INTRODUCTION D’UN NOUVEAU ROBOT EN ORL
Nous avons étudié, dans les deux chapitres précédents, l’anatomie particulière de l’oreille et du massif facial et la chirurgie qui s’y rapporte (2), et les caractéristiques de ces espaces de travail (3). La littérature nous a apporté des données sur les gestes du chirurgien lors de ces procédures [12]. Nous avons donc défini les caractéristiques des chirurgies concernées. Suivant des propositions de plan pour la conception de robots chirurgicaux [54], nous pouvons désormais analyser les solutions techniques qui pourraient être proposées dans ce contexte, puis vérifier ces choix. Pour répondre à ces questions, un état de l’art des robots étudiés en chirurgie oto- logique et sinusienne est présenté (4.2). Ensuite, une analyse fonctionnelle est réalisée (4.3), présentant les fonctions auxquelles notre système robotique devrait répondre. Pour savoir si nos propositions sont innovantes, une veille de brevets est ensuite réalisée (4.4), et un dépôt de brevet dans le cas échéant (4.5). Enfin, une étude de marché (4.6) permet de savoir si notre système répondrait aux attentes des chirurgiens de ces spécialités, et Lors d’une chirurgie de l’oreille moyenne, le chirurgien, et donc le système robotique, doit faire face à plusieurs contraintes : un champ de vision limité, et de nombreuses struc- tures anatomiques importantes dans un espace restreint. De plus, cette micro-chirurgie dépend de la dextérité du chirurgien, et est soumise aux tremblements de ses mains.
La majorité des robots otologiques sont développés pour le fraisage mastoïdien dans le cadre de l’implantation cochléaire. Ils partagent la possibilité de fraiser selon un trajet prédéfini, grâce à des images de scanner pré-opératoire. Ces robots fraisent à la place du chirurgien, jusqu’à la fenêtre ronde au niveau de la caisse du tympan. L’équipe de Danilchenko et al [15] utilisait également un robot industriel (Mitsubi- shi RV-3S) pour réaliser une mastoïdectomie. Le système, nommé OTOBOT, se veut un système autonome permettant de planifier un fraisage, associant robot industriel et tracking optique pour vérifier le positionnement de l’outil. D’après scanner, le chirurgien entoure sur logiciel la zone d’os à enlever (Figure 4.2), puis contrôle durant la procédure le positionnement correct de l’effecteur par rapport aux structures anatomiques. La valeur d’erreur maximale après fraisage de trois rochers cadavériques était de 0,6 mm, ce qui semble élevé au vu de l’anatomie de l’oreille. L’équipe de Dillon [16] proposait également d’automatiser la procédure de mastoïdec- tomie, en proposant un robot compact, attaché à l’os du crâne du patient (Figure 4.3). Le prototype était un robot à 4 DDL, monté sur un cadre de positionnement pour l’attache osseuse. A nouveau, un scanner était nécessaire pour que le chirurgien contoure manuel- lement la zone à fraiser. La précision moyenne du système était de 0,5 mm, ce qui semble insuffisant, comme pour les deux précédents robots.
Microtable est un autre système [17] étudié pour réaliser un fraisage mastoïdien. Il s’agit d’une architecture parallèle de type Gough-Stewart, attachée à la tête du patient par des vis à ancrage osseux (Figure 4.4). Cela permet d’éviter le recours à des sys- tèmes de suivi de mouvements de la tête du sujet. Un logiciel de planification du fraisage permet, à partir d’images de scanner pré-opératoire, de définir une trajectoire optimale pour le robot. Ce système était testé au stade pré-clinique sur des rochers en laboratoire d’anatomie. Un autre robot a été imaginé par l’équipe de Kobler [18] utilisant une architecture identique, de type Gough-Stewart avec 6 pieds connectant la plate-forme mobile et la base, fixée sur l’os temporal. L’objectif est à nouveau d’augmenter la précision et d’éviter le recours à un tracking optique en se fixant directement sur la tête du patient. Le projet RoboJig a permis de faire évoluer ce dispositif à un stade pré-clinique, avec des essais de fraisage sur os cadavérique, principalement en réalisant un tunnel mastoïdien après repérage des structures anatomiques à risque. Ce système a ensuite été testé pour réaliser l’insertion du porte-électrode dans la cochlée [56].
Ces différents robots ne permettent pas de distinguer os et tissu mou ; l’équipe de Bir- mingham [19] a développé un système de fraisage permettant de faire cette distinction, grâce à la force appliquée sur l’instrument. Le robot, appelé “Smart Micro-Drill” (Fi- gure 4.6), fraise automatiquement, mais lorsque la fraise ne touche plus de tissu osseux, On peut citer également une étude ayant utilisé le robot Da Vinci pour réaliser le fraisage mastoïdien [20]. Sur deux rochers en laboratoire d’anatomie, un adaptateur im- primé en 3D a été positionné sur un bras du robot, afin de lui permettre de maintenir une fraise. Ensuite, la mastoïdectomie a été réalisée à l’aide du Da Vinci, selon la tech- nique opératoire habituelle. Une image augmentée des structures anatomiques acquises par scanner pré-opératoire était fournie au niveau de la console du robot pour le chi- rurgien (Figure 4.7. Pour cela, le chirurgien contourait manuellement les structures sur un logiciel, après acquisition scanner. Cependant, d’après les auteurs eux-mêmes, la vi- sualisation de la zone opératoire était moins bonne qu’en microscopie conventionnelle. De plus, l’absence de retour de force était considérée comme gênante. Enfin et surtout, l’encombrement important du robot rendait impossible la réalisation correcte de l’ouver- ture du récessus facial au robot, puis de la cohléostomie. Ces deux étapes chirurgicales ont donc été réalisées manuellement par le chirurgien, alors qu’il s’agit précisément des parties minutieuses de l’intervention. La mise en place de l’implant était également réa- lisée manuellement, donc sans gain en termes de diminution des tremblements