La frontière imaginaire et géographique. Les découpages et analyses de séquences

La frontière imaginaire et géographique. Les
découpages et analyses de séquences

Le terme frontière implique plusieurs lectures, le plus souvent elles dérivent en deux acceptions ou groupes : les abstraites et les concrètes. Je les ai classifiées de manière très générale en : frontières imaginaires, symboliques ou métaphoriques et frontières géographiques. Maintenant, j’analyserai la construction cinématographique que mon corpus propose, à savoir trois représentations différentes d’un sujet similaire. Les séquences que j’analyserai ici ont été choisies pour leur notoriété et leur importance lors de la construction de la frontière dans la triade d’étude. Les analyses ont été faites par le biais de découpages analytiques. Elles sont illustrées par des syntagmes de plans composés par des photogrammes. Le but est de décortiquer les films afin qu’ils puissent montrer comment la frontière est construite. Les découpages sont composés de catégories différentes selon le film, puisque rien ne garantit que l’utilisation de paramètres identiques apporte une information valable, car chaque œuvre possède des procédures de fonctionnements distincts. Dans l’intention de réaliser des analyses plus actuelles, je souligne que, à la différence du modèle proposé par Metz où il ne tenait compte que de la bandeimage, j’ajouterai aussi la catégorie de la bande-son en suivant quelques principes suggérés par Michel Chion1 , qui revendique l’importance du son et de l’audio au moment d’une création et construction cinématographiques. Cette sous-partie est un travail d’analyse très descriptif qui permettra de ne pas laisser passer d’indices importants sur la frontière et le voyage. Je travaillerai un film après l’autre. Premièrement, je présenterai six séquences de Los que se quedan, où je chercherai à comprendre la construction audio-visuelle de la frontière comme absence. Deuxièmement, je travaillerai avec Norteado, le seul film où la frontière est entièrement visuelle et présente. À la fin j’exposerai des séquences de A better life, film où la frontière est une question plus symbolique ou imaginaire que visuelle.

Los que se quedan. Séquences de la frontière absente et fantasmée

Construction de l’absence

Dans Los que se quedan, la notion de frontière comme question purement abstraite, voire imaginaire ou métaphorique, est pertinente. Je rappelle que ce film se passe entièrement au Mexique, dans des lieux réels. En effet, je fais l’hypothèse qu’au sein du film, la frontière ne peut être autre chose qu’une question d’absence. Je travaillerai sur les séquences où la frontière n’est pas dans le champ visuel, mais où elle est évoquée. Donc, l’intention des découpages analytiques du film est d’observer comment la frontière apparaît sans nécessairement y apparaître ; des ambiguïtés que j’essaierai de comprendre au long de cette section, pour plus tard répondre à la question : comment la frontière absente est-elle construite dans le film. Los que se quedan est composé par l’assemblage d’histoires de neuf familles qui habitent dans les zones rurales affectées par la plus grande émigration vers les États-Unis. Ces régions se trouvent au Mexique, dans les états de Michoacán, Yucatán, Zacatecas, Puebla et Jalisco. Les témoins sont groupés de la façon suivante. Les enfants de l’école maternelle de La Cañada, Jalisco ; la famille de Maricela et Evelyn Panduro à Dzoncauich, Yucatán ; Gerardo et Gloria Castillo à Félix Ireta, Michoacán ; la famille de Pascual et Juanita Serrano de Las Barrancas, Puebla ; Francisco et María Ruedas à Monte Escobedo, Zacatecas ; la famille de Yaremi et Rodolfo Manzo à Tizapán, Jalisco ; Rosi Martínez à Tlamanca, Puebla ; la famille de José Elías et Edubina Esparza à Laguna Grande, Zacatecas ; la famille de Raquel Gómez à San Cristóbal, Chiapas et Alejandro Guzmán à San Andrés Puebla. Dès le départ de la recherche je propose l’hypothèse que la frontière dans Los que se quedan est liée aux frontières qui dépassent l’aspect physique, c’est-àdire qui sont plus proches d’une question imaginaire et par conséquent, un aspect d’absence visuelle.

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Les transitions et les mouvements panoramiques

Ces séquences font partie des liaisons entre les séquences qui se trouvent dans « Portraits de témoins 1 ». Elles sont dans la deuxième partie du récit : la présentation de Maricela Panduro, ainsi que celle de Pascual et Juanita Serrano, témoins résidants respectivement dans les états de Yucatán et de Puebla. Comme le titre l’évoque, elles présentent les aspects généraux des endroits où ils y habitent, elles constituent aussi des transitions de récit entre les deux familles. Les deux séquences ont trois plans. Leur durée est courte, 25 secondes pour la première et 18 pour la seconde. Leur composition suit une dynamique similaire. Le cadre présente des plans généraux qui montrent des paysages, puis leur taille « rétrécit » légèrement jusqu’à devenir des plans d’ensemble. Les trois plans de chaque séquence sont supposés introduire l’espace géographique où les témoins habitent. Les trois premiers plans se déroulent dans un lieu chaud en plein milieu de la journée, les bruits de cigales renforcent cet espace diégétique. Les trois derniers plans se passent à la montagne, dans un horaire incertain, avec des couleurs plus froides. Les six plans sont pris dans des angles verticaux, soit en légère plongée ou contre-plongée. Ils ne présentent pas de narrateur déclaré. Leur PV est inscrit dans un type de monstration externe. Les six plans partagent l’absence de mouvement. Ils sont fixes, il n’y a rien qui bouge non plus à l’intérieur du champ visuel. Tout semble être statique, ils paraissent être de pures descriptions. Le seul type de « mouvement » se passe dans le hors-champ, notamment dans la partie sonore. Les plans correspondants à la deuxième séquence, 4, 5 et 6 ne contiennent pas de mouvement visuel, mais sonore ; car de la même manière que dans le premier exemple, le son suggère l’idée du mouvement hors-champ. À différence des premiers plans, dans les trois derniers on trouve aussi une bande musicale qui donne un effet narratif, disons, plus dramatique au récit.  

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