Influence d’une sous-alimentation gravidique
sur la croissance staturo-pondérale de la
progéniture
Généralités sur la croissance
La croissance est le processus par lequel les organismes vivants grandissent au travers de transformations morphologiques et fonctionnelles jusqu’à atteindre leur maturité physiologique. La croissance peut être présentée comme l’accroissement progressif d’une unité biologique (ou liée à des phénomènes biologiques) se poursuivant sans perte de l’individualité ni interruption de l’activité fonctionnelle (GOLD, 2000). Elle est aussi couramment définie comme une augmentation de taille et de poids. Sur le plan tissulaire, elle est caractérisée par une augmentation de la masse protoplasmique due à une néoformation protéique spécifique et sur le plan biochimique par la prépondérance de l’anabolisme sur le catabolisme (MAYER, 1990).
Mécanismes de la croissance
La croissance d’un organisme résulte essentiellement de deux phénomènes : d’une part l’augmentation de la masse de protoplasme par hyperplasie et hypertrophie cellulaire ; d’autre part, par l’accumulation de matières intercellulaires telles que les substances conjonctives, cartilagineuses, osseuses. C’est pourquoi on parle de croissance staturo-pondérale qui est définie comme une augmentation de taille (croissance staturale) et de poids (croissance pondérale).
Croissance pondérale
Tout organisme étant composé de cellules et provenant d’une cellule, l’augmentation de masse ou croissance pondérale doit trouver son explication sur le plan cellulaire. C’est ainsi qu’on peut la subdiviser en trois phases : (GANSEN et ALEXANDRE, 1997) – une phase de latence ou phase de préparation à la croissance qui est une période de multiplication du nombre de cellules ou hyperplasie car le nombre de cellule reste constant ; – une phase de croissance proprement dit ou phase exponentielle dominée par l’augmentation de volume de chaque cellule ou hypertrophie cellulaire ; – une phase d’arrêt de la croissance.
Croissance staturale
Taille et poids ne sont pas forcément liés, car la taille traduit surtout l’évolution du système osseux : c’est la croissance staturale. En cas de croissance rapide, l’accroissement porte d’abord sur la taille et ensuite sur le poids. Chez beaucoup d’espèces, cette croissance s’arrête à un certain moment de l’ontogenèse. Cependant il existe des animaux (reptiles, poissons, crustacés), chez lesquels elle est illimitée et se poursuit tant que vit l’animal. Le taux de croissance tant à diminuer de la naissance â l’âge adulte (FONTAINE, 1987).
Evaluation de la croissance
La croissance est un phénomène quantitatif qui peut être appréciée par des paramètres mesurés ou calculés. On peut l’évaluer par le poids qui est cependant un paramètre médiocre de mesure car dépendant aussi du contenu corporel en eau et en graisse ou par la taille. Cette dernière est indiquée en fonction de l’âge.
Les paramètres mesurés
Ce sont la taille, le poids, le périmètre crânien et l’envergure. La masse musculaire peut aussi être estimée par la mesure de la créatininurie des 24 heures rapportée à la taille. La mesure de la 3-méthyl histidine urinaire serait plus fidèle. Cependant cette méthode s’avère difficile chez certaines espèces. La masse cellulaire ne peut être appréciée que par des méthodes de réalisation difficile : mesure du potassium échangeable, mesure de l’eau intracellulaire (JACOTOT et LE PARCO, 2000). La biométrie des paramètres de croissance fœtale est réalisable lors de l’examen échographique. Elle est composée d’une biométrie céphalique, d’une biométrie abdominale et d’une biométrie des membres (GUIS et coll., 1997). La variabilité biologique de ces paramètres est liée à la parité, au sexe fœtal, au poids maternel durant la gestation et à l’espèce selon HADLOCK et coll. (1985).
Les paramètres calculés
Ce sont la vitesse de croissance (cm/unité de temps), le poids par rapport à la taille, et l’indice de corpulence ou Body Mass Index (BMI) ou indice de Quételet correspondant au rapport du poids sur la taille au carré (Kg/m2). Le calcul du périmètre musculaire peut aussi se faire comme suit : 3,14 (périmètre brachial –pli cutané tricipital). La valeur normale chez l’homme est de 25,3 cm en moyenne et chez la femme 23,2 cm en moyenne (JACOTOT et LE PARCO, 2000).L’estimation du poids fœtale est possible in vivo grâce à la formule classique de HADLOCK et coll. (1985) qui intègre les mensurations du tronc, de la tête et de la longueur fumorale. La croissance de l’organisme tout entier peut résulter d’une augmentation du nombre de cellules, d’un accroissement de la dimension des cellules, d’une augmentation du volume de matière extracellulaire ou d’une combinaison de ces trois éléments (RIEUTORT, 1999). Chez les Vertébrés et notamment chez l’Homme, certaines des étapes les plus marquantes de la croissance se déroulent avant la naissance, puisqu’une seule cellule indifférenciée (cellule œuf ou zygote) se développe pour devenir un organe complexe. Cette croissance se poursuit en différentes phases après la parturition et concerne plusieurs organes particulièrement les os et les muscles. 4 Cette croissance globale est un mécanisme complexe qui fait intervenir différents facteurs parmi lesquels les hormones (THIBAULT, BEAUMONT et LEVASSEUR, 2001).
Ossification et Croissance osseuse
Les tissus osseux et cartilagineux forment un cadre stable qui influence l’aspect extérieur et permet le mouvement des différentes parties du corps en association avec les muscles. Ce cadre est le squelette. L’association de ce dernier avec la musculature sera désignée sous le terme d’appareil locomoteur (SCHÄFFLER et SCHMIDT, 2002). Les os se développent chez le fœtus soit par ossification de cartilage hyalin (ossification enchondrale), soit par ossification de la membrane (ossification membranaire). L’ossification enchondrale donne naissance aux os courts et aux os longs. C’est le principal processus d’ossification. Cette évolution structurale s’accompagne de modification de la vascularisation et de la nutrition du fœtus. L’ossification de chaque os apparaît à des moments précis du développement fœtal, phénomène qu’on utilise pour déterminer l’âge gestationnel du fœtus. En général l’ossification démarre et se termine plus tôt chez la femelle que chez le mâle (BROOKER, 2001). La croissance osseuse intra-utérine se poursuit après la naissance pour se terminer généralement vers la puberté. La croissance en longueur se fait par ossification enchondrale au niveau du cartilage de conjugaison. Elle s’arrête lorsque le cartilage de conjugaison est totalement ossifié et que les épiphyses fusionnent avec la diaphyse. La croissance en largeur et en épaisseur a lieu par apposition. (SCHÄFFLER et SCHMIDT, 2002)
Croissance musculaire
Les cellules musculaires en forme de longues fibres allongées servent pour la locomotion, la contraction du cœur et pour d’autres fonctions vitales. On distingue généralement trois types de musculature : la musculature lisse, la musculature striée et la musculature cardiaque. Au cours du développement embryonnaire, certaines cellules mésenchymateuses de chaque myotome se différencient en longues cellules musculaires mononuclées appelés myoblastes qui prolifèrent par mitoses successives. Les myoblastes fusionnent entre eux pour constituer progressivement de longues cellules polynucléées appelés myotubes. La synthèse des protéines contractiles débute après la fusion des myoblastes. Elles se déposent initialement au centre du myotube et déplacent les noyaux vers la périphérie au fur et à mesure de leur synthèse. Le développement musculaire s’achève à la naissance par le processus d’innervation. 5 Après la naissance, la croissance musculaire se fait par augmentation de la taille du cytoplasme des cellules musculaires ou sarcoplasme. En cas de lésion, les cellules musculaires matures peuvent être remplacées par la prolifération de cellules souches ou cellules satellites qui persistent dans le muscle de l’adulte. Ces cellules souches ressemblent aux myoblastes et entre en mitose à la suite d’une blessure musculaire et fusionnent entre elles pour former des fibres différenciées (WHEATER, YOUNG et HEATH, 2001).
Hormones et croissance
Les principales hormones impliquées sont l’hormone de croissance et la thyroxine (qui contrôle par exemple la métamorphose chez les amphibiens). Dans l’espèce humaine, les hormones thyroïdiennes augmentent la croissance dans les premières années, tandis que les hormones somatotropes interviennent à partir de l’âge de 4 ans. Les hormones sexuelles induisent l’arrêt de la croissance par maturation accélérée des cartilages et les glucocorticoïdes inhibent la croissance. L’insuline stimulerait la croissance fœtale (LE MOIGNE et FOUCRIER, 2001).
L’hormone de croissance
L’hormone de croissance ou Growth hormon (GH) est la principale hormone qui stimule la croissance osseuse au niveau du cartilage épiphysaire (BROOKER, 2001). Elle est secrétée par l’hypophyse antérieure, et agit en stimulant la sécrétion de facteurs de croissance secondaires : les somatomédines. Celles-ci sont synthétisées dans le foie. Elles stimulent fortement la prolifération des cartilages de croissance. L’hormone de croissance provoque aussi la différenciation de certaines cellules cartilagineuses pour les rendre sensibles aux somatomédines (SAURA, 2000). Chez l’animal, l’administration du GH entraîne une augmentation du volume placentaire et de la croissance fœtale (TAUBER, 2001).
Les hormones thyroïdiennes
Dés la naissance, les hormones thyroïdiennes (thyroxine ou T4 et triiodothyronine ou T3) contrôlent la croissance. Leur absence empêche la mise en place d’une organisation normale du cartilage et s’accompagne d’une diminution de la sécrétion de l’hormone de croissance. Une carence dans la jeunesse (déficit thyroïdien congénital) freine le développement du squelette et de la taille. A l’inverse l’hyperthyroïdie accélère la croissance staturale et la maturation de l’os (BROOKER, 2001).
Les hormones sexuelles
Le taux circulant de ces hormones est très bas chez le jeune animal. La sécrétion devient importante à l’approche de la puberté et amorce les changements pubertaires chez les jeunes individus (LE MOIGNE et FOUCRIER, 2001). En effet, la testostérone chez le mâle provoque l’apparition des caractères sexuels secondaires mâles, stimule la production de sperme et intervient dans la croissance et le développement musculaire. L’œstrogène entraîne l’apparition des caractères sexuels secondaires femelles. La puberté précoce déclenche une accélération de la croissance staturale, mais aussi une maturation accélérée des cartilages de conjugaison, ce qui entraîne un arrêt prématuré de la croissance. Les androgènes fœtaux pourraient expliquer les faibles différences de croissance entre les fœtus mâles et femelles (TAUBER, 2001).
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