Etude comparative de variétés de manioc (Manihot esculenta CRANTZ) selon leur sensibilité aux termites ravageurs des boutures
Botanique
Le manioc est un arbuste vivace à la tige noueuse, pluriannuel mais essentiellement cultivé comme plante annuelle (Birindwa et al., 2007). Comme naturellement chez les Euphorbiacées, ses diverses parties contiennent du latex.
Les tiges
Le manioc peut se présenter avec une ou plusieurs tiges, plus ou moins verticales et atteignant 1 à 6 m de haut (Camara, 2006). Elles sont de couleur variée : blanc verdâtre, gris, jaunâtre, violacé, rouge ou brun. Leur diamètre est de 3 à 4 cm en moyenne. A une certaine hauteur, ces tiges peuvent se ramifier en 2 ou 3 branches, qui à leur tour peuvent se ramifier jusqu’à dix fois au cours du cycle. Cette ramification provoquée par la floraison, est sous contrôle variétal. Elle est également influencée par les facteurs du milieu. Le port de la plante est variable : rampant, étalé, dressé ou érigé. Lorsque les feuilles tombent, on remarque à leur point d’insertion une protubérance protégeant un œil. On appelle cet ensemble protubérance-œil, à tort, « nœud ». Ces « nœuds » sont disposés en spirale et la longueur des « entre-nœuds » est décroissante de la base au sommet. Selon Marty (1993), les tiges ne s’aoûtent que dans la moitié inférieure de leur hauteur, et comportent dans cette partie, une moelle centrale (Planche 2 E). Chez certaines variétés de manioc, la tige est en grande partie remplie de moelle et, de ce fait, fort fragile. Chez d’autres variétés par contre, l’écorce de la tige est plus épaisse et couvre une moelle mince. Dans ce dernier cas, la tige est relativement plus dure (Faye et al., 2014).
Les feuilles
Les feuilles du manioc (Planche 2 A) sont alternes et palmatilobées avec 3 à 11 lobes. Elles mesurent de 10 à 20 cm de long et sont portées par un pétiole qui peut être réduit à quelques millimètres parfois atteignant 6 cm de long selon la variété et dont la couleur va du jaune clair au rouge en passant par le vert (Camara, 2006). D’après Marty (1993), les feuilles du manioc sont caduques car elles tombent durant sa phase de repos.
Les racines
Les racines de manioc sont fasciculées et se renflent en se gorgeant d’amidon. La plante forme une centaine de racines mais quelques-unes seulement se tubérisent (Marty, 1993). Les tubercules (Planche 2 F) ont de 20 à 80 cm de long et de 5 à 15 cm de diamètre selon Abderahim (2010). Ils sont attachés au collet de la plante par un pédoncule plus ou moins long, parfois inexistant. Ils se situent à quelques centimètres de la surface du sol.
Une coupe transversale d’un tubercule montre une écorce externe grise violacée, jaunâtre ou brune formée de liège, une écorce interne blanche ou rose plus ou moins violacée de 2 à 10 mm d’épaisseur (le phelloderme), pauvre en fécule et riche en produit toxique (la manihotoxine) et un cylindre central blanc ou jaune clair riche en fécule (Allem, 2002). Les tubercules ont des formes très variables et pèsent de 100 g à 3 Kg chacun. Un pied de manioc peut produire 5 à 6 Kg de tubercules et parfois plus (Sy, 2010). 2.4. Fleurs et inflorescences D’après Silvestre et Arraudeau (1983), les fleurs du manioc ont 1 cm environ de diamètre et sont jaunâtres, parfois de couleur rose, pourpre ou verdâtre. Les fleurs mâles comprennent un calice de 5 sépales soudés à la base et 10 étamines. Les fleurs femelles comprennent un calice de 5 sépales libres, un ovaire divisé en 3 loges et surmonté d’un style portant un stigmate divisé en 3 parties portant de nombreuses protubérances (Planche 2 A).
Les fleurs mâles, qui ne sont pas toujours fertiles, et femelles ne s’ouvrent pas en même temps : la fécondation est donc croisée. Les inflorescences du manioc (Planche 2 A) apparaissent aux points où les tiges et les branches se ramifient. Ce sont des grappes qui comprennent en général 80 à 120 fleurs mâles et 4 à 10 fleurs femelles. Ces dernières se trouvent à la base des inflorescences (Marty, 1993). 2.5. Fruits et graines Les fruits de manioc (Planche 2 B) sont des capsules déhiscentes qui mûrissent en 5 mois et projettent les graines à 10 m environ (Silvestre & Arraudeau, 1983). Elles sont de la même couleur que les rameaux et comportent à leur surface externe 6 ailes plus ou moins sinueuses, avec un renflement ou « caroncule » à la base. Elles renferment 3 loges contenant chacune 1 graine de 5 à 13 mm de long sur 3 à 7 mm de large et possèdant un tégument marbré.8 Planche 2 : Caractéristiques botaniques du manioc A : Fleurs et feuilles B : Fruits C : Graines D : Tiges E : Coupe transversale d’une tige montrant la limite des différents tissus F : Tubercules de manioc A B C F E C D Source : Sylvestre & Arraudeau (1983) 2 cm 2,5 cm 7 cm 16 cm 1 cm 0,4 cm
Ecologie
Le manioc est une plante de zone tropicale humide à grande faculté d’adaptation, tant pour le climat que pour le sol. Il ne pousse normalement que dans les régions tropicales et tempérées chaudes. Il ne supporte pas le gel et l’optimum de rendement est obtenu sous 1 200 à 1 500 mm de pluie, à température moyenne de 23 à 24°C, avec 2 à 3 mois de saison sèche (Raffaillac, 1993). Dans ces conditions, tous les sols sont acceptés à l’exception des sols asphyxiants. Le manioc est en mesure de survivre à des périodes de sécheresse prolongées au cours desquelles la plante, qui est susceptible de s’effeuiller totalement, stoppe également la croissance des racines épaissies.
Elle se régénère dès le retour des pluies sans que l’on ait à déplorer de baisses de rendement notables. Cette propriété qualifie tout particulièrement le manioc pour les sites caractérisés par des précipitations incertaines et irrégulières (Cock, 1985). 4. Intérêt nutritionnel Le manioc est une source de fécule. Il contient bien plus d’eau et bien moins de protéines que les céréales. Sa teneur en protéines est inférieure à celle de presque toutes les autres denrées essentielles. On peut en faire la base de l’alimentation, mais à condition de l’associer à d’autres aliments énergétiques riches en protéines, comme les graines d’oléagineux, les légumes secs et le poisson. Cependant, on le cultive souvent comme aliment de réserve dans les régions pauvres et éloignées, où la population ne peut se procurer des denrées plus nourrissantes (FAO, 1990).
Les tubercules de manioc sont riches en amidon et contiennent beaucoup de glucides (35% dont 20 à 25% d’amidon contre 1% seulement de protéines), de la vitamine C, du potassium et des fibres alimentaires selon Guitteny (2010). Les feuilles de manioc constituent un aliment très riche en protéines et en vitamines, surtout A et C. Elles contiennent d’ailleurs considérablement plus d’énergie, de protéines (environ 6%), de lipides, de glucides, de fibres, de sels minéraux (Ca, P, Fe, etc.), de vitamine A, de thiamine, de riboflavine et de niacine que certains légumes, tels que le chou chinois ou l’épinard (IITA, 1990). Le tableau 1 présente la composition nutritionnelle des feuilles et des racines de manioc. Tableau 1 : Composition nutritionnelle des feuilles et des racines de manioc. Feuille Racine Eau 80 % 62 à 68 % Glucides 7 % 35 % (dont 20 à 25 % d’amidon) Lipides 1 % 0,3 % Protéines 6 % env. 1 % Vitamine C 200 mg/100g 35 mg/100g Vitamine B1 0,2 mg/100g négligeable Vitamine B2 0,3 mg/100g négligeable Source : FAO (2000) 5.
Intérêt médicinal Les feuilles de manioc sont particulièrement riches en acides aminés essentiels (isoleucine, leucine, lysine, méthionine et cystéine, phénylalanine et tyrosine, thréonine, tryptophane, valine). Les teneurs pour 100 g de feuilles sont suffisantes pour couvrir les besoins quotidiens de l’homme selon les recommandations de la FAO et de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). La farine de manioc appliquée en cataplasme fait murir les abcès. En bouillie sucrée au miel, elle permet de lutter contre l’insuffisance spermatique. Boire à petites gorgées un remède composé d’une cuillère à café de farine de manioc délayée dans une tasse d’eau et sucrée d’une cuillérée de sirop de canne, permet de lutter contre les fortes émotions (Guitteny, 2010).
Toxicité
Le manioc contient en quantité limitée mais non négligeable deux toxines potentielles que sont la linamarine et la lotaustraline (Alves, 2012). Il s’agit de glucosides cyanogènes qui sont transformés en acide prussique (acide cyanhydrique) par un enzyme, la linamarase qui est également présente dans les tissus du tubercule. La concentration de l’acide prussique varie de 10 à 490 mg/kg de tubercules frais (FAO, 1990). C’est chez les variétés amères et surtout celles qui poussent en milieu aride sur des sols pauvres que cette concentration est plus forte. Chez ces variétés amères, la toxine est également présente dans la chair du tubercule et notamment dans le cœur fibreux.
Chez les variétés douces par contre, la toxine est dans sa quasi-totalité concentrée dans l’enveloppe externe du tubercule. Certaines de ces variétés peuvent être consommées crues après épluchage. Les tubercules de manioc contiennent en quantité variable du cyanure libre (jusqu’à 12% du total). La dose mortelle d’acide cyanhydrique libre pour un adulte est de 50 à 60 mg (FAO, 1990). La toxicité du cyanure lié est cependant moins bien connue. En effet, il n´est possible de distinguer l´amer du doux qu’uniquement á travers des analyses effectuées en laboratoire (Allem, 2002), le goût amer du manioc n’étant pas une forme de détection sure. Le potentiel cyanogénique des feuilles est de 5 à 20 fois plus grand que celui de la racine. En effet, selon Alves (2012), la Linamarine est synthétisée dans les feuilles (200 à 500 mg HCN/Kg en poids frais) où la linamarase se trouve en de hautes concentrations, puis transférée aux racines (15 à 500 mg HCN/Kg en poids frais).
Détoxification
Faire bouillir le manioc frais ne diminue guère sa toxicité, le glucoside linamarine est thermorésistant. Quant à l’enzyme linamarase, elle est inactivée à 75°C (Alves, 2012). Les procédés de désintoxication du manioc reposent essentiellement sur l’hydrolyse des enzymes, aux fins de réduire la concentration de glucoside. L’acide cyanhydrique, outre qu’il est très volatil, est soluble dans l’eau. Il convient donc de le libérer par un traitement approprié avant que le tubercule ne soit consommé.
Toutefois, les glucosides des tubercules consommés se décomposent dans le tractus intestinal ; ce qui libère le cyanure libre. Les méthodes de traitement des tubercules de manioc peuvent être classées en plusieurs catégories selon qu’elles prévoient ou non une étape de fermentation. Celle-ci améliore la valeur nutritionnelle et la saveur du produit et peut en réduire la teneur en acide cyanhydrique. L’épluchage diminue aussi la toxicité des tubercules car la concentration de cyanure dans l’enveloppe externe est de 3 à 15 fois supérieure à sa concentration dans la chair (FAO, 1990). Selon Alves (2012), la teneur maximale de cyanure (HCN) recommandée par la FAO est de 10 mg/Kg d’aliment.
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