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Indices du DLPF-A exploités
Les différentes données recueillies au moyen du DLPF-A et utilisées dans l’étude sont détaillées ci-après.
– La proportion de noms indique la part du lexique de l’enfant accordée aux noms de personnes, objets, animaux, lieux, véhicules, jeux, repas, vêtements, éléments corporels et naturels, sentiments et émotions.
– L’acquisition des adverbes, prépositions, mots interrogatifs, pronoms et conjonctions est renseignée par l’indice de mots grammaticaux, proportion d’items acquis parmi ceux proposés dans le DLPF-A.
– La proportion de mots grammaticaux dans le vocabulaire total de l’enfant est employée comme indicateur de la composition du lexique actif de l’enfant.
– Les proportions de mots paralexicaux et prédicats dans le lexique total de l’enfant indiquent respectivement la part des onomatopées, interjections, bruits d’animaux, expressions de routines et jeux et la part des verbes et adjectifs dans le vocabulaire expressif de l’enfant.
– L’indice de vocabulaire total indique la proportion de mots produits par l’enfant parmi ceux proposés dans le DLPF-A, toutes catégories lexicales confondues entre 18 et 42 mois.
– L’indice de flexions verbales renseigne sur la proportion de flexions utilisées par l’enfant parmi celles proposées en flexions personnelles (terminaisons verbales en adéquation avec le sujet) et flexions temporelles (présent de l’indicatif, impératif, participe passé, passé composé, infinitif, futur simple, imparfait, plus-que-parfait, futur antérieur, conditionnel et subjonctif).
– L’indice de structures complexes évalue l’usage des déterminants, auxiliaires, pronoms sujet et pronoms objet, prépositions, structures possessives, tournures interrogatives et constructions subordonnées (complétives, relatives et infinitives).
– L’indice de phrases complexes correspond à une proportion de phrases complexes produites par l’enfant parmi celles proposées dans le DLPF-A. Chaque item comporte une relation entre deux propositions avec un niveau d’élaboration de plus en plus élaboré afin d’évaluer la complexité des phrases produites par l’enfant.
– L’indice d’échanges langagiers est une proportion d’items acquis qui renseigne sur l’intelligibilité des messages, l’attention portée à autrui, l’adaptation à la situation de communication, la pertinence des réponses, l’alternance des tours de parole, le respect des conventions de conversation et le maintien du thème de l’échange.
– L’indice d’échanges langagiers est une proportion d’items acquis qui renseigne sur l’intelligibilité de l’enfant, son attention à autrui, la pertinence de ses réponses, l’adaptation de sa communication, son respect des tours de rôle et du thème de l’échange.
– L’indice d’utilisation du langage est une proportion d’items acquis qui révèle la qualité d’expression des désirs et émotions, des requêtes (demandes d’objet), des questions (demandes d’information), des assertions simples (dénominations et descriptions) et des rapports d’événement et explications.
– L’indice d’organisation du message est une proportion d’items acquis qui indique la capacité à faire référence aux personnes et au temps, à enchaîner les phrases et à utiliser les procédés discursifs.
Populations et recrutement
Cette étude compare deux populations : un groupe d’enfants avec des troubles du spectre de l’autisme (TSA) et un groupe d’enfants au développement ordinaire (DO). Les participants sélectionnés remplissent différents critères.
Les enfants avec TSA doivent être oralisants, francophones, diagnostiqués avec un trouble du spectre autistique et évalués sur le plan du développement langagier par un test psychométrique situant le développement expressif de la parole entre 18 et 42 mois. Les enfants présentant un plurilinguisme et/ou des troubles associés comme un déficit sensoriel (cécité, surdité, etc.), un retard mental, une trisomie, etc. n’ont pas été inclus.
Les enfants DO doivent avoir un âge réel compris entre 18 et 42 mois, être francophones et monolingues. Le plurilinguisme, les troubles de l’acquisition du langage, les pathologies ORL et neurologiques associées à un trouble du développement langagier, une prise en charge orthophonique en cours et les déficits sensoriels sont des critères de non-inclusion.
Au total, l’étude inclut 37 enfants.
La population TSA de l’étude se compose de 8 enfants. Tous ont été diagnostiqués au moyen de l’ADOS au sein de l’unité de détection, diagnostic et prise en charge précoce des troubles du spectre autistique à l’hôpital Robert-Debré. Ces huit enfants avec TSA sont des garçons d’âge réel compris entre 4 ans et 5 ans 8.
La population contrôle de l’étude se compose de 29 enfants, 14 garçons et 15 filles. Le groupe d’enfants DO a été recruté dans des groupes d’échanges entre parents sur les réseaux sociaux. Des infographies ont été réalisées afin de présenter les profils recherchés pour chaque cohorte et les objectifs de l’étude (Annexe B). Au total 72 numéros d’anonymat ont été envoyés, 8 personnes ont débuté le questionnaire mais ne sont pas allées au bout.
Les enfants de l’étude ont été regroupés en 3 classes d’âge respectant un équilibre entre les âges des enfants DO et TSA (Figure 1). La délimitation de ces classes d’âge s’est faite avant, pendant et après l’explosion lexicale, période sensible qui a lieu autour de 30 mois.
Procédure
Cette étude est réalisée sous la direction de Magali LAVIELLE-GUIDA, orthophoniste et docteure en psychologie, en partenariat avec le CRAIF (Centre de Ressources Autisme Ile-de-France) dirigé par Bertrand Le Baut.
Après un premier contact par mail, le parent d’un enfant DO reçoit une lettre d’information sur le projet de DLPF-A en cours. S’il souhaite participer à l’étude, il est invité à remplir une fiche d’informations familiale (Annexe C) afin de décrire le contexte de vie de l’enfant : fratrie, catégorie socio-professionnelle, mode de garde, éventuels antécédents médicaux, etc. Si le profil de l’enfant correspond aux critères énoncés précédemment, le parent reçoit un lien de connexion et un numéro d’identifiant par enfant assurant l’anonymat des données recueillies, conformément au RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données, 2018). Le lien de connexion permet d’accéder au questionnaire DLPF-A informatisé en 2019 par Elsa Colas-Maheux, ergonome et développeuse informatique. Le parent est invité à donner son consentement à l’issue d’un formulaire (Annexe D) avant d’accéder aux diverses pages de questions (Annexes E). Cette informatisation permet une extraction des données rapide et automatisée dans un tableur.Les parents d’enfants avec TSA ont rempli une version papier du même questionnaire DLPF-A qui a ensuite été informatisée avec un numéro d’anonymat.
Analyse statistique
Pour obtenir une comparaison transversale des deux populations, des tests non-paramétriques adaptés à la taille des échantillons (tests de Mann-Whitney, de Wilcoxon et régressions de Spearman) ont été réalisés avec le logiciel JMP® version 15.1.0. Le seuil de différence suggestive utilisé dans l’étude est p=0,05. En dessous de p=0,005 on parlera de différence significative.
RÉSULTATS
Comparaison des populations
Figure 1 : Composition des populations.
Des analyses préliminaires sont réalisées pour s’assurer que chaque groupe d’âge est homogène entre les deux populations. Avec le test de Mann-Whitney, on ne trouve pas de différence significative entre les moyennes d’âge pour chaque classe d’âge (p=0,952, p=1,000 et p=0,813).
Figure 2 : Résultats issus du DLPF-A et comparaisons.
Hypothèse lexicale : Les enfants avec TSA montreraient des spécificités dans l’acquisition du lexique par rapport aux enfants avec DO. Leur lexique serait plus restreint que celui des enfants avec DO et avec une plus faible proportion de mots grammaticaux.
La première comparaison réalisée concerne l’indice de vocabulaire total. Les populations de classe d’âge 1 ont des stocks lexicaux similaires avec une acquisition moyenne de 15,71% (DO) et 18,90% (TSA). En classes d’âge 2 puis 3, les DO produisent 48,32% puis 87,56% du lexique proposé, contre 33,76% puis 56,59% pour les enfants TSA. Le test non-paramétrique de Wilcoxon n’indique pas de différence significative entre les moyennes des résultats des deux populations en classe d’âge 1 (p=0,5490). La différence se rapproche du seuil suggestif en classe d’âge 2 (p=0,0527) et en classe d’âge 3, une différence suggestive apparaît (p=0,0495). En grandissant, l’écart entre leurs stocks lexicaux se creuse en faveur des enfants avec DO.
Figure 3 : Composition du lexique observé et comparaisons des moyennes.
Chez les enfants avec DO, la proportion d’items paralexicaux dans le lexique expressif chute de 21,60% à 6,58% puis 4,01% entre les classes d’âge 1, 2 et 3. Tandis que chez les enfants avec TSA, la proportion d’items paralexicaux dans le vocabulaire expressif reste assez stable avec des proportions de 8,49%, 8,61% et 6,21%. En classe d’âge 3, les proportions d’items paralexicaux dans le lexique total montrent une différence suggestive (p=0,0495). Les enfants avec TSA conservent une proportion stable d’items paralexicaux dans leur lexique, contrairement à l’amenuisement observé chez les enfants avec DO.
Pour les trois classes d’âge, la proportion de noms dans le lexique acquis est plus forte chez les enfants avec TSA (72,11% puis 66,61% et 62,19%) que chez les enfants avec DO (54,20% puis 58,40% et 53,27%). La comparaison des moyennes obtenues par les deux populations montre un écart suggestif pour chaque classe d’âge (p=0,0417 puis p=0,0304 et p=0,0495). Le lexique des enfants avec TSA est composé d’une plus forte proportion de noms que celui des DO.
L’indice d’acquisition des prédicats montre un important développement de cette catégorie lexicale chez les enfants avec DO. Ils passent de 12,03% d’acquisition des items proposés à 45,04% puis 93,32%. Tandis que les enfants avec TSA semblent produire moins de prédicats : ils passent de 8,27% à 21,64% puis 49,62%. En classe d’âge 1, les résultats obtenus ne montrent pas de différence significative entre les deux populations (p=0,9046). En classe d’âge 2, les moyennes sont proches du seuil de différence suggestive (p=0,0527) et en classe d’âge 3 celui-ci est atteint (p=0,0495). En grandissant, les enfants avec TSA semblent ne pas produire autant de prédicats que les enfants avec DO.
L’indice de mots grammaticaux montre une grande progression d’acquisition chez les enfants avec DO avec un passage de 10,39% à 39,11% puis 89,39%. Tandis que chez les enfants avec TSA, l’acquisition de mots grammaticaux est moins importante avec des moyennes par classe d’âge de 11,11%, 20,03% et 37,21%. La comparaison de ces résultats montre des différences suggestives entre les populations en classes d’âge 2 et 3 (p=0,0304 et p=0,0495). Les progrès importants réalisés par les DO en acquisition de mots grammaticaux ne se retrouvent pas autant dans le développement langagier des TSA.
Hypothèse syntaxique : Les enfants avec TSA développeraient leur système syntaxique de façon atypique. Les flexions verbales seraient moins employées et les phrases réalisées plus simples sur le plan de la construction syntaxique.
Pour l’indice de flexions verbales, les résultats obtenus en classe d’âge 1 (22,11% pour les enfants avec DO et 26,66% pour les enfants avec TSA) ne montrent pas de différence significative (p=0,6284). En revanche en classes d’âge 2 et 3, les enfants avec TSA montrent des compétences en flexions verbales bien en deçà de celles des enfants avec DO : 26,66% puis 48,89% pour les enfants avec DO contre 45,71% et 91,11% pour les enfants avec TSA. On observe donc des différences suggestives de productions entre les enfants avec DO et avec TSA en classe d’âge 2 (p=0,0279) et 3 (p=0,0495). En grandissant, les enfants avec TSA semblent employer moins de flexions personnelles et temporelles que les DO.
Pour l’indice de phrases complexes, les moyennes obtenues en classes d’âge 1 et 2 ne soulignent pas de différences significatives entre enfants avec DO et enfants avec TSA (p=0,4201 et p=0,8147). En classe d’âge 3, les enfants avec DO atteignent une production de 62,75% des items, contre 23,53% pour les enfants avec TSA. La différence devient alors suggestive entre les deux populations (p=0,0495). En grandissant, les différences de compétences en construction de phrases s’accroissent en défaveur des enfants avec TSA.
Hypothèse pragmatique : L’autisme se caractérisant par un trouble de la communication et des interactions sociales, les compétences pragmatiques des enfants avec TSA seraient moins fréquemment observées et moins efficientes comparées à celles des enfants avec DO, notamment en utilisation du langage.
Table des matières
INTRODUCTION
MÉTHODE
RÉSULTATS
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES