De nos jours, toute activité industrielle ou agricole nécessite l’utilisation de moyens de transport entre le lieu de production et le lieu de consommation, ou entre le lieu de commercialisation et le lieu de consommation. À cela, il faut ajouter les conséquences de la mondialisation que sont les délocalisations, l’augmentation des distances interentreprises et l’augmentation des flux : tout cela crée une demande accrue de service de transport intermodal et d’infrastructures de transport multimodal. En effet, un produit fabriqué localement peut être exporté vers les quatre coins de la planète par divers modes de transport. Un client ou un fournisseur peut également s’approvisionner en matières premières de par le monde, augmentant ainsi les distances de transport et conduisant à l’utilisation de divers modes de transport pour faciliter la mobilité et l’accessibilité de certaines zones.
Par ailleurs, cette thèse est née d’un constat à la fois national et mondial ; c’est que le secteur du transport et en particulier le transport de marchandises est l’un des secteurs économiques émettant le plus de gaz à effets de serre .
En effet, les impacts du transport sur l’environnement et la société sont indéniables de nos jours. La mondialisation et les prises de conscience environnementales sans cesse croissantes contraignent les autorités gouvernementales et les entreprises à prendre des mesures pour limiter les impacts de leurs activités sur l’environnement et la société. Les entreprises de logistique et de transport ne sont pas en reste dans cette dynamique, et des recherches sont de plus en plus menées pour mieux comprendre et limiter les impacts émanant de leurs activités.
Dans le secteur du transport de marchandises, les consommations d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre dépendent fortement de l’organisation de la chaîne logistique (de l’extraction des matières premières à la vente du produit fini) mais aussi des choix technologiques et des modes de transports. Le secteur des transports est le premier consommateur de produits pétroliers et le premier émetteur de gaz à effet de serre. Il est donc impératif de réduire le niveau de consommation d’énergie des transports et de s’orienter vers des modes ayant moins d’impacts sur l’environnement, tels que le rail et les voies navigables.
La chaîne logistique est ainsi entrée dans une ère où les défis environnementaux et sociétaux sont au cœur des préoccupations non seulement des décideurs, mais également des populations touchées par ces activités. Comment transporter des marchandises jusqu’au client final en impactant le moins possible la société et l’environnement, tout en garantissant un temps de transport raisonnable ainsi qu’un coût satisfaisant les parties prenantes ? Comment trouver un compromis entre ces différents aspects ? Cette thèse essaie de proposer une réponse à ces interrogations.
Positionnement du problème et plan de la thèse
Durant la dernière décennie, de nombreuses études (Crainic et Kim, 2007 ; Ziliaskopoulos et Wardell, 2000 ; Caramia et Guerriero, 2009) se sont intéressées à différents aspects de la problématique du transport multimodal tel que la complémentarité des modes de transport, les modifications de politiques tarifaires, la gestion des flux entre modes et ses éventuelles répercussions environnementales. L’objectif de cette thèse s’inscrit dans une dynamique à la fois européenne et mondiale qui est la réduction des impacts environnementaux et sociétaux des systèmes de transport. Dans la littérature, plusieurs approches de réduction de ces impacts sont proposées : ces approches concernent entre autres des aspects organisationnels, des méthodes managériales respectant les normes ISO 14000 (ensemble des normes qui concernent le management environnemental), des études sur de nouvelles technologies des véhicules, l’éco-conduite…
Les critères environnementaux, économiques et sociétaux pris en compte dans notre étude sont le « coût de transport », le « temps de transport », les « dégâts dus aux transbordements », la « pollution atmosphérique », la « consommation d’énergie », les « nuisances sonores », et le « risque d’accident ». L’objectif de notre étude est de développer un système d’aide à la décision au choix d’un chemin dans un système de transport intermodal permettant de réduire ces impacts. Le coût et le temps de transport ne sont donc plus les seuls critères de choix d’un chemin. Dans ce cas, l’aspect environnemental n’est plus intégré en tant qu’une contrainte, mais en tant qu’un objectif à atteindre. Le système proposé devra, d’une part, guider le décideur au choix d’un itinéraire intermodal (succession de modes et de chemins) avec le meilleur compromis socio-environnemental et économique possible. D’autre part, nous visons également à apporter des réponses à la gestion du trafic, notamment par la prise en compte des problèmes de congestion dans notre système de décision.
Au vu du nombre de critères à prendre en compte, nous modéliserons notre problème sous la forme d’un problème de plus court chemin multiobjectif.
Pour ce faire, nous mettrons en place un algorithme d’optimisation permettant de trouver un compromis entre les différents critères considérés. Nous avons choisi de mettre en place un algorithme de colonies de fourmis multiobjectif permettant de prendre en compte le caractère intermodal du réseau de transport étudié ainsi que la multiplicité des critères étudiés.
Restructuration de la chaîne logistique face aux défis environnementaux et sociétaux : la chaîne logistique verte – état de l’art.
Il existe dans la littérature plusieurs approches de définition de la structure et du fonctionnement de la chaîne logistique. Par exemple, selon Harris la structure de la chaîne logistique concerne la configuration des réseaux de distribution et le choix des canaux de distribution (Harris et al., 2011). Elle inclut également la localisation des plateformes logistiques, la planification des flux de produits en tenant compte de la taille des lots à expédier et de la gestion des ressources de transport.
L’état actuel et la tendance de dégradation de l’environnement impliquent un besoin de changement dans les habitudes de consommation et de fabrication de produits. Il doit y avoir un changement fondamental dans la gestion et le fonctionnement des systèmes de production et de distribution de biens et services. Nous assistons à une évolution vers la durabilité ou « la soutenabilité » réalisée en opérant des changements profonds dans les différentes étapes de la chaîne logistique par le traitement des déchets, l’utilisation rationnelle des ressources, la limitation de la production de déchets et la gestion de la fin de vie des produits (Beamon, 1999). Cette notion de « soutenabilité » induit un changement des attitudes en termes de gestion de la chaîne logistique par la limitation des impacts sur la société, la faune et la flore tout en garantissant une gestion durable des ressources naturelles et des infrastructures telles que les routes; tout cela devant conduire à une restructuration de la chaîne logistique.
Introduction |