Influences de la déforestation sur la structure
des macroinvertébrés aquatiques
Etude des cours d’eau et des paramètres environnementaux
Les cours d’eau subissent des impacts dus au changement du bassin versant et des rives par la déforestation. Hynes (1975) décrit que «la vallée gouverne le cours d’eau», ce qui montre que la nature du bassin versant est importante aux écosystèmes lotiques. Les paramètres physico-chimiques de l’eau sont : le pH de l’eau, la conductivité, la turbidité, la température, la largeur, la profondeur, la longueur, la pente de la rivière, la vitesse du courant, le débit du cours d’eau, la granulométrie, le type d’écoulement (turbulent, laminaire ou creux), et la couverture de la canopée. C’est l’ensemble des variables environnementales. Les paramètres biologiques, focalisés particulièrement sur la végétation riveraine du bassin versant déterminent également la caractéristique du cours d’eau. Le pH de l’eau d’une rivière est essentiellement tributaire des apports par ruissellement. Les eaux acides sont très souvent riches en organismes acidophiles (Hem 1970). Le pH de la rivière est aussi influencé par la teneur en éléments minéraux, liée à la dissolution des roches. La conductivité est déterminée par la présence des ions dans la rivière. Elle exprime l’aptitude de l’eau à laisser passer le flux d’électrons représentant le courant électrique. Son influence spécifique sur la vie des organismes aquatiques est encore peu connue. La turbidité est la charge en suspension des matières organiques ou des matières inorganiques. La forte valeur de turbidité perturbe la pénétration de la lumière dans l’eau et par conséquent, la croissance des plantes aquatiques. La température est capitale par son influence sur plusieurs propriétés physiques, chimiques et biologiques. L’augmentation de la température entraîne une diminution des concentrations d’oxygène dissous. Le taux de croissance et la production des larves des invertébrés dans le milieu naturel non perturbé sont contrôlés essentiellement par la température (Benke 1993). La largeur du cours d’eau est un facteur souvent peu étudié. Amoros & Petts (1993) ont expliqué l’influence de la végétation surplombante comme une source partielle des apports en nutriments ; cette influence est d’autant plus faible que la largeur est importante. La profondeur de l’eau influence sa température : les eaux peu profondes ont généralement tendance à se réchauffer ou à refroidir plus rapidement. La profondeur affecte également la capacité de pénétration de la lumière à travers l’eau, ce qui influence l’activité de la photosynthèse des plantes aquatiques. La pente accentue la vitesse du courant. Plus la pente est raide, plus la vitesse est forte. La longueur de la rivière est également un paramètre déterminant de l’écosystème lotique, à savoir la théorie de zonation longitudinale et le concept du continuum fluvial. La vitesse du courant détermine la taille des éléments constituant la charge du fond, et la disponibilité en ressources nutritives. Elle influence la dérive des organismes aquatiques et 6 la structure des assemblages faunistiques (Misserendino 2001). Cette situation est prouvée par la distribution et l’abondance des larves des Ephéméroptères dans la rivière tropicale au Nigeria qui sont fonction de la rapidité de la vitesse du courant (Ogobogu 2001). En ce qui concerne la rivière, il est nécessaire de distinguer deux types de vitesse : la vitesse du courant fort avec des fonds érodés pierreux et la vitesse du courant modéré ou faible (Allan 1995) aux fonds formés par des dépôts de limons et de sables fins. Le débit contrôle la vitesse du courant ainsi que la profondeur, la granulométrie du fond (Ward 1982) et la stabilité du substrat. L’étude effectuée par Tumwesigue et al. (2000) sur les invertébrés benthiques de la forêt tropicale de Nyameru, à l’Ouest de l’Ouganda, consiste à observer l’influence du débit de la rivière sur l’abondance benthique, et les résultats obtenus mettent en évidence cette corrélation.
Quelques principaux concepts en écologie aquatique
Le réseau hydrographique peut être schématisé comme une arborescence convergente vers la mer. De la source à l’embouchure, les rivières peuvent être classées selon leur taille et leur numéro d’ordination en trois parties. Le système d’ordination qui fixe la hiérarchie du réseau fluvial peut se résumer à l’aide du graphique suivant. bien au niveau de la largeur et du lit du cours d’eau qu’au niveau de la vitesse du courant et de son débit. En effet, «la confluence de deux cours d’eau de même catégorie provoque la formation d’un cours d’eau de rang supérieur», c’est la règle des confluences. La figure ci-dessus montre que deux cours d’eau d’ordre 1, c’est-à-dire sans affluents, en se rencontrant, forment un cours d’eau d’ordre 2. Ce dernier se joignant à un autre cours d’eau donne un cours d’eau d’ordre 3. Or, la rivière formée par la jonction de deux cours d’eau ayant un débit semblable tient toujours son numéro d’ordination. A titre d’exemple, le cours d’eau d’ordre 2 qui se réunit à un autre cours d’eau d’ordre 2 demeure toujours un cours d’eau d’ordre 2. Amoros & Petts (1993) traitent ce sujet avec plus de détails. Selon la taille de la rivière, les rivières en tête de bassin versant sont constituées généralement par des rivières d’ordre 1 à 3. Les rivières de taille moyenne sont d’ordre 4 à 6. Les rivières d’ordre supérieur présentent une taille d’une dizaine de mètres ou plus. L’écosystème lotique peut être analysé suivant trois dimensions spatiales : transversale (le cours d’eau et la plaine), verticale (les écosystèmes superficiels et souterrains), et longitudinale (unidirectionnelle). Les deux premières dimensions portent le nom de flux bidirectionnels. A cela s’ajoute une quatrième dimension, qualifiée comme temporelle, qui peut être appréhendée à plusieurs échelles, toutefois, notre étude a été limitée essentiellement sur le concept de la perturbation (« Disturbance Concept »). Flux bidirectionnels : les flux transversaux concernent les flux de matériaux. Ceux-ci se traduisent par les accumulations des sédiments transportés et déposés, et la reprise de ces matériaux par l’érosion. Quant aux flux d’eau, il s’agit des inondations du lit majeur de la rivière lors des crues, et le retour dans le lit mineur à la fin de la crue ou lors des étiages (Cummins & Klug 1979 ; Statzner & Hilger 1986).
Zonation longitudinale
La rivière se caractérise par une structure longitudinale. Beaucoup de chercheurs ont mené des travaux relatifs à cette structure. Illies & Botosaneau (1963) ont défini trois grandes zones : le crénon, le rhitron et le potamon. Cette subdivision est basée sur l’existence d’un gradient de la caractéristique du cours d’eau, à partir de la source formée par des petits cours d’eau jusqu’aux fleuves. Les petits cours d’eau sont généralement constitués par les ruisseaux et les torrents. Le crénon désigne la zone d’un cours d’eau à proximité de la source, aux eaux froides et saturées en oxygène dissous. Cette zone est caractérisée par des fonds constitués de substrat grossiers et d’une largeur relativement faible. Le rhitron désigne la zone d’un cours d’eau ayant une pente supérieure à 2‰, avec des eaux rapides et bien oxygénées. Il correspond à la partie supérieure des écosystèmes lotiques. La rivière est beaucoup plus large qu’au niveau de la zone précédente. Le potamon est la zone correspondant à la partie inférieure du cours d’eau où la pente est inférieure à 1‰. Le courant est lent et les rivières sont les plus larges. La plupart des travaux ultérieurs se sont inspirés de ce modèle. En milieux tropicaux, une zonation longitudinale conjuguée à l’altitude a été établie (Illies 1964). Une limite entre le rhitron et le potamon à 2000 m d’altitude sur le bassin péruvien de la Huallaga (en Amazonie) a été mentionnée. En Afrique, d’autres chercheurs ont tenu compte particulièrement des effets de l’altitude pour la zonation longitudinale (Chutter 1970). Une autre approche proposée par Malicky & Chantaramongkol (1993), se base sur des critères géomorphologiques pour une transition rhitron/potamon. Une telle transition est signalée dans la plupart des zones tropicales : ─ en Asie : Bishop (1973), Dudgeon (1992a), Chantaramongkol (1985) ; ─ en Afrique : Oliff (1963), Oliff & King (1965), Andresen & Johanson (1993); ─ en Amérique du Sud : Fittkau (1964), Harrison & Rankin (1976), Botosaneanu & Sakal (1992). En milieux tempérés, la théorie de zonation longitudinale a été basée sur la succession de la population aquatique. Huet (1949), et Illies (1958) ont appuyé leur recherche sur la succession de populations piscicoles. Alors que Botosaneanu (1959) a axé son recherche sur la succession de la population des insectes aquatiques
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