LA GESTION DE L’EAU D’IRRIGATION SUR LA RIVE GAUCHE DU PERIMETRE

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LA METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET LA PRODUCTION DES DONNEES

S’interroger sur les réalités qui nous entourent, c’est vouloir en comprendre les éléments qui les constituent, qui en déterminent la forme ou qui la causent telle qu’elle apparaît sous notre regard. Comprendre, c’est entrer dans le processus de rationalité, c’est-à-dire d’une explication organisée, logique et causale. De fait, les réalités ne peuvent être saisies qu’à travers un regard construit, c’est une démarche méthodologique qui permet le passage entre le champ théorique et l’observation empirique à saisir.
L’étude qui a été conduite s’est fondée sur une méthode mixte c’est à dire qualitative et quantitative. Il faut préciser qu’elle est essentiellement qualitative, la quantification vient en appoint pour vérifier certaines variables.

Le milieu d’enquête

La recherche entreprise a été menée sur la rive gauche de la plaine aménagée de Bagré. Elle a une superficie de 600 hectares aménagés. La rive gauche est constituée d’un regroupement de six villages. Initialement, la Maîtise d’Ouvrage de Bagré (MOB) avait installé 125 familles de producteurs par village dont plus de sept cent familles à la rive gauche. Mais ce chiffre est revu à la baisse à cause des départs de certains producteurs. Deux villages de la rive gauche ont été retenus comme sites de réalisation des enquêtes, pour des raisons de faisabilité et de disponibilité des producteurs. Il s’agit des villages numéros 5 (V5) et 1-A (V1-A).

L’échantillonnage

La population mère constitue l’ensemble des riziculteurs exploitant la rive gauche. Pour la réalisation des enquêtes, deux types d’échantillon ont été déterminés. Il s’agit de l’échantillon raisonné pour les entretiens sémi-directifs et l’échantillon aléatoire simple pour le questionnaire. Pour les entretiens sémi-directifs, l’échantillon raisonné consiste à identifier les personnes susceptibles de mettre en évidence le phénomène de la gestion de l’eau d’irrigation sur le périmètre de Bagré. Le choix de cet échantillon s’est fait en fonction des variables suivantes : l’autochtonie, le genre (sexe et âge), la place occupée par le producteur dans le village, l’activité socio-professionnelle antécédente. L’activité socio-professionnelle antécédente constitue un critère de sélection des enquêtés, parce qu’il y a eu des producteurs sur le périmètre aménagé du petit barrage Bagré (périmètre pilote), qui ont été installés dans les années quatre vingt. Ce groupe de producteurs a bénéficié de formations en techniques d’agriculture irriguée et sont les premiers à pratiquer l’agriculture irriguée sur les terres de Bagré. Ces producteurs ont été réinstallés à la plaine après l’aménagement. C’est un groupe ressource, détenteurs d‘informations qui orienteront la vérification des hypothèses de travail.
Il faut noter que pour cette catégorie d’enquêtés, il n’a pas été arrêté un chiffre pour l’échantillon, mais le principe de la saturation de l’information a été appliqué. Il a été réalisé trente deux (32) entretiens individuels. Pour les autres acteurs impliqués dans la gestion de l’eau, la Maîtrise d’Ouvrage de Bagré (MOB), la Société Nationale Burkinabé d’ Electricité (SONABEL), la Mission Technique Chinoise (MTC), les responsables des servies eau d’irrigation et entretien des ouvrages de ces structures ont été rencontrées.
En ce qui concerne l’échantillon aléatoire, la taille a été retenue à partir de la base de sondage constituée une fois sur le terrain. Le tirage des enquêtes a suivi la procédure du tirage indépendant. Dans les deux villages, la base de sondage était de 200 producteurs et 71 producteurs ont été enquêtés.

Les techniques de production de données

Tous les procédés auxquels l’on recourt pour la production des données et la mise en œuvre de l’étude constituent les techniques de production de données. L’étude utilise comme techniques de production de données, une recherche documentaire, des enquêtes de terrains et une observation participante. Ces techniques de collecte de données ont adopté les outils suivants :
– des guides d’entretien
– des questionnaires
– des fiches d’observation

La recherche documentaire

La recherche documentaire s’est effectuée dans des centres de documentation à Dakar, à Ouagadougou et à Bagré. Elle a consisté à rassembler les informations pertinentes sur le sujet d’étude et la méthodologie de recherche à partir des sources écrites existantes. Il s’est agit de consulter et d’exploiter des ouvrages généraux et méthodologiques, des rapports, des articles, des textes législatifs, des mémoires et des thèses…

L’entretien sémi-directif

L’entretien sémi-directif convient bien au genre d’étude, entrepris ici. Il s’agit de proposer des guides d’entretien thématiques aux interlocuteurs afin de recueillir des informations appropriées aux objectifs de la recherche. Deux types de guides d’entretien ont été élaborés, l’un à l’endroit des exploitants et l’autre s’adressant aux structures de gestion de l’eau. Etant donné la longueur des guides d’entretien, des interviews à passages répétés ont été adoptées.
Les guides d’entretien s’articulent autour des thèmes centraux suivants :
– la représentation de l’eau ;
– les modes de recrutement des producteurs ;
– les règles de gestion de l’eau d’irrigation ;
– les institutions de gestion de l’eau d’irrigation ;
– les acteurs impliqués dans la gestion de l’eau d’irrigation ;
– les enjeux et les conflits liés à l’eau d’irrigation.
Les entretiens se sont déroulés en langue locale mooré en ce qui concerne la population cible, parce que la majorité des interlocuteurs s’exprime assez bien en cette langue bien qu’ils soient dans une aire linguistique bissa.
Afin d’avoir l’intégralité des discours produits auprès des interviewés, les entretiens ont été enregistrés à l’aide d’un magnétophone (avec l’autorisation des interlocuteurs).

Le questionnaire

La démarche est essentiellement qualitative, le questionnaire vient en complément aux entretiens afin de mesurer certaines hypothèses dans le but de les confirmer ou de les infirmer. Pour ce faire il a été identifié certains indicateurs à partir des quels le questionnaire a été construit. Ce sont :
– le payement de la redevance hydro agricole ;
– le respect du calendrier agricole ;
– les institutions intervenant dans la gestion de l’eau d’irrigation ;
– le fonctionnement de l’organisation des producteurs ;
– la présence et la gestion des conflits liés à l’eau d’irrigation.
Le questionnaire a été administré sous forme d’interview à questions ouvertes et fermées.

L’observation

Dans l’appréhension plus ou moins complète du phénomène étudié, l’observation participante est une bonne entrée pour repérer les significations que les acteurs sociaux attribuent à leurs actes. Il existe des faits empiriques complexes qui ne se révèlent qu’avec une observation minutieuse des situations. En effet, Del Bayle l’affirme en se référant à Malinowski « il est des phénomènes de grande importance que l’on ne saurait enregistrer en procédant à des interrogations ou en déchiffrant des documents, mais qu’il importe de saisir dans leur pleine réalité. Appelons-les, les impondérables de la vie quotidiennes » Malinowski cité par Del Bayle39. Les évènements observés ont permis de déceler des lacunes dans la gestion de l’eau et la nature de cohabitation des différents acteurs. Les significations que les producteurs attribuent à leurs actes sont révélatrices de la dynamique, des processus, des composantes et des situations sociales du phénomène observé. Les fiches d’observation se présentent comme suit :
• La physionomie du périmètre de la rive gauche (parcelles non exploitées)
• Les ouvrages hydrauliques (barrage, canaux d’irrigation et de vannes)
• L’alimentation des parcelles en eau
• Le réseau de drainage
• L’exploitation en amont du barrage

Le déroulement de l’enquête

Les enquêtes de terrain se sont déroulées du mois de septembre au mois de novembre. Dans le but de produire des données contextuelles et transversales, nous avons opté pour une démarche itérative. Le séjour et les passages répétés sur le périmètre et dans les villages des producteurs ont facilité notre immersion dans le groupe.
Des visites des parcelles, des canaux d’irrigation et de l’amont du barrage ont été faites et décrites. Ce qui induisait des discussions et des échanges avec les irrigants présents sur les parcelles. La visite de l’amont du barrage a laissé percevoir le problème de la protection des berges et donc la survie de l’ouvrage.

Les techniques d’analyse

La méthode de travail étant mixte, nous avons utilisé l’analyse de contenu pour les données qualitatives et l’analyse statistique à travers le logiciel SPSS pour les données quantitatives. L’analyse de contenu comme le décrit Berelson paraphrasé par Gautier40 (1990), est une technique de recherche visant la description objective, systématique et quantitative du contenu manifeste des communications. En effet, le choix préféré cette technique pour analyser le corpus de données permettra de mieux comprendre et de faire ressortir les stratégies adoptées par les différents acteurs pour gérer l’eau d’irrigation. L’analyse sera constituée des discours, des entrevues, et des sources écrites. L’unité d’analyse retenue est le thème dont la fréquence dans le discours sera un important indicateur pour l’analyse.
Une fois les données recueillies, nous avons transcrit les entretiens pour procéder ensuite au dépouillement et à l’analyse.
La triangulation des données a permis le croisement de discours variés et riches obtenus à partir d’une diversité d’informations fournies grâce à l’échantillon raisonné. Par ailleurs, l’observation participante a sans doute facilité la perception de la réalité sociale de la gestion de l’eau. A travers la visite du périmètre et du réseau d’irrigation, les discours produits par les entretiens, ont pu être éclairés, complétés, confirmés ou infirmés.

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Les difficultés rencontrées

Les difficultés rencontrées dans l’élaboration de ce document sont liées au terrain. La période de collectes de données a coïncidé avec celle des travaux agricoles. Ce qui a rendu le travail d’enquête difficile à cause de la non disponibilité des producteurs. Nous étions contraint d’administrer les entretiens et les questionnaires matinalement ou nuitamment.
En outre la question de la gestion de l’eau est délicate dans la zone ce qui n’a pas facilité notre intégration sur le site. Nous avons commencé par des visites de courtoisie, des discussions informelles, la participation à des réunions afin de mettre les producteurs en confiance et de dissiper leur peur ou réserve. Ce n’est qu’après que nous avons pu réaliser nos enquêtes. Il faut ajouter qu’avec les imprévus de l’enquête, nous n’avons pas eu suffisamment de temps pour l’analyse des données.
Par ailleurs, les données qualitatives produites gagneraient à être traitées sous un logiciel d’analyse qualitatif, NUDIST notamment qui aurait allégé le travail manuel de l’analyse. L’exploitation des données était complexe vu la quantité et la richesse des informations. Il faut noter également que la distance du site d’étude et la non disponibilité des moyens de transport compliquaient d’une manière ou d’une autre nos déplacements.
Le chapitre a décrit la démarche scientifique adoptée pour produire ce document.
Les données recueillies sont analysées et interprétées dans les chapitres suivants.

LA GESTION DE L’EAU D’IRRIGATION SUR LA RIVE GAUCHE LA OERENNITE DU PERIMETRE

LA MONOGRAPHIE DU SITE D’ETUDE

La monographie présente la physionomie générale du site d’étude. Elle décrit les caractéristiques physiques et sociales de Bagré. Elle met en exergue les atouts et les potentialités de la zone.

Situation géographique et contexte climatique

Le site de Bagré est situé dans la province du Boulgou (Tenkodogo), à 230 kilomètres au centre-est de Ouagadougou (cf. carte n°1). Les coordonnées géographiques de la zone sont de 11°30’ et 11°23’ de Latitude Nord et de 0°25’ et 0’35 de Longitude Ouest (MOB, 1999)41.
Le site est marqué par la présence du barrage qui alimente en aval, une plaine irriguée situé à cheval entre deux provinces : la province du Boulgou à travers les départements de Tenkodogo, Bittou et Bané sur la rive gauche, Zabré sur la rive droite, et la province du Zoundwéogo à travers le département de Gomboussougou sur la rive droite (cf. figure n°3).
Carte n°2 : Présentation du plan d’eau de Bagré et du périmètre aménagé
Bagré est soumis à un climat tropical de type soudano-guinéen, caractérisé par une double saison.
Une saison sèche s’étalant de novembre à mai. Ce sont les vents d’harmattan soufflant dans la direction Nord- Est qui marquent une période sèche et fraîche (novembre à janvier) et une période sèche et chaude (février à mai). Les températures minimales moyennes s’observent en décembre et en janvier et sont de l’ordre de 17 degré Celsius et les maximales en avril et mai pouvant dépasser 40 degré Celsius.
Une saison humide allant de juin à octobre, influencée par les vents de mousson du sud-ouest. La pluviométrie moyenne annuelle observée est comprise entre 700 et 900 mm (MOB, 1999)42. La température moyenne annuelle est voisine de 29° degré Celsius avec une variation inférieure à 5° sur l’année. Concernant la végétation naturelle, elle varie de la savane arborée à la savane arbustive avec des forêts galeries.

Contexte géologique et pédologique

Le relief dominant est une vaste plaine située à une altitude de 250 à 300m. En effet, l’ensemble de la région est dominé par des reliefs résiduels rocheux dégagés par l’érosion. Le massif le plus culminant est à 386 mètres et est situé au sud du village de Lenga. Le massif se prolonge en rive droite du Nakambé par un axe de collines érodées orientées nord-est/sud-ouest. L’on note également la présence d’affleurements rocheux peu élevés.
Au niveau pédologique, la majorité des sols est issue des roches précambriennes du socle africain. Les sols de l’ensemble du département sont sableux, sablo-argileux ou argilo-sableux. La présence d’argile montmorillonite est liée à un milieu riche en base et en drainage interne. Les sols hydromorphes sur matériaux hétérogènes sont présents dans les zones alluviales, les sols limoneux très fertiles sur les terrasses, les petits bourrelets de berges sableux ainsi que sur les différents types de dépressions argileuses d’hydromorphie variable. Alors que les sols vertiques sont présents dans les zones inondées et ont un PH compris entre 6,5 et 8,5, les sols de la région confèrent aux eaux du lac Bagré un PH légèrement alcalin et une conductivité relativement bonne (MOB, 1999). Les sols rencontrés sur le périmètre irrigué appartiennent à cinq classes qui sont :
• Les sols bruns allu-colluviaux couvrant la majeure partie de la superficie totale ;
• Les sols peu évolués d’érosion ;
• Les sols ferrigineux tropicaux ;
• Les sols hydromorphes ;
• Les lithosols sur roches.

L’hydrographie

La zone de Bagré bénéficie d’un réseau hydrographique dense avec comme principale source d’eau, le Nakanbé. Il est situé dans le bassin fluvial de la Volta et est le deuxième grand fleuve du pays après le Mouhoun. Le Nakanbé prend sa source au Nord-Est de Ouahigouya sous le 14ème parallèle après le Mouhoun, coule dans le sens Nord- Sud, passe par le département de Bagré, traverse la frontière Burkina-Ghana, pour se jeter dans le lac Volta au Ghana. Il draine un bassin versant de 34 000 km2 au site de Bagré (DGIRH, 2004)43.
C’est sur ce bassin versant que le barrage de Bagré est construit. Sa longueur s’élève à 84 km, sa largeur moyenne est de 3km et la surface de la retenue est de 255 km2. La longueur de la digue est de 4,3 km et sa capacité est de 1,7 milliards de m3. C’est un ouvrage hydroélectrique et hydroagricole. Il est doté de deux turbines de 8MW et un potentiel irrigable de 30 000 hectares dont 7300 hectares par gravité. Il y a 1800 hectares déjà aménagés dont 600 hectares à la rive gauche et 1200 hectares à la rive droite. L’utilisation des eaux du barrage dont l’apport moyen annuel de 1 270 Millions de m3 (MOB, 2002)44 est répartie comme suit:
– 12% pour les besoins agricoles
– 68% pour le turbinage
– 13% pour l’évaporation
– 7% pour le déversement
Outre le lac artificiel de Bagré, il existe une petite retenue collinaire d’une capacité de 3,5 millions de m3 (petit Bagré) et des plans d’eau naturels temporaires au nombre de 11 selon les données 2005 de la MOB. L’on observe également l’existence d’une nappe phréatique plus ou moins profonde exploitable à travers des puisards assez répandus dans la zone.

Table des matières

INTRODUCTION
1ERE PARTIE : CADRE GENERAL ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE I : CADRE GENERAL DE LA RECHERCHE
CHAPITRE II. LA METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET LA PRODUCTION DES DONNEES
2ème partie : LA GESTION DE L’EAU D’IRRIGATION SUR LA RIVE GAUCHE LA OERENNITE DU PERIMETRE
CHAPITRE I : LA MONOGRAPHIE DU SITE D’ETUDE
CHAPITRE II : LA GESTION DE L’EAU D’IRRIGATION SUR LA RIVE GAUCHE DU PERIMETRE
CHAPITRE III: LA SURVIE ET / OU LA PERENNITE DU PERIMETRE
CONCLUSION ET RECOMMADATIONS
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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