La gestion des risques à l’hôpital

La gestion des risques à l’hôpital

Contexte et enjeux Après les actes invasifs et les infections nosocomiales, les médicaments constituent la 3ème cause d’évènements indésirables graves (EvIG). En France, les études ENEIS (Enquête Nationale sur les Evènements Indésirables associés aux Soins) de 2004 et 2009 ont montré que 275 000 à 395 000 EvIG surviennent par an à l’hôpital, dont un tiers sont considérés comme évitables. Parmi ces EvIG, 32.9% sont liés au médicament et 51.2% d’entre eux sont évitables13. En outre, le guichet des erreurs médicamenteuses de l’ANSM révèle qu’un EvIG sur deux serait lié à une erreur médicamenteuse14 . Les enjeux de la gestion des risques sont nombreux. En effet, la survenue d’évènement indésirable grave et d’erreurs médicamenteuses sont source de dommages pour le patient mais aussi pour l’établissement de santé, par leurs répercussions médiatiques, financières et juridiques parfois importantes. Les chiffres alarmants des études ENEIS et les accidents successifs liés à des erreurs  médicamenteuses ont conduit les gouvernements à promouvoir une culture du risque dans les établissements de santé à travers un encadrement législatif strict. 

Réglementation en vigueur

Depuis la loi Hôpital Patient Santé Territoire (HPST) de 2009, chaque établissement de santé a pour mission de mettre en place des démarches de gestion des risques associés aux soins, sous la responsabilité d’un coordonnateur des risques. Cette loi, mise en application par le décret du 12 novembre 2010 relatif à la lutte contre les EvI liés aux soins, entérine le concept de culture de sécurité des établissements de santé15 . Par ailleurs, l’arrêté du 6 avril 2011 relatif au management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse et aux médicaments dans les établissements de santé16 suit les objectifs de la loi HPST en se focalisant sur le circuit du médicament. La sécurisation de circuit du médicament repose sur la règle des 5B : « le bon médicament administré à la bonne dose, au bon moment, par la bonne voie d’administration, au bon patient ». Cette règle est la pierre angulaire de la politique du médicament des établissements de santé. Malgré un durcissement de la législation, les textes réglementaires fixent des objectifs mais ne constituent pas des guides méthodologiques à destination des établissements de santé. Les agences compétentes (HAS, ANAP, ANSM etc.) ont mis à la disposition des établissements de santé des guides et des outils pour les accompagner dans leur démarche de gestion des risques.  La DGOS (Direction Générale de l’Offre de Soins) a diffusé un guide « qualité de la prise en charge médicamenteuse – outils pour les établissements de santé » 17 qui présente les différents outils et ressources bibliographiques permettant de sécuriser chaque étape de la prise en charge médicamenteuse (prescription, préparation, administration etc.)  Suite à une saisine de la DGOS, la HAS a placé la gestion des risques parmi les critères prioritaires de la certification v2010 des établissements de santé. Au sein d’un guide de « gestion des risques associés aux soins en établissements de santé », la HAS a recensé des outils pratiques déjà testés sur le terrain : analyse d’évènements indésirables, revue de morbi-mortalité, audits, check-list, etc18 . Dans ce guide, on retrouve notamment : – la gestion des évènements indésirables – le management de la prise en charge médicamenteuse du patient – la prise en charge médicamenteuse du patient – l’analyse des risques a priori 30 Les trois premiers critères font partie des Pratiques Exigibles Prioritaires (PEP) fixées par la HAS. Par ailleurs, la HAS est à l’origine d’un guide « outils de sécurisation et d’auto-évaluation de l’administration des médicaments » 19 et qui contribue à la mise en œuvre de l’arrêté du 6 avril 2011.  L’ANSM, en collaboration avec la DGOS, a élaboré une liste des 12 « never events » ou évènements qui ne devraient jamais arriver. Ces « never events » sont à l’origine d’accidents graves, potentiellement létaux et évitables (exemple : erreur d’administration de potassium injectable). Cette liste a permis de prioriser les actions à mener au sein des établissements de santé et de sensibiliser les professionnels de santé. Par ailleurs, l’ANSM dispose depuis 2005 d’un guichet des erreurs médicamenteuses qui centralise toutes les déclarations d’erreurs médicamenteuses, ayant conduit à un évènement indésirable ou non.  L’ANAP (Agence Nationale d’Appui à la Performance des Etablissements de Santé) a élaboré l’outil « Inter Diag médicaments », un outil d’auto-évaluation des risques par l’unité de soins qui est à l’origine du questionnaire ARCHIMED20 .  L’ANAES (Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé) a publié un guide « méthodes et outils des démarches qualité pour les établissements de santé » 21 qui répertorie les différentes méthodes de gestion des risques à disposition des hôpitaux. II.3. Terminologie et concepts II.3.1. Notion de risque La notion de risque est généralement associée à la gravité et à la probabilité d’occurrence d’un évènement redouté. Il peut être défini comme « la probabilité qu’un effet spécifique se produise dans une période donnée ou dans des circonstances déterminées » (Directive Seveso 2, 1996). Le risque étant inhérent à l’activité humaine, il ne peut être supprimé. Toutefois, il peut être appréhendé, quantifié et géré. La gestion des risques s’applique à réduire certains risques ou à en prévenir d’autres. Ainsi, elle s’intègre dans toute bonne démarche de gestion de projet, quel que soit le domaine concerné. Les grands principes de la gestion des risques peuvent être exprimés ainsi22 : – la sécurité des personnes doit primer avant toute chose – mieux vaut prévenir que guérir – la sécurité d’une organisation est la résultante des efforts de chacun – l’erreur est humaine – l’effort de sécurité doit être adapté aux objectifs – les résultats de l’effort de sécurité doivent se mesurer 31 Dans le secteur médical, le risque doit être appréhendé dans toute décision, comme l’enseignait déjà Hippocrate avec le « primum non nocere ». Aujourd’hui, l’expression a évolué vers la notion de ratio bénéfice/risque : le risque est toléré si le bénéfice pour le patient est suffisant. Lors de l’évaluation d’un médicament, un ratio bénéfice/risque favorable conduit à sa commercialisation, tandis qu’un ratio bénéfice/risque empêche l’obtention de son AMM. La réévaluation du ratio bénéfice/risque d’un médicament est régulièrement effectuée en fonction des données de pharmacovigilance. Le principe de gestion des risques en continu est fondamental. 

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