Infirmité motrice cérébral (IMOC)
DEFINITIONS
Le terme d’infirmité motrice cérébral (IMOC), en anglais : «cerebral palsy» a été inventé il y a plus d’un siècle. Cependant une définition précise reste inaccessible parce que l’IMOC n’est pas un diagnostic mais un «parapluie » : terme qui décrit les lésions cérébrales non progressives impliquant anomalies motrices et posturales, qui sont notées au début du développement [44]. C’est un ensemble de troubles moteurs provoqués, par des lésions cérébrales non progressives datant de la période fœtale, périnatale, ou néonatale, pouvant s’associer à des troubles cognitifs. [06, 48, 56]. Elle résulte de lésions cérébrales précoces, non héréditaires, stabilisées, responsables de déficiences motrices prédominantes. Le handicap moteur associe à des degrés variables, des troubles de la posture et du mouvement. Des troubles spécifiques des fonctions supérieures peuvent s’associer [53] à savoir: des troubles cognitifs, de la communication, de la perception, du comportement. Cette définition cependant n’a pas de consensus. G.TARDIEU en 1954 a proposé le terme : d’infirmité motrice cérébrale (IMC) pour définir à l’intérieur du groupe IMOC une catégorie particulière, celle des enfants ayant uniquement des troubles moteurs. Cette distinction a été importante pour l’organisation des structures de soins [119]. Certains auteurs spécifient IMC, IMOC et polyhandicap. Pour eux l’IMC et IMOC sont deux formes différentes de paralysie cérébrale qui donnent tous les deux des déficits moteurs. Et leur expression la plus sévère est le polyhandicap: qui associe déficience motrice et déficience mentale sévère [48, 119]. En résumé IMOC est l’association de l’infirmité motrice cérébrale et du retard mental. Le terme anglo-saxon « Cerebral Palsy »(CP) est la traduction la plus proche de l’IMOC [119]. Il a l’avantage d’une plus grande exhaustivité (regroupe 6 IMC, IMOC et polyhandicap), ainsi qu’un grand record de reproductibilité épidémiologique [48]. Cette atteinte survient sur un cerveau immature. Même si la lésion neuronale et gliale est définitive, ses manifestations cliniques vont par contre se modifier avec l’âge, au cours des étapes de maturation neurologique jusqu’à l’âge de 3ans [48, 64, 90]. Tout l’éventail du tableau clinique sera par la suite représenté, avec la particularité de passer d’un schéma à un autre, d’une spasticité focale à une spasticité diffuse .
Prévalence
L’infirmité motrice d’origine cérébrale est la principale cause de déficience infantile affectant la fonction motrice et le développement. Les lésions de la paralysie cérébrale se produisent à partir de la période fœtale ou néonatale jusqu’à l’âge de 3ans [44]. La prévalence de l’IMOC n’a pas changé ou est légèrement en hausse, depuis plus de 4 décennies (1970 – 2010) [37, 57, 67] en dépit des avancées significatives dans la prise en charge médicale des nouveau-nés et dans la lutte pour la survie des prématurés et des grands prématurés [19, 44]. C’est la tendance à la hausse : dans le temps, de bien en dessous de 2 pour 1000 (1,7) naissances vivantes dans les années 70, elle fut au dessus de 2 pour 1000 naissances vivantes (2,4) dans les années 90. La prévalence est estimée dans le monde à 1,25 – 2,5 pour mille naissances vivantes [48, 56]. Toutes les races sont touchées par cette affection. Dans les pays développés, globalement elle est estimée à 2 – 2,5 pour mille naissances vivantes [44, 58, 80, 93]. Dans les pays en voie de développement la prévalence de l’IMOC n’est pas bien établie. Mais les estimations sont de 1,5 – 5,6 pour mille naissances vivantes. On 7 pense que la prévalence est beaucoup plus élevée du fait du manque de soins ou des difficultés d’accès aux soins prénatals et les maladies liées à la pauvreté [08, 103]. En Afrique du Sud, la prévalence estimée est comprise entre 1% et 8% [21], avec des chiffres plus élevés dans les communautés rurales [105]. La lésion responsable de l’IMOC se produit pendant le développement du cerveau immature. Ce qui explique la prévalence élevée chez les prématurés et les nouveau-nés ayant un petit poids (< 2500g) [3, 113]. Les nourrissons de sexe masculin [103] forment une petite majorité (58%) des enfants diagnostiqués d’IMOC [80, 29]. Certains auteurs ont aussi retrouvé une forte association entre le statut économique et la survenue de l’IMOC dans son ensemble.
Facteurs de risque
Il est important de faire une différence entre les facteurs de risque et les causes connues et démontrées de l’IMOC. Chez certains enfants atteints de CP, il ne semble pas exister un événement unique mais une séquence d’événements, responsable de la survenue du désordre moteur [93]. Cela a conduit à la notion de «relations causales» : une séquence d’événements interdépendants qui aboutiront à l’affection [103]. Certains de ces facteurs se retrouvent chez tous les enfants quelque soit les grossesses, tandis que d’autres ne sont associés, soit qu’aux enfants nés à terme ou qu’aux nouveau-nés prématurés. Ces facteurs de risque peuvent être présents avant et pendant la grossesse, pendant le travail et l’accouchement, et dans la période suivant la naissance [93]. 8
Les facteurs de risque avant la grossesse
Facteurs maternels -un niveau socio-économique bas, même chez des enfants ayant un poids normal à la naissance d’après les études de Dolk et al 2001 Dowding et Barry, 1990 [26, 93]. -les multiples parités qui sont des facteurs de prématurité donc d’IMOC [106]. -plusieurs auteurs ont démontré une relation entre la l’IMOC et des antécédents de mort fœtal au cours des précédentes grossesses [73, 88]. -certaines conditions médicales maternelles sont retrouvées comme facteurs de risque : la déficience mentale, les convulsions [14, 73]. Facteurs paternels et consanguins Ce sont des facteurs qui sont rarement retrouvés mais qui ne sont pas négligeables. On peut citer : – l’âge avancé du père qu’on retrouve fréquemment dans les IMOC à caractère dystonique [93]. – l’existence d’un déficit moteur d’origine congénitale dans la fratrie.
Les facteurs de risque pendant la grossesse
Ces facteurs sont loin d’être les plus importants. Ainsi on peut retrouver : -la pré-éclampsie qui est un facteur associé à l’IMOC chez les nouveau-nés à terme [20]. Mais cette association ne semble pas exister chez les prématurés. [69, 101]. – un important traumatisme de la mère au cours de la grossesse (grave chute, accident etc.…) a été impliqué mais la question reste en suspend [34]. – L’administration aux mères d’hormones thyroïdiennes et d’œstrogènes pendant la grossesse [72]. 9 – l’hémorragie au cours de la grossesse, l’hémorragie du pré-partum a été reconnue comme facteur augmentant le risque d’IMOC associé à la prématurité, mais pas de sur-risque [103]. – Deux mutations ont été identifiées, prédisposant les porteurs hétérozygotes à une thrombose veineuse. L’un est une mutation localisée sur le gène du facteur V (facteur V de Leiden mutation, VL) et est la cause la plus fréquente des thromboses familiales. Le second est le gène de la prothrombine [94]. Dans une étude portant, sur 3 bébés hétérozygotes pour la mutation du facteur V de Leiden, Thoranensen et al 1997 ont suggéré qu’ils ont peut être été victimes de thrombose placentaire ou néonatale, ce qui expliquerait leur hémiplégie [93]. – Les grossesses multiples à cause de leur association à : un accouchement prématuré, un retard de croissance intra-utérin, des malformations congénitales, des complications pendant l’accouchement [115]. – Dans les grossesses gémellaires monozygotes, la mort d’un des jumeaux est reconnue comme étant un facteur de risque important de d’IMOC pour le jumeau survivant. En effet la mort d’un jumeau peut nuire au développement neurologique du survivant pendant toute la gestation [86]. Une importante analyse de quatre études a démontré que la mort prénatale d’un des jumeaux multiplie par 7 le risque de d’IMOC par confinement [103]. Le nouveau-né, survivant d’une grossesse dont un fœtus est mort in utéro est exposé à environ 20% de risque d’IMOC.
Les facteurs de risque durant le travail
Ces facteurs sont dominés par, les événements susceptibles de provoquer une asphyxie périnatale donc responsables de souffrance fœtale aigue. Ainsi on peut citer : la procidence du cordon, les hémorragies intra-partum massives (placenta prævia, rupture utérine, hématome rétro-placentaire), un accouchement prolongé ou traumatique en raison d’une disproportion foeto- 10 pelvienne ou d’une présentation vicieuse, une macrosomie foetale avec dystocie de l’épaule et un état de choc maternel d’étiologies variées [103]. D’autres facteurs associés à l’IMOC sont : un travail prolongé, une césarienne d’urgence, un décollement prématuré du placenta, une position fœtale anormale [107], la rupture prématurée et prolongée des membranes [72], la teinte du liquide amniotique par le méconium [69, 102], une circulaire du cordon [75]. Il a été prouvé tout récemment que, l’exposition intra-utérine à une l’infection, en particulier la chorioamniotite, dans les derniers mois de la grossesse, et pendant le travail, est un puissant facteur de risque d’IMOC, surtout chez les nourrissons nés à terme [69, 76, 88]. La chorioamniotite s’est avéré être un important facteur de risque à la fois pour la paralysie cérébrale et leucomalacie périventriculaire [118]. Les recherches sont actives dans ce domaine pour avoir plus d’information sur ce facteur.
Facteurs de risque à la naissance
La disponibilité de la réanimation néonatale, des unités de soins et des procédures diagnostiques de haut niveau surtout dans les pays développés, ont entrainé la survie des nouveau-nés prématurés, parmi lesquels, se révèle plus tard l’IMOC [93]. Les traitements fertilisants et la fécondation in vitro, ont également augmenté le nombre de prématurés. Le risque d’IMOC augmente avec la diminution du poids à la naissance [37, 69, 104, 107]. Un faible poids du placenta [107] et un bas score d’Apgar sont fortement associés à l’IMOC [110]. Les enfants ayant un score compris entre 0 – 3 à cinq minutes ont 81 fois plus de risque d’avoir une infirmité motrice cérébrale.
Les facteurs de risque dans la période néonatale
D’importants facteurs interviennent dans cette période notamment : les convulsions néonatales [89, 107] la septicémie [13], les maladies respiratoires [89] et surtout chez les prématurés, la persistance du canal artériel, l’hypotension, la ventilation prolongée, le pneumothorax, les infections [68].