Influence de l’interface fibre/matrice sur le comportement mécanique en température des
composites C/C
La caractérisation des interphases de pyrocarbone par microscopie électronique en transmission.
La microscopie électronique en transmission est la technique qui a été choisie pour déterminer les épaisseurs des interphases ainsi que leur microstructure. Cependant, elle nécessite la préparation d’échantillons spécifiques dont la préparation fait beaucoup travailler les interfaces fibre-matrice et risque de détériorer certaines de leurs propriétés.
La microscopie électronique en transmission
Toutes les observations ont été effectuées à l’aide d’un microscope électronique (PHILIPS CM 30) de 300kV. Celui-ci permet d’obtenir des grandissements de plus de x500 000 ainsi que de caractériser les dépôts de pyrocarbone par plusieurs techniques : le Fond Clair Contrasté, le Fond Noir, le Haute Résolution et la Diffraction Electronique à Aire Sélectionnée (DEAS). Mais le principal garant d’une observation riche en renseignements est la réussite de la préparation d’un bon échantillon. Dans le cas des composites carbone/carbone, l’obtention de lames minces, c’est-à-dire inférieures à 100 nm, s’est faite, après un premier préamincissement mécanique, puis par un bombardement d’ions primaires qui érode progressivement l’échantillon. Une photographie prise par microscopie électronique à balayage d’une préparation correctement réalisée est donnée à la figure II.23. Dans ce cas, l’observation de la zone interfaciale fibre-matrice est relativement aisée. En revanche, les échantillons peuvent réagir différemment à l’amincissement ionique, soit en présentant de véritables effondrements de la zone amincie laissant alors place à des épaisseurs trop importantes pour permettre la transmission du faisceau électronique (figure II.24.a), soit en amincissant de façon inégale la fibre et la matrice, ce qui complique l’analyse de la zone interfaciale (figure II.24.b). Dans les deux cas, il est quasiment impossible de réaliser des photos suffisamment contrastées pour mettre en évidence les différences de structures qui doivent exister aux interfaces. Figure II.23 Zone d’un C/C aminci pour observation MET observée au MEB. Figure II.24 Problèmes rencontrés lors des amincissements des échantillons MET a) effondrement d ’une partie de la zone amincie b) différence d ’amincissement entre la fibre et la matrice a) b) 6 µm 10 µm 15 µm C
Elaboration des matériaux
Le matériau référence
La caractérisation de la fibre ex-PAN et de la matrice de pyrocarbone (de type Laminaire Rugueux) a déjà été présentée. Il reste à caractériser l’interface fibre-matrice du matériau référence avant d’étudier les différentes interphases déposées. L’observation de la zone interfaciale par la technique du Fond Noir permet de constater que le dépôt de la matrice ne s’est pas fait de façon homogène (figure II.25). En effet, une zone plus désorganisée est obtenue en début de densification pouvant être considérée comme une interphase. L’épaisseur de celle-ci peut être estimée entre 200 et 400 nm. Sa relative désorganisation est caractérisée par une multitude de petits cônes de croissance conférant au dépôt un aspect granulaire. Une analyse en DEAS confirme cette plus faible anisotropie à l’interface où l’on obtient une figure de diffraction différente de celle de la matrice avec des anneaux d002 ayant une ouverture angulaire de OA = 60° (figure II.26). Il apparaît donc que, lors du dépôt de la matrice, une zone de faible anisotropie se forme en surface de fibre. Ce n’est qu‘après environ 200 nm de dépôt que le pyrocarbone de type Laminaire Rugueux se forme de façon continue. La même étude en MET a été réalisée sur un matériau référence mais après traitement à haute température (T = 2200°C). La matrice étant de type Laminaire Rugueux, elle possède la faculté de se graphiter après un tel traitement contrairement aux dépôts moins bien orientés de type laminaire lisse ou isotrope. Ces observations confirment la modification de structure de la matrice avec une meilleure organisation des plans de graphène et une figure de diffraction qui tend vers celle d’un réseau cristallin (figure II.14). Mais la zone interfaciale a elle aussi évolué. Le traitement thermique a permis de lui conférer une meilleure organisation. Un cliché réalisé en Haute-Résolution (figure II. 27) montre que le dépôt a une structure de type Laminaire Rugueux. Il s’avère, par conséquent, que ce dépôt plus faiblement organisé observé à l’interface fibre/matrice, n’est pas un pyrocarbone de type Laminaire Lisse mais Laminaire Rugueux. Sa croissance s’effectue avec régénérescence des cônes de croissance. Au-delà de 200nm, ce phénomène s’arrête et les derniers cônes donnent au pyrocarbone laminaire son aspect habituel (cône traversant).
Les interphases ex-propane I1 et I2
L’étude des interphases I1 et I2 du point de vue structural (par microscopie optique) et cinétique s’est faite à partir d’épaisseurs supérieures au micron et après des temps de dépôt assez longs. Il reste donc à vérifier par microscopie électronique en transmission la Figure II.25 Zone interfaciale d ’un C/C de référence sans interphase en M.E.T. (Fond Clair Contrasté) et les clichés en DEAS des différentes zones observées. Matrice de pyrocarbone Laminaire Rugueux Pyrocarbone Granulaire à l’interface Fibre/Matrice 5 nm Figure II.26 Cliché en Haute Résolution de la zone interfaciale d’un C/C de référence après un THT-2200°C. Fibre HTA Chapitre II : Elaboration des matériaux -50- véracité de l’hypothèse selon laquelle les dépôts se seraient faits de façon uniforme et principalement lors de la réalisation des interphases d’épaisseur de 100 nm.
L’interphase
Des échantillons des matériaux C/C avec la présence de l’interphase I1, ayant une épaisseur supposée de 100 nm, avec et sans traitement thermique à 2200°C ont été préparés en lame mince pour l’analyse en MET. Pour les composites sans THT 2200°C, une zone plus désorganisée apparaît à l’interface fibre-matrice en Fond Noir (figure II.27) avec une épaisseur qui peut être estimée entre 100 et 200 nm. Celle-ci a été caractérisée par DEAS et Haute Résolution afin de déterminer sa microstructure. Les échantillons n’ont pas permis de réaliser des clichés en Haute Résolution suffisamment contrastés pour pouvoir conclure sur l’organisation de l’interphase. En revanche, l’analyse en DEAS fournit des clichés de diffraction avec des anneaux d002 largement ouverts. Le logiciel de traitement ANADIF permet de mesurer l’ouverture angulaire de l’interphase ce qui donne des valeurs de OA = 50°. Cette valeur correspond bien à un pyrocarbone désorganisé de type Laminaire Lisse ce qui se corrèle bien avec la valeur de l’angle d’extinction de Ae = 16° déterminé en microscopie optique. Un traitement THT 2200°C doit accentuer les différences de structure qui existent entre l’interphase et la matrice. En effet, cette dernière de type Laminaire Rugueux est graphitisable tandis que l’interphase ne l’est pas. Ceci a pour conséquence d’accentuer le contraste entre les deux phases en fond clair contrasté. Ceci permet de confirmer la présence d’une interphase, plus désorganisée que la matrice, d’une épaisseur de 100 à 200 nm qui ne subit que peu de modifications structurales par traitement thermique.
L’interphase I2
La même étude que pour l’interphase I1 a été faite pour l’interphase I2. Des échantillons ont été préparés à partir de matériau C/C en présence de l’interphase I2 avec et sans traitement thermique à 2200°C. L’analyse en microscopie électronique en transmission a permis de confirmer que le dépôt d’une interphase, d’environ 100 nm et de microstructure moins anisotrope que celle de la matrice avait été préalablement déposée, en particulier par la technique du fond clair (figure II.28) et en frange de réseau (figure II.29). Les photos des interfaces fibre-matrice après le THT 2200°C (figure II.30) montrent une différence de contraste qui apparaît clairement entre, la zone interfaciale qui n’a pas graphité (le dépôt étant un pyrocarbone laminaire lisse), et le Figure II.27 Caractérisation de l’interphase I1 par un cliché en Fond Noir par MET. Figure II.28 Caractérisation de l’interphase I2 par un cliché en Fond Noir par M.E.T. et les clichés en DEAS des différentes zones observées. 10 nm Figure II.29 Caractérisation de l’interphase I2 par M.E.T. en Haute Résolution. 200 nm x 80 000 Matériau C/C avec une interphase ex-propane de 0.1µm ayant subi un THT 2200°C Fibre HTA Interphase Matrice Fgure II.30 Cliché en fond clair contrasté du matériau C/C/C 1000.1 après un THT 2200°C. Décohésion Interfaciale reste de la matrice qui a évolué vers une structure plus proche de celle du graphite. L’épaisseur de l’interphase pouvant alors être mesurée est de l’ordre de 150 nm. L’étude de l’interphase I2 en DEAS a permis de caractériser la microstructure avec une ouverture angulaire des anneaux de diffraction de OA = 60°. Cette mesure corrobore la différence d’angle d’extinction observée en microscopie optique pour les deux interphase. Bien que I1 et I2 soit des pyrocarbones laminaires lisses, il existe une différence de structure entre les deux interphase avec un dépôt, I1, possédant une meilleure anisotropie.
L’interphase ex-toluène Itol
L’étude en microscopie électronique en transmission de l’interphase Itol n’a pas pu être correctement réalisée. En effet, une mauvaise préparation des échantillons (par amincissement ionique) n’a pas permis d’obtenir de clichés suffisamment contrastés pour mettre en évidence la présence de cette interphase. Par conséquent, seule la mesure de la prise de masse, équivalente aux interphase I1 et I2, et l’observation des ces mêmes interphase en microscopie électronique en transmission permet de supposer que l’interphase Itol a été déposée de façon uniforme et avec une épaisseur de l’ordre de 100nm. Mais aucune confirmation par microscopie électronique en transmission n’a pu être donnée.
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