La définition de l’intimidation et ses différentes formes

État de la situation dans les milieux scolaires 

L’ouvrage de Smith, Morita, Junger-Tas, Olweus et Siee (1999) donne une perspective internationale de la problématique de l’intimidation. Il expose entre autres la recherche de Peter, Smith et Yohji (1999) qui indique que, malgré toutes les différences culturelles des pays concernés, les caractéristiques de l’intimidation en milieu scolaire présentent plusieurs similitudes. Par exemple, de nombreux élèves victimes d’intimidation ne parlent pas des gestes posés à leur égard et ne demandent pas d’aide. De plus, lorsque ces élèves intimidés demandent de l’aide, cela est souvent perçu comme méprisable aux yeux des pairs et quelquefois même par les adultes.

Pour O’Connell, PepIer et Craig (1999), le problème de l’ intimidation est omniprésent dans les milieux scolaires du Canada. Leur étude, réalisée auprès de 5000 Canadiens âgés de 5 à 14 ans, montre que 38 % des enfants rapportent être intimidés une à deux fois pendant un trimestre et que 15 % des élèves rapportent être intimidés plus d’ une à deux fois durant un trimestre. Une autre étude effectuée auprès de 4 743 enfants relate que 29,5 % des élèves rapportent intimider autrui une à deux fois par trimestre et que 6 % mentionnent intimider plus d’une à deux fois par trimestre (O’Connell, Sedighdeilami, PepIer, Craig, Connolly, Atlas, Smith et Charach, 1997).

Craig, Peters et Konarski (1998) se sont inspirés des résultats de recherche de L’Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes pour affirmer qu’un nombre significatif d’enfants canadiens est impliqué dans des situations d’intimidation. En effet, Craig et al. (1997) stipulent qu’au Canada, environ 1 garçon sur 7 entre l’âge de 4 et de Il ans (14 %) intimide les autres et environ 1 sur 20 (5 %) est victimisé par les autres, parfois ou très souvent. De plus, environ 1 fille sur Il entre 4 et Il ans (9 %) intimide les autres, tandis que 1 fille sur 14 (7 %) est  victimisée. Parmi les enfants rejoints pour cette étude, il a été relevé qu’un pourcentage plus élevé de garçons que de filles affichait des comportements d’ intimidation.

Par ailleurs, Atlas et Pepier (1997) ainsi que Craig et Pepier (1997) indiquent que souvent, lorsqu’il y a intimidation, on ne dénombre pas seulement deux protagonistes. En effet, 85 % des incidents relatifs à l’intimidation se produisent dans le cadre d’un groupe de pairs. La recherche canadienne menée par Q’Connell et al. (1997) stipule que 83% des élèves déclarent que le fait d’être témoin d’épisodes d’intimidation les rend mal à l’aise. Qui plus est, 41 % de ces élèves révèlent que lorsqu’ils sont témoins d’intimidation, ils essaient de venir en aide à la victime, dont Il% qui rapportent tenter d’ arrêter ces scènes d’ intimidation « presque toujourS ». Par contre, 31 % des élèves reconnaissent qu ‘ils « pourraient intimider à leur tour » quelqu’ un qu’ils n’aiment pas. Dans le même sens, Q’Connell et al. (1999) confirment le rôle central occupé par les pairs lors de scènes d’intimidation qui surviennent sur la cour de l’école. En effet, 75 % du temps occupé par les pairs lors d’ une situation d’intimidation se présente de cette manière: pendant les épisodes d’intimidation répertoriés dans la cour de l’école, les pairs peuvent apporter un renforcement positif à l’agresseur et n’ aident pas la victime.

Au Québec, afin de constater l’ampleur de l’ intimidation dans les écoles, une recherche intitulée L’Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois (1999) a été réalisée auprès de 3000 jeunes dans 180 écoles primaires et secondaires du Québec (Aubin, J., Lavallée, c., Camirand, 1., et Audet, N., 2002). Cette étude trace un portrait de l’ état de santé et de bien-être des filles et des garçons québécois âgés entre 9 et 16 ans. Un document synthèse de cette recherche, réalisé par Roy (2003), présente les résultats spécifiques concernant la violence en milieu scolaire, l’ intimidation et le taxage. L’auteur indique que les expériences d’intimidation les plus fréquemment admises par les jeunes sont les suivantes: « se faire crier des noms, se faire menacer de se faire frapper ou de détruire leur bien, se faire frapper ou pousser violemment» (p. 6).

Les conséquences de l’intimidation 

Comme l’indiquent de nombreux auteurs, l’intimidation constitue un problème significatif dans les écoles primaires et cela, pour tous ceux qui s’y livrent, ceux qui la subissent et ceux qui ont à vivre au quotidien avec ces scènes de violence. Certains chercheurs, ne minimisant point les effets négatifs des épisodes de violence vécus ponctuellement, affirment que la violence « à répétition » est considérée comme étant la plus dommageable (Bélanger et al., 2006). Ainsi, le fait d’être intimidé à répétition occasionne un ensemble de conséquences à court et à long terme (Bowen et Desbiens, 2004; Olweus, 1999; Parault, Davis et Pellegrini, 2007; Pepier, Farrokh et Sedighdeilami, 1998).

Les conséquences chez les agresseurs 

Pepier et al. (1998) révèlent que les filles et les garçons agressifs sont plus susceptibles de vivre des problèmes affectifs ainsi que d’avoir une mauvaise image de soi que les filles et les garçons non agressifs. Une étude réalisée au plan international, auprès d’adolescents âgés entre Il et 15 ans, montre une cohérence à travers les pays concernant la relation entre l’intimidation et les aj ustements psychosociaux. En effet, les résultats révèlent que les agresseurs se livrent à une plus grande consommation d’alcool (Nansei, Craig, Overpeck, Saluja, Ruan et the Health Behaviour in School-aged Children Bullying Analyses Working Group, 2004). Une autre étude s’intéressant spécifiquement aux manifestations d’agression indirecte des jeunes filles relate que les filles des groupes « agressifs directs » développent davantage de problèmes externalisés, principalement d’ordre agressif, et qu’elles éprouvent plus de difficultés sérieuses dans leurs relations interpersonnelles que les filles du groupe témoin (Verlann, Déry, Toupin et Pauzé, 2005).

Les conséquences chez les agresseurs et les victimes 

Pour Lamonde et Turcotte (2004), le rejet, la perte d’estime de soi, la peur, la dépression et l’ anxiété sont quelques exemples de conséquences susceptibles d’être vécues par les auteurs et les victimes de manifestations de violence. De plus, les agresseurs et les victimes manifestent de nombreux problèmes de santé, une faible adaptation émotionnelle et une faible adaptation scolaire (Nansei et al. , 2004). Voyons maintenant plus précisément les conséquences relatives aux victimes.

Les conséquences chez les victimes d’intimidation 

Concernant les victimes d’intimidation chez les jeunes de tous les âges, qu’ils soient victimes soumise ou provocante, les résultats de recherche sont parlants. Parault et al. (2007) indiquent qu’ un nombre significatif d’élèves subissant de l’intimidation rapportent se sentir seuls à l’école. Ces élèves intimidés affirment avoir des pensées négatives d’eux mêmes, ils se sentent tristes, stupides et honteux. Plus spécifiquement chez les filles vivant de l’intimidation indirecte, Verlan, Turmel et Charbonneau (2004) rapportent qu’en plus de faire face aux ragots ou aux moqueries de toutes sortes, elles vivent de l’isolement, souffrent d’une faible estime d’elles-mêmes, d’un niveau marqué d’anxiété, de tristesse et de troubles émotifs. En outre, ils précisent qu’au fil du temps, ces victimes risquent de développer des comportements extériorisés et de la dépression. Fortin (2002), dans L ‘Enquête sociale et de santé des enfants et des adolescents, confirme que concernant l’ estime de soi, les enfants intimidés ont une moyenne inférieure à celle des autres enfants qui ne se rapportent pas intimidés. D’autres auteurs approuvent ces informations en ajoutant que les jeunes éprouvant déjà de tels types de problèmes internalisés verront peut être ces mêmes problèmes prendre de l’ampleur. En  majorité, les victimes d’intimidation vivent une détresse psychologique (Desbiens, Janosz, Bowen et Chouinard, 2003) ainsi qu’ un désintérêt marqué pour l’école pouvant même entraîner un abandon de la scolarité (Craig, 1998; Hodge et Perry, 1999). Par ailleurs, des résultats de recherches concernant les effets néfastes de l’intimidation chez les jeunes adolescents confirment une association entre l’intimidation vécue pendant l’ enfance et le début de l’adolescence à des problèmes d’ordre psychologique et scolaire (Juvonen, Nishina et Graham, 2000).

Les résultats des travaux de Lepage, Marcotte et Fortin (2006) soulèvent l’existence d’une relation entre l’ intimidation et la dépression. De ce fait, Swearer, Song, Cary, Eagle et Mickelson (2001) mentionnent que 42,9 % des intimidateurs, 30 % «des intimidateurs/victimes» et 13,5 % des victimes âgées de Il à 13 ans seraient déprimés. Parallèlement, d’autres de leurs résultats montrent que 0 % des intimidateurs, 19,2 % des victimes et 17,5 % d’ intimidateurs/victimes vivaient de l’anxiété. Desbiens et al. (2003) révèlent qu’une victime d’intimidation risque de subir, et cela peu importe son profil psychologique et comportemental, des conséquences importantes, voire dramatiques.

Les conséquences chez les pairs 

Finalement, en ce qUI a trait aux conséquences de l’intimidation vécues spécifiquement chez les pairs, on remarque dans la recension des écrits, qu’ elles font nettement mOInS l’objet de recherches. Craig et al. (1998) stipulent que ces enfants ressentent une pression qui est exercée de la part de leur entourage. De plus, lorsqu’il y a problème important d’intimidation dans l’école, voire dans la classe, le climat social en est affecté et les élèves ont tendance à s’y sentir moins en sécurité (AQPS, 2003).

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 PROBLÉMATIQUE
1.1 État de la situation dans les milieux scolaires
1.2 Les conséquences de l’ intimidation
1.2.1 Les conséquences chez les agresseurs
1.2.2 Les conséquences chez les agresseurs et les victimes
1.2.3 Les conséquences chez les victimes d’intimidation
1.2.4 Les conséquences chez les pairs
1.3 L’intimidation selon le genre
1.4 La différence d’âge
1.5 Le point de vue socioéconomique
1.6 Le rôle de l’école
1.7 La position du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec
1.8 Problème de recherche
CHAPITRE 2 CADRE DE RÉFÉRENCE
2.1 La définition de l’intimidation et ses différentes formes
2.2 Les caractéristiques individuelles des victimes, des intimidateurs et des pairs
2.2.1 Caractéristiques de la victime
2.2.2 Caractéristique de la victime provocante
2.2.3 Caractéristiques de l’intimidateur ou de l’agresseur
2.2.4 Les pairs en contexte d’ intimidation
2.3 La notion d’habiletés sociales chez les enfants d’âge primaire
2.4 Les programmes de prévention de la violence
2.5 Quelques facteurs influençant la réussite d’ un outil ou d’un programme d’intervention sur l’intimidation
2.6 Objectif de recherche
CHAPITRE 3 MÉTHODOLOGIE
3.1 Le type de recherche
3.2 Procédures de contact sur le terrain
3.3 Échantillon
3.4 Instrument de mesure et procédures d’ administration
3.5 Cueillette des données
3.6 Dispositifs évalués
3.6.1. Dispositif: Ateliers de théâtre d’intervention « T’es qui toé?»
3.6.2. Dispositif: Vidéo
3.7 Analyse des données
CONCLUSION

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