Infirmité motrice cérébrale et troubles visuo-spatiaux

Troubles visuo-spatiaux

Selon Benton il existe trois types de troubles liés au visuo-spatial :
les troubles visuo-spatiaux avec une localisation altérée des points de l’espace, un déficit d’orientation, des difficultés dans les distances et les directions, la négligence d’une partie du champ visuel ;
les troubles visuo-moteurs qui sont liés à des mouvements oculaires défectueux ou à des performances graphomotrices réduites ;
les troubles visuo-perceptifs qui sont en fait des altérations de la reconnaissance des couleurs, de la reconnaissance visuelle ou de l’analyse du figure-fond.
Dans sa thèse, Emilie Schmetz explique la complexité de la définition des troubles visuo-perceptifs avec les termes suivants : « Pour Chokron (2010), les troubles de la cognition visuelle recouvrent, isolément ou en association, des déficits d’attention et d’exploration visuelle, des troubles de la reconnaissance visuelle et/ou des atteintes des traitements visuo-spatiaux et visuo-moteurs mais n’intègrent pas les troubles visuo-constructifs. Fazzi (2004, 2007, 2009) est encore plus restrictive puisqu’elle exclut aussi les déficits d’attention visuelle et d’exploration visuelle de sa définition des troubles visuo-perceptifs. »
D’après le site Dys Positif, un trouble visuo-spatial est un dysfonctionnement d’un ou plusieurs mécanismes permettant la saisie, l’analyse et le traitement des informations visuelles en vue d’exécuter une tâche en particulier. Cela se manifeste généralement par une incapacité au niveau de la perception de la position d’un élément : par rapport à l’axe corporel ; par rapport à la gravité ; par rapport à son orientation ou/et par rapport à son environnement.
Les enfants atteints de troubles visuo-spatiaux sont en général des grands maladroits, mal à l’aise avec les activités qui nécessitent de la précision et de la rapidité. Ils sont souvent bien plus investis sur des activités à composante verbale et intellectuelle.
Il semblerait que les enfants atteints d’IMC soient particulièrement touchés par des troubles visuo-perceptifs, à des degrés différents selon les enfants. Selon la localisation et l’amplitude de la lésion, la manifestation des troubles neurovisuels des enfants IMC peut être très variée.
Les troubles visuo-spatiaux sont généralement accompagnés de troubles du regard et d’une non automatisation des gestes dans les activités constructives, ce qui aboutit à des symptômes typiques d’une dyspraxie visuo-spatiale. Cela implique des retentissements très négatifs sur le plan des apprentissages.
De plus, lors des atteintes de la voie dorsale qui est une voie à conduction rapide, le contrôle visuel des mouvements ne sera plus assuré que par la voie ventrale qui, quant à elle, est une voie à conduction lente. Cela aura un impact direct sur les capacités attentionnelles de l’enfant atteint d’IMC.
Bien que les troubles visuo-spatiaux ne soient pas la seule conséquence de l’IMC sur les enfants qui en sont atteints, elle semble être l’une des plus fréquentes caractéristiques de ces derniers.

Infirmité Motrice Cérébrale

Dans la littérature, le terme de paralysie cérébrale regroupe l’infirmité motrice cérébrale (IMC), l’infirmité motrice d’origine cérébrale (IMOC) et le polyhandicap. Ce mémoire traitera principalement de l’infirmité motrice cérébrale. Guy Tardieu décrit en 1955 l’IMC «comme une atteinte cérébrale précoce, périnatale et non évolutive qui affecte plus ou moins gravement la motricité mais laisse intactes, totalement ou en grande partie, les capacités mentales et relationnelles». Les enfants présentant une déficience intellectuelle ne sont donc pas inclus dans la définition de l’IMC selon Guy Tardieu. L’IMC est une pathologie importante et très spécifique de neuropédiatrie, ce qui constitue de nos jours un véritable problème de santé publique.
Épidémiologie :Malgré les progrès de la médecine néo-natale, la prévalence des IMC ne diminue pas. Les IMC touchent 2 enfants pour 1 000 naissances, c’est-à-dire 1500 enfants de plus chaque année. Dans le cas des grands prématurés et des enfants dont le poids de naissance est très faible, cette prévalence est de 5% à 8 %. Selon une étude réalisée en Suisse dans le canton de Saint-Gall par la SCPE intitulée « Étude rétrospective portant sur l’épidémiologie de l’infirmité motrice cérébrale dans le canton de Saint-Gall » de Violeta Stojicevic (2016), les garçons sont plus touchés que les filles (60% pour les garçons, 40% pour les filles). Les enfants atteints d’IMC représentent 19% de l’ensemble de la population infantile handicapée.

Présence des troubles visuo-spatiaux chez les enfants atteints d’IMC

Avant d’étudier plus en détail les troubles visuo-spatiaux dont souffrent les enfants atteints d’IMC, cette première sous-partie va nous permettre de mettre en corrélation diverses études afin de déterminer de la présence ou non des atteintes visuo-spatiales chez ces enfants. Pour cela nous nous sommes intéressés à plusieurs études dont les premières se sont basées sur le Test of Visual Perceptual Skills (TVPS) pour tester les capacités visuo-spatiales. La plupart des travaux présentés dans cette étude bibliographique utilisent principalement le TVPS 3, c’est pourquoi nous allons le définir brièvement. Le TVPS 3 est un test normé et standardisé qui a été conçu comme un outil de diagnostic, mais aussi comme outil de recherche, ce qui le rend idéal pour une étude fiable. Il comprend sept sous-tests, à savoir la perception visuelle, la discrimination visuelle, la mémoire visuelle, les relations visuo-spatiales, la constance des formes, la mémoire séquentielle visuelle, le figure-fond et la vision syncrétique. Chaque sous-test comporte 16 items classés de facile à difficile. L’avantage du TVPS-3 est qu’il peut être utilisé pour tester des enfants souffrant de troubles moteurs ou de la parole, ce qui est régulièrement le cas pour les enfants atteints d’IMC.
La première étude que nous allons analyser est celle de Valérie Critten et al. (2018): “Visual perception, visual-spatial cognition and mathematics: Associations and predictions in children with cerebral palsy”. Son but était de déterminer l’étendue des déficiences visuelles spatiales et leur effet sur les capacités mathématiques chez les enfants atteints de paralysie cérébrale.
La population de l’étude était composée de 32 enfants comprenant un groupe d’enfants atteints de paralysie cérébrale (7 à 18 ans) qu’on appellera « PC » et un autre groupe d’enfants référent en cours de développement qu’on nommera « TD ». Les enfants ont été sélectionnés selon les critères suivants : des capacités de communication et de parole suffisantes pour répondre verbalement aux questions dans les situations de test; une acuité visuelle typique avec correction optique si nécessaire ; des capacités auditives typiques et enfin une dextérité suffisante pour répondre aux tâches.
Les évaluations pour les enfants atteints de paralysie cérébrale ont été effectuées dans l’ordre suivant : BPVS III, test oral de mathématiques, test écrit en mathématiques, tâche de rotation mentale, batterie de test de mémoire de travail (WMTB-C), rappel de bloc puis TVPS 3.
Les comparaisons de groupes ont montré que le TVPS 3 était la plus problématique des quatre évaluations pour le groupe « paralysie cérébrale ».
Les analyses ont révélé que le groupe « paralysie cérébrale » (PC) avait des scores inférieurs à ceux du groupe en développement pour tous les sous-tests de perception visuelle, et que pour ces évaluations la différence était parfois extrêmement grande. On constate donc que les enfants atteints de PC ont une performance réduite dans tous les sous-tests de perception visuelle du TVPS 3, quelle que soit la forme de la tâche. L’auteur précise que le fait que les enfants atteints de paralysie cérébrale aient obtenu les scores les plus faibles au test de perception visuelle, par rapport aux trois autres tests qui évaluaient également le traitement cognitif (mémoire, fonctionnement exécutif, résolution générale de problèmes), suggère que les déficiences de la perception visuelle, plutôt que des déficiences cognitives plus globales, pourraient être le principal handicap (bien que le TVPS ait montré que la mémoire visuelle était déficiente). Il est donc possible que les performances dans certaines évaluations cognitives et mathématiques soient entravées par des déficiences de la perception visuelle de base plutôt que par les exigences cognitives des tâches.

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Les troubles visuo-spatiaux et les différents types de paralysie cérébrale

Nous allons maintenant essayer de déterminer, à partir de plusieurs études, si les troubles visuo-spatiaux sont présents dans toutes les paralysies cérébrales ou si elles ne sont représentatives que de certains types spécifiques de paralysies. Si certaines paralysies cérébrales sont plus propices aux troubles visuo-spatiaux, cela pourrait nous permettre par la suite de cibler des lésions spécifiques en cause de ces troubles.
Tout d’abord, Dalvand Hamid et al.(2016) dans son étude intitulée “Comparision of visual perceptual skills in children with cerebral palsy based on the severity of gross motor function” étudie 67 enfants de la ville de Karaj atteints de paralysie cérébrale entre 6 et 12 ans à l’aide du TVPS révisé.
Le but de cette étude était de vérifier si la perception visuelle des enfants atteints de paralysie cérébrale était liée au degré d’incapacité motrice. Les résultats de cette étude sont qu’il n’y avait au final aucune différence significative entre les 7 compétences de perception visuelle testées au TVPS et le niveau de gravité de l’atteinte motrice. Cette étude démontre donc que les déficiences de la fonction motrice chez les enfants atteints de paralysie cérébrale n’aggravent pas les insuffisances de perception visuelles de ces enfants, y compris les capacités visuo-spatiales. L’étude précédente tend à prouver qu’il n’existe pas de lien de cause à effet entre la déficience motrice et la perception visuelle, mais qu’en est-il du lien entre la pathologie à l’origine de la paralysie cérébrale et cette perception visuelle ? En effet le terme de paralysie cérébrale est un terme très global qui englobe de nombreuses atteintes dont les origines sont diverses. Pour étudier cet aspect de l’étude bibliographique, nous allons nous appuyer sur le rapport de recherche effectué par Sharna Berelowitz (2019) intitulé “Visual perceptual deficits in different types of cerebral palsy”. Le principe de son étude était de déterminer les difficultés visuelles perceptives spécifiques chez les enfants âgés de 5 à 18 ans atteints de paralysie cérébrale en utilisant le TVPS 3 et de comparer les scores de chaque sous-test pour les différents types de paralysie cérébrale. La population de l’étude comprenait des enfants présentant différents types de paralysie cérébrale, limités à une cause congénitale et non progressive de lésion cérébrale.
L’échantillon comprenait donc 19 enfants atteints de paralysie cérébrale spastique unilatérale, 35 enfants atteints de paralysie cérébrale spastique bilatérale, 17 enfants atteints de paralysie cérébrale dyskinétique et 9 enfants atteints de paralysie cérébrale ataxique. L’étude s’est déroulée à la Forest Town School de Johannesburg, en Afrique du Sud.

Table des matières

Article : INFIRMITÉ MOTRICE CÉRÉBRALE ET TROUBLES VISUO-SPATIAUX 
INTRODUCTION 
I – Définitions
I.1 Infirmité Motrice Cérébrale
I.1.1 Généralités
I.1.2 Épidémiologie
I.1.3 Étiologie
I.2 Capacités visuo-spatiales
I.2.1 Rappels
I.2.2 Troubles visuo-spatiaux
II – Étude bibliographique 
II.1 Présence des troubles visuo-spatiaux chez les enfants atteints d’IMC
II.2 Les troubles visuo-spatiaux et les différents types de paralysie cérébrale
II.3 Localisation par IRM des atteintes responsables de ces troubles visuo-spatiaux
III – Projet de soin et prise en charge de l’enfant atteint d’infirmité motrice cérébrale
III.1 Prise en charge pluridisciplinaire
III.1.1 Ergothérapie
III.1.2 Orthophonie
III.1.3 Kinésithérapie
III.1.4 Psychomotricité
III.1.5 Psychologie
III.1.6 Corps enseignant
III.2 Prise en charge des troubles visuels de l’enfant atteint d’IMC
III.2.1 Troubles visuels
III.2.2 Troubles des apprentissages
III.2.3 Troubles liés à la basse vision
IV – Discussion
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES 
Annexe 1 : Figures et tableaux
Annexe 2 : Table des figures

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