nous considérons ainsi le plurilinguisme et le pluriculturalisme malgache « à travers » la presse écrite. Objet complexe, puisqu’elle est à la fois moyen et outil de communication, d’information, un discours et un langage, et s’inscrit dans un ancrage social.

Domaines d’intervention et spécificités

Les sciences du langage regroupent les disciplines scientifiques ayant pour objet de recherches le langage humain et les langues. Ces derniers sont « contextualisés », au sens fort du terme, s’inscrivant dans une société. Une société a sa propre histoire, sa culture, ses valeurs…sa vision de ce que sera l’avenir, sa conception de la société elle-même, ses perspectives éducatives. De la considération de cet ancrage est née la sociolinguistique.

La sociolinguistique s’apparente à la linguistique dans leur préoccupation commune que sont les langues. Elles se distinguent l’une de l’autre par leur fondement épistémologique et méthodologique propre : « le linguiste qui observe et décrit la langue, se pose essentiellement la question de savoir comment ça marche, tandis que le sociolinguiste, tout en se posant cette question doit compléter son questionnement; pourquoi ça marche comme cela… » Blanchet, Bulot. Ainsi, elle s’intéresse plus, sur le terrain, à ce lien complexe entretenu entre langues et société(s). Elle est donc beaucoup plus orientée vers la compréhension des phénomènes linguistiques (le plurilinguisme et les variations linguistiques, les contacts de langues, les normes, les usages sociaux, les discriminations, l’enseignement des langues, les innovations linguistiques, etc.).

La recherche en socio-linguistique se distingue des « autres sciences » à travers ces caractéristiques :

– la complexité des phénomènes langagiers- donc- humains qui doit intégrer une approche multidimensionnelle
– le libre arbitre des humains suppose qu’il adapte leur comportement en fonction d’une finalité, contrairement aux objets d’études dans les sciences naturelles.
– la nature du sujet et de l’objet qui sont la même, ce qui rend l’objectivité plus difficile à réaliser .

Approche sociolinguistique

L’approche sociolinguistique du langage, par rapport à la linguistique, permet d’aller au-delà de la description pour comprendre par les faits, les réalités et les résultats de recherche « pourquoi ça marche comme cela » (Bulot, Blanchet, 2013, p. 4). Être un observateur qui met de côté ses propres interprétations des phénomènes socio-langagiers, ne laisse pas un sujet à défaut d’un autre mais étudie toutes les formes d’implications du langage dans un contexte précis. Il s’engage également dans la mise en valeur de la diversité. En effet, la complexité, le dynamisme, le caractère évolutif de l’étude du langage humain exige un procédé qui fera valoir les spécificités de la langue et du contexte dans lequel elle évolue, un phénomène qui ne sera jamais tout à fait maitrisable. Dans le cadre de ce projet cette approche sera écologique.

Les approches mobilisées en CAPEN : apports et limites

Compte tenu du fait que « l’individu bilingue utilise chacune de ses langues pour différentes fonctions et que l’utilisation d’une langue est spécifique à un contexte donné. » (Helot, 2007, p. 24), l’approche fonctionnelle a été retenu. Elle a permis de cerner les conditions  d’utilisation des langues permettra d’en déterminer leurs places, leurs fonctions. En d’autres termes, une phase d’étude pour déterminer la place des langues malgache et français (et autres) et la fonction qu’elles y occupent dans le contexte bilingue de la presse écrite. Nous pouvons ainsi affirmer que la gestion des langues dans la presse écrite bilingue tananarivienne est diglossique. La proportion d’utilisation du français est assez élevé tant dans la mise en page que dans les fonctions à assurer.

Pour dégager d’autres particularités de la presse écrite bilingue, le travail de recherche a abordé les productions médiatiques en termes de variations. William Labov a tracé les premières lignes de cette approche en se basant sur des enquêtes dans Manhattan, à Lower East Side en 1976. Il essaie de dégager les différents usages des différents locuteurs dans une communauté linguistique en décelant les probables influences du contexte extérieur. La variation stylistique est liée au statut social des interlocuteurs. L’enquête de Harlem également permet de dégager l’importance des variables sociales dans la résolution des problèmes linguistiques. Trois types de règles sont ainsi considéré : catégoriques relevant de l’apprentissage fondamentale de la langue, semi-catégoriques engendrées par les infractions et condamnées par la norme, et les règles à variables.

Compte tenu de la dynamique des faits de langues et des différentes sphères, moments, lieux… dans lesquels le langage intervient, cinq types de variations ont été pris en compte par Bulot et Blanchet. Ils considèrent ainsi les variable temporelle (diachronique), spatiale (diatopique), sociale (diastratique), interactionnelle (diaphasique) et genre (diagénique) auxquels ils attribuent chacun des lectes (Bulot, Blanchet 2013, p.49).

Cependant, le présent travail se centrera, non pas sur des variables mais sur les variétés d’usages d’une langue. Pour ce faire, une référence aux approches théoriques de Chaudenson et Manessy (1991) est pertinente. Ils mettent « l’accent sur l’importance décisive des critères sociolinguistiques dans la définition même de variété » (Bavoux, 1993, p.180). La problématisation tourne autour des écarts de formes déviantes de la langue et des résultats de contacts de langues en milieu bilingue sous l’influence de la norme, ou non. D’un côté se trouve alors les écarts intrasystémiques et d’un autre les écarts en termes d’interférences.

Les limites résident dans l’absence de mise en lien entre le contexte décrit et les particularités dégagés. Ce qui nécessiterait une approche contextualisée et dynamique de la situation.

Approche écologique : pour une dynamique de l’approche

L’écologie des langues a été initiée et théorisée par Haugen, théorie empruntée à la biologie végétale dans sa conceptualisation des relations entre les plantes et leur environnement (Haugen, 1972). La langue considérée en fait social, le modèle écologie des langues dépasse, ainsi, la description de type linguistique intégrant la problématique des typologies des langues, et la problématique des langues en danger. L’objectif est de décrire des langues du monde pour la planification linguistique : prédire l’avenir des langues, agir délibérément sur celles-ci pour en modifier l’évolution.

Mühlhaussler se positionne et considère l’écologie linguistique en une « défense de l’environnement » (Mühlhaussler, 1996). Sa théorie concerne la défense des langues en péril. Les points de divergences résident dans les perspectives environnementales.

Calvet, utilise la métaphore écologie et suppose des niveaux d’analyse (Calvet, 1999). Il recherche un modèle explicatif et intègre les langues dans leur contexte social et étudie les rapports entre les langues elles même et les langues entre société. Il s’intéresse ainsi à la situation sociolinguistique, aux pratiques et aux représentations linguistiques.

Lechevrel, 2010, considère l’écologie linguistique en une approche en construction, qu’elle rattache à des phénomènes langagiers tels le contact des langues, le plurilinguisme, etc. s’exprime également en terme de niveau conditions sociales et environnementales des productions linguistiques.

Table des matières

Introduction générale
Première Partie : De l’essence du projet : fondements contextuels et construction de l’objet de recherche
Introduction
1. Chapitre 1 : De la compréhension du contexte
2. Chapitre 2 : Motivations sociales et personnelles
3. Chapitre 3 : Les tenants et les aboutissants de la recherche
Conclusion
Deuxième partie : Construction des fondements théoriques
Introduction
4. Chapitre 4 : La presse d’un point de vue sociolinguistique
5. Chapitre 5 : Nécessité d’une collaboration disciplinaire : l’interdisciplinarité
Conclusion
Troisième partie : Cadre méthodologique
Introduction
6. Chapitre 6 : Choix du corpus
7. Chapitre 7 : Cadre méthodologique
Conclusion
Conclusion générale
Bibliographie
Sitographie
Tables des matières
Annexes

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