La nature du bois et son origine
Le bois est défini par l’IAWA (1964) (International Association of Wood Anatomist) comme l’«ensemble des tissus de soutien et de conduction de la sève brute dans les tiges et les racines ; caractérisé par la présence d’éléments conducteurs […] désignant la masse des tissus résistants issus du fonctionnement du cambium et c’est une déviation abusive de sons sens correct que d’appliquer ce mot à la partie vasculaire des faisceaux conducteurs dans les tiges à structure primaire ». Le bois est donc une des organisations tissulaires de la plante, assurant diverses fonctions, et généré par un méristème secondaire : l’assise génératrice libéro-ligneuse, plus communément appelée ‘cambium’. De par sa production, le cambium est l’acteur principal de l’épaississement des axes de la plante, qu’ils soient racinaires ou caulinaires. La production de bois est un caractère partagé par les Spermaphytes (i.e. plantes à graines). D’un point de vue taxonomique et évolutif, on retrouve le bois chez les Gymnospermes (e.g. les conifères) et les Angiospermes (e.g. toutes les plantes à fleurs). La structure du bois chez les angiospermes est dite ‘dérivée’ alors que chez les Gymnospermes elle présente des caractères plus ‘ancestraux’.
Le bois et l’apparition de la forme arborée
L’apparition du bois au cours de l’évolution est intimement liée à l’apparition de la structure arborescente chez les plantes. Archaeopteris (genre fossile appartenant à l’ordre des Archeopteridales, diversifié à la fin du Dévonien (Figure 1) fut sans doute le premier « arbre moderne ». Sa modernité lui est attribuée par le cumul de 4 caractéristiques le rapprochant des arbres actuels : (1) un syndrome de ramification latérale pérenne, (2) la présence de primordia latents, et de (3) zones nodales comme sites de développement des organes latéraux, ainsi (4) qu’une stratégie anatomique ligneuse minimisant les stress mécaniques causés par la pérennité de la croissance des ramifications latérales (Figure 1) (MeyerBerthaud et al., 1999). Archaeopteris est donc le genre fossile frère des Spermaphytes, avec qui il partage un cambium bifacial produisant un bois assurant à la fois la fonction hydraulique et la fonction mécanique (Figure 1). C’était une plante cosmopolite, pouvant résister au froid (Meyer-Berthaud et al., 2010), et ayant une hauteur maximale estimée à 40 m (Meyer-Berthaud, 2000). La nature du bois et son origine . Phylogénie simplifiée des plantes terrestres du Paléozoïque (adapté de Kenrick & Crane (1996) dans Meyer-Berthaud et al. (2010)) montrant l’apparition de la ramification chez les Euphyllophytes et l’apparition du cambium chez les lignophytes (B). Schéma de la structure d’A rc ha eopt eris illustrant la différenciation d’axe à durée de vie longue, et courte, et la capacité de croissance en épaisseur (C). Schéma de la section transversale du tronc d’A rch a eopt eris illustrant la présence de tissus secondaire s (trachéides en gris et cortex secondaire en blanc) (D). III. Les fonctions du bois Le bois est un tissu plurifonctionnel assurant (1) la conduction de la sève brute des racines vers les feuilles, (2) le soutien mécanique de la structure de la plante ainsi que (3) le stockage des réserves (i.e. amidon et graisse). Ces trois fonctions sont spécifiques de différents types cellulaires, la spécialisation des cellules étant plus prononcée chez les Angiospermes que chez les Gymnospermes. La conduction est assurée par les vaisseaux, alors que les fibres et les parenchymes assurent respectivement les fonctions de soutien mécanique et de mise en réserves de photosynthétats. Les vaisseaux et fibres sont des types cellulaires qui perdent leurs contenus cytoplasmiques après maturation. Ces cellules sont mortes et donc incapables de se dédifférencier. A contrario, les cellules de parenchymes sont vivantes. Alors que fibres et vaisseaux sont orientés longitudinalement (i.e. parallèle à l’axe de la tige), les parenchymes sont orientés dans le plan longitudinal et radial (i.e. perpendiculaire à l’axe de la tige). De par leurs directions, on distinguera deux types : le parenchyme axial (i.e. vertical ou longitudinal) et le parenchyme de rayon (i.e. transversal) qui permet le stockage et les échanges radiaux. La disposition du parenchyme axial est très variable et d’une assez bonne significativité taxonomique (Détienne et al., 1982). Chez les Légumineuses par exemple, le parenchyme est dit ‘circumvasculaire’, de par sa disposition autour des vaisseaux, et forme également des bandes dites ‘tangentielles’ (i.e. parallèle au cerne de croissance) (Figure 2). Le parenchyme de rayon est également sujet à des variations du nombre et des types de cellules qui le composent. Les tissus longitudinaux et transversaux du bois sont interconnectés et forment un réseau tissulaire tridimensionnel complexe (Figure 3). Figure 2 : L’anatomie des plans ligneux chez quelques Fabaceae. Plan transversal chez D i cory ni a guia nensis (A et B). Plan longitudinal tangentiel chez I nga s p. (C) et longitudinal radial chez P ark ia bi c olor (D). pa et pr, parenchyme axial et parenchyme de rayon ; v, vaisseau. (Photos : Inside Wood, http://insidewood.lib.ncsu.edu/) Figure 3 : La structure tridimensionnelle du bois d’après Guinochet (1965). Les flèches indiquent l’orientation des types cellulaires. IV. L’anisotropie du bois L’hétérogénéité de sa structure fait du bois un matériau anisotrope. Toutefois, comme la majorité de ses cellules est allongée dans le sens de l’axe de l’arbre, le bois est parfois qualifié de matériau orthotrope. Sa structure et ses propriétés varient en fonction du plan ligneux considéré. On distingue 3 directions dans le bois : – La direction axiale : dans l’axe des fibres et de la tige – La direction radiale : perpendiculaire à l’axe de la tige passant par la moelle – La direction tangentielle : perpendiculaire à l’axe de la tige ne passant par la moelle La combinaison de ces 3 directions conditionne l’existence de 3 plans ligneux : – Le plan longitudinal–radial est définit par une direction axiale et radiale : parallèle à l’axe de la tige passant par son centre. – Le plan longitudinal–tangentiel est définit par une direction axiale et tangentielle : parallèle à l’axe de la tige ne passant par son centre. Par construction, le plan longitudinal-tangentiel est perpendiculaire au plan longitudinal-radial. – Le plan transversal : perpendiculaire à l’axe de la tige. Les propriétés de la direction axiale seront bien différentes des propriétés de la direction radiale et tangentielle, alors que les propriétés radiales et tangentielles seront assez similaires. De ce fait, les propriétés intimement liées à la structure tridimensionnelle du bois n’ont de sens que si elles sont considérées dans un plan déterminé (e.g. retrait dimensionnel, élasticité).