La déjudiciarisation du traitement de l’impayé
La déjudiciarisation de pondération du traitement de l’impayé
Il est vrai que la baisse du contentieux de l’impayé en France devant les tribunaux commerciaux et civils est l’aboutissement d’une conjonction de plusieurs procédés et techniques y ayant contribué, car cette déjudiciarisation du traitement de l’impayé n’était pas le fruit du hasard. Elle traduit en premier chef la volonté du législateur Français de mettre en place des dispositifs de nature à traiter l’impayé efficacement sans recourir à la justice Etatique(p.1), les dispositifs en question ont fait l’objet de différentes révisions pour, d’une part répondre à cette question de l’impayé, et d’autre part veiller à ce que les juridictions nationales soient désencombrées des affaires relatives à l’impayé. Au demeurant, le développement du recouvrement amiable par les professionnels du recouvrement(p.2) ainsi que la concurrence permanente existant dans le marché de recouvrement a permis indéniablement de privilégier le recouvrement amiable au détriment du recouvrement forcé, eu égard aux résultats obtenus par ces professionnels qui promettent une efficacité absolue en matière du recouvrement amiable. Ceux-ci sont parvenus par des procédés qui leur sont propres à déjudiciariser le traitement de l’impayé.
La déjudiciarisation à caractère légal du traitement de l’impayé
A priori, la législation Marocaine semble dépourvue de dispositions ayant pour objet de déjudiciariser les affaires relatives au contentieux de l’impayé, la loi ne prévoit que très peu de textes de référence, en l’espèce ces textes ne sont pas la priorité de la politique juridique et judiciaire au Maroc, faute de sensibilisation quant à l’importance de ces dispositifs, ou leur utilisation à mauvais escient, étant donné que ceci provoque un dysfonctionnement de l’institution judiciaire de ce pays, à la suite de l’explosion du contentieux de l’impayé, et du nombre de dossiers titanesques auxquel elle doit faire face. En comparaison, le législateur Français qui était vraiment conscient de ces enjeux, a essayé d’y répondre à travers plusieurs dispositifs comportant des méthodes différentes, mais ayant la même finalité, celle de réduire le contentieux de l’impayé et de moins recourir à la justice étatique. La promotion de la médiation bancaire (A), et l’adoption d’une loi relative à la lutte contre les retards de paiement (B), témoignent de la volonté du législateur. A- La médiation bancaire 301. À l’exception d’une disposition de la loi bancaire373 Marocaine qui confère le droit à toute personne qui s’estime lésée d’un quelconque manquement aux dispositions de ladite 373-article 119 de la loi n° 34-03dispose : « Toute personne s’estimant lésée, du fait d’un manquement par un établissement de crédit aux prescriptions 175 loi par un établissement bancaire, de saisir Bank al Maghreb, qui agit en vertu des pouvoirs qui lui sont impartis pour effectuer des contrôles afin de déterminer le manquement, la banque centrale peut procéder, le cas échéant, à la recherche d’un terrain d’entente entre le client et l’établissement de crédit. En outre le législateur Marocain a institutionnalisé récemment la médiation à travers la loi 08-05 insérée dans le code de la procédure civile, relative à l’arbitrage et à la médiation conventionnelle, une loi applicable en matière civile, commerciale, ayant pour objet de prévenir ou de régler un différend, le législateur donne en effet aux parties la possibilité de convenir de la désignation d’un médiateur qui se charge de faciliter la conclusion d’une transaction mettant fin au différend, nonobstant, cette loi est restée peu connue, et les individus n’y recourent que rarement. De fait, elle n’a pas contribué à la baisse du contentieux de l’impayé devant les tribunaux nationaux. 302. Par ailleurs, dans notre domaine, particulièrement en matière bancaire, la médiation a fait l’objet d’une intervention législative vraisemblablement destinée à désencombrer les tribunaux des litiges, notamment bancaire, y compris ceux relatifs à l’impayé et également ceux qui opposent les établissements du crédit et leurs clients. Outre la médiation judiciaire régie par le décret n° 96-652 du 22 juillet 1996, le législateur Français a mis en place une loi tellement attendue par le milieu bancaire avec pour objectif de réduire le nombre de litiges susceptibles de donner lieu à un contentieux judiciaire, il s’agit de loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite loi MURCEF. c’est une loi qui a fait l’objet de plusieurs réformes, et qui oblige l’ensemble des établissements de crédit à désigner un ou plusieurs médiateurs qui se chargent de proposer des solutions pour les litiges nés entre l’établissement de crédit et les particuliers non-professionnels relatifs aux services et prestations fournis par la banque, et relatifs également à l’exécution des contrats conclus entre les parties. Ainsi, seule une loi d’une telle teneur peut garantir au client autant d’avantages, comme à l’établissement bancaire, des avantages qui ont été soulignés par les travaux préparatoires de ladite loi374 dont on peut citer ici les plus importants : À l’égard des deux parties : – L’évitement des incertitudes et les longueurs des procédures judiciaires.
À l’égard du client
– La désignation des médiateurs se fait en fonction de leur compétence et impartialité. Ceuxci doivent jouir de l’indépendance organique nécessaire à l’exercice de cette mission. – la procédure de médiation offre une célérité certaine pour le client, vu que le médiateur doit statuer dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. – la gratuité de la procédure et son caractère non contraignant, hors accord des parties. À l’égard de l’établissement bancaire : – les banques peuvent ainsi avoir une vision d’ensemble des difficultés auxquelles se heurtent les clients dans leurs relations bilatérales. En dépit de sa récence, ce dispositif juridique grâce à plusieurs réformes introduites et venant étendre le domaine de cette loi (1) a servi néanmoins à faire baisser légèrement le contentieux de l’impayé bancaire et élargi la mission du médiateur (2). 1- Le domaine de la loi 303. Désormais, les clients des banques peuvent dans le cadre des litiges qui les opposent à un établissement bancaire saisir un médiateur. Il s’agit d’un mécanisme qui dérive des modes alternatifs de règlement de litiges, et qui est défini comme étant : « le mode de solution des conflits, consistant, pour la personne choisie par les antagonistes, à proposer à ceux-ci un projet de solution, sans se borner à s’efforcer de les rapprocher, à la différence de la conciliation, mais sans être investi du pouvoir de leur imposer comme décision juridictionnelle, à la différence de l’arbitrage et de la juridiction étatique. Plus vaguement, mission polymorphe et polyvalente qui interfère avec la conciliation dans l’exploration des voies d’apaisement des situations conflictuelles et la quête d’une justice alternative375 . » En effet c’est au regard de l’article 312-1-3 du code monétaire et financier que le législateur impose aux établissements de crédit de désigner un ou plusieurs médiateurs dont le champ de compétence est limité seulement aux litiges portant sur la conclusion de la convention de compte, de dépôt, l’ouverture, la clôture, et le fonctionnement du compte. En outre, le médiateur peut intervenir s’il est saisi pour les litiges liés à l’interdiction des ventes avec primes et les prestations de service qui y sont liées. Ainsi, les dispositions du code monétaire et financier sont d’ordre public, et applicables à l’ensemble des établissements organismes bancaires, y compris la banque de France. Au demeurant, la loi oblige les établissements bancaires à introduire une clause de médiation et à préciser les modalités pour y recourir. Celles-ci doivent figurer sur la convention du compte ainsi que sur les relevés de compte, or la réussite de cette mesure passait par une sensibilisation efficace et une information suffisante sur la présence de cette procédure peu connue jusqu’alors. Par ailleurs, en cas de survenance du litige prévu par les textes de la loi en vigueur, le client de la banque, qui ne doit pas être un professionnel, est contraint préalablement à toute saisine du médiateur, d’épuiser toutes les voies de recours internes à l’institution. Il doit, à cet effet, se mettre en rapport avec les services dûment habilités, à savoir le chargé de clientèle et le directeur d’agence, si ses réclamations restent vaines, le client pourrait saisir par écrit le médiateur, en l’occurrence par un courrier postal qui doit contenir l’objet de sa requête et comporter toutes les informations utiles pour l’instruction de la demande. La loi prévoit toutefois la possibilité pour le client d’être assisté par une association de consommateurs ou par un professionnel du droit si la charte de médiation le stipule. Ace propos, chaque banque dispose d’une charte de médiation dont elle définit les principes fondamentaux.