La fonderie et de la macroségrégation
La fonderie et la coulée de lingots
Présentation du procédé de fonderie
« La fonderie peut apparaître comme une technique de fabrication très simple, universellement connue, utilisée depuis des millénaires et qui consiste à « fondre un alliage et le couler dans un moule reproduisant la forme de la pièce à obtenir ». Le processus industriel se révèle beaucoup plus complexe; il s’agit en effet de fabriquer des pièces répondant à des critères bien définis, avec des cahiers des charges rigoureux, dans une gamme étendue d’alliages différents à qui l’on demande des performances de plus en plus élevées et fiables, dans des gammes de masse allant de quelques grammes à plusieurs dizaines ou centaines de tonnes, avec des précisions dimensionnelles toujours serrées, des états de surface les meilleurs possibles, des formes complexes pour intégrer le maximum de fonctions et avec des cadences de production allant de la pièce unitaire à plusieurs milliers de pièces par jour dans des conditions les plus économiques possibles. » P. Cuénin, Technique de fabrication – Généralités, Technique de l’ingénieur M3-510 Cette rapide présentation de la fonderie montre bien l’étendue des applications et aussi la complexité d’une étude scientifique de ce procédé très général. Ainsi, dans cette introduction, nous essayerons, en décrivant le procédé et les phénomènes physiques entrant en jeu, de mieux cerner la spécificité de la coulée de lingot dans le domaine de la fonderie. Descriptif d’un procédé de fonderie Le procédé classique de fonderie est constitué de cinq étapes principales : − fabrication des parties du moule − élaboration des alliages dans les appareils de fusion − coulée du métal dans les moules − refroidissement de la pièce dans le moule après coulée − refroidissement final de la pièce Chacune de ces étapes est un domaine d’étude à part entière avec ses problèmes techniques et ses contraintes économiques (très importantes dans ce domaine hautement concurrentiel). La Figure 1-1 montre l’ensemble des étapes intervenant dans le procédé, en montrant en particulier les récupérations de matière intervenant tout au long du procédé ainsi que les étapes de finition. Dans cette étude, seulement une étape du procédé sera traitée. En effet, nous nous limiterons à l’analyse de l’étape de refroidissement de la pièce dans le moule. Ainsi l’étape de remplissage ne sera pas étudiée et l’on considérera que le moule est initialement plein de métal liquide à une température homogène. Toutefois cet état initial peut aussi provenir des résultats d’un logiciel de remplissage de moules. 2 La fonderie et la coulée de lingots Figure 1-1 : Schéma de principe de la fabrication de pièces de fonderie. P. Cuénin, Technique de fabrication – Généralités, Technique de l’ingénieur M3-510
Domaines d’utilisation de la fonderie
La polyvalence du procédé de fonderie a conduit à un grand nombre d’applications que nous diviserons en deux catégories : la fabrication de pièces finies et la production de produits semi-finis. On peut ranger dans la première catégorie l’ensemble des applications conduisant à la production de pièces complexes ne nécessitant plus que des étapes de finition ou d’assemblage. La deuxième catégorie regroupe à l’inverse soit la coulée de pièce requérant une mise en forme très importante soit la coulée de lingots pour obtenir des nuances d’alliages très particulières. La Figure 1-2 illustre deux pièces coulées de forme assez complexe et à des échelles complètement différentes. 3 Introduction générale de la fonderie et de la macroségrégation Carter de cylindre en fonte (Fonderie du Poitou) Cage de laminoir en acier (Industeel Creusot) Figure 1-2 : Illustration de pièces coulées. P. Cuénin, Industrie de la fonderie, Technique de l’ingénieur M3-500 Pour la première catégorie la difficulté provient principalement de l’étape de remplissage, étant donné la complexité de la forme de la pièce. D’autre part, les pièces ainsi créées sont généralement de petite taille et peu massives. A contrario, les produits de la deuxième catégorie sont généralement massifs voire très massifs dans le cas des lingots, les processus physiques entrant en jeu au cours de la solidification sont alors d’un autre ordre. La convection dans le bain liquide devient importante et la solidification complète est longue, ce qui conduit à des transports plus importants et à un changement des processus de solidification et donc à la formation de structures cristallines différentes. Choix de l’étude de la coulée de lingots Cette différence fondamentale des processus de solidification entre les pièces complexes et les pièces massives comme les lingots, nous conduit donc à choisir la solidification en lingots pour notre étude. En effet le fait de négliger l’étape de remplissage dans le cas des pièces complexes est totalement inacceptable alors que dans le cas des lingots, on peut considérer qu’il s’agit d’une première approximation négligeant la solidification de la première peau intervenant lors du remplissage des lingots. Toutefois dans certains cas lors du remplissage de lingot une portion supérieure à 20% de la masse peut se solidifier en fonction de la vitesse de remplissage. Si la formation de cette couche solidifiée est importante à simuler, ce cas est moins critique que pour le remplissage de formes complexes et notre approximation reste encore utile.
Coulée de lingots
La coulée en lingots est une application assez particulière de la fonderie car si historiquement elle était utilisée pour l’obtention de la majorité des alliages, elle a depuis longtemps été supplantée par la coulée continue qui présente des avantages d’automatisation, de qualité des produits et surtout de productivité très importants. Toutefois la mise en place d’une production par coulée continue nécessite des investissements très importants qui ne sont économiquement viables que dans le cas de production de tonnage très important. Ainsi pour les marchés plus restreints le choix de la coulée en lingots peu être économiquement avantageux. 4 La fonderie et la coulée de lingots Les éléments de moules présents lors de la coulée d’un lingot sont schématisés sur la Figure 1-3. La lingotière est la partie principale qui permettra le refroidissement du métal liquide. Elle repose éventuellement sur une base plus ou moins isolante selon les besoins. L’alimentation en liquide peut aussi être réalisée par la base dans le cas de coulée en source. En effet deux types généraux de remplissage sont adoptés dans la coulée de lingots : la coulée en source et la coulée au jet (ou en chute) dont une variante est la coulée au panier. Dans la coulée en source, le remplissage est effectué par le bas à travers des canaux d’alimentation. Dans la coulée en panier, le remplissage est effectué en vidant un baquet de métal liquide guidé éventuellement par une quenouille qui permet de régulariser la pression ferrostatique, donc la vitesse, et aussi d’assurer le centrage du jet. Les avantages et les inconvénients de ces deux techniques sont résumés dans le Tableau 1-1. Un autre élément essentiel dans le design d’un lingot est le choix du masselottage. En effet la partie supérieure du lingot, appelée masselotte, va servir à conserver une poche de métal liquide qui permettra d’alimenter le reste du lingot lors de la solidification. D’autre part, étant donné que cette zone est bien isolée, elle se solidifiera en dernier et concentrera donc la majorité de la macroségrégation positive, par l’enrichissement progressif du bain liquide comme nous le verrons par la suite. C’est aussi dans cette zone que se concentrent des défauts tels que porosité et retassure.