Influence de la chimiothérapie
INTRODUCTION
Le cancer du sein malgré les progrès thérapeutiques reste le 2e cancer le plus fréquent dans le monde et constitue la cause la plus principale de décès par cancer chez les femmes. Au Sénégal, plus de 200 nouveaux cas sont diagnostiqués par an et il est au 2e rang des cancers gynécologiques et mammaires. Dans tous les pays de la sous région, sa prise en charge est encore très onéreuse. Parmi les moyens thérapeutiques disponibles figure la chimiothérapie dont l’efficacité n’est pas garantie. Elle est en outre associée à plusieurs effets secondaires en raison de son manque de spécificité pour les seules cellules tumorales. Plusieurs études ont rapporté une réduction des nombres de lymphocytes sanguins au cours de la chimiothérapie et tres peu de données sont actuellement disponibles quant à son influence sur la fonctionnalité lymphocytaire. Les essais cliniques actuellement en cours dans le domaine de l’immunothérapie préconisent l’association de substances anticancéreuses à des facteurs de la réponse immunitaire tels que les anticorps et les cellules dendritiques sensibilisées. L’utilisation de ces nouvelles stratégies therapeutiques ne pourra alors reposer que sur une meilleure maitrise des effets de la chimiothérapie sur les composants de l’immunité. Notre étude entre donc dans le cadre d’une meilleure connaissance de ces effets avec pour objectifs l’évaluation des niveaux d’activation précoce et tardive des sous populations lymphocytaires T et des cellules B de patientes atteintes de cancer de sein et soumises à une chimiothérapie anticancéreuse.
DEFINITION ET HISTORIQUE DU CANCER DU SEIN
Le cancer du sein peut être défini comme une prolifération maligne des cellules épithéliales. La description la plus ancienne de la maladie reste celle retrouvée dans un papyrus découvert par Edwin Smith et datant de 2800 avant JC. Il s’agit d’un manuel égyptien sur la chirurgie et la traumatologie décrivant une pathologie apparentée au cancer du sein [Baize, Mounier et al., 2008]. C’est vers 400 avant JC que le terme de cancer est apparu en Grèce chez les prêtres-médecins d’Esculape et les Asclépiades, qui rapportaient des tumeurs et ulcères du sein traités par cautérisation. Il fallait attendre 460 avant J.C pour avoir une description plus précise des tumeurs malignes faite par Hippocrate qui leurs donna le nom de « carcinos », « carcinoma » qui signifie crabe en raison de l’aspect à un stade évolué. C’est plus tard, qu’un médecin romain nommé Cornelius Celsus traduisit alors le mot grec « carcinos » en « cancer ». Il définit par la suite, les différents stades de la maladie et les traitements à utiliser en fonction de son évolution : excision, cautérisation, onguents avant d’évoquer le risque d’une aggravation en cas de traitement incomplet [Baize, Mounier et al., 2008]. Selon Galien, le processus tumoral est la conséquence d’un excès de bile noire qui se solidifie à l’ endroit où doit apparaitre la maladie. Au XVe siècle, Aetius démontre l’existence d’une adénopathie axillaire et par la suite, la chirurgie a permis une meilleure compréhension du cancer du sein. Ces anciennes descriptions sont aujourd’hui remplacées par des classifications qui permettent de résumer les principales caractéristiques du cancer mammaire
EPIDEMIOLOGIE DU CANCER DU SEIN
Situation dans le monde
En termes de fréquence, le cancer du sein est le deuxième cancer dans le monde après celui du poumon. Selon l’OMS, une augmentation de l’incidence de plus de 20 % et une hausse de la mortalité de 14% ont été observées ces dernières années. C’est ainsi qu’il représente un cancer sur quatre chez les femmes et constitue l’une des principales causes de décès par cancer dans les pays les moins développés. En effet, 1,7 million de femmes sont annuellement diagnostiquées et en 2012, 6,3 millions de femmes vivaient avec un cancer mammaire confirmé au cours des cinq années précédentes. L’incidence est variable d’un pays à l’autre allant de 80% ou plus en Amérique du Nord, en Suède et au Japon, à près de 40 à 60% dans les pays sous-développés [Coleman and al, 2008].
Situation au Sénégal
Selon les estimations de la ligue sénégalaise contre le cancer, on dénombre plus de 853 cas de cancer du sein par an au Sénégal. Environ 472 décès sont notés parmi les cas répertoriés soit plus de la moitié, cette mortalité est surtout liée à un dépistage tardif et un défaut de prise en charge de la maladie. En 2008, selon une étude réalisée a l’Institut Juliot Curie de Dakar, le cancer du sein est au 2e rang des cancers gynécologiques et mammaires. Il s’agit d’une situation similaire à tous les pays d’Afrique subsaharienne [Ahmadou, B.T. et al., 2008]. Avec un âge moyen de 47,6 ans, les patientes concernées sont relativement plus jeune qu’en Europe. Les cancers du sein surviennent à partir de 20 ans, augmentent de fréquence aux alentours de 30 ans pour atteindre un pic dans la tranche d’âge de 40 à 44 ans. Plus de la moitié des cas (57,3 %) surviennent avant 50 ans et l’apparition des premières règles audelà de 12 ans, les grossesses multiples et la multiparité font la particularité de la plupart de ces patientes atteintes de cancer du sein au Sénégal.
FACTEURS DE RISQUE DU CANCER DU SEIN
Prédisposition génétique
Le cancer du sein est dû à une prédisposition génétique dans 5 à 10% des cas. L’origine génétique du cancer mammaire est fortement suspectée lorsque plusieurs individus d’une même famille sont atteints, sur plusieurs générations et surtout si la maladie survient avant 40 ans. Les mutations impliquées concernent les gènes BRCA1 et BRCA2. En effet, il a été démontré que les mutations de ces deux gènes seraient à l’origine d’une augmentation du risque de développer un carcinome mammaire [Coupier and Pujol, 2005]. Les gènes BRCA1 et BRCA2 sont localisés respectivement dans les loci 17q21 et 13q14; ils codent pour des protéines impliquées dans la réparation des altérations du génome. La fréquence des mutations de ces deux gènes est de l’ordre de 0.2% et la transmission génétique se fait selon un mode autosomique dominant [Eisinger, Bressac et al., 2004]. Pour une femme porteuse d’une mutation délétère de BRCA1, le risque de développer un cancer du sein est estimé entre 40 et 85% avant 70 ans contre 10% environ dans la population générale. Ce risque est plus élevé et plus précoce pour BRCA1 (70%) comparé celui lié à la mutation du gène BRCA2 (50%) [Eisinger, Bressac et al., 2004]. D’autres gènes de prédisposition, responsables de syndromes génétiques rares confèrent un risque héréditaire de cancer du sein. Parmi ces gènes, on retrouve le PTEN dont l’altération est responsable de la maladie de Cowden, le p53 impliqué dans le syndrome de Li Fraumeni et le gène Ramatoulaye NDIAYE / Mémoire Master Immunologie et Infection/ 2013-2014 3 STK11 muté dans le syndrome de Peutz-Jeghers. Le risque cumulé de cancer du sein dans ces différents syndromes est respectivement de 25 à 50%, de 28 à 43% et de 29%.
Facteurs hormonaux endogènes
Apparition précoce des règles et ménopause tardive La précocité des règles augmenterait le risque de cancer du sein jusqu’à 5%. Aussi, ce risque serait accentué d’environ 3% par un retard de ménopause au delà de 50 ans [Key and Pike, 1988] . Au plan biologique, cette association aurait pour fondement l’hypothèse de l’exposition précoce ou prolongée aux hormones telles que l’œstrogène naturel libéré par les ovaires pendant le cycle menstruel. Il a été démontré qu’une présence prolongée des œstrogènes dans l’organisme était associée à un risque accru de cancer du sein .
Contraceptifs oraux et thérapie hormonale substitutive
Le risque de cancer du sein est augmenté d’environ 25 % chez les femmes utilisant couramment les contraceptifs oraux renfermant des hormones sexuelles femelles. Cependant, cet accroissement de risque chute dès l’arrêt de la consommation, de sorte que 10 ans après l’arrêt de l’utilisation, aucune augmentation significative de risque ne soit manifeste [Cancer., 1996 ]. Ce risque augmenterait surtout lors de prises tardives des contraceptifs à l’âge où le risque de cancer du sein devient appréciable. De même les femmes sous thérapie hormonale substitutive présentent un risque augmenté de cancer du sein par rapport aux femmes qui ne l’ont jamais utilisé et ce risque augmente avec la durée d’utilisation et diminue dès l’arrêt du traitement. L’effet de la thérapie hormonale substitutive varie selon la composition des produits. Le risque relatif est de 2 chez les femmes utilisant une association oestro-progestative, tandis qu’il n’est augmenté que de 30 % chez les femmes recevant un traitement oestrogénique simple .
Grossesse et allaitement
Les facteurs liés à la reproduction sont aussi fortement associés au risque de cancer du sein. Les femmes qui ont mené au moins une grossesse à terme avant l’âge de 30 ans présentent, en moyenne, un risque de cancer du sein diminué de 25 % par rapport aux femmes nullipares et ce risque diminue avec l’augmentation du nombre de grossesses [Russo, Hu et al., 2000]. Ceci est dû au fait que, pendant la grossesse, les ovaires ne produisent pas d’œstrogènes. D’autres parts les capacités prolifératives des lobules de la glande mammaire diminuaient avec leur différenciation. Les lobules primaires seraient donc les structures les plus prolifératives tandis que les cellules constituant les lobules dits « quatre » seraient bien différenciées et perdraient leur capacité à proliférer. Comme chaque grossesse contribue ainsi à la différenciation des lobules cela expliquerait en partie leur effet protecteur [Cancer, 2002]. Ramatoulaye NDIAYE / Mémoire Master Immunologie et Infection/ 2013-2014 4 D’autres études indiquent également que l’allaitement réduirait le risque de cancer du sein et que plus la durée d’allaitement d’une femme est longue plus le risque diminuait. Cette diminution est estimée à 4,3% lorsque le calcul est effectué sur 12 mois d’allaitement . La lactation produit des changements hormonaux endogènes, en particulier une réduction d’œstrogènes et une augmentation de la production de prolactine, qui sont supposées diminuer l’exposition cumulative aux œstrogènes chez la femme. Par conséquent, la lactation réprimerait l’apparition et le développement du cancer du sein .
Facteurs environnementaux
Certains facteurs environnementaux peuvent augmenter le risque de cancer du sein. Il a été démontré que l’effet des radiations ionisantes, chez les femmes exposées avant l’âge de 40 ans, était associé à un risque accru de cancer du sein dans la mesure où ces radiations endommagent l’ADN et ses constituants [Little, Muirhead et al., 1999]. De même certains produits chimiques présents dans notre environnement peuvent mimer l’action d’hormones. Les produits chimiques imitant l’œstrogène font partie d’un groupe de produits appelés « perturbateurs hormonaux » ou « perturbateurs endocriniens». C’est le cas de pesticides comme les pyréthrinoïdes et le méthoxychlore, qui agissent sur le récepteur de l’œstrogène.
Autres facteurs de risques
L’âge
La maladie est rare chez les femmes de moins de 30 ans (cancers non génétiques). Le risque augmente entre 50 et 75 ans (près des deux tiers des cancers du sein). L’obésité augmente d’environ 50 % le risque de cancer du sein chez les femmes ménopausées, probablement en raison de l’augmentation des concentrations sériques d’œstradiol libre. L’excès de tissu adipeux entraîne l’augmentation de la production et du temps d’exposition aux hormones stéroïdiennes [Wenten, Gilliland et al., 2002]. S’agissant de la consommation d’alcool, les données restent encore contradictoires. Certaines études montrent qu’elle augmentait le risque de cancer du sein chez la femme [Singletary and Gapstur, 2001] alors que d’autres études soutiennent le contraire [Hamajima, Hirose et al., 2002]. Aussi pour le tabac certaines études ont montré que les fumeuses présentent un risque réduit, alors que, d’autres ont rapporté une augmentation de risque associé au tabagisme [Johnson, Hu et al., 2000].
LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES |