La discipline à l’école primaire
Ma pratique de la discipline
Dans la partie précédente, j’ai dressé un rapide bilan des dispositifs de discipline scolaire déjà existants dans l’école dans laquelle j’enseigne. L’expérience que j’ai acquise au cours des premiers mois et les conseils des personnes qui sont venues m’observer m’ont permis de comprendre que je devais préciser mon utilisation de ces outils, me les approprier et aussi trouver ma propre manière d’assurer la discipline dans ma classe en instaurant des méthodes personnalisées.
L’anticipation – La préparation de la journée et des savoirs
Dans les premiers temps, j’ai essentiellement pensé à l’organisation des journées de classe en fonction des savoirs et des instructions officielles. Nous devions faire un certain nombre d’heures de chaque matière par semaine, on m’avait dit qu’une séance type durait environ 40 minutes et j’ai ainsi établi un emploi du temps très « scolaire ». Les journées étaient composées d’un certain nombre de séance qui s’enchainaient en fonction des temps de pause (les récréations et le déjeuner). Pour ce qui est du contenu des cours, je me suis basée de la même manière sur le bulletin officiel et j’ai paré au plus urgent en m’inspirant de séances toutes prêtes que je trouvais dans les manuels et sur internet. Malheureusement je me suis vite rendue compte que ce n’était pas suffisant et quelque fois inadapté. Je risquais de vite m’essouffler si je n’ajustais pas tout cela à ma classe et qu’il était fondamental que je personnalise les séances de travail. En effet, la discipline passe notamment par la maîtrise des savoirs et l’organisation de la journée. C’est le constat émis également par C. Félix et F. Saujat, tous deux maîtres de conférences à l’université d’Aix-Marseille. Ils expliquent qu’il est exigé de « l’enseignant qu’il propose un milieu favorable à l’étude des avoirs scolaires en vue de la réussite de tous les élèves, sans distinction aucune. D’une certaine manière, on peut dire que ce milieu, défini comme « aide à l’étude », est doublement organisé par le professeur ; d’abord, hors de la classe, au moment de la préparation de la leçon, puis en classe, par un jeu de négociations qu’il orchestre entre les élèves et lui-même. » J’ai constaté qu’au moindre temps mort, les élèves en profitaient pour faire tout autre chose. Dans le même esprit, au delà de 20 minutes de travail collectif, un brouhaha s’installait et j’avais beaucoup de mal à ramener le silence et à recentrer les élèves. J’ai donc appris à organiser la journée de manière rythmée, à éviter les temps morts. Je fais au mieux pour diversifier les activités (français, mathématiques, EPS, anglais etc.) et le type d’exercice (lecture, écriture etc.). J’alterne le travail individuel et collectif et je fais varier les supports (cahier, ardoise, feuille volante etc.) pour dynamiser la journée. De cette façon, les élèves sont en permanence sollicités et ne s’ennuient pas ce qui empêche les écarts de discipline. D’autre part, comme je l’ai évoqué en première partie de ce mémoire, la maîtrise des savoirs à transmettre fait partie des éléments à prendre en compte pour assurer une bonne gestion de classe. J-M Barreau nous apprend que « L’obéissance (…) nait de la reconnaissance envers celui qu’on juge comme compétent. » Le maître se doit donc de connaître les savoirs qu’il transmet. Pour cela, je m’applique dorénavant à passer plus de temps sur le contenu du cours en lui-même et à envisager en amont toutes les questions que les élèves pourraient me poser. Il est impossible de tout prévoir mais j’essaie d’anticiper au maximum afin de pouvoir répondre aux interrogations. Ce travail préparatoire me permet également d’être plus à l’aise en classe, d’être plus sure de moi et il est incontestable que les élèves le ressentent et cherchent moins à me déstabiliser. La prise en compte des individualités et la différenciation. Il s’agit d’une compétence présente dans le référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation : « Construire, mettre en œuvre et animer des situations d’enseignement et d’apprentissage prenant en compte la diversité des élèves. – Différencier son enseignement en fonction des rythmes d’apprentissage et des besoins de chacun. Adapter son enseignement aux élèves à besoins éducatifs particuliers. » Dans son ouvrage, C. Foussard affirme que « les élèves ont le droit d’attendre de leur maître des compétences à la hauteur de leurs possibilités, et tout élève est capable d’apprendre sur des supports à sa portée. Ce n’est pas leur rendre service que de diminuer les exigences, nos élèves méritent bien mieux que cela. »16 Effectivement, proposer des exercices trop simples a pour conséquence l’ennui et la recherche d’une autre occupation. L’inverse, proposer des exercices trop compliqués a le même effet. Cela peut générer une démotivation et une perte de confiance en soi et l’élève peut rapidement abandonner et chercher à s’occuper autrement. Il a donc fallu que je mette en place de la différenciation dans les activités et les exercices. A présent, je tente le plus possible d’adapter le niveau d’exigence en fonction des capacités de l’élève. Par exemple, le matin à l’arrivée, les élèves s’installent et se mettent directement au travail avec une gamme d’écriture. Il y a en général plusieurs phrases à recopier. J’ai mis au début de chaque phrase un certain nombre d’étoile. Il y a une, deux ou trois étoiles. Les élèves les plus rapides peuvent tout faire tandis que j’ai ciblé quelques élèves qui doivent faire seulement les phrases à une étoile ou deux étoiles. J’ai annoncé cette différence en expliquant que certains élèves étaient plus longs à écrire et que je voulais que tout le monde fasse de son mieux et s’applique. L’objectif à long terme étant que tous les élèves fassent toutes les phrases. Mes élèves ont bien intégré ce système d’étoile qui est à la fois clair et ludique, je l’ai donc décliné dans d’autres matières comme en orthographe ou en vocabulaire. – La préparation du matériel des élèves en début de journée. J’ai également remarqué que l’indiscipline était notamment générée par des déplacements nombreux et fréquents des élèves dans la classe. Ils cherchent des occasions pour bouger et se rendre intéressants auprès de leurs camarades. Mais ces mouvements engendrent du bruit et sont source de multiples bêtises. L’élève va ainsi en profiter pour parler à son copain sur le chemin, faire passer un message ou tenter d’attirer l’attention des autres élèves. Nous avons dans la classe un système de réserve de matériel. Il y a entre le bureau de la maîtresse et le tableau, un meuble dans lequel nous rangeons le matériel supplémentaire. Chaque élève met tout ce qu’il a en double dans un sac plastique individuel ce qui constitue une réserve au cas où il lui manquerait quelque chose. Au début de l’année je n’accordais pas d’importance à ces mouvements et donc les élèves étaient libres de se rendre à la réserve quand ils le voulaient. Or j’ai constaté que certains élèves s’y rendaient alors qu’ils avaient déjà dans leur trousse le matériel dont ils avaient besoin. Autre problème, les mouvements intervenaient à n’importe quel moment. Cela pouvait perturber le passage d’une consigne par exemple. J’ai donc mis fin à ces va-et-vient intempestifs en n’autorisant de se rendre à la réserve qu’en début de matinée ou d’après-midi. Nous en avons discuté tous ensemble et je leur ai expliqué qu’ils devaient s’assurer d’avoir le matériel indispensable au commencement de la journée. Ils ont mis quelques jours à s’habituer et j’ai rappelé cette règle à plusieurs reprises mais cela fonctionne bien à présent.
Éveiller le désir et maintenir la motivation
Pour P. Meirieu, il existe un véritable « malaise enseignant ». Les enseignants se sentent dépassés par le manque d’intérêt des élèves alors qu’ils déploient beaucoup d’énergie à essayer de faire classe. Ce malaise qui d’après lui « est l’expression d’une contradiction qui ne fut jamais aussi vive entre la pression sociale pour que les élèves apprennent et la 28 démobilisation de ces derniers, sollicités par mille choses qui leur paraissent infiniment plus séduisantes que les apprentissages scolaires. » Mais la motivation des élèves est essentielle pour assurer une certaine discipline en classe. Il s’agit donc d’éveiller le désir d’apprendre et de maintenir la curiosité afin qu’ils restent focalisés sur le déroulement du cours et intègrent mieux les apprentissages. J-M Barreau nous dit que « pour un bon didacticien, apprendre c’est placer l’élève dans le registre de « l’action », de « l’énigme », du « mystère », de « l’obstacle ». (…) C’est à dire dans la joie d’être à l’école, avec confiance et allégresse. » Pour cela je fais en sorte de rendre les activités ludiques et de féliciter régulièrement les élèves. Il me paraît également important de montrer ma propre motivation, c’est pourquoi je m’oblige à faire preuve d’enthousiasme. Je me dois de rappeler ici comme je l’ai déjà dit en première partie que cela est inscrit dans le référentiel des compétences des professeurs qui exige d’ « organiser et assurer un mode de fonctionnement du groupe favorisant l’apprentissage et la socialisation des élèves ». J’étais en début d’année, gênée de devoir en permanence sanctionner les mauvais comportements sans avoir à l’inverse de possibilité de récompenser les élèves qui respectent toutes les règles et qui font preuve de motivation. J’ai donc réfléchi à un système de « bons points ». J’ai eu envie de me servir des fusées de comportement (collées dans le carnet de liaison) non plus seulement pour sanctionner mais aussi pour récompenser. J’ai donc crée les étoiles. Si la fusée de la semaine précédente est toute verte et qu’elle a été signée par les parents alors le lundi matin je donne une étoile à l’élève.
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