Introduction à la microélectronique

Le procédé de lithogravure

Deux différentes approches sont possibles pour fabriquer des nanostructures : « Bottom-up » : les atomes ou les molécules sont assemblés directement par voie ascendante.
« Top-down » : de la matière est retirée par voie descendante. C’est l’approche couramment utilisée en microélectronique pour la fabrication des transistors. Elle nécessite l’enchainement successif d’étapes de dépôts, lithographies et gravures par plasma.
Dans cette deuxième approche, les dimensions des dispositifs sont définies par le transfert par gravure plasma de l’image d’un masque, réalisé par photolithographie, dans la couche active du dispositif. De ce fait, la gravure par plasma est, avec la lithographie, l’étape technologique élémentaire dont dépend directement la miniaturisation des dispositifs microélectroniques [Cardinaud et al. 2000].
C’est donc la voie descendante qui est étudiée dans cette thèse. Les principales étapes de la fabrication d’un transistor :
Préparation du substrat : dopage du silicium N ou P par implantation ionique et isolation des zones de transistors par gravure et dépôt de SiO2 (« Shallow Trench Isolation »),
Dépôt des couches actives de l’empilement de grille : oxydes high-k, métaux, poly-silicium, masque dur, résine photosensible, Lithographie : délimitation des grilles dans la résine, Gravure de l’empilement de grille, Dépôt de SiN ou SiO2 et gravure sans masque pour former les espaceurs, Siliciuration des zones source (S), drain (D) et grille (G), puis réalisation des contacts métalliques.

Le phénomène d’autopolarisation

Pour la gravure des matériaux, c’est la vitesse directionnelle des ions qui est exploitée. Cependant l’énergie cinétique des ions doit généralement être supérieure au potentiel plasma. Une tension de polarisation négative supplémentaire doit donc être appliquée au substrat. Les substrats étant souvent recouverts d’un film isolant, l’application d’une tension continue est impossible et c’est donc une tension RF qui est appliquée (fréquence de 13,56 MHz dans notre réacteur). Le phénomène d’autopolarisation est alors exploité : lorsqu’une tension RF sinusoïdale est appliquée sur une surface, une polarisation DC additionnelle s’y développe. En effet, la forte mobilité des électrons impose que le potentiel de surface ne dépasse pas le potentiel du plasma, afin de maintenir sa quasi-neutralité. Ainsi le potentiel de surface oscille autour d’une polarisation moyenne négative . Cette tension d’autopolarisation est rendue possible par la présence d’une capacité de blocage entre le générateur RF et le substrat : c’est cette capacité qui va se polariser négativement.
La valeur de s’ajuste de manière à ce que les flux d’ions et d’électrons vers la paroi s’égalisent : les ions sont perdus durant la majorité de la période RF tandis que les électrons sont perdus par pulses lorsque le potentiel de la surface est proche du potentiel plasma. Comme nous l’avons vu précédemment, la masse importante des ions implique que ces derniers voient une moyenne du champ électrique. Leur énergie cinétique à la sortie de la gaine vaut donc en moyenne . Ainsi il est possible de contrôler l’énergie du bombardement ionique sur le substrat. Notons que pour une forte tension appliquée (grande devant), l’amplitude RF est proche de la tension d’autopolarisation .

Nouveaux défis technologiques de la gravure

Les transistors FDSOI et FinFET : Depuis les années 1960, la taille des transistors de l’industrie microélectronique décroit de manière exponentielle en suivant la loi de Moore. À chaque nouveau nœud technologique, les dimensions toujours inférieures des dispositifs exigent l’utilisation de nouveaux matériaux et d’architectures plus performantes. Le fonctionnement même des transistors devient alors plus complexe. La variation de la tension de grille doit piloter précisément le passage d’un courant constant (état ON) ou son blocage (état OFF) dans le canal du transistor, pour une tension source-drain donnée : c’est le principe du transistor à effet de champ (FET pour Fiel Effect Transistor). Le basculement entre les états ON et OFF doit être rapide et sensible à la tension de grille. Ainsi le courant croit de plusieurs ordres de grandeur quand le transistor passe de l’état OFF à ON, typiquement de 10-12 à 10-3 A.µm-1, pour des variations de tension de la grille de quelques dixièmes de volts. Quant à la fréquence de basculement, elle a atteint le GHz dans les années 2000 et évolue peu depuis en raison de la puissance thermique à dissiper qui devient limitante. Pour les transistors de largeur de grille inférieure à quelques dizaines de nm et constitués de couches ultraminces, des effets quantiques visibles uniquement à ces échelles apparaissent, notamment le transport d’électrons par effet Tunnel. Tout d’abord un courant de fuite apparait entre le canal et la grille. La capacité entre les deux étant inversement proportionnelle à l’épaisseur de la couche d’oxyde qui les sépare, une épaisseur de 1,2 nm de SiO2 est nécessaire pour le nœud 45 nm, soit environ 4 atomes ! Cette épaisseur ne pouvant être réduite davantage, de nouveaux matériaux à haute permittivité (high-k) ont été introduits : HfO2, HfSiON, ZrO2… De plus, le poly-silicium de la grille étant un matériau semi-conducteur, la tension de grille crée une zone de déplétion au-dessus de l’oxyde qui fait chuter la capacité. Le pied de la grille a donc été remplacé par un métal.

Introduction à la microélectronique

La microélectronique est la miniaturisation de l’électronique. Les composants de base sont par exemple les transistors, capacités, résistances, lesquels une fois reliés forment dispositifs et circuits. On parle de circuit intégré (ou puce) lorsque les dispositifs sont réalisés sur un même cristal de matériau semi-conducteur.
À la suite des travaux réalisés durant près d’un siècle sur les semi-conducteurs, le premier transistor voit le jour en 1947 dans les laboratoires de la société Bell. Ses inventeurs John Bardeen, William Shockley et Walter Brattain reçoivent en 1956 le prix Nobel de physique pour cet accomplissement. En 1958, Jack Kilby réalise le premier circuit intégré dans les laboratoires de Texas Instrument [Kilby 1976] qui lui vaudra également un prix de Nobel de physique en 2000. Le nombre de transistors par puce a alors très rapidement augmenté et Gordon Moore, l’un des trois cofondateurs d’Intel, prévoit en 1965 que ce nombre va doubler chaque année . Il revoit en 1975 cette tendance à la baisse et postule un doublement tous les deux ans. Cette prédiction empirique sera par la suite étonnamment bien vérifiée de 1971 à aujourd’hui : cette croissance est illustrée sur la figure 1 avec les processeurs d’Intel, leader actuel du marché. Les puces microélectroniques sont ainsi de moins en moins coûteuses et de plus en plus performantes. Le dernier processeur d’Intel « Core i7 Haswell » produit en 2014 et destiné au grand public contient par exemple 2,6 milliards de transistors. La poursuite de cette performance exponentielle au cours du temps requiert une miniaturisation permanente de la taille des dispositifs. Le besoin de coordination entre les différents acteurs, fondeurs et équipementiers, a amené à la création d’une feuille de route internationale : c’est l’ITRS (International Technology Roadmap for Semiconductors). Elle définit chaque année les dimensions requises pour les transistors des futurs circuits intégrés. Elle est parrainée par les cinq régions principales productrices de puces (Europe, Japon, Corée, Taiwan et États-Unis). Le nœud technologique, souvent utilisé pour identifier une génération de circuits intégrés, représente la demi-largeur entre deux lignes d’interconnexion métalliques sur une cellule de mémoire DRAM : 22 nm par exemple en 2016. Actuellement les circuits d’Intel en production ont atteint le nœud 14 nm, la recherche et développement porte donc sur des nœuds de dimensions inférieures.

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Introduction à la physique des plasmas

Le terme plasma a été proposé en 1928 par le physicien Irving Langmuir pour décrire un gaz constitué d’espèces neutres, d’ions et d’électrons et qui est globalement neutre à l’échelle macroscopique . Les plasmas représentent plus de 99 % de la matière de l’univers : typiquement les étoiles sont des plasmas générés par la pression gravitationnelle. De manière générale, lorsque la matière subit une élévation de température, elle peut passer successivement par les trois états solide, liquide et gazeux.
Mais si la température du gaz augmente encore, les molécules se dissocient en atomes sous l’effet des collisions, puis les atomes eux-mêmes se séparent en ions positifs et électrons formant l’état plasma, qui est ainsi souvent désigné comme le 4e état de la matière. Cependant il est également possible de générer un plasma à partir d’un gaz à faible température sous l’action d’un champ électrique. En microélectronique, ce gaz est confiné à l’intérieur d’un réacteur à basse pression, variant du millitorr au torr. Les électrons du gaz sont accélérés par le champ électrique à des énergies de plusieurs dizaines d’eV et induisent des collisions inélastiques avec les espèces neutres qui constituent le gaz. En particulier, ces électrons créent des paires ion-électron par des collisions ionisantes avec le gaz. Ces dernières permettent d’entretenir le plasma en compensant la perte des paires ion-électron sur les parois du réacteur.

Table des matières

Chapitre I – Introduction et contexte de l’étude 
1 – Introduction à la microélectronique 
1.1 – Historique
1.2 – Le procédé de lithogravure
2 – Introduction à la physique des plasmas 
2.1 – Définition d’un plasma
2.2 – La gaine
2.3 – Collisions et réactions
3 – La gravure plasma 
3.1 – La gravure chimique
3.2 – La gravure physique
3.3 – La synergie ions-neutres
3.4 – Limitations des procédés plasma actuels
4 – Nouveaux défis technologiques de la gravure 
4.1 – Les transistors FDSOI et FinFET
4.2 – Cas de la gravure des espaceurs SiN pour les transistors FDSOI
4.3 – Les nouvelles technologies de gravure plasma en développement
5 – Nouvelle technologie de gravure : modification par plasma de H2/He suivie d’un retrait par voie chimique 
5.1 – Principe et applications
5.2 – Objectifs et démarche de l’étude
Chapitre II – Dispositifs expérimentaux et logiciels 
1 – Le réacteur de gravure ICP 
2 – Retrait de la couche de matériau modifié 
2.1 – La gravure humide
2.2 – Le réacteur de gravure Siconi
3 – Techniques de caractérisation des matériaux 
3.1 – La microscopie électronique : MEB, STEM et TEM
3.2 – L’ellipsométrie spectroscopique
3.3 – La spectroscopie de photoélectrons X (XPS)
3.4 – La spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR)
3.5 – La spectrométrie de masse d’ions secondaires à temps de vol (ToF-SIMS)
4 – Diagnostics du plasma 
4.1 – Analyseur en énergie des ions RFEA
4.2 – Sonde de flux d’ions capacitive
4.3 – Fluorescence induite par laser à deux photons (TALIF)
5 – Simulation du bombardement ionique sous le logiciel SRIM 
Chapitre III – Étude de la reproductibilité du nouveau procédé de gravure 
1 – Problème de la contamination par le fluor 
2 – Réduction des oxydes métalliques de parois par l’hydrogène 
2.1 – Analyses XPS et TEM sur Al2O3, SiO2 et Y2O3
2.2 Discussion de la formation de HF dans les parois sous atmosphère humide
3 – Étude de différents conditionnements : CFx , SiOF et SiOBr 
4 – Procédé sur matériau SiN avec conditionnement SiOF 
5 – Conclusion 
Chapitre IV – Étude de la modification du SiN en plasma d’hélium 
1 – Caractérisation du plasma d’hélium 
1.1 – Mesures de flux d’ions
1.2 – Mesures d’énergie des ions
1.3 – Nature des ions
1.4 – Effet de la pression
1.5 – Effet de la modulation en impulsions du plasma
2 – Mesure cinétique de l’épaisseur de SiN gravée 
3 – Étude paramétrique 
4 – Caractérisation du matériau SiN modifié 
4.1 – Observations TEM
4.2 – Simulation de la pénétration des ions sous SRIM
4.3 – Quantifications MIR des liaisons Si-H et N-H
4.4 – Effet des photons
5 – Discussion sur la modification et la gravure du SiN 
6 – Conclusion 
Chapitre V – Modification du SiN en plasma d’hydrogène 
1 – Caractérisation du plasma d’hydrogène 
1.1 – Mesures du flux d’ions
1.2 – Mesures de l’énergie des ions
1.3 – Nature des ions
1.4 – Effet de la pression
1.5 – Effet de la modulation en impulsions du plasma
2 – Mesures cinétiques de la gravure du SiN : comparaison H2 / He 
3 – Étude paramétrique 
4 – Caractérisation du matériau SiN modifié 
4.1 – Observations STEM
4.2 – Simulation de la pénétration des ions sous SRIM
4.3 – Quantifications MIR des liaisons Si-H et N-H
4.4 – Analyses SIMS
4.5 – Effet des photons
5 – Mécanismes de modification et de gravure du SiN 
5.1 – Rôle des radicaux H
5.2 – Régime stationnaire dans la couche de SiN modifié
6 – Conclusion 
Conclusion et perspectives 
Bibliographie

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