Indicateurs des évènements hydroclimatiques extrêmes dans le bassin versant de l’Ouémé à l’exutoire
Méthode d’analyse des indicateurs des évènements hydroclimatiques extrêmes inhérents aux inondations
Parmi les préoccupations liées à l’évolution du climat, que ce soit dans les régions tropicales d’Afrique de l’Ouest ou ailleurs dans le monde, la modification possible de la fréquence des évènements extrêmes et des changements graduels dans les caractéristiques moyennes du climat, suscite un intérêt majeur dans la communauté scientifique compte tenu de leurs effets anticipés sur l’environnement naturel et humain (Mara, 2010). Ces évènements constituent des facteurs importants de vulnérabilité des populations (Houghton et al., 2001) notamment les évènements extrêmes de précipitations. Pour mieux appréhender ces phénomènes, le recours au développement d’indices est suggéré comme un moyen relativement simple pour analyser les changements dans les évènements de précipitations ayant potentiellement un effet sur l’environnement naturel et humain (Gachon et al., 2005 ; Dubuisson et al., 2006). Cependant, plusieurs groupes d’expert dans le contexte des changements globaux et environnementaux à l’échelle internationale ont mis au point une méthodologie standard pour calculer ces indices : c’est le cas par exemple du projet ETCCDMI (Expert Team Climate Detection Monitoring and Indices), ou du projet européen STARDEX (Statistical and Regional dynamical Downscaling of Extremes for European regions). Le groupe CLIVAR : Climate Variability and predictability (Karl et al., 1999 ; Frich et al., 2002) du WCRP (World Climate Research program) de l’OMM (Organisation Météorologique Mondiale) a proposé une liste de différents indices calculés à partir des séries quotidiennes des variables de surface (précipitation et température). Ces indices décrivent les caractéristiques particulières des extrêmes, y compris la fréquence, l’amplitude et la persistance. L’une des approches clés du concept des indices implique le calcul du nombre de jours dans une année dépassant des seuils spécifiques. De nombreux indices sont basés sur les percentiles avec des seuils fixés pour évaluer les extrêmes modérés qui se produisent généralement quelques fois par année plutôt que les 86 évènements à fort impact observés une fois par décennie. Pour les précipitations, les seuils de percentile sont calculés à partir de l’échantillon de tous les jours de pluie de la période d’étude. Ces indices permettent d’évaluer directement les tendances observées dans la fréquence ou l’intensité des évènements pluvieux qu’ils soient modérés ou extrêmes. La raison du choix d’un seuillage par percentile plutôt qu’un seuil fixe apparaît dans le fait que le nombre de jours dépassant un seuil de percentile est mieux réparti dans l’espace. Par contre les valeurs des seuils sont spécifiques aux sites. Ces indices permettent des comparaisons spatiales parce qu’ils échantillonnent la même partie de la distribution de probabilité des précipitations à chaque emplacement. Les indices basés sur des seuils absolus sont moins appropriés pour les comparaisons spatiales des extrêmes que ceux basés sur des seuils par percentile. Ceci se justifie par le fait que les indices basés sur des seuils absolus peuvent échantillonner des parties très différentes des distributions de températures et de précipitations. Neuf indices caractérisant les pluies intenses sont définis comme suit par le groupe d’expert ETCCDI : ÿ Rx1day, Monthly maximum 1-day precipitation : la pluie journalière maximale d’un mois donné ; ÿ Rx5day, Monthly maximum consecutive 5-day précipitation : le maximum de la quantité de 5 jours de pluie successifs d’un mois donné ; ÿ SDII, Simple daily intensity index (mm/Jr) : cet indice correspond aux totaux de pluie annuelle divisés par le nombre de jours de pluie (=1mm) ; ÿ R10mm, Annual count of days when PRCP (daily precipitation amount) = 10 mm : nombre de jours de pluie supérieure à 10 mm par an ; ÿ R20mm, Annual count of days when PRCP= 20 mm : nombre de jours de pluie supérieure à 20 mm par an ; ÿ Rnnmm, Annual count of days when PRCP= nnmm : correspond au nombre de jours de pluies supérieures à un seuil (nn) fixé par l’utilisateur par an ; 87 ÿ R95pTOT, Annual total PRCP when RR > 95p ; (RR = 1.0 mm) : il s’agit du nombre de jours de pluie du 95ème percentile, c’est-à-dire le nombre de jours de pluie supérieure à la valeur de pluie du 95ème percentile d’une période donnée ; ÿ R99pTOT, Annual total PRCP when RR > 99p : il s’agit du nombre de jours de pluie du 99ème percentile, c’est-à-dire le nombre de jours de pluie par an supérieur à la valeur de pluie du 99ème percentile d’une période donnée ; ÿ PRCPTOT, Annual total precipitation in wet days (>1mm) : cet indice correspond à la quantité des pluies journalières supérieure à 1 mm par an. De même, des indices sont souvent utilisés. Il s’agit de Climatic Moisture Index (CMI) qui un indice de sévérité de la sécheresse mis en évidence par (Willmott et Feddema, 1992 ; Vörösmarty, 2005) ; de l’indice de sévérité de Palmer (PDI) de (Palmer, 1965) ; de l’Effective Drought Index (EDI) utilisée par (Byun et al., 1999) et de l’indice standardisé de précipitation (SPI) développé par (Mckee et al., 1993, 1995). Par ailleurs, le choix d’une méthode d’analyse des évènements hydroclimatiques extrêmes dépend de l’intérêt de l’étude et des données disponibles. Ainsi, à cause de la fiabilité des données disponibles et des indices pouvant permettre de constituer des outils d’aide à la décision sur les indicateurs des évènements hydroclimatiques extrêmes aux inondations, cette recherche s’est focalisée sur quelques indices. Il s’agit des indices déjà expérimentés dans la sous-région et au Bénin comme les SPI (Mckee et al., 1993), celle de SDII (Simple Daily Intensity Index), indice correspondant aux totaux de pluie annuelle divisés par le nombre de jours de pluie (Hountondji et al., 2011 ; Taïbi, 2016) et la méthode de seuillage par percentile basée sur l’analyse fréquentielle qui caractérise les pluies extrêmes par les pluies maximales journalières au 90, 95 et 99ème percentile (Martinez et al., 2007 ; Kioutsioukis et al., 2010 ; Lupikasza, 2010 ; Sahani et al., 2012 ; Griffiths et al., 2003 ; New et al., 2006 ; Aguilar et al., 2009, Khomsi et al., 2015 ; Amoussou et al., 2015). ÿ Classification non supervisée Il s’agit de la méthode du seuillage par percentile qui permet de déterminer le nombre de jours pluvieux par an dépassant la valeur de pluie associée à chaque percentile. Ce choix a été fait ainsi pour représenter les différentes tranches de pluies journalières et obtenir des échantillons avec un nombre d’évènements suffisants pour mener une analyse statistiquement significative. 88 La classification non supervisée concerne d’une part, des indices de 90ème percentile qui désignent le nombre de jours de pluie du 90ème percentile, c’est-à-dire le nombre de jours de pluie supérieur à la valeur de pluie du 90ème percentile d’une période donnée et d’autre part les indices liés au 95ème percentile qui concernent le nombre de jours de pluie du 95ème percentile, c’est-à-dire le nombre de jours de pluie supérieur à la valeur de pluie du 95ème percentile d’une période donnée. Par ailleurs, les indices associés au 99ème percentile, désignent le nombre de jours de pluie du 99ème percentile, c’est-à-dire le nombre de jours de pluie par an supérieur à la valeur de pluie du 99ème percentile d’une période donnée. Ces indices ont été appliqués aux débits et caractérisent respectivement les aléas hydroclimatiques forts, très forts et extrêmement forts qui sont des indicateurs des évènements hydroclimatiques extrêmes susceptibles d’occasionner les catastrophes. ÿ Classification supervisée C’est une typologie des précipitations quotidiennes qui identifie des fractions de précipitations rapportant au cumul pluviométrique (Carbonnel, 1983 ; Houndénou et al., 1998 ; Kingumbi et al., 2000). Cette classification est désignée par la classification supervisée (Taïbi, 2016). Elle complète la méthode du seuillage par percentile et permet de voir la variation de la fréquence des jours de pluie sur des intervalles de pluie fixe. A cet effet, cinq (05) classes de pluies journalières ont été choisies : v Classe 1 : 1< P < 5 v Classe 2 : 5 < P <10 v Classe 3 : 10 < P < 20 v Classe 4 : 20 < P < 50 v Classe 5 : P > 50 Ces classifications visent également à identifier les tranches de pluies journalières pouvant servir d’indicateurs pour la caractérisation des aléas hydroclimatiques extrêmes dans le bassinversant.
Indice de l’intensité des pluies journalières
L’analyse de l’intensité des pluies journalières repose sur l’indice de l’intensité SDII (Simple Daily Intensity Index) proposé par l’ETCCDI (Climate Change Detection and Indices) qui exprime la moyenne des pluies journalières par jours de pluies supérieures ou égales à 1 mm par an. 89 Il est obtenu par la formule ci-après : = Â N P SDII j j , Avec : Pj : Quantité de pluies journalières durant la période ; N : Nombre de jours de pluie durant la période.
Indices standardisés de Précipitation (SPI)
L’indice standardisé de précipitation est un indicateur statistique qui permet d’apprécier ou de caractériser l’ampleur des aléas hydroclimatiques dans une série de données (Mckee et al., 1993). L’indice SPI (McKee et al., 1993, 1995) est un indice à la fois puissant, souple d’utilisation et simple à calculer. Les données sur les précipitations constituent en fait le seul paramètre requis. En outre, l’indice SPI se révèle tout aussi efficace pour analyser les périodes ou cycles humides que les périodes ou cycles secs. Il permet de quantifier l’écart des précipitations d’une période, du déficit ou d’un surplus par rapport aux précipitations moyennes historiques dans une série de données historiques. Les SPI sont recommandés par l’Organisation Mondiale de Météorologie (OMM) pour la sécheresse météorologique locale ou régionale (Vidal et al., 2009 ; OMM, 2012). Selon McKee et al. (1993) ; Guttman (1998) repris par Koumassi (2014), les SPI sont basés sur la définition d’un seuil permettant de déclarer ou non une année sèche ou humide. Le SPI a été employé par de nombreux auteurs sur diverses régions du globe (Giddings et al., 2005 ; Wu et al., 2001 ; Roudier et al., 2010 ; Bodian, 2014 ; Faye et al., 2015). Il est obtenu à partir de la formule suivante : SPI = P – Pm /s Avec : P : Précipitation totale d’une période (mm) ; Pm : Précipitation moyenne historique de la période (mm) ; s : Écart-type historique des précipitations de la période (mm) Les indices de SPI calculés sont interprétés suivant les classes du tableau 2.4. Tableau 2. 4:Classes et grille d’interprétation des SPI indiquant les périodes humide Classe des SPI Grille d’interprétation SPI > 2 Humidité extrême 1< SPI < 2 Humidité forte 0 < SPI <1 Humidité modérée Source : Mckee et al., (1993) 90 La mise en évidence de l’évolution de la pluie et des débits vient compléter cette démarche dans la caractérisation des évènements extrêmes
Étude de l’évolution de la pluie et des débits
Elle vise à déterminer par la méthode de régression l’évolution des hauteurs de pluie et de débits sur la période de 1951 à 2015. Selon Amoussou (2010), Ibrahim (2012), Fayé et al. (2015), elle consiste en une représentation graphique de droite de régression de type affine qui présente l’évolution linéaire et permet de déceler la tendance. L’équation de la droite de tendance est sous la forme : Y = ax + b ; a est le coefficient directeur et représente la pente et b une constante. v Si a > 0 , on a une augmentation ; v Si a < 0, on a une diminution Ces méthodes supra présentées sont complétées par l’analyse fréquentielle des évènements hydroclimatiques extrêmes à l’inondation.
Analyse fréquentielle des évènements hydroclimatiques extrêmes
L’analyse fréquentielle est une méthode statistique de prédiction consistant à étudier les évènements passés, caractéristiques d’un processus hydrologique afin d’en définir les probabilités d’apparition future (Meylan et Musy, 1999). Cette prédiction repose sur la définition et la mise en œuvre d’un modèle fréquentiel, qui est une équation décrivant le comportement statistique du processus. Ce modèle décrit la probabilité d’apparition d’un évènement de la valeur donnée. L’analyse fréquentielle vise à définir les buts de l’analyse, à constituer et contrôler les séries des valeurs. Les principales étapes les plus importantes pour l’analyse fréquentielle sont consacrées au choix du modèle, à son ajustement, au contrôle de l’ajustement, à l’analyse des incertitudes et enfin à l’exploitation dudit modèle (Meylan et Musy, 1999). La figure 2.4, expose les principales étapes de l’analyse fréquentielle
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