La hernie congénitale de la coupole diaphragmatique (HCCD) se définit par l’absence de développement de tout ou d’une partie d’une coupole diaphragmatique, cette anomalie entraine la présence dans le thorax de certains viscères abdominaux (estomac ; intestin grêle ; colon ; rate ; foie) aux moments cruciaux du développement pulmonaire fœtale [1].
Dans 80 % des cas il s’agit de la partie postéro-latérale de la coupole gauche appelée hernie de Bochdalek [1, 2]. Les autres sièges sont essentiellement les hernies droites dans 10 à 15% des cas, et plus rarement dans moins de 1% des cas hernies bilatérales [3]. La fréquence de cette pathologie est de l’ordre de 1/3000 à 1/5000 naissances avec une prédominance masculine [1, 2, 4]. Ses conséquences fonctionnelles sont particulièrement hétérogènes puisque certains enfants sont asymptomatiques à la naissance alors que d’autres présentent des difficultés majeures de l’adaptation à la vie extra-utérine pouvant conduire au décès [3]. L’HCCD est habituellement sporadique bien que de très rares formes familiales aient été rapportées [2]. Les HCCD sont associées à d’autres malformations (hypoplasie pulmonaire, HTAP, PCA, FO, malrotation intestinale, diverticule de Meckel et /ou des anomalies chromosomiques (trisomie13 ,18) dans 40% cas [2, 5, 6]. C’est ainsi que de nombreuses approches thérapeutiques ont vu le jour aussi bien en anténatal qu’en postnatal afin de réduire la mortalité et la morbidité relatives à cette malformation [3]. Malgré les progrès de la réanimation, la mortalité néonatale reste élevée proche de 40 à 70% essentiellement due à l’hypoplasie pulmonaire et à HTAP [3, 4, 7-9]. Notre travail est basé sur l’étude rétrospective des dossiers de 15 cas de HCCD colligée entre octobre 2009 et novembre 2012 au service de chirurgie pédiatrique et de la réanimation pédiatrique du CHU Mohamed VI Marrakech.
Historique
La hernie diaphragmatique congénitale est le résultat d’un défect de la cloison musculoaponévrotique qui sépare la cavité thoracique de la cavité abdominale. Ce défect conduit, pendant la vie fœtale, au passage des viscères abdominaux dans le thorax compromettant ainsi la croissance normale du poumon. Décrite pour la première fois en 1848 par Bochdalek, elle a pendant longtemps été considérée comme un simple défect du diaphragme, qu’un simple geste chirurgical permettait de fermer après réintégration des viscères herniés dans l’abdomen. Pourtant, malgré les progrès dans la prise en charge anté et postnatale, la mortalité de la hernie diaphragmatique congénitale en 1997 avoisinait encore 50%. L’étiologie et la pathogénie de la hernie diaphragmatique congénitale restent encore obscures notamment quant à son premium movens : est-ce le défect diaphragmatique ou l’hypoplasie pulmonaire qui est a l’origine de cette malformation ? De nombreux travaux expérimentaux ont permis, au cours des 30 dernières années, de mieux cerner sa physiopathologie [2,10]. Bien qu’elle fut sans succès, la première tentative de réduction chirurgicale de la HCCD par laparotomie eu lieu en 1888. Il faudra toutefois attendre encore une quinzaine d’années avant d’assister à la première réussite chirurgicale de correction du défaut de diaphragme chez un enfant et pas moins de 60 ans pour une correction réussi chez le nouveau –né. CROSS, en 1946, a rapporté le premier succès de réparation chirurgicale d’une HCCD à travers le foramen de BOCHDALEK chez un nouveau-né de moins de 24 heures de vie [11,12]. Le traitement laparoscopique des hernies diaphragmatiques n’a été décris qu’en 1991 par Kuster [11].
Rappel anatomique et embryologique
Le diaphragme forme une paroi musculo-tendineuse étanche qui divise la cavité cœlomique en cavités abdominale et thoracique. Il permet le passage d’éléments digestifs (œsophage), vasculaires (aorte thoracique et veine cave inférieur), nerveux ou lymphatiques. Son origine embryologique découle de quatre structures se développant entre la 4eme et la 7éme semaine de vie: le septum transversum, le meso-œsophage, les membranes pleuropéritonéales et parois latérales du corps. Les reliquats de ces structures forment le centre tendineux du diaphragme pour le septum transversum, les piliers du diaphragme par l’invasion des cellules musculaires du meso-œsophage, la partie musculaire latérale du diaphragme par les parois latérales [1, 2]. Les membranes pleuro-péritonéales peuvent manquer partiellement ou totalement. Leur hypotrophie voir leur absence détermine l’orifice de Bochdalek. Celui-ci est plus fréquent à gauche [1, 13]. Il siège à la partie postéro latérale du diaphragme, en dehors des piliers en regard des dixième et onzième cotes. Selon le point d’arrêt du développement des membranes, la surface de l’orifice de Bochdalek varie d’un défect ovalaire de 2 à 3 cm de diamètre jusqu’à une perte de substance intéressant la majeure partie d’un hémi diaphragme. Le bord antérieur de l’orifice, concave en arrière, est bien défini, alors que le bord postérieur peut se réduire en un simple bourrelet conjonctif ou musculaire [2, 10, 11, 14]. Son bord médial est musculaire alors que son bord latéral peut venir au contact de la paroi thoracique, et n’être signalé que par un léger ressaut de la séreuse [14]. La position et la forme du diaphragme thoraco-abdominal sont conditionnées par la respiration, la position du corps et le volume des viscères [11]. C’est ainsi que le diaphragme se répartit en deux parties : une périphérique qui se divise en trois portions et un centre phrénique .
La partie périphérique : constituée de trois portions
a. La portion sternale :
La plus petite qui relie le centre tendineux à l’appendice xiphoïde par essentiellement deux petites fibres séparées par la fente de Marfan, cet orifice est avasculaire.
b. La portion chondro-costale
Les insertions se font sur la face interne des six dernières côtes. Insertion chondrocostale pour les trois sus-jacents et uniquement costale pour les trois dernières. Les fibres musculaires se fixent sur les deux arcades de Sénac; unissant ainsi la douzième côte à la onzième et la onzième à la dixième.
c. La portion lombaire: piliers et arcades
Les piliers sont plus ou moins verticaux. Le pilier gauche va jusqu’au niveau de la face antérieure de L2 parfois L3. Il a un rapport important avec le muscle de treizt qui relie l’angle duodéno-jéjunal avec ce pilier qui joue ainsi un rôle de suspenseur. Le pilier droit descend plus bas: L3 et le disque L3-L4 est en relation avec le ligament long antérieur de la colonne vertébrale. Ces deux piliers forment un lit fibreux pour l’aorte. En haut, ils forment un anneau fibreux: le ligament arqué médian du diaphragme qui limite l’hiatus aortique. Chacun des piliers est renforcé par un pilier accessoire. Les arcades sont d’avantage horizontales, elles sont dans le prolongement des arcades de Sénac, ce sont les arcades du psoas et du carré des lombes. Dans la partie musculaire du diaphragme thoraco-abdominal, sur l’arcade du carré des lombes, il y a un hiatus appelé l’hiatus costo-lombaire, il peut être le siège d’inflammation suite à un rapport de la plèvre avec l’espace rétro péritonéal qui peuvent rivaliser du fait d’une importante différence de pression, on peut alors parler de hernie pleurale.
le centre phrénique
Il est composé de trois folioles comme un trèfle à trois feuilles: La foliole antérieure est la plus étendue, les folioles gauche et droite sont reliées entre elles par une bandelette semi-circulaire inférieure; tandis qu’une bandelette semi-circulaire supérieure lie la foliole antérieure à la foliole droite. D’autres fibres plus sagittales relient la foliole antérieure aux folioles latérales.
Données épidémiologiques
Les caractères épidémiologiques de la HCCD sont difficiles à définir avec précision. En effet, il s’agit d’une malformation rare, au pronostic sombre. De plus, la mortalité «cachée » relative à cette pathologie n’est pas négligeable. De ce fait, peu d’études se sont consacrées exclusivement à l’épidémiologie de cette pathologie [4, 19].
Incidence
Dans la littérature l’incidence rapportée de la hernie diaphragmatique congénitale varie entre 1/3000 à 1/5000 naissances vivantes [1, 11,19-27]. Pour ce qui s’agit de la hernie diaphragmatique de Bochdalek, elle survient dans 1/3500 naissances vivantes [28-30]. Environ 60% des cas de HCCD bénéficient d’un diagnostic prénatal, ce qui permet d’une part d’éliminer les anomalies associées (dont les anomalies chromosomiques) présentes dans 25% des cas et d’autre part de préparer la naissance dans une structure adaptée en termes de réanimation et de chirurgie néonatale [21, 28]. Au Maroc, il n’y a pas de registres des malformations congénitales, aucune incidence de la HCCD dans notre pays ne peut être avancée. Notre série ne comporte que 15 cas de HCCD durant la période d’Octobre 2009 à Novembre 2012. Ce chiffre ne reflète certainement pas la réalité, parce qu’on peut avoir :
– décès par DRNN (détresse respiratoire néonatale) avant le diagnostic
– diagnostic non fait du fait des symptômes non spécifiques dans les formes à révélation tardive au sein des hôpitaux périphériques.
-diagnostic anténatal se fait rarement. Dans notre série elle a été faite chez un patient.
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