Ce travail présente une recherche sur les enjeux et les difficultés d’une intégration au niveau scolaire des enfants de familles issues de la migration. Les thèmes abordés sont la migration et plus spécifiquement la migration portugaise en Suisse, l’instruction publique et ses demandes, des notions d’intégration, d’ethnocentrisme et, pour finir, tous les enjeux sociaux et psychologiques d’une migration sur des enfants qui vivent ce processus différemment de leurs ainé·e·s. De plus, pour mieux comprendre les démarches et les actions mises en place par l’Etat et principalement le canton du Valais, un point sur les textes législatifs qui concernent la migration et l’instruction publique est fait. Toutefois, même si ce travail concerne principalement les questions liées à l’intégration et aux mesures favorisant l’intégration des enfants de migrant·e·s en Valais, il a également une vision globale de ces questions en considérant ces aspects de manières plus générales.
Convention relative aux droits de l’enfant (1989)
Cette recherche se focalisant principalement sur les enfants, il nous est nécessaire de connaitre leurs droits. Les enfants de migrant·e·s sont, en premier lieu, des enfants. Leurs droits en tant que tel·le·s doivent être respectés. De plus leur statut de migrant·e demande une attention particulière pour certains points. Les quatre principes généraux se doivent d’être respectés lors de l’arrivée et tout au long du processus d’intégration de l’enfant : son droit à la non-discrimination, la considération primordiale de son intérêt supérieur, son droit à la vie, à la survie et au développement et pour finir le respect de ses opinions.
De plus, l’article 10 concernant la réunification familiale permet en premier lieu à l’enfant d’entrer en Suisse dans le but de rester avec sa famille. Pour finir, les articles 28 et 29 concernant l’éducation de l’enfant sont au centre de ce travail. Ces articles discutent du droit à l’éducation pour tous les enfants sur la base de l’égalité des chances, mais également spécifient que l’éducation doit favoriser l’épanouissement et le développement de l’enfant en lui inculquant le respect des droits de l’homme, de ses parents, de son identité, de sa langue ou encore de ses valeurs culturelles. L’éducation doit également viser à préparer l’enfant à devenir un·e citoyen·ne dans un esprit d’égalité et de respect.
Lois fédérales et cantonales
La loi fédérale sur les étrangers3 (2005) concerne principalement les adultes. Toutefois, le respect de cette loi par les parents influence l’intégration des enfants de migrant·e·s. De plus, cette loi régit le regroupement familial et permet donc aux enfants de migrant·e·s d’arriver en Suisse. La loi d’application de cette loi et son ordonnance la complètent et nomment les autorités compétentes en charge de la migration
La loi sur l’instruction publique du canton du Valais4 (1962) définit les rôles de chaque partenaire responsable de l’éducation de l’enfant. Elle désigne la fonction et les buts de l’instruction publique et les moyens que celle-ci doit mettre en œuvre pour une bonne éducation scolaire. De plus, le département de l’éducation, de la culture et du sport (DECS) a écrit des directives en 2001 s’appuyant sur cette loi, ces directives seront nommées plus tard dans ce travail.
Programme d’intégration du canton du Valais – PIC Valais
Le département de la formation et de la sécurité a mandaté un groupe de travail afin de rédiger un programme d’intégration dénommé PIC Valais en 2013. La base de ce programme et ces buts sont expliqués dans un texte rédigé par Gay, Monnat, Eggel & Rossier (2013). Tout d’abord le PIC Valais se base sur la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers et son ordonnance de 2012. Ces lois touchent à l’intégration des étrangères et des étrangers et ont donné la base au projet PIC Valais.
Le programme contient trois différents piliers.
• Information et conseil : ce premier pilier touche principalement les adultes qui doivent être informé·e·s sur les conditions de vie et sur les offres du point de vue de l’intégration offerts. De plus, la protection contre la discrimination fait également partie de ce pilier.
• Formation et travail : ce deuxième pilier est le plus important dans cette recherche. Les familles migrantes doivent connaitre les différentes possibilités préscolaires et scolaires pour intégrer au mieux leurs enfants. Le fait d’être informé·e·s des différentes possibilités permet aux parents de choisir ce qui est le plus adapté pour leurs enfants.
• Communication et intégration sociale : les immigré·e·s doivent participer à la vie communautaire et s’engager socialement. Ce point est important au niveau de l’environnement social de l’enfant. L’enfant dépend de ces parents jusqu’à un certain moment dans sa scolarité où il sera en âge de choisir son entourage social.
Les objectifs pour les prochaines années seront principalement la lutte contre la discrimination et l’encouragement à l’inscription dans les institutions préscolaires pour les enfants en bas âge. Ce programme est appliqué dans les offices gérant la migration des grandes villes en Valais. A l’arrivée de personnes immigrées en Valais, ces dernières se voient offrir la possibilité d’entrer dans différents programmes pouvant faciliter leur intégration. Ces programmes aident les familles à s’intégrer et leur donne les informations nécessaires pour l’intégration de leurs enfants. De plus, le délégué à l’intégration responsable de la région sera présent tout au long de la démarche. Toutefois il est important de préciser que tous les ressortissant·e·s de l’Union Européenne et de l’Association Européenne de Libre-Echange n’ont pas l’obligation de suivre ces mesures d’intégration.
Types d’immigration
Un parcours migratoire n’est jamais universel. Chaque parcours a une histoire qui mène à différentes raisons d’immigrer et à de multiples conséquences. Dans ce chapitre, nous parlons brièvement des types d’immigrations, puis, plus précisément de l’immigration portugaise en Suisse. Ces informations sont intéressantes pour comprendre les difficultés par lesquelles doivent passer les enfants de migrant·e·s.
Volontaires et forcées
Grinberg et Grinberg (1986) parlent de deux types d’immigrations. Ces auteurs différencient les immigrations volontaires et forcées. La première catégorie comporte différents types. Les « travailleurs étrangers et travailleuses étrangères » sont des immigrant·e·s travaillant temporairement dans le pays d’accueil et visant un retour au pays après un certain nombre d’années. Ces immigrant·e·s considèrent davantage le départ du pays que l’arrivée dans celui-ci. Les « immigrant·e·s » décident de s’établir définitivement dans le pays d’accueil, même si la possibilité de retourner au pays leur est offerte. Pour cette catégorie, le sentiment de perte est plus important que chez la première catégorie.
En ce qui concerne les immigrant·e·s forcé·e·s, ces personnes ont été contraintes de quitter leur lieu d’origine pour des raisons politiques, idéologiques ou encore religieuses. Nous les appelons également «exilé·e·s », «réfugié·e·s »… Ces immigrations ne sont pas uniquement individuelles, mais également massives. Cette différence est primordiale puisque le processus d’intégration ne sera pas le même en cas d’immigration volontaire ou forcée. Dans ce travail, nous travaillons principalement sur les enfants issu·e·s d’une immigration volontaire.
Exemple par l’immigration portugaise
Étant donné que ce travail s’intéresse à l’intégration des enfants de migrant·e·s dans les écoles valaisannes, il est plus facile de s’intéresser à un type de migration pour mieux en comprendre les difficultés. Comme expliqué dans l’introduction, nous nous intéressons à la migration portugaise au vu du nombre important de migrant·e·s portugais·e·s en Valais. Fibbi et al. (2010) ont décrit l’histoire, les raisons et les conséquences de l’immigration portugaise en Suisse.
Histoire du Portugal
Pour mieux comprendre l’histoire de l’immigration portugaise et ses raisons, il est important de connaitre certains éléments de l’histoire du pays. Nous commençons cette description au début du XXe siècle, puisque ce qui précède cette période nous semble peu essentiel pour ce sujet de recherche. Fibbi et al. (2010) décrivent cette histoire dès le début du siècle. En 1910, la monarchie cesse suite à une révolution. Toutefois un système répressif se met en place. En 1932, Salazar gouverne le pays. Ce gouverneur favorise une politique dite isolationniste. Toutefois en 1960, le Portugal devient l’un des pays fondateurs de l’Association européenne de libre échange (AELE). La Révolution des Œillets en 1974 renverse le régime de Salazar et une année après les colonies africaines se font accorder l’indépendance. Les années suivantes, le Portugal entre dans plusieurs programmes mis en place en Europe tels que l’ «Europe des Douze», le Conseil de l’Europe ou encore la Communauté économique européenne. Ces changements permettent au Portugal de sortir de la politique isolationniste et de s’offrir des opportunités au niveau européen. En 1960, l’école devient obligatoire au Portugal. Au début du siècle, le système scolaire portugais est élitiste, le taux d’analphabétisme est de plus de 80 % dans le pays. Toutes les tentatives pour améliorer le système scolaire sont stoppées par Salazar et les trois décennies suivantes seront caractérisées par un niveau scolaire faible.
Histoire de l’immigration portugaise vers la Suisse
L’un des chapitres de l’ouvrage dirigé par Fibbi (2010) se consacre à l’histoire de l’immigration portugaise vers notre pays. Les premiers immigrant·e·s sont des étudiant·e·s ou de membres de l’intelligentsia contre le régime répressif du Portugal. Puis, dès 1960, l’immigration portugaise est majoritairement composée de migrant·e·s du travail. Cependant, la Suisse n’est pas prête à signer des accords avec le pays puisqu’elle craint que les migrant·e·s n’arrivent pas à s’adapter au mode de vie suisse qui diffère fortement du leur. Toutefois, en 1980, lorsque la France ferme ses frontières, la Suisse signe une convention administrative avec le Portugal pour laisser entrer la main- d’œuvre nécessaire aux emplois saisonniers suisses. L’essor de l’immigration portugaise arrive au début des années 1990 dans lesquels plus de cent mille portugais·e·s entrent en Suisse. Les années suivantes, la Suisse modifie sa politique d’immigration et abolit le statut de « travailleur saisonnier» en réduisant le délai pour l’obtention d’un permis C.
1. INTRODUCTION |