LA MATRICE DE L’EXPERIMENTATION
Saint-Denis J’voudrais faire un slam pour une grande dame que j’connais depuis tout petit, J’voudrais faire un slam pour celle qui voit ma vieille canne du lundi au samedi, J’voudrais faire un slam pour une vieille femme dans laquelle j’ai grandi, J’voudrais faire un slam pour cette banlieue nord de Paname qu’on appelle Saint-Denis. Prends la ligne D du RER et erre dans les rues sévères d’une ville pleine de caractère, Prends la ligne 13 du métro et va bouffer au McDo ou dans les bistrots d’une ville pleine de bonnes gos et de gros clandos, Si t’aimes voyager, prends le tramway et va au marché. En une heure, tu traverseras Alger et Tanger. Tu verras des Yougos et des Roms, et puis j’t’emmènerais à Lisbonne, Et à 2 pas de New-Deli et de Karashi (t’as vu j’ai révisé ma géographie), j’t’emmènerai bouffer du Mafé à Bamako et à Yamoussoukro, Et si tu préfères, on ira juste derrière manger une crêpe là où ça sent Quimper et où ça a un petit air de Finistère, Et puis en repassant par Tizi-Ouzou, on finira aux Antilles, là où il y a des grosses re-noi qui font « Pchit, toi aussi kaou ka fé la ma fille ! ». Au marché de Saint-Denis, faut que tu sois sique-phy. Si t’aimes pas être bousculé tu devras rester zen, Mais sûr que tu prendras des accents plein les tympans et des odeurs plein le zen, Après le marché on ira ché-mar rue de la République, le sanctuaire des magasins pas chers, La rue préférée des petites rebeus bien sapées aux petits talons et aux cheveux blonds peroxydés. Devant les magasins de zouk, je t’apprendrai la danse. Si on va à la Poste j’t’enseignerai la patience… La rue de la République mène à la Basilique où sont enterré tous les rois de France, tu dois le savoir ! Après Géographie, petite leçon d’histoire, Derrière ce bâtiment monumental, j’t’emmène au bout de la ruelle, dans un petit lieu plus convivial, bienvenu au Café Culturel, On y va pour discuter, pour boire, ou jouer aux dames. Certains vendredi soir, y’a même des soirées Slam. Si tu veux bouffer pour 3 fois rien, j’connais bien tous les petits coins un peu poisseux, On y retrouvera tous les vauriens, toute la jet-set des aristocrasseux, Le soir, y’a pas grand chose à faire, y’a pas grand chose d’ouvert, A part le cinéma du Stade, où les mecs viennent en bande : bienvenue à Caillera-Land. Ceux qui sont là rêvent de dire un jour « je pèse ! » et connaissent mieux Kool Shen sous le nom de Bruno Lopez, 96 C’est pas une ville toute rose mais c’est une ville vivante. Il s’passe toujours quelqu’chose, pour moi elle est kiffante, J’connais bien ses rouages, j’connais bien ses virages, y’a tout le temps du passage, y’a plein d’enfants pas sages, j’veux écrire une belle page, ville aux cent mille visages, St-Denis-centre mon village, J’ai 93200 raisons de te faire connaître cette agglomération. Et t’as autant de façons de découvrir toutes ses attractions. A cette putain de cité j’suis plus qu’attaché, même si j’ai envie de mettre des taquets aux arracheurs de portables de la Place du Caquet, St-Denis ville sans égal, St-Denis ma capitale, St-Denis ville peu banale.. où à Carrefour tu peux même acheter de la choucroute Hallal !, Ici on est fier d’être dyonisiens, j’espère que j’t’ai convaincu. Et si tu m’traites de parisien, j’t’enfonce ma béquille dans l’… J’voudrais faire un slam pour une grande dame que j’connais depuis tout petit, J’voudrais faire un slam pour celle qui voit ma vieille canne du lundi au samedi, J’voudrais faire un slam pour une vieille femme dans laquelle j’ai grandi, J’voudrais faire un slam pour cette banlieue nord de Paname qu’on appelle Saint-Denis.
LES LECTURES DURANT LA PHASE DE MISE EN PLACE DU CADRE CONCEPTUEL SE REFERANT AU SLAM POESIE 6ème sens
La nuit est belle, l’air est chaud et les étoiles nous matent, Pendant qu’on kiffe et qu’on apprécie nos plus belles vacances, La vie est calme, il fait beau, il est 2 heures du mat’, On est quelques sourires à partager notre insouciance. C’est ce moment là, hors du temps, que la réalité a choisi, Pour montrer qu’elle décide et que si elle veut elle nous malmène, Elle a injecté dans nos joies comme une anesthésie, Souviens-toi de ces sourires, ce sera plus jamais les mêmes. Le temps s’est accéléré d’un coup et c’est tout mon futur qui bascule, Les envies, les projets, les souvenirs, dans ma tête y’a trop de pensées qui se bousculent, Le choc n’a duré qu’une seconde mais ses ondes ne laissent personne indifférent, » Votre fils ne marchera plus « , voilà ce qu’ils ont dit à mes parents. Alors j’ai découvert de l’intérieur un monde parallèle, Un monde où les gens te regardent avec gêne ou avec compassion, Un monde où être autonome devient un objectif irréel, Un monde qui existait sans que j’y fasse vraiment attention. Ce monde-là vit à son propre rythme et n’a pas les mêmes préoccupations, Les soucis ont une autre échelle et un moment banal peut être une très bonne occupation, Ce monde là respire le même air mais pas tout le temps avec la même facilité, Il porte un nom qui fait peur ou qui dérange : les handicapés. On met du temps à accepter ce mot, c’est lui qui finit par s’imposer, La langue française a choisi ce terme, moi j’ai rien d’autre à proposer, Rappelle-toi juste que c’est pas une insulte, on avance tous sur le même chemin, Et tout le monde crie bien fort qu’un handicapé est d’abord un être humain. Alors pourquoi tant d’embarras face à un mec en fauteuil roulant, Ou face à une aveugle, vas-y tu peux leur parler normalement, C’est pas contagieux pourtant avant de refaire mes premiers pas, Certains savent comme moi qu’y a des regards qu’on oublie pas. C’est peut-être un monde fait de décence, de silence, de résistance, Un équilibre fragile, un oiseau dans l’orage, Une frontière étroite entre souffrance et espérance, Ouvre un peu les yeux, c’est surtout un monde de courage. 98 Quand la faiblesse physique devient une force mentale, Quand c’est le plus vulnérable qui sait où, quand, pourquoi et comment, Quand l’envie de sourire redevient un instinct vital, Quand on comprend que l’énergie ne se lit pas seulement dans le mouvement. Parfois la vie nous teste et met à l’épreuve notre capacité d’adaptation, Les 5 sens des handicapés sont touchés mais c’est un 6ème qui les délivre, Bien au-delà de la volonté, plus fort que tout, sans restriction, Ce 6ème sens qui apparaît, c’est simplement l’envie de vivre.