La notion de Translucidité fiscale française

LA NOTION DE TRANSLUCIDITÉ FISCALE FRANÇAISE 

L’analyse se limitera, dans le cadre de cet exposé, aux SCI translucides, les deux autres formes de SCI (transparentes (sociétés d’attribution) et opaques) ne présentant pas le même intérêt vu l’absence de problèmes particuliers les concernant (la question du traitement des dividendes des SCI d’attribution étant réglée par le point 2 du protocole final de la convention et celle des dividendes des SCI soumises à l’impôt des sociétés ne présentant pas d’obstacles à l’application de l’article 15 de la convention). À noter que les trois formes possèdent la personnalité juridique selon la loi française. Pour rappel, les SCI sont par défaut (art. 8 du Code général des impôts français (CGI)) soumises au régime fiscal des particuliers, sauf lorsque les conditions légales pour le maintien de ce statut particulier ne sont plus rencontrées (activités commerciales ou industrielles, elles basculent dès lors, de facto, dans le régime opaque). Mais les associés ont le choix, en vertu de l’article 206 du CGI d’opter pour le régime de l’impôt des sociétés. Ce choix est en principe irréversible sauf sous certaines conditions (art. 239 du CGI) que nous ne développerons pas ici. Revenons à nos SCI translucides. En droit fiscal français, tout contribuable est en principe titulaire de trois obligations :
1. Obligation de déclaration des revenus concourant à la perception de l’impôt,
2. Obligation de justification du résultat constituant la base d’imposition,
3. Obligation de payer l’impôt dû.
Le mécanisme de translucidité fiscale attribue les deux premières obligations à la société alors que l’obligation de payer l’impôt revient à charge des associés en fonction de leur participation dans le capital social. Si l’associé est une personne physique, sa part de revenu imposable sera traitée comme un revenu immobilier et imposée comme telle, si l’associé est une société, la part des revenus lui revenant sera traitée comme des bénéfices et imposée comme telle. Cette imposition intervient indépendamment de la distribution effective de ces revenus. Il en ressort, et c’est important pour la suite, que la SCI translucide est un sujet fiscal à part entière.

REVENUS IMPOSABLES EN BELGIQUE 

Nous n’allons évidemment pas aborder l’ensemble du Code d’impôt sur les revenus, mais simplement vérifier, avant toute chose si les revenus visés dans cet exposé sont imposables en Belgique. En effet, dans le cas contraire, il sert à rien d’examiner la convention, celle-ci n’étant destinée qu’à prévenir les cas de double imposition.

Pour faire simple, un habitant du Royaume doit déclarer les revenus obtenus pendant la période imposable, mais nullement les revenus obtenus par une société ayant la personnalité juridique (ce qui est le cas des SCI) dont il est détenteur de parts si ceux-ci ne sont pas distribués. En cas de distribution des revenus de SCI, ceux-ci correspondent à la définition de dividendes en droit fiscal belge (article 18, code d’impôt sur les revenus 1992 (ci-après CIR 92)) et sont donc imposables en Belgique, à l’inverse des revenus non distribués, qui ne doivent même pas faire l’objet d’une déclaration. En cas de cession à titre onéreux d’un bien immobilier par un particulier, la Belgique, sous certaines conditions (article 90 CIR 92) ne prévoit pas de taxation sur la plus-value réalisée, il en est de même pour la cession à titre onéreux des parts de sociétés, pour autant que celles-ci s’inscrivent dans ‘la gestion normale du patrimoine privé’, autrement dit, en dehors de toute opération spéculative.

ARTICLE 3 DE LA CONVENTION 

L’article trois de la convention règle le cas des revenus de biens immobiliers en réservant le pouvoir d’imposition à l’Etat dans lequel ces biens sont situés. Le paragraphe 2 stipule également que « la notion de bien immobilier se détermine d’après les lois de l’Etat contractant où est situé le bien considéré ». Dans le paragraphe 4, nous retrouvons une autre disposition qui s’avèrera utile par la suite : « les dispositions des paragraphes 1 à 3 s’appliquent également […]. Elles s’appliquent également aux bénéfices résultant de l’aliénation de biens immobiliers». Cet article est central dans la problématique qui nous occupe et nous y ferons référence à de nombreuses reprises dans la suite de l’exposé.

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ARTICLE 15 DE LA CONVENTION 

L’article 15 traite le sujet des dividendes. Outre le fait que l’article stipule que les dividendes, ayant leur source dans un des Etats contractant, sont imposables dans l’autre Etat lorsqu’ils sont payés à un résident de cet autre Etat, ce qui va nous intéresser ici, est la définition du terme « dividendes » applicable à l’article en question. Pour reprendre les termes du paragraphe 5 de l’article, « le terme ‘dividendes’ employé dans le présent article désigne […] les revenus provenant d’actions, actions ou bons de jouissance, parts de mine, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires ainsi que les revenus d’autres parts sociales soumis au même régime que les revenus d’actions par la législation fiscale de l’Etat dont la société distributrice est un résident ». Donc, si la société distributrice est résidente française, pour être considérés comme dividendes, les revenus distribués doivent être soumis au même régime que les revenus d’actions dans la législation française.

ARTICLE 18 DE LA CONVENTION

Cet article fait office de « disposition balai », en stipulant que les revenus qui ne sont pas traités dans la convention ne sont imposables que dans l’Etat du résident concerné. Il nous sera utile lorsque nous parlerons de la classification des revenus des SCI ainsi que des plus-values sur actions dans la suite de l’exposé.

PROTOCOLE FINAL DE LA CONVENTION, POINT 2 

Nous reviendrons également à ce texte du protocole final de la convention, visant à priori les SCI d’attribution, dans l’exposé qui suit, les références à ce dernier dans les jugements et arrêts des différentes Cours y étant fréquentes. La déduction selon laquelle ce sont les sociétés d’attribution qui sont visées dans ce point 2 du protocole final vient du fait que le texte reprend de manière identique la description faite des sociétés d’attribution dans l’article 1655 ter du CGI. En voici le texte : « l’article 15, paragraphe 1, ne s’oppose pas à ce que la France, conformément aux dispositions de sa loi interne, considère comme des biens immobiliers, au sens de l’article 3 de la convention, les droits sociaux possédés par les associés ou actionnaires des sociétés qui ont, en fait, pour unique objet, soit la construction ou l’acquisition d’immeubles ou de groupes d’immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées à leurs membres en propriété ou en jouissance, soit la gestion de ces immeubles ou groupes d’immeubles ainsi divisés. La Belgique pourra toutefois imposer, dans les limites fixées aux articles 15, paragraphe 1 et 2, et 19-A, paragraphe 1, les revenus tirés par des résidents de la Belgique de droits sociaux représentés par des actions ou parts dans lesdites sociétés résidentes de la France».

Table des matières

1. Introduction
2. Notions et articles utiles
2.1 La notion de Translucidité fiscale française
2.2 Revenus imposables en Belgique
2.3 Article 3 de la convention
2.4 Article 15 de la convention
2.5 Article 18 de la convention
2.6 Protocole final de la convention, point 2
3. Description de la problématique
4. Evolution de la jurisprudence et analyse de l’argumentaire
4.1 L’arrêt de la Cour de cassation du 2 décembre 2004
4.1.1 L’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 7 novembre 2002
4.1.2 L’arrêt de la Cour de cassation du 2 décembre 2004
4.1.3 Analyse
4.2 L’arrêt de la Cour de cassation du 29 septembre 2016
4.2.1 Analyse
4.3 L’arrêt du Conseil d’Etat du 24 février 2020
4.3.1 Analyse
5. Conclusion

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