LA MALNUTRITION CHEZ LES ENFANTS DE ZERO A CINQ ANS
Rappel théorique sur la malnutrition
Définition
Selon l’O.M.S., la malnutrition est un « état pathologique résultant de la carence ou de l’excès relatif ou absolu, d’un ou de plusieurs nutriments essentiels, que cet état se manifeste cliniquement ou n’est pas décelable que par des analyses anthropométriques, biochimiques et physiologiques » (1). Ce terme groupe aussi les divers troubles provoqués par un déséquilibre de l’apport alimentaire, soit quantitativement (obésité par suralimentation ou marasme par insuffisance), soit qualitativement, le plus souvent par défaut (rachitisme, anémie ferriprive) (1). La « malnutrition protéino-calorique » désigne des troubles nutritionnels fréquemment rencontrés dans des pays en développement, notamment à Madagascar. Ces troubles s’observent surtout chez les enfants de 06 mois à 5 ans.
Indicateurs
Pour classer les différents degrés de malnutrition, les cliniciens, les agents de la santé Publique ou les anthropologues utilisent différents indicateurs : – anthropométriques, – biologiques, – cliniques.
Indicateurs anthropométriques
Les meilleurs critères pour les enquêtes de masse reposent sur l’analyse des données anthropométriques. L’étude de la courbe pondérale permet de dépister rapidement le cas de l’enfant qui présente un ralentissement ou un arrêt, voire une augmentation du poids. Un examen médical minutieux et un interrogatoire de la mère permettent de reconnaître parmi ces enfants ceux qui sont en danger ou qui débutent une malnutrition. Plusieurs systèmes de comparaison peuvent être utilisés : – Rapport du poids de l’enfant au poids normal pour son âge (classification de GOMEZ et courbes de croissance selon l’O.M.S.). – Rapport du poids de l’enfant sur sa taille. – Rapport de la circonférence du bras de l’enfant sur la circonférence normale pour son âge. 2 – Rapport de la circonférence du bras de l’enfant sur son périmètre crânien. – La classification de GOMEZ : tient compte uniquement de l’écart entre le poids de l’enfant et le poids normal pour son âge. On considère qu’il y a malnutrition lorsque le poids de l’enfant est inférieur d’au moins de 10% par rapport au poids normal. Tableau n°1 : classification de GOMEZ (2) Degré de malnutrition Poids de l’enfant par rapport au poids normal pour son âge Déficit pondéral Enfants Normaux 110 à 90% Malnutrition 1 er degré 90 à 75% 10 à 25% Malnutrition 2 ème degré 75 à 60% 24 à 40% Malnutrition 3 ème degré moins de 60% plus de 40% Tous les cas de malnutrition avec œdèmes sont classés en 3ème degré. Poids de l’enfant P/T = Poids d’un enfant de même taille X 100 Taille de l’enfant T/A = Taille d’un enfant de même âge X 100 3 Tableau n°2 : Rapport poids sur taille (2) Dénomination Poids / Poids idéal Taille / Taille idéale Signification Normal > 80% > 90% Décharnés < 80% > 90% Malnutrition aiguë récente Rabougris > 80% < 90% Malnutrition chronique ancienne Décharnés Rabougris < 80% < 90% Malnutrition chronique aggravée Le rapport T/A (Taille sur Age) : Le rapport T/A chez l’enfant de 0 à 5 ans est la conséquence d’un ralentissement dans le développement du squelette et de la stature, traduisant les effets de la sousnutrition à long terme, pouvant résulter d’une mauvaise situation socioéconomique du milieu familial. La classification de WELLCOME Cette classification est basée sur le rapport Poids sur Age en tenant compte de la présence ou non d’œdème. Il existe 4 formes cliniques de malnutrition : – Kwashiorkor – Marasme – Marasme Kwashiorkor – Sous-nutrition. Tableau n°3 : Classification de WELLCOME (2) Rapport poids sur âge Avec œdèmes sans œdème 60 – 80% Kwashiorkor Sous-nutrition < 60% Marasme Kwashiorkor Marasme La classification de KANAWATT et MAC LAREN Utilise le périmètre brachial (PB) et le périmètre crânien (PC). Tableau n°4 : Classification de KANAWATT et MAC LAREN (2) PB/PC Normal > 0,31 1 er degré : fruste 0,28 – 0,31 2 ème degré : modéré 0,25 – 0,28 3 ème degré : sévère < 0,25 4 Le système ABAQUE Préconisé par l’O.M.S., il est le plus simple et le plus utilisé, il caractérise l’enfant en fonction de son poids par rapport au poids médian de même taille. Le rapport Poids sur Taille : quand on ne connaît pas l’âge de l’enfant, on peut essayer d’évaluer le déficit pondéral en étudiant le poids par rapport à la taille. Des tables ont été établies et donnent pour chaque taille la norme : 90%, 80%, 70%. Mais lorsque les troubles nutritionnels persistent (depuis plusieurs mois), ils retentissent non seulement sur la croissance pondérale, mais aussi sur la croissance staturale. Ces phénomènes diminuent l’intérêt de l’étude du poids par rapport à la taille. La fiche de croissance utilisée dans les centres de santé de base permet la surveillance mensuelle du poids de l’enfant. Cette fiche est à mettre à portée de toutes les mères avec recommandation de la rapporter à chaque venue dans les centres de santé. Elle comprend 3 zones : – La bande rouge : indique que le poids de l’enfant est très faible, nécessitant une surveillance nutritionnelle et parfois même une hospitalisation. – La bande jaune : traduit une diminution du poids par rapport à la normale. Les agents de santé proposent à la mère une éducation nutritionnelle et une surveillance de l’état sanitaire de l’enfant. – La bande verte indique que le poids de l’enfant est normal, fait qui ne doit pas dispenser la mère d’une surveillance de l’enfant, bien que celui-ci semble être en bonne santé.
Les examens biochimiques
Bien que certains examens biochimiques soient d’un intérêt indéniable, en particulier l’électrophorèse des protéines sériques et le dosage de la fraction albumine, ils sont rarement utilisés de façon systématique pour les études de prévalence. Chez les jeunes enfants, on limite le plus possible les prélèvements sanguins, ainsi, au cours d’une enquête, on ne les pratiquera que sur un souséchantillon défini, avec précision de la population étudiée. Poids de l’enfant P/T = Poids médian de même taille X 100 5
Electrophorèse des protéines
Le taux normal d’albumine est de 35 – 50 g/l. Quand il diminue, il traduit un état de dénutrition sévère et prolongée. Ce taux est inversement corrélé à la morbidité et mortalité du malnutri. Mais le taux d’albumine n’est pas un bon marqueur de la malnutrition d’apparition rapide en raison de sa demi-vie longue (20 jours). Figure n°1 : Schéma de l’électrophorèse des protéines – Le taux normal du Rétinol-Binding-Protein (RBP) est de 0,058 g/l. Cette protéine assure le transport de la vitamine A du foie vers les tissus récepteurs. Chez les enfants malnutris, son taux est inférieur à 0,029 g/l. – Le taux normal de la Transferrine est de 2 – 3,5 mg/l. Son taux sérique constitue un indicateur du statut ferrique par l’intermédiaire de la capacité de fixation de la transferrine.
Les marqueurs de la Masse protéique musculaire et créatininurie
Il y a une relation entre créatininurie et capital protéique d’un individu. C’est le Créatinin Heigh Index (CHI) Le taux normal de la créatininurie est de 10 à 25 mg/kg/j. CHI = 60 – 80% : la dénutrition protéique est modérée. CHI < 60% : la dénutrition est grave. Créatunirie de 24 h CH = Créatunirie de 24 h d’un enfant de même taille X 100 6
Methylhistidinurie de 24 h (3MH)
L’excrétion urinaire de 4,2 µmol de 3MH correspond à 1 g de protéine musculaire. Sa diminution traduit une dénutrition par carence d’apport. L’inconvénient réside dans la nécessité d’un recueil d’urine, souvent difficile chez l’enfant durant 24 heures, et aussi une privation d’ingestion de viande et de poisson 3 jours avant l’examen.
Les marqueurs Immunitaires
La malnutrition présente une diminution des lymphocytes matures CD3, et des lymphocytes auxiliaires CD4 avec une involution thymique et une augmentation des lymphocytes immatures. Par ailleurs, il apparaît une hypersensibilité retardée aux tests cutanés vis-à-vis de divers antigènes tels que la tuberculine. Cette anergie cutanée est en rapport avec la diminution de la synthèse des protéines plasmatiques 2- Rappel clinique de la malnutrition protéino-énergétique de l’enfant. La malnutrition protéino-énergétique est la conséquence de plus de la moitié des décès d’enfants dans le monde (56% de décès, selon le réf 40). Elle est apparente dans les 2 à 3 premières années de la vie et peut être mise en évidence par : – l’insuffisance pondérale à la naissance ou IPN < 2.300 kg. – les indicateurs anthropométriques exprimés en pourcentage d’enfant ayant un rapport taille pour âge (T/A), poids sur taille (P/T), poids sur âge (P/A), inférieur à moins 2 écart type et / ou à moins 3 écart type, à la médiane ou la moyenne de la population de référence par l’O.M.S.(3) – le Kwashiorkor, dû à un déséquilibre de la ration protéique, avec présence ou non d’œdème, des lésions cutanées et des cheveux plus ou moins dépigmentés. – le marasme, conséquence de l’insuffisance calorique globale, caractérisé par la maigreur. – les formes mixtes, associant à la fois, les signes liés au Kwashiorkor et au marasme.
INTRODUCTION |