Infections à Plasmodium falciparum et à Schistosoma haematobium chez l’enfant à Lambéréné (Gabon)

Infections à Plasmodium falciparum et à Schistosoma haematobium chez l’enfant à Lambéréné (Gabon)

Immunité anti-palustre 

La notion de prémunition 

Cette immunité s’installe progressivement au cours d’infections régulières et d’une longue exposition dans une zone d’endémie. Elle est non stérilisante. C’est un état de prémunition associé à un maintien d’une infection parasitaire minimale qui constitue une condition indispensable pour une protection contre l’infection ultérieure (Sergent 1950). Cela explique que des sujets vivant en zones endémiques présentent des parasitémies en absence de signes cliniques ou bien ils se font piquer sans présenter des parasitémies. Cette réponse immunitaire se décline en deux: une réponse immunitaire humorale et une réponse immunitaire cellulaire. 

L’immunité innée

L’immunité innée s’active dès la pénétration du parasite dans l’organisme. C’est la première ligne de défense de l’organisme et elle est non spécifique. Les premières cellules effectrices de l’immunité innée que sont les cellules dendritiques, les monocytes/macrophages et les granulocytes sont les cellules présentatrices d’Ag aux lymphocytes T. D’autres effecteurs cellulaires telles que les neutrophiles, les cellules, NKT, les cellules NK et les cellules Tγδ ont une activité importante lors de la réponse innée (Hansen, D’Ombrain, et Schofield 2007). Les cellules dendritiques et les macrophages s’activent après l’interaction PRRs et PAMPs parasitaires qui initie le déclenchement d’un signal de danger aboutissant à la mobilisation des cellules effectrices. Ces cellules libèrent la cytokine IL-12 favorisant ainsi l’activation des NK et la différenciation des lymphocytes TCD4 (Stevenson et Riley 2004). Les cellules NK et les lymphocytes Tγδ produisent de l’IFN-γ qui sont efficaces au stade érythrocytaire de l’infection palustre (Artavanis-Tsakonas et Riley 2002; Teirlinck et al. 2011). Les cellules NKT, quant à elles produisent l’IFN-γ et l’IL-4 et sont actives au stade hépatique et au stade érythrocytaire (Sköld et Behar 2003; Roura-Mir et Moody 2003). 

L’immunité humorale 

La réponse humorale repose entre autre sur la production des anticorps qui participent à l’élimination du parasite. Les anticorps ont un rôle protecteur spécifique de l’espèce plasmodiale et du stade du cycle. Ils inhibent la séquestration des hématies infectées dans les cellules endothéliales, permettent de bloquer la pénétration des sporozoïtes dans les hépatocytes, inhibent l’invasion des érythrocytes par les mérozoïtes et la croissance intra érythrocytaire du parasite (Wåhlin et al. 1984; Bouharoun-Tayoun et al. 1990). L’infection palustre induit une production d’IgG et d’IgM. Ces anticorps ont la capacité d’activer le complément par la voie classique favorisant ainsi l’opsonisation des érythrocytes infectés et leur destruction par phagocytose (Kumaratilake et al. 1997). ZONIABA ABIAGA Linda Bernise / Memoire Master Immunologie et Infection Page 7 Les IgG sont essentielles car elles ont la capacité de neutraliser les toxines plasmodiales. Les IgG1 et les IgG3 sont plus protectrices que les IgG2 et IgG4. En étant cytophiles, elles ont la capacité de se lier aux récepteurs FcR des neutrophiles et des macrophages ce qui facilite la phagocytose du Plasmodium (Israelsson et al. 2008; Vafa et al. 2009). Les anticorps agissent par plusieurs mécanismes pour détruire le parasite. Le premier est une action cytotoxique appelée ADCC. Les NK associés aux IgG libèrent la perforine et les granzymes tandis que les neutrophiles, macrophages, monocytes libèrent des enzymes lytiques qui vont lyser les cellules cibles. Les IgG ont la capacité d’induire l’ACDI (Antibody Dependant Cellular Inhibition) en interagissant avec les cellules effectrices, stimulent la sécrétion des cytokines IFN-γ, TNF-α. Ce mécanisme est efficace contre les Ag MSP-3 et GLURP du stade mérozoïte (Oeuvray et al. 1994; Theisen et al. 1998). L’IgE est présente dans le sérum des sujets infectés et son abondance est associée à la sévérité de la maladie. En effet, l’expression à la surface des cellules endothéliales du récepteur FcεRII de faible affinité pour les IgE induit la production des substances solubles comme le TNF-α, le monoxyde d’azote (NO) incriminées dans le paludisme cérébral (Clark et Alleva 2009; Higgins, Kain, et Liles 2011). 

L’immunité cellulaire 

Pendant la phase exo-érythrocytaire, les hépatocytes infectées expriment à leur surface le CMH-I favorisant leur destruction par les lymphocytes TCD8+ (Stanisic, Barry, et Good 2013; Spring et al. 2013). C’est l’activité des lymphocytes TCD8+ cytotoxiques ou CTL par l’intermédiaire des molécules telles que la perforine, les granzymes et l’oxyde nitrique qui permet la lyse des hépatocytes infectées par Plasmodium (Pradhan et Ghosh 2013). Les cytokines IFN-γ et IL-2 produites par les lymphocytes TCD4+ induisent l’activité cytotoxique des lymphocytes TCD8+ qui interviennent dans l’inhibition du développement des parasites au stade hépatique (Doolan et Hoffman 1999; Tse, Radtke, et Zavala 2011). Les lymphocytes TCD4+ seraient efficaces lors de phase érythrocytaire du paludisme. En effet, les cellules TCD4+ qui sécrètent majoritairement les cytokines pro-inflammatoires IFN-γ, IL-2 et le TNF-α se différencient cellules Th1 (Stevenson et al. 2011). L’IFN-γ produite par les cellules Th1 favorise l’activation et le pouvoir phagocytaire des macrophages et des neutrophiles (Figure 3). L’activité des cellules phagocytaires par l’intermédiaire d’enzymes lytiques comme les radicaux libres oxygénés et du monoxyde d’azote entrainent la lyse des cellules parasitées (Schofield et al ; 2006). ZONIABA ABIAGA Linda Bernise / Memoire Master Immunologie et Infection Page 8 Figure 3: Réponse immunitaire innée et adaptative anti-palustre (Stanisic, Barry, et Good 2013) La sécrétion des cytokines anti-inflammatoires comme l’IL-4, IL-13, IL-7 par les cellules TCD4+ entraine leur différenciation en cellules Th2. L’activation des cellules Th2 médiée par les cytokines anti-inflammatoires induisent la régulation de la réponse humorale et l’orientation de l’activation des lymphocytes B nécessaire dans la production des anticorps (Rousset et al. 1992). Une réponse précoce ou tardive de la réponse Th2 déclencherait le passage dans la phase sévère du paludisme d’où l’importance d’un équilibre entre ces deux réponses (Bucher et al. 2011). ZONIABA ABIAGA Linda Bernise / Memoire Master Immunologie et Infection

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LA SCHISTOSOMIASE 

Définition 

La schistosomiase ou bilharziose est une maladie causée par des schistosomes qui sont des vers trématodes hématophages (A. G. P. Ross et al. 2013). Cinq espèces infectent l’homme: S. mansoni, S. japonicum et S. mekongui responsable de la bilharziose intestinale, S. intercalatum responsable de la bilharziose rectale et S. haematobium qui entraine la bilharziose uro-génitale (Gryseels et al. 2006). II. 2. Epidémiologie A travers le monde 200 millions de personnes sont infectées par la schistosomiase (Rinaldi et al. 2015). Parmi les espèces infectant l’homme, S. haematobium et S. mansoni sont les deux principales parasites qui causent la schistosomiase en Afrique (Utzinger et al. 2009). La prévalence de l’infection est plus grande chez les jeunes enfants car ils sont souvent en contact avec les eaux infestées (Stothard et al. 2011). On estime ainsi que 60-80% des personnes infectées sont des enfants en âge scolaire contre 20-40% d’adultes (Colley et Secor 2014). La chimioprophylaxie basée sur l’administration du Praziquantel à grande échelle (traitement de masse) a permis une diminution du taux de transmission et d’infection dans les régions à risque (El Ridi et Tallima 2013). Parmi les 34,8 millions de personnes traitées contre la schistosomiase, 81,9% vivaient en Afrique subsaharienne (WHO 2013). Figure 4: Distribution géographique de la schistosomiase dans le monde en 2011 (WHO 2012) ZONIABA ABIAGA Linda Bernise / Memoire Master Immunologie et Infection 

 Biologie du parasite: Schistosoma haematobium 

Le parasite Les schistosomes appartiennent à l’embranchement des Plathelminthes, à la classe des Trematoda, au genre Schistosoma. Ce sont des vers trématodes à sexes séparés possédant des ventouses et dépourvus de pharynx. Les œufs de S. haematobium ont une forme ovoïde et sont munis d’un d’éperon terminal réduit. La coque de l’œuf est lisse épaisse et transparente. II. 3.2. Hôte intermédiaire: mollusque gastéropode L’hôte intermédiaire de S. haematobium est un mollusque gastéropode et hermaphrodite du genre Bulinus. Il vit généralement dans les eaux douces mais aussi dans les étendues d’eau artificielles. Le développement du parasite au sein de du mollusque dépend des conditions climatiques adéquates. 

Cycle biologique de S. haematobium

 Il existe deux phases dans le cycle: une phase sexuée qui s’effectue chez l’homme, et une phase asexuée qui se déroule chez le mollusque du genre Bulinus (Figure 5).

La phase sexuée chez l’homme 

L’infestation de l’homme se fait par voie transcutanée lors du contact avec l’eau contaminée par pénétration des cercaires. Les schistosomules migrent via la circulation sanguine vers le cœur, les artérioles pulmonaires et les veines portes intra-hépatiques. Certains schistosomules restent bloqués dans les tissus et sont à l’origine des manifestations aberrantes. Ceux qui atteignent la veine porte intra-hépatique se développent jusqu’à leur maturité sexuelle. Ils migrent vers la veine hémorroïdale et atteignent les plexus vésicaux et vaginaux. La femelle quitte le mâle et va pondre les œufs dans les ramifications veineuses de la paroi vésicale. Les œufs pondus ont trois destinées:  Ceux qui réussissent leur migration vont pouvoir traverser la muqueuse vésicale et tomber alors dans la lumière vésicale. Ils seront éliminés avec l’urine.  Les œufs bloqués dans les tissus vont rester vivants pendant environ 25 jours et détermineront la formation d’un granulome bilharzien.  Les oeufs seront transportés à contre-courant et iront s’enkyster dans le foie, les poumons et autres organes, y induiront également la formation des granulomes.

Table des matières

LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
I. LE PALUDISME
I.1. Définition
I.2. Epidémiologie
I.3. Biologie du Plasmodium
I.3.1. Le vecteur
I.3.2. Le parasite
I.3.3. Cycle du Plasmodium falciparum
I.3.3.1. Phase pré-érythrocytaire
I.3.3.2. Phase érythrocytaire
I.3.3.3. Phase sexuée chez Anopheles
I.4. Pathologie de l’infection à P. falciparum
I.4.1. Le paludisme simple
I.4.2. Le paludisme grave
I.5. Immunité anti-palustre
I.5.1. La notion de prémunition
I.5.2. L’immunité innée
I.5.3. L’immunité humorale
I. 5.4. L’immunité cellulaire
II. LA SCHISTOSOMIASE
II.1. Définition
II.2. Epidémiologie
II.3. Biologie du parasite: Schistosoma haematobium
II.3.1. Le parasite
II.3.2. Hôte intermédiaire : mollusque gastéropode
II.3.3. Cycle biologique de S. haematobium
II.3.3.1. La phase sexuée chez l’homme
II.3.3.2. Phase asexuée chez le mollusque
II.3.4. La pathologie de l’infection à S. haematobium
II.3.4.1. La phase d’incubation.
II.3.4.2. La phase d’invasion ou aigue
II.3.4.3. La phase chronique ou phase d’état
II. 4. Immunité anti-schistosomiase
II.4.1. Immunité humorale
II.4.2. Immunité cellulaire
III. HYPOTHESE DE L’ETUDE.
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. MATERIELS ET METHODES
I.1. Site et population d’étude
I.2. Prélèvement et collecte des échantillons.
I.3. Matériels utilisés.
I.3.1. Matériels de laboratoire
I.3.1.1. Les consommables
I.3.1.2. Tampons et réactifs chimiques
I.3.1.3. Matériel biologique
I.4. Méthodologie.
I.4.1. La technique ELISA
I.4.1.1. Principe de la technique ELISA
I.4.1.2. Mode opératoire
II. RÉSULTATS
II.1. Caractéristiques de la population d’étude.
II.1.1. Caractéristiques générales
II.1.2. Comparaison des données parasitologiques chez les enfants infectés.
II.2. Comparaison globale des cytokines dans les différents groupes d’enfants
II.2.1. Comparaison des taux d’IFN-γ entre les groupes d’enfants
II.2.2. Comparaison des taux d’IL- entre les groupes d’enfants
II.2.3. Corrélations entre les taux plasmatiques des cytokines et la parasitémie
II.2.3.1. Corrélations entre les taux d’IFN-γ et la parasitémie à P. falciparum
II.2.3.2. Corrélations entre les taux d’IL- et la parasitémie à P. falciparum
II.2.4. Corrélations entre la concentration en IFN-γ et la concentration en IL
III. DISCUSSION
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
BIBLIOGRAPHIE

 

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