Informer les PME et les sensibiliser aux enjeux d’Internet
Une action de sensibilisation est encore malheureusement nécessaire
Certes aujourd’hui il ne paraît plus nécessaire de sensibiliser les industriels à l’existence même d’Internet : il n’est plus possible depuis plusieurs années d’ouvrir un journal ou une radio sans en entendre parler, et un grand événement est inconcevable sans une déclinaison Internet (livres censurés, atterrissage sur mars, visite du Pape, décès d’une princesse, ou le site de Nagano avec ses 635 millions de connections en 15 jours lui-même dépassé par le mundial98 74 millions dans la seule journée du 30 juin, sans parler de loft-story, chaque grand événement depuis battant les records du précédent)
Mais cette information journalistique véhicule 2 niveaux de « leurres » qui finalement dissuadent le chef d’entreprise d’aller plus loin dans sa réflexion :
niveau 1 : l’insécurité des paiements électroniques et l’aspect non professionnel (ludique, voire immoral « naviguer sur une mer infestée de pirates et de violeurs de sirènes… »)
niveau 2 :la réduction des usages
• aux sites « WEB plaquette » (qui ne sert effectivement pas à grand chose)
• au commerce en ligne visant le grand public (qui ne concerne qu’un nombre très limité de PME)
• et à la recherche d’information au hasard de la navigation..
Ils conduisent le patron de PME à considérer que ceci ne le concerne pas vraiment et peu d’informations laissent imaginer au chef d’entreprise que la richesse d’Internet se situe bien au-delà et le concerne de façon incontournable. Malheureusement nos multiples contacts sur le terrain, corroboré par les enquêtes comme celles d’Ufb-Locabail www.ufb-locabail.fr, de Mazar voir page 72 ou de novamétrie voir page 64 nous permettent de constater, encore cette année, qu’en ce qui concerne les usages « business » d’Internet, une action de sensibilisation reste nécessaire:
Ce n’est encore qu’un nombre insuffisant de PME qui a compris à quoi Internet pouvait leur servir pour économiser de l’argent (Achats, télécommunication, couts administratifs, formation, recrutements, gestion financière,…), pour réduire leurs besoins de capitaux (stocks), pour gagner en réactivité, pour pouvoir travailler plus efficacement avec leurs partenaires (conduite de projet ou de chantier) ou pour aborder de nouveaux marchés notamment en trouvant les bons partenaires, pour être en mesure de mieux servir leur client et donc de le fidéliser (SAV, personnalisation, information, suivi des commandes,…), pour recuter de nouveaux collaborateurs
Elles n’ont pas assimilé le fait qu’internet concernait TOUS les métiers de l’entreprise, dans tous les secteurs professionnels et ceci indépendamment de la taille de celle-ci (de l’entreprise individuelle à la Worldcompany)
L’éclatement de la « bulle » financière du Nasdaq les renforce dans leur septicisme et leur attentisme alors même que la véritable mutation en profondeur dans le tissu économique est en train de se réaliser chez leurs concurrents étrangers ou leurs donneurs d’ordre
Beaucoup pensent que les technologies ne sont pas encore stabilisées et qu’ils peuvent attendre: ils ne voient pas qu’ils risquent de se trouver exclus brutalement de certains domaines d’activité (automobile, aéronautique, grande distribution,…) qui mettent en place des process d’achat, de conception ou de fabrication qui ne supporteront plus les resaisies d’information ainsi que les délais inhérents à des processus séquentiels
Enfin à côté de l’image « gadget à la mode » propagé par les média et amplifié par la bulle du Nasdaq, Internet garde une image de « haute technologie » et donc de coûts et de besoin de hautes qualification, alors même qu’Internet a surtout apporté la normalisation des interfaces qui permet, par rapport à l’informatique et aux télécommunications traditionnelles, une simplicité dans l’usage, des couts beaucoup plus faibles et une interopérabilité permettant des développements progressifs et modulaires.
Peu encore ont compris que Internet, c’est à dire TCP/IP ce n’est qu’un simple standard, mais que c’est lui qui permet de sortir de l’informatique et des télécommunications « propriétaires », de ses couts et de ses rigidités: l’électricité n’a pu véritablement révolutionner l’industrie que quand la normalisation (220V, écartement des prises, 50 périodes,…) a permis le développement des réseaux électriques et le développement des multiples appareils sachant que leur interconnection permettaitde batir des systèmes complexes, flexibles et évolutifs
Elles n’ont pas non plus compris que de ne pas acheter leur nom pouvait leur couter ultérieurement extrêmement cher
La plupart du temps Internet est encore assimilé à « site web » pour « la notoriété » ou « la boutique en ligne » alors que comme nous l’avons vu ce ne sont que des utilisations extrêmement marginales de cet outil (et qui de plus n’ont de sens qu’intégrés à l’ensemble de la gestion des flux)
Confucius le disait déjà « l’ennemi de la connaissance n’est pas l’ignorance, mais le fait que l’on croit savoir »
Les conclusions de l’évaluation des opérations conduites en Franche Comté en mars 2001 montrent l’ampleur du chemin qui restait encore à parcourir
« le constat est amer… les chefs d’entreprise sont encore assez réticents à faire évoluer leur société parce que les NTIC mettent souvent en cause leur organisation et leur gestion de l’information. Même si les entreprises ont de réelles capacité d’adaptation, leurs démarches sont lentes et les freins culturels profonds … les usages sont encore à leurs balbutiements, …les élus n’ont toujours pas pris conscience des enjeux des NTIC. Au même titre que les chefs d’entreprises, ils peuvent être aussi la cible d’une campagne de sensibilisation » Hervé Claudet www.action70.com
voir aussi l’étude réalisée par Taylor Nelson Sofres, auprès de 604 dirigeants d’entreprise traditionnelles de toutes tailles, seulement 19% des patrons estiment en France que le Web révolutionnera le fonctionnement de leur société. Ils sont 53% au Royaume-Uni, 44 % aux Pays-Bas. La frilosité des entreprises françaises, grandes ou petites, face à l’outil Internet ne cesse de se confirmer: 46 % des chefs d’entreprise au Royaume-Uni estiment qu’Internet leur permettra d’améliorer leur profitabilité, 35 % aux Pays-Bas et 16 % seulement en France). voir page 75
Les grandes réunions de sensibilisation
En général un coup d’épée dans l’eau
C’est souvent la première idée, ce n’est pas toujours la meilleure: on peut avoir un sentiment de gain de productivité en permettant d’un coup à un grand nombre de chefs d’entreprises d’écouter des gens de grande qualité leur expliquer l’internet et ce qu’ils peuvent en attendre
Malheureusement, au grand dam des organisateurs on constate que ne viennent à ces réunions chronophages que ceux qui sont déjà sensibilisés et qui sont avides d’en savoir plus ou de tester leurs projets:
Les initiateurs de ces manifestations se désolent en outre de voir le faible nombre de vraies PME parmi un public essentiellement constitué d’institutionnels et de sociétés de service qui recherchent le client .Ceci est en fait tout à fait normal car un chef d’entreprise dynamique est en général sollicité de toutes part et doit gérer ses priorités. S’il n’est pas préalablement convaincu qu’il y a un réel enjeu pour son affaire il ne se déplacera pas (n’oublions pas non plus que toutes les entreprises ne sont pas au chef lieu de région):
Pour les organisateurs de « Grands Messes », rappelons leur que « seuls les croyants vont à l’office »
Ceci est encore plus vrai après l’éclatement de la « Bulle » des nouveaux marchés financiers:
Il y a 3 ou 4 ans certains chefs d’entreprise se déplaçaient par curiosité pour en apprendre un peu plus sur une « nouvelle technologie » mystérieuse. Il y a un an ou deux, anxieux devant les couts et les risques, ils se croyaient « obligés d’en passer par là » sans en comprendre l’interet. Aujourd’hui, la faillite des dot.com les rassurent sur leur analyse initiale « c’est un phénomène de mode qui ne concerne pas les PME » et ils reviennent « aux choses sérieuses » en arrétant de perdre du temps avec ces « gadgets »…: tous les organisateurs, malgré les moyens financiers et humains mis sur la table en ont fait l’amère expérience
Récemment par exemple dans une conférence à gros budget parfaitement bien organisée dans une grande métropole régionale, avec des orateurs de grande qualité, couplée à une exposition de haut niveau, un rapide sondage parmi les participants a montré qu’il n’y avait, en dehors des sociétés de prestation de service internet que deux vraies PME:… celles qui témoignaient à la tribune
Les opérations « d’évangélisation » (cf § suivant) sont un préalable incontournable au succès de telles opérations: les chefs d’entreprises préalablement sensibilisés un par un au fait qu’internet pouvait véritablement leur apporter de véritables gains de productivité sont alors demandeurs et participent au choix des thèmes et des orateurs
Une exception : quand c’est le gros client qui organise la cérémonie..
Le seul cas où la méthode consistant à inviter les industriels à une réunion de sensibilisation sans travail de terrain peut marcher c’est lorsque la puissance invitante a une crédibilité incontournable pour faire passer le message comme c’est le cas pour les acheteurs:
Quand le département de la défense organise un séminaire voir page268 dont le titre est « Using Electronic Commerce to Win Federal Contracts », tous les fournisseurs répondent présent, car la présensibilisation, montrant qu’il s’agit d’un vrai enjeu, vital pour l’entreprise, est clairement réalisée par les 2 lignes de l’invitation .Il est certain que si, comme pour la qualité, les acheteurs automobile ou les grandes surfaces invitaient ainsi leurs fournisseurs, peu se trouveraient une excuse pour décliner l’invitation.. On peut espérer que des opérations comme net200X http://www.mynet2001.net participeront à cet objectif
La technique du Coucou, efficace et peu onéreuse
A noter également la « technique du coucou » en profitant d’une réunion professionnelle incontournable et en tirant partie de la présence effective des chefs d’entreprises pour faire passer le message .Ce message doit alors être particulièrement percutant pour atteindre des auditeurs qui se sont mis parfois « en position veille »
Un risque grave: se reposer sur un grand opérateur pour conduire cette sensibilisation
DANGER : certains responsables régionaux, dépassés par les évènements, ou n’ayant pas perçu que le monde avait changé, se laissent circonvenir par des opérateurs pour assurer cette sensibilisation. Il n’est pas nécessaire de souligner le caractère très contre-productif pour les PME de ce type de sensibilisation nécessairement orienté par de légitimes préoccupations commerciales (ce qui est normal) mais bénéficiant d’un label public d’intérêt général pour ce faire, (ce qui l’est beaucoup moins)La distorsion de concurrence que cela peut de créer n’est-elle pas susceptible d’entraîner la responsabilité des personnes chargées de mission d’intérêt public concernées?