Détermination de l’agressivité
L’équilibre chimique relatif au carbonate de calcium peut se déplacer sous l’action du CO2; c’est ainsi qu’il peut y avoir des réactions de dissolution de la calcite, dans ce cas l’eau est dite agressive, ou de précipitation de la calcite, alors l’eau est dite incrustante et entartre les conduites. Le phénomène d’agressivité des eaux a été étudié par plusieurs auteurs qui ont proposé des méthodes permettant son évaluation tant qualitative que quantitative. Parmi ces auteurs on peut citer Langelier, Ryznar, Larson, Stiff et Davis pour les méthodes qualitatives ; Hallopeau-Dubin, Girard,…pour les méthodes quantitatives. Le contexte socio-économique de nos pays n’autorisant pas une neutralisation de l’agressivité de nos eaux souterraines, seul l’aspect qualitatif de ce phénomène sera traité dans ce chapitre.
Travaux antérieurs
Au Burkina Faso, rares sont les travaux sur la chimie des eaux qui ont traité de la problématique de l’agressivité des eaux souterraines de manière approfondie. Bremond, R. dans “Note interne sur l’agressivité et la corrosivité des eaux naturelles (CIEH)”, est l’un des pionniers des travaux antérieurs qui ont prévalu dans ce domaine. La dernière étude en date et qui nous a inspirée est celle du bureau d’étude COWI dans le cadre du PEEN (2002).
Il va de soit que cette étude à nous confiée, sans se vouloir exhaustive, vient combler le déficit de données existant sur l’agressivité des eaux souterraines en milieu de socle cristallin.
Approche méthodologique
Comme nous l’avons déjà souligné plus haut, plusieurs méthodes permettent de déterminer qualitativement l’agressivité des eaux. Pour le cas de la présente étude notre choix a été porté sur celles de Langelier et de Ryznar; ce choix est guidé par la simplicité de calcul de l’indice de Langelier et l’application avec succès de l’indice de Ryznar dans l’étude de l’agressivité des eaux souterraines du Mali.
De plus l’application de plus d’un indice permet d’avoir une meilleure base de décision.
Méthode de Langelier
Cet auteur apprécie l’agressivité en utilisant comme données la salinité totale ou le résidu sec à 110°C, la température, la teneur en calcium et l’alcalinité (Greffard, J.1970). Il calcule ainsi le pH que devrait avoir la solution pour être en équilibre avec le carbonate de calcium. En comparant la valeur calculée avec le pH de l’eau, il détermine si l’eau est agressive ou incrustante, il définit ainsi un indice d’agressivité : IL=pH –pHS=pH – F – Log1/ │Ca2+ │-Log1/│Alc │
Si IL>0 eau incrustante;
I L=0 eau en équilibre;
I L<0 eau agressive. pH= pH mésuré; pHS= pH calculé;
F= valeur calculée à partir du résidu sec et de la température
Ca= concentration en ions Ca2+ en mole/l
Alc= alcalinité totale ou TAC exprimée en mole/l de CaCO3 ou de [HCO3 -] -+[CO3 2-]
Agressivité de l’eau vis à vis du fer
La connaissance du caractère agressif ou non d’une eau par rapport au calcaire pour pouvoir en déduire son comportement vis à vis des matériaux, notamment le fer, ne suffit pas. En effet les problèmes ne sont plus simplement chimiques, mais font intervenir des réactions de nature électrochimique et même biochimique mettant en jeu un grand nombre de facteurs (O2, pH, température) que Girard, R. (1963) a essayé de dégager en étudiant l’action de l’eau douce sur les matériaux. Nous lui emprunterons le développement qui va suivre pour montrer les rôles du pH et de l’oxygène dissous dans le processus de corrosion.
Ce bref aperçu ne vise pas à entrer dans des processus électrochimiques complexes, mais plutôt à montrer le mécanisme de corrosion qui est l’une si non la plus grave des conséquences de l’agressivité des eaux sur les colonnes d’exhaure.
D’après Girard, en l’absence d’oxygène et entre 0 et 100°C on a l’oxydation du fer selon la réaction suivante : Fe + 2H2O Fe (OH)2 + H2
En milieu acide Fe (OH)2 est très soluble, donc la surface du fer est mise à nu et la corrosion se poursuit.
En milieu neutre, l’hydroxyde se transforme en donnant : 3 Fe (OH)2 Fe3O4, 2H2O + H2 Soit une réaction évoluant aussi avec dégagement d’hydrogène.
En milieu alcalin, en l’absence d’oxygène, Fe (OH)2 est insoluble et forme une carapace suffisamment imperméable pour empêcher le contact avec le milieu, donc la corrosion.
Que se passe-t-il en présence d’oxygène ?
La solubilité de Fe(OH)2 étant assez sensible aux pH compris entre 5.5 et 8, si l’arrivée de O2 est assez lente, les produits de corrosion Fe3O4 et Fe2O3 se forment le plus souvent non pas au contact immédiat avec la surface métallique, mais à une certaine distance de celle-ci permettant donc un nouvel afflux de solution corrodante dans l’espace ainsi constitué, une arrivée encore plus difficile d’O2 et la formation de nouvelles couches de Fe3O4 et Fe2O3.
Application aux eaux souterraines de la région du Centre-est
Résultats
pH
87 eaux sur 251, ont un pH <7 et 164 sont basiques (pH >7). Pratiquement toutes les eaux acides sont agressives ou corrosives (84 sur 87); la répartition des pH (tableau 6) montre que les valeurs sont comprises entre 6 et 8 avec un grand nombre (141) entre 7 et 7.5.
Indice de Langelier
L’application de l’indice de Langelier pour la détermination de l’agressivité des eaux souterraines montre que sur un total de 251 eaux analysées, 163 (65%) sont agressives.
La répartition de l’agressivuté en fonction du pH fait ressortir les résultats ci-dessous : –sur 87 eaux dont le pH est compris entre 6 et 7 on note que 84 sont agressives; –79 eaux sur 164 sont agressives pour des valeurs de pH supérieures ou égales à 7.
Indice de Ryznar
L’indice de Ryznar appliqué aux eaux souterraines montre que 183 eaux (73%) sont corrosives sur un total de 251 eaux analysées.
De la répartition de l’agressivité en fonction du pH il ressort que : –84 eaux sur 87 sont corrosives 87 pour des valeurs de pH comprises entre 6 et 7; –99 eaux sur 164 sont corrosives pour pH supérieur égal à 7.